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Direction de la séance

Projet de loi

Crédit à la consommation

(1ère lecture)

(n° 448 , 447 )

N° 41

9 juin 2009


 

AMENDEMENT

présenté par

C Demande de retrait
G Demande de retrait
Retiré

M. LECLERC


ARTICLE 15


Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - A la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 311-50 du code de la consommation, les mots : « de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigée : « du premier incident de paiement non régularisé à peine de forclusion. Le simple dépassement du découvert autorisé ne constitue pas un incident de paiement non régularisé tant que le découvert reste inférieur au montant maximum autorisé par le contrat initial entre le prêteur et le bénéficiaire du crédit. »

Objet

L'amendement proposé a pour objet :

- De restaurer la sécurité juridique en clarifiant la définition du point de départ du délai de forclusion ;

- De ne pas décourager les prêteurs d'adopter une attitude tolérante à l'égard d'une première échéance non remboursée, spécialement en matière de crédit renouvelable.

L'actuel article L.311-37 du code de la consommation, appelé à devenir l'article L.311-50, dispose dans son alinéa premier :

"Le tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion."

Le projet maintient ce texte inchangé, se contentant d'un simple aménagement rédactionnel, revu par la commission spéciale, à l'alinéa 2.

Or le premier alinéa du texte mériterait d'être révisé.

On y lit que le délai pour agir dont dispose le prêteur contre l'emprunteur, et qui est un délai biennal de forclusion (non susceptible d'interruption ni de suspension), a pour point de départ l'événement qui a donné naissance à l'action en paiement.

L'instant de la défaillance, point de départ du délai, peut se comprendre de diverses manières, et il y a toujours eu des débats à ce sujet.

Les enjeux de la question sont importants parce que, s'agissant d'une forclusion, le prêteur qui laisse passer le délai de deux ans perd la totalité de sa créance sur l'emprunteur, c'est-à-dire non seulement son droit au paiement des intérêts, comme ce serait le cas s'il avait consenti un crédit sur la base d'une offre préalable non conforme, mais aussi son droit au remboursement du capital.

La gravité de la sanction est telle qu'elle invite le prêteur à agir en justice contre l'emprunteur dès qu'il a le sentiment d'être menacé par la forclusion, ce qui a pour effet d'interdire toute tolérance à l'égard de l'emprunteur qui n'a pas pu honorer une échéance.

La jurisprudence de la Cour de cassation, qui avait déjà dû faire l'objet d'un démenti législatif par la loi 89-421 du 23 juin 1989, a fini par dire que le point de départ du délai est celle du premier impayé non régularisé. Toutefois, elle obscurcit de nouveau la question en assimilant à un incident de paiement non régularisé tout dépassement d'un découvert d'un montant déterminé (Cass. civ. 1re, 21 févr. 2006, Bull. civ. I, n°96). Elle retient cette solution, alors que le prêteur n'a pas réagi à ce dépassement, même lorsque le découvert reste inférieur au montant maximum autorisé par le contrat initial entre le prêteur et le bénéficiaire du crédit (Cass. civ. 1re, 25 avr. 2007, Legifrance n°06-11805), et même lorsque le contrat initial comportait une clause de dépassement de découvert (Cass. civ. 1re, 16 janv. 2007, Legifrance n°06-11340).

En effet, dans le cas des ouvertures de crédit utilisables par fractions et assorties d'une carte de crédit, la Cour de cassation considère que le délai biennal court à compter de la première échéance impayée non régularisée (Cass. civ. 1re, 24 janv. 2006, Legifrance 04-13458).

On trouve cependant des solutions différentes, de la part de la même formation de la Cour de cassation (Cass. civ. 1re, 5 juill. 2006, Legifrance n°04-20364), et de la part des autres juridictions puisque la plupart des cours d'appel estiment qu'il n'y a pas incident de paiement par le seul fait du dépassement du découvert autorisé, dès lors que l'on reste dans les limites du maximum disponible et que le prêteur n'a pas réagi.

Une clarification s'impose donc et le présent projet en constitue l'occasion évidente.

La jurisprudence dominante, comme on l'a dit précédemment, conduit à condamner toute mansuétude du prêteur, puisque les prêteurs tolérants sont déclarés forclos dès lors qu'ils n'ont pas pris d'initiative judiciaire rapide pour contraindre l'emprunteur au remboursement du crédit.

Cela démontre la nécessité d'apporter au texte légal les précisions qui s'imposent, afin que les prêteurs ne soient pas incités à agir en justice dès la première échéance impayée, et qu'une tolérance de leur part ne risque pas d'être sanctionnée par la perte intégrale et automatique de leurs droits. Cette clarification diminuera considérablement le contentieux.