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Direction de la séance

Proposition de loi

Droit de la chasse

(1ère lecture)

(n° 444 , 443 )

N° 27

4 mai 2011


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

Le Gouvernement


ARTICLE 4


Rédiger ainsi cet article :

La section 2 du chapitre V du titre II du livre IV du même code est complétée par un article L. 425-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 425-5-1. – Lorsque le détenteur du droit de chasse d’un territoire ne procède pas ou ne fait pas procéder à la régulation des espèces présentes sur son fonds et qui causent des dégâts de gibier, il peut voir sa responsabilité financière engagée pour la prise en charge de tout ou partie des frais liés à l'indemnisation mentionnée à l'article L. 426-1 et la prévention des dégâts de gibier mentionnée à l'article L. 421-5.

« Lorsque l'équilibre agro-sylvo-cynégétique est fortement perturbé autour de ce territoire, le représentant de l’État dans le département, sur proposition de la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs, après avis de la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, peut notifier à ce détenteur du droit de chasse un nombre d’animaux non prélevés dans un délai donné servant de référence à la mise en œuvre de la responsabilité financière mentionnée à l’alinéa précédent. »

 

Objet

L'article 4 dans sa rédaction actuelle autorise le préfet à passer outre le refus du propriétaire du territoire de chasse de limiter la population des animaux causant des dégâts aux récoltes en lui imposant les «prélèvements » nécessaires.

En prévoyant que le préfet peut imposer au propriétaire d’un terrain le prélèvement d’animaux sans réserver l’hypothèse du propriétaire opposant, l’article 4 habilite une simple autorité administrative à passer outre les oppositions légalement fondées sur les dispositions des articles L. 422-10 du code de l’environnement et 544 du code civil et ce, pour un motif dont il n’est pas évident qu’il soit d’intérêt général, s’agissant de limiter les dégâts agricoles causés par le gibier.

Compte tenu de la problématique traitée (contraindre un propriétaire à laisser les chasseurs accéder à son terrain nonobstant son opposition légalement formée), la viabilité juridique du dispositif supposerait l’intervention préalable de l’autorité judiciaire, gardienne du droit de propriété, intervention qu’il n’envisage pas.

Outre cette difficulté procédurale, il apparaît que l’article 4 aura concrètement pour effet de soumettre à l’action des ACCA des terrains dont les propriétaires auront pourtant exprimé leur opposition à la pratique de la chasse, dès lors que le préfet leur aura imposé le prélèvement de gibier. Cette soumission pourrait être assimilée à un apport forcé à ces associations du droit de chasse appartenant aux propriétaires concernés.

Or, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que l’apport forcé par un propriétaire de son droit de chasse à une ACCA constituait une atteinte disproportionnée à son droit de propriété et une violation de l’article 1er du Protocole n°1 additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Arrêt de la CEDH du 29 avril 1999, Chassagnou et autres c/ France).

Dès lors, l’article 4 paraît présenter un risque de non-conformité à la Convention précitée.

Cependant, la problématique soulevée par l'article 4 est réelle.

La réalité des dégâts de gibiers provenant de propriétés non chassés a déjà fait l'objet de contentieux. Il semble nécessaire de renforcer les dispositions de l'article L.425-11 qui prévoit déjà la responsabilité des bénéficiaires de plan de chasse qui ne prélève pas le nombre minimum d'animaux et celle des personnes ayant formé l'opposition prévue au 5° de l'article L.422-10 (ACCA) en prévoyant explicitement la responsabilité des détenteurs de droit de chasse qui ne le mettent pas, directement ou indirectement, en œuvre.

Pour ce faire, l'initiative donnée à la fédération départementale des chasseurs gagnerait à être soutenue par un avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage qui rassemble toutes les parties prenantes : administration, chasseurs, piégeurs, agriculteurs, forestiers, associations de protections de la nature et de l'environnement, personnalités qualifiées dans le domaine cynégétique.