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Direction de la séance

Projet de loi

projet de loi de finances pour 2003

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 67 , 68 )

N° I-102 rect.

21 novembre 2002


 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  
Irrecevable art. 40 C

M. OUDIN, Mme Gisèle GAUTIER et MM. DEMILLY, DOUBLET, GÉRARD, LE GRAND, NATALI, de RICHEMONT, TRILLARD et GODEFROY


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 2


Après l'article 2  insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I –Il est inséré un article 39 novedecies dans le code général des impôts ainsi rédigé :

« Article 39 novedecies - I. – Les artisans pêcheurs soumis à un régime réel d'imposition et qui ont souscrit une assurance couvrant les risques climatiques, économiques et sanitaires, dans des conditions définies par décret, peuvent, sur option, déduire de leur bénéfice une somme plafonnée soit à 3 000 euros, soit à 40 % de ce bénéfice dans la limite de 12 000 euros. Ce plafond est majoré de 20 % de la fraction de bénéfice comprise entre 30 000 euros et 76 000 euros. L'option est valable pour l'exercice au titre duquel elle est pratiquée et pour les quatre exercices suivants. Elle est irrévocable durant cette période et reconductible.

« Pour les sociétés de pêche artisanale qui n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, et pour les copropriétés de navires, qui ont souscrit une assurance couvrant les risques climatiques, économiques et sanitaires, dans des conditions définies par décret, la limite de la déduction visée au premier alinéa est multipliée par le nombre des associés ou copropriétaires exploitants sans pouvoir excéder trois fois les limites visées au premier alinéa.

« Cette déduction s'exerce à la condition que, à la clôture de l'exercice, l'artisan pêcheur ait inscrit à un compte d'affectation ouvert auprès d'un établissement de crédit une somme provenant des recettes de l'exploitation de cet exercice au moins égale au montant de la déduction. L'épargne professionnelle ainsi constituée doit être inscrite à l'actif du bilan de l'exploitation.

« La déduction est pratiquée après application de l'abattement prévu à l'article 44 nonies.

« Les sommes déposées sur le compte peuvent être utilisées au cours des cinq exercices qui suivent celui de leur versement pour l'acquisition ou la création d'immobilisations strictement nécessaires à l'exploitation, pour l'acquisition ou la souscription de parts de sociétés coopératives maritimes ou en cas d'intervention de l'un des aléas d'exploitation dont la liste est fixée par décret.

« Lorsque les sommes déposées sur le compte sont utilisées pour l'acquisition ou la création d'immobilisations amortissables, la base d'amortissement de celles-ci est réduite à due concurrence.

« Lorsque ces sommes sont utilisées pour l'acquisition ou la souscription de parts sociales de coopératives maritimes, la déduction correspondante est rapportée par parts égales au résultat de l'exercice qui suit celui de l'acquisition ou de la souscription et des neuf exercices suivants. Toutefois, le retrait de l'adhérent ou la cession de parts sociales entraîne la réintégration immédiate dans le résultat imposable de la fraction de la déduction qui n'a pas encore été rapportée.

« Lorsque les sommes déposées sur le compte sont utilisées en cas d'intervention de l'un des aléas d'exploitation mentionnés au cinquième alinéa, la déduction correspondante est rapportée au résultat de l'exercice au cours duquel le retrait est intervenu. Les sommes retirées sont réputées correspondre en priorité à la déduction la plus ancienne.

« Lorsque les sommes déposées sur le compte ne sont pas utilisées au cours des cinq exercices qui suivent celui de leur versement, la déduction correspondante est rapportée aux résultats du cinquième exercice suivant celui au titre duquel elle a été pratiquée.

« Lorsque des sommes déposées sur le compte sont utilisées à des emplois autres que ceux définis ci-dessus au cours des cinq exercices qui suivent celui de leur dépôt, l'ensemble des déductions correspondant aux sommes figurant sur le compte au jour de cette utilisation est rapporté au résultat de l'exercice au cours duquel cette utilisation a été effectuée.

« II. – L'apport d'une exploitation individuelle dans les conditions visées au I de l'article 151 octies, à une société de pêche artisanale par un artisan pêcheur qui a pratiqué la déduction au titre d'un exercice précédant celui de l'apport n'est pas considéré pour l'application du I comme une cessation d'activité si la société bénéficiaire de l'apport en remplit les conditions et s'engage à utiliser les sommes déposées sur le compte au cours des cinq exercices qui suivent celui au titre duquel la déduction correspondante a été pratiquée dans les conditions et sous les limites définies au I.

« III. – Le compte ouvert auprès d'un établissement de crédit est un compte courant qui retrace exclusivement les opérations définies au I (1).

 

II - Les dispositions du présent article s'appliquent pour la détermination des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2003. 

 

Objet

La pêche a toujours été considérée comme un métier à risque. Le plus immédiat est malheureusement le risque de mer, comme l'attestent de nombreuses disparitions enregistrées encore cette année. Il serait par lui-même suffisant pour que soit réservée à la population maritime une attention et une bienveillance particulière de la part du législateur et des Pouvoirs Publics.

Mais bon nombre d'autres contraintes, considérées naguère comme « risques du métier » (et supportées bon an mal an par la pêche artisanale) deviennent menaçantes et tendent à s'accumuler.

