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Direction de la séance

Projet de loi organique

Vote des Français établis hors de France élection du Président de la République

(1ère lecture)

(n° 305 , 315 )

N° 22 rect. bis

12 mai 2005


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

M. GUERRY et Mmes BRISEPIERRE et KAMMERMANN


ARTICLE 3


Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) de cet article :

« 1° L'article 10 est ainsi rédigé :

« Art. 10 - Sans préjudice des dispositions des traités relatifs à la Communauté et à l'Union européenne et des actes pris pour leur application ainsi que de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et des protocoles qui lui sont annexés, toute propagande électorale à l'étranger est interdite, à l'exception :

« 1° de l'envoi ou de la remise aux électeurs, sous pli fermé, des circulaires et bulletins de vote des candidats, effectués par les soins des postes diplomatiques ou consulaires concernés ;

« 2° de l'affichage de ces documents à l'intérieur des locaux des ambassades et des postes consulaires et, en accord avec l'Etat concerné, dans les bureaux ouverts dans d'autres locaux. »

Objet

Le droit européen résultant des traités sur la Communauté européenne et sur l'Union européenne consacre la liberté d'expression politique dans les Etats de l'Union. Cette liberté a été consacrée par la Charte des droits fondamentaux de l'Union qui n'a certes pas, en l'état, de valeur normative, mais dans laquelle la jurisprudence communautaire voit l'expression des « droits de l'Homme et des libertés fondamentales tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres » qui font partie du droit de l'Union en tant que « principes généraux » du droit communautaire, conformément à l'article 6, § 2 du traité sur l'Union européenne. La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 et l'article 3 du protocole n° 1 à la Convention garantissent également ce droit à la libre expression électorale.

Dans un arrêt Piermont contre France du 20 mars 1995, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que l'appartenance d'une personne à un Etat membre de l'Union européenne ne permettait pas de lui opposer l'article 16 de la Convention de 1950 permettant aux Etats de restreindre la liberté politique des étrangers et notamment leur liberté d'expression au cours d'une campagne électorale. La Cour a rappelé que la liberté d'expression constitue « l'un des fondements essentiels d'une société démocratique, l'une des conditions primordiales de son progrès. » Elle a précisé certes que « La liberté de discussion politique ne revêt assurément pas un caractère absolu et un Etat contractant peut l'assujettir à certaines "restrictions" ou "sanctions" », mais la Cour a jugé qu'il lui appartenait de statuer en dernier lieu sur leur compatibilité avec la liberté d'expression telle que la consacre l'article 10 de la Convention. En l'espèce, la Cour a protégé le droit de libre expression des citoyens européens contre les restrictions que voulait imposer le Gouvernement français. Cet arrêt consacre donc la liberté d'expression électorale des ressortissants de l'Union dans tout Etat membre.
L'article 10 de la loi organique du 31 janvier 1976 ne respecte donc pas les dispositions actuelles du droit européen, ni des traités qui garantissent les libertés fondamentales, tant la Charte du Conseil de l'Europe (article 10) que les traités communautaires (article 6 du traité sur l'Union européenne) qui reconnaissent l'existence d'une citoyenneté européenne aux ressortissants des Etats membres.
Notre amendement a donc pour objet de rappeler les exigences de la liberté d'expression électorale sur le territoire de l'Union et des Etats membres. Seront ainsi autorisés les réunions, l'affichage, l'usage des moyens de communication, la liberté des correspondances, dans le respect de la législation du Pays hôte, et restant sauve l'interdiction de toute injure ou diffamation.
Notre amendement respecte les conclusions de la Commission de la Réforme du Conseil supérieur des Français de l'étranger qui avait opté pour une distinction du régime applicable dans l'Union européenne et de celui applicable dans les autres Etats.