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Direction de la séance

Projet de loi

Bioéthique

(1ère lecture)

(n° 189 (2001-2002) , 128 )

N° 96

24 janvier 2003


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

Le Gouvernement


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 12 BIS


Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles L. 613-15 et L. 613-16 du code de la propriété intellectuelle sont ainsi rédigés :
« Art. L. 613-15. - Lorsque le titulaire d'un brevet ne peut l'exploiter sans porter atteinte à un brevet antérieur dont un tiers est titulaire, le tribunal de grande instance peut lui accorder une licence d'exploitation du brevet antérieur dans la mesure nécessaire à l'exploitation du brevet dont il est titulaire et pour autant que cette invention constitue à l'égard du brevet antérieur un progrès technique important et présente un intérêt économique certain.
« La licence accordée au titulaire du brevet postérieur ne peut être transmise qu'avec ledit brevet.
« Le titulaire du brevet antérieur obtient, sur demande présentée au tribunal, la concession d'une licence réciproque sur le brevet postérieur.
« Les dispositions des articles L. 613-12 à L. 613-14 sont applicables.
« Art. L. 613-16. - Si l'intérêt de la santé publique l'exige et à défaut d'accord amiable avec le titulaire du brevet, le ministre chargé de la propriété industrielle peut, sur la demande du ministre chargé de la santé publique, soumettre par arrêté au régime de la licence d'office, dans les conditions prévues à l'article L. 613-17, tout brevet délivré pour :
« - a) un médicament, un dispositif médical, un dispositif médical de diagnostic in vitro, un produit thérapeutique annexe ;
« - b) leur procédé d'obtention, un produit nécessaire à leur obtention ou un procédé de fabrication d'un tel produit ;
« - c) une méthode de diagnostic ex vivo.
« Les brevets de ces produits, procédés ou méthodes de diagnostic ne peuvent être soumis au régime de la licence d'office dans l'intérêt de la santé publique que lorsque ces produits, ou des produits issus de ces procédés, ou ces méthodes sont mis à la disposition du public en quantité et qualité insuffisantes ou à des prix anormalement élevés, ou lorsque le brevet est exploité dans des conditions contraires à l'intérêt de la santé publique ou constitutives de pratiques déclarées anti-concurrentielles à la suite d'une décision administrative ou juridictionnelle.
« Lorsque la licence a pour but de remédier à une pratique déclarée anti-concurrentielle ou en cas d'urgence, le ministre chargé de la propriété industrielle n'est pas tenu de rechercher un accord amiable. »

Objet

Cet amendement vise à renforcer le régime des licences obligatoires dites de « dépendance » et des licences d'office prises dans l'intérêt de la santé publique prévues respectivement aux articles L. 613-15 et L. 613-16 du Code de la propriété intellectuelle (CPI). Il aménage également leurs dispositions dans un sens plus conforme à l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l'Organisation Mondiale du Commerce.
Les licences obligatoires de dépendance règlent les conflits d'ordre privé entre le titulaire d'un brevet antérieur et celui d'un brevet postérieur dépendant du premier et qui nécessite donc, pour son exploitation, l'accord du titulaire du premier brevet. Elles sont accordées par décision judiciaire à la demande du titulaire du brevet dépendant, lorsqu'il justifie que son invention présente à l'égard du brevet antérieur un progrès technique important et un intérêt économique certain.
Le présent amendement supprime l'exigence de l'existence d'un intérêt public pour l'octroi d'une licence obligatoire car elle ne figure pas dans l'accord ADPIC. De même, il ne subordonne plus le dépôt de la demande de licence obligatoire auprès des tribunaux à l'expiration du délai de 3 ans décomptés à partir de la délivrance du premier brevet.
La modification des dispositions de l'article L. 613-15 vise à faciliter l'octroi des licences obligatoires en cas de dépendance entre des brevets portant notamment sur des produits de santé à visée diagnostique et thérapeutique ainsi que l'exploitation des inventions qui dans ce domaine constituent un progrès technique important par rapport à l'état de la technique.
En ce qui concerne les licences d'office dans l'intérêt de la santé publique, le présent amendement a pour objet de les étendre à d'autres produits de santé que le médicament, tels que les dispositifs médicaux, y compris ceux de diagnostic in vitro, les produits thérapeutiques annexes ainsi qu'aux procédés et produits nécessaires à leur obtention. Les méthodes de diagnostic ex vivo y sont également incluses.
Cette extension apparaît nécessaire pour éviter que l'exploitation de brevets portant sur les médicaments et certains produits de santé se fasse dans des conditions contraires à l'intérêt de la santé publique, et conduise à ce que ces produits ne soient pas disponibles en quantité ou qualité suffisante, ou seulement à un prix anormalement élevé. Dans de tels cas et pour préserver l'accès de tous à la santé et le droit des malades, le ministre chargé de la propriété industrielle pourra, sur demande du ministre chargé de la santé, décider de placer les brevets de ces produits de santé sous le régime de la licence d'office.
Les conditions exigées pour la mise sous le régime de la licence d'office ont été adaptées pour tenir compte des dispositions de l'article 31 de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l'Organisation Mondiale du Commerce. Conformément également aux accords ADPIC, le ministre chargé de la propriété industrielle est tenu de rechercher un accord amiable avant de soumettre à licence d'office sauf en cas de pratique déclarée anti-concurrentielle ou de situation d'urgence.