Certaines restent liées aux aléas biologiques et climatiques que connaissent tous les « producteurs du vivant ».

D'autres, -plus émergents- découlent de l'évolution générale des sociétés et de l'économie.

 Les principaux risques :

- le risque climatique

Majeur dans les activités maritimes, avec un caractère quotidien et répétitif que l'on ne retrouve pas dans l'agriculture.

- le risque biologique

Très illustré par les débats actuels sur la ressource. Relativement maîtrisé dans l'agriculture, ce risque reste plein et entier dans le domaine de la pêche. Les variations annuelles par espèces pêchées ont une amplitude que ne connaît aucun autre secteur de production.

- le risque systémique

Le plus souvent lié à la politique internationale ; (ouverture et fermeture des zones de pêche ; et surtout gazole dont les dérapages possibles sont de plus en plus liés à l'actualité géopolitique). Or, la pêche est, sans controverse possible, le secteur le plus dépendant des cours du pétrole brut. Ce qui a poussé en 2000-2001 les Pouvoirs Publics à un système d'aide directe, aujourd'hui condamné par l'Union Européenne.

- le risque sanitaire

Même si le poisson reste un produit particulièrement sain, les nouvelles contraintes réglementaires émises par l'Union Européenne (métaux lourds, contaminants) et l'effet très médiatisé de pollutions marines, tendancielles ou accidentelles, accroissent fortement l'inquiétude professionnelle. Ce risque augmente.

- le risque « écologique »

La mer devient, dans l'opinion et la presse, un secteur ultra-sensible. De nombreuses restrictions –sans fondement technique ou biologique- sont réclamées à cor et cri.

Paradoxalement, c'est l'ignorance en matière de biologie marine qui légitimerait un appel massif au principe  de précaution vis-à-vis d'écosystèmes toujours considérés à priori comme « en danger ».

- les risques du Marché

Les variations de prix constatées sur les produits de la mer – faute d'une OCM de type agricole sont probablement les plus fortes que l'on puisse constater sur des marchés de production. Aussi le report (de stockage) s'analyse t-il comme une opération à terme sur un marché ultra-sensible et volatile ?

Là aussi, des sécurités de type financières / assurances constituent le ressort de l'organisation.

- des risques personnels ou familiaux

Le Régime social ENIM des marins ne fait guère de place à la prévoyance et ne couvre que faiblement les éventuels sinistres. Toute une branche d'assurance et de mutualité reste à développer.

Ainsi s'accumule sur les seules épaules du marin exploitant (et de ses équipiers compagnons) une masse de risques inégalés. Elle s'ajoute à une pratique professionnelle particulièrement astreignante et contraignante.

Laissée en l'état, elle ne peut engendrer que démotivation et abandon.

C'est largement sur cet état de fait que mise Bruxelles, avec un plan de casse de grande envergure sur la base du départ volontaire.

Un tel plan aurait pour effet de « désertifier » de larges pans de notre économie littorale et d'aiguiser les appétits de flottes concurrentes puissamment soutenues, à pavillon espagnol ou hollandais. Une large part de la richesse maritime nationale passerait ainsi à d'autres marins.

Retenons à caractère fragile, aléatoire, volatile, de notre économie des pêches : ce qui sera perdu ne sera jamais reconstitué, ou passera définitivement à nos compétiteurs sur une mer européenne riche, dont la France peut garder sa part.

Réduire les risques propres à la Pêche ; les étaler, les partager, les transférer, c'est la base même d'une refondation positive de notre système.

Ces idées reposent sur des mécanismes d'assurance et de titrisation des risques, offerts par l'économie moderne. Il convient de s'y investir sans tarder.

L'instrument le plus adapté semble être la déduction pour aléas.

Ce mécanisme a été introduit par l'art.82 de la Loi de Finances pour 2002, votée en décembre 2001, comme une alternative à la Déduction pour Investissement déjà en vigueur pour l'agriculture. Par mesure de justice et d'équité, cet amendement vise à étendre le dispositif au secteur de la pêche.

Liée aux risques biologiques, cette mesure est fortement limitée aux secteurs concernés (et probablement mieux admise à Bruxelles.) Son extension à la Pêche (avec ou sans l'alternative DPI) nous paraît aller de soi, dès lors que son assimilation à l'Agriculture s'impose de plus en plus (même Ministère et désormais à Bruxelles, même Conseil).

Le faible nombre d'Entreprises concernées ne la rend pas coûteuse (surtout si elle permet, à terme, de prendre le relais de mesures directes conjoncturelles désormais interdites). L'intérêt national apparaît enfin clairement dans ce qui est désormais une compétition européenne sur les ressources communes.

Le coût budgétaire, sur la base de 1000 entreprises qui déduisent en moyenne 10 000 € au taux moyen de 32% serait de l'ordre de 3.2 Millions d'Euros.

Les Fonds DPA affectés, mutualisés, seront ainsi la base d'un système d'assurance professionnel à base de Fonds de Garantie.

Pourraient s'y adosser des contrats d'assurance ou de réassurance négociés avec les grandes compagnies.

Un cadre permanent d'assurance – exploitation peut ainsi être créé. Les pêcheurs pourront ainsi, l'esprit plus libre, se consacrer à l'essentiel : faire toujours mieux, et dans de meilleures conditions, leur métier.



NB :La rectification porte sur la liste des signataires.