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Direction de la séance

Projet de loi

Simplification du droit dans les domaines justice et affaires intérieures

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 289 , 288 )

N° 35

22 janvier 2014


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

Le Gouvernement


ARTICLE 7


Rédiger ainsi cet article :

I. – L’intitulé de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d’État est ainsi rédigé :

« Loi du 24 mai 1872 relative au Tribunal des conflits »

II. – Les articles 1er à 18 de la loi du 24 mai 1872 précitée sont rétablis dans la rédaction suivante :

« Art. 1er. – Les difficultés de compétence entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire sont réglées par un Tribunal des conflits composé en nombre égal de membres du Conseil d’État et de la Cour de cassation.

« Art. 2. – Dans sa formation ordinaire, le Tribunal des conflits comprend :

« 1° quatre conseillers d’État en service ordinaire élus par l’assemblée générale du Conseil d’État ;

« 2° quatre magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus par les magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation ;

« 3° deux suppléants élus, respectivement, l’un, par l’assemblée générale du Conseil d’État parmi les conseillers d’État en service ordinaire et les maîtres des requêtes, l’autre, par l’assemblée générale des magistrats du siège de la Cour de cassation parmi les conseillers hors hiérarchie et référendaires.

« Les membres du Tribunal des conflits sont soumis à réélection tous les trois ans et rééligibles deux fois. Lorsqu’un membre titulaire ou suppléant cesse définitivement d’exercer ses fonctions, il est procédé à son remplacement jusqu’à la fin du mandat en cours dans les conditions prévues aux 1°, 2° ou 3° ci-dessus, selon le cas.

« Art. 3. – Les membres mentionnés aux 1° et 2°, de l’article 2 choisissent parmi eux, pour trois ans, un président issu alternativement du Conseil d’État et de la Cour de cassation, au scrutin secret à la majorité des voix.

« En cas d’empêchement provisoire du président, le Tribunal est présidé par le membre le plus ancien appartenant au même ordre de juridiction.

« En cas de cessation définitive des fonctions du président, le Tribunal, alors complété comme il est dit au dernier alinéa de l’article 2, est présidé par un membre du même ordre, choisi dans les conditions du dernier alinéa de l’article 2, pour la durée du mandat restant à courir.

« Art. 4. – Deux membres du Conseil d’État, élus par l’assemblée générale du Conseil d’État parmi les rapporteurs publics, et deux membres du parquet général de la Cour de cassation, élus par l’assemblée générale des magistrats hors hiérarchie du parquet général parmi eux, sont chargés des fonctions de commissaire du gouvernement.

« Ils sont élus pour trois ans et rééligibles deux fois.

« Le commissaire du gouvernement expose publiquement et en toute indépendance son opinion sur les questions que présentent à juger les affaires dont le Tribunal des conflits est saisi.

« Art. 5. – Sous réserve des dispositions de l’article 6, le Tribunal des conflits ne peut délibérer que si cinq membres au moins sont présents.

« Art. 6. – Dans le cas où, après une seconde délibération, les membres du Tribunal n’ont pu se départager, l’affaire est examinée en formation élargie dans les conditions précisées par décret en Conseil d’État. Cette formation est composée, outre les membres mentionnés aux 1° et 2° de l’article 2, de deux conseillers d’État en service ordinaire et deux magistrats du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation élus comme il est dit aux 1° et 2° de l’article 2, lors de l’élection des membres de la formation ordinaire.

« Les règles de suppléance sont applicables.

« Le Tribunal ne peut siéger que si tous les membres sont présents ou suppléés.

« Art. 7. – Les débats ont lieu en audience publique après une instruction contradictoire.

« Art. 8. – Le délibéré des juges est secret.

« Art. 9. – Les décisions sont rendues au nom du Peuple français. Elles sont motivées et comportent le nom des membres qui en ont délibéré.

« Elles sont rendues publiquement.

« Art. 10. – Lorsque la solution de la question soumise au Tribunal des conflits s’impose avec évidence, le président, conjointement avec le membre le plus ancien appartenant à l’autre ordre de juridiction, peut statuer par voie d’ordonnance dans les cas prévus par décret en Conseil d’État.

« Art. 11. – Les décisions du Tribunal des conflits s’imposent à toutes les juridictions de l’ordre judiciaire et de l’ordre administratif.

« Art. 12. – Le Tribunal des conflits règle la difficulté de compétence entre les deux ordres de juridiction, dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État :

« 1°) lorsque le préfet a élevé le conflit dans le cas prévu à l’article 13 ;

« 2°) lorsque les juridictions de l’un et l’autre ordre se sont respectivement déclarées incompétentes pour connaître d’un litige ayant le même objet ;

« 3°) lorsqu’une juridiction de l’un ou l’autre ordre lui a renvoyé la question de compétence soulevée dans un litige.

« Art. 13. – Lorsque le préfet estime que la connaissance d’un litige ou d’une question préjudicielle portée devant une juridiction de l’ordre judiciaire relève de la compétence de la juridiction administrative, il peut, alors même que l’administration ne serait pas en cause, demander à la juridiction saisie de décliner sa compétence.

« Art. 14. – Le conflit d'attribution entre les juridictions judiciaires et administratives ne peut être élevé en matière pénale.

« Il peut être élevé en toute autre matière, sauf sur l’action civile dans les cas mentionnés à l’article 136 du code de procédure pénale.

« Art. 15. – Le Tribunal des conflits peut être saisi des décisions définitives rendues par les juridictions administratives et les juridictions judiciaires dans les instances introduites devant les deux ordres de juridiction, pour des litiges portant sur le même objet, lorsqu’elles présentent une contrariété conduisant à un déni de justice.

« Sur les litiges qui lui sont ainsi déférés, le Tribunal des conflits juge au fond, à l’égard de toutes les parties en cause. Ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours.

« Art. 16. – Le Tribunal des conflits est seul compétent pour connaître d’une action en indemnisation du préjudice découlant d’une durée totale excessive des procédures afférentes à un même litige et conduites entre les mêmes parties devant les juridictions des deux ordres en raison des règles de compétence applicables et, le cas échéant, devant lui.

« Art. 17. – Les modalités de désignation prévues à l’article 2 entrent en vigueur lors du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l’entrée en vigueur de la présente loi. Jusqu’à ce renouvellement, les fonctions de président sont exercées par le vice-président précédemment élu en application de  l’article 25 de la loi du 24 mai 1872.

« Dans les deux mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, il est procédé aux élections prévues au premier alinéa de l’article 6 pour la durée restant à courir du mandat des membres du Tribunal.

« Dans le même délai et pour la même durée, il est procédé à la désignation des commissaires du gouvernement selon les modalités prévues à l’article 4.

« Art. 18. – La présente loi, qui s’applique à tout le territoire de la République, entrera en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État et au plus tard le 1er janvier 2015. »

III. – Sont abrogés :

- l’ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative ;

- l’ordonnance du 12 mars 1831 modifiant celle du 2 février 1831 sur la publicité des séances du Conseil d'État et le mode de décision des affaires contentieuses et des conflits ;

- la loi du 4 février 1850 portant sur l'organisation du Tribunal des conflits ;

- le titre IV de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d'État, à l’exception de son article 25 qui est abrogé à compter du premier renouvellement des membres du Tribunal des conflits suivant l’entrée en vigueur de la présente loi ;

- la loi du 20 avril 1932 ouvrant un recours devant le Tribunal des conflits contre les décisions définitives rendues par les tribunaux judiciaires et les tribunaux administratifs lorsqