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Direction de la séance

Projet de loi

Financement de la sécurité sociale pour 2002

(1ère lecture)

(n° 53 , 60 , 61)

N° 1

7 novembre 2001


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Défavorable
Adopté

M. VASSELLE

au nom de la commission des affaires sociales


Article 1er

(ANNEXE)


Rédiger comme suit le rapport annexé à cet article :

Rapport sur les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier

« Chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale »[1].

Pour satisfaire cette prescription organique, le rapport annexé à l'article premier des lois de financement ne saurait se réduire à un rappel des actions passées, ni à un exposé des motifs des différentes mesures inscrites dans le projet de loi, ni même à une suite de déclarations d'intention.

La présente loi de financement est la sixième que le Parlement examine ; force est de constater que les limites de l'exercice ont été atteintes voire dépassées tant a été systématiquement affaibli et détourné cet instrument qui aurait dû constituer un progrès essentiel de la démocratie.

 · Retrouver l'ambition initiale des lois de financement

A l'issue d'une période de croissance exceptionnelle, la situation des comptes sociaux apparaît paradoxalement d'une extrême fragilité.

L'exercice 2002 affiche un excédent prévisionnel de nature symbolique au regard de l'importance du budget social et, de surcroît, grevé d'une grande incertitude compte tenu des hypothèses particulièrement volontaristes qui ont été retenues tant pour la croissance économique que pour l'évolution des dépenses d'assurance maladie.

Davantage, la sécurité sociale aborde les difficultés qui viennent sans aucune réserve financière et sans avoir ne serait-ce qu'amorcé les réformes indispensables pour affronter les échéances lourdes qui s'annoncent, liées notamment au vieillissement de notre population.

Enfin, en dépit de la part croissante des prélèvements obligatoires qu'ils ont consacrée aux dépenses sociales, les Français n'ont pas le sentiment d'être mieux soignés, mieux protéges et de pouvoir regarder vers l'avenir avec sérénité.

Cet échec tient pour beaucoup au détournement dont ont été l'objet les lois de financement de la sécurité sociale.

Dès qu'est apparue la perspective fragile d'un redressement des comptes sociaux, ces lois ont été en effet transformées en instrument de financement d'une politique de l'emploi aventureuse, les trente-cinq heures.

Dès lors, ces lois n'ont-elles guère dépassé le stade initial de la mise en œuvre d'un nouveau plan de sauvetage de la sécurité sociale et n'ont pu jouer leur véritable rôle : celui de permettre un débat annuel sur les priorités de la protection sociale, et sur les moyens financiers que la collectivité est prête à lui consacrer, faire apparaître clairement aux yeux des Français la raison d'être de l'effort qu'ils consentent et le bénéfice qu'ils sont en droit d'attendre.

La législature qui s'achève porte ainsi une lourde responsabilité.

C'est pourtant cette ambition initiale que doivent retrouver les lois de financement de la sécurité sociale. Elles constituent un acquis essentiel pour garantir, dans la transparence et dans le cadre d'un débat démocratique, l'avenir de notre système de protection sociale.

· Débattre des priorités de santé publique

A l'évidence, les orientations de la politique de santé ne sauraient être cantonnées à un cadre annuel. Les travaux du Haut comité de santé publique et de la Conférence nationale de santé en témoignent clairement. Cette constatation de bon sens ne doit pas conduire à s'abstenir de tout débat au motif que les lois de financement de la sécurité sociale s'inscrivent dans un cadre annuel.

Il est au contraire nécessaire de mettre ces lois en perspective grâce à un cadre qui dépasse les aspects purement comptables : celui d'une loi d'orientation pluriannuelle qui définirait les axes d'une véritable politique de santé publique et qui, au-delà de la seule politique de soins, aborderait résolument les voies et moyens d'une politique d'éducation et de prévention.

Il reviendrait alors chaque année à la loi de financement, à travers l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM), de traduire, dans son domaine, les priorités ainsi arrêtées.

Une telle démarche apparaît préférable à celle consistant, d'une part, à prévoir chaque année au Parlement un débat sur la santé, qui risque fort d'être décevant car répétitif et dépourvu d'enjeu et de traduction concrète et, d'autre part, à évoquer, de manière vague, le caractère pluriannuel qui pourrait être conféré à l'ONDAM.

Quelle que soit la solution qui pourrait être retenue, il importe que l'ONDAM puisse réellement remplir sa fonction.

Constitué à l'origine sous la forme nécessairement d'un agrégat comptable, il est resté, cinq ans plus tard, le même agrégat comptable, qui a dérivé, que le Gouvernement a « rebasé » et auquel il a appliqué mécaniquement des pourcentages de progression.

Dépourvu de tout contenu en santé publique, de tout lien avec les besoins des malades, les progrès de la médecine et a fortiori les priorités de l'action publique, l'ONDAM et sa progression arbitraire constituent aujourd'hui un arbitrage comptable inévitablement contesté, entre les contraintes financières de l'assurance maladie et le souci des pouvoirs publics d'apaiser les tensions que connaît notre système de soins.

Aussi n'est-il pas étonnant que la maîtrise des dépenses de santé reste inefficace tout en entraînant, faute d'orientations et de priorités clairement affichées, la confusion des responsabilités entre l'Etat et l'assurance maladie et une rupture durable avec les professionnels de santé.

Il apparaît donc indispensable de renouer le dialogue avec les professionnels de santé et de refonder notre système conventionnel. Les rôles de chacun des acteurs - Etat, caisses de sécurité sociale et professionnels de santé - doivent être désormais clairement définis.

Mais il semble illusoire de prétendre conduire durablement une telle démarche dans un contexte marqué par la multiplication des ponctions sur les recettes de l'assurance maladie dont témoigne le présent projet de loi de financement qui aggrave dans des proportions considérables des déficits déjà insupportables.

· Clarifier les circuits financiers

A la différence du budget de l'Etat, le budget social est le domaine par excellence des affectations de recettes. Elles sont le corollaire de l'existence de caisses ou de branches qui trouvent elle-même leur fondement dans le principe originel de l'assurance.

Or la période récente se caractérise par la mise en place de mécanismes de transferts de charges et de ressources, entre le budget de l'Etat et le budget social et au sein même du budget social, qui conduisent à une confusion extrême que rien ne justifie.

Il revient certes au Parlement de faire apparaître, grâce à un travail de décryptage long et fastidieux, la réalité économique de ces transferts qui, au demeurant, est simple et répétitive : ponctionner la sécurité sociale pour financer la coûteuse politique des trente-cinq heures.

Les lois de financement, qui devaient, chaque année, permettre un débat lucide sur les comptes sociaux, ont été ainsi utilisés pour mettre en place des circuits financiers opaques, chaque année modifiés et masquant des transferts illégitimes.

Aussi, définir les « orientations de la politique de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier » conduit à devoir réaffirmer les principes nécessaires pour :

redonner une signification aux résultats des différentes branches de la sécurité sociale car ce résultat est un bon indicateur des efforts consentis, les marges de manœuvre disponibles et des réformes à entreprendre. Aujourd'hui, les ajustements annuels, voire infra-annuels, dans l'affectation des recettes et dans la prise en charge des dépenses, de même que la confusion entre les déficits et les excédents autorisent toutes les dérives et toutes les confusions ;

clarifier les financements de sorte que le contribuable puisse connaître la destination des prélèvements dont il s'acquitte. Aujourd'hui, la plupart des impôts affectés, souvent « exceptionnels » à l'origine, ont été pérennisés, puis éclatés entre les différentes branches et leurs clefs de répartition manipulées tous les ans ;

rétablir une cohérence durable de ces financements entre assurance et solidarité et dans l'adossement des ressources et des dépenses. Aujourd'hui, à titre d'exemple, l'assurance maladie supporte les dépenses liées à l'alcoolisme et au tabagisme, mais les droits sur les tabacs et les alcools financent pour l'essentiel la réduction du temps de travail.

C'est à ce prix que les comptes sociaux pourront être équilibrés durablement et que pourront apparaître clairement les enjeux de la protection sociale : nécessité d'une meilleure maîtrise des dépenses de santé, réformes indispensables pour garantir l'avenir des retraites, impératif d'une politique familiale ambitieuse.



[1] Article LO 111-3 du code de la sécurité sociale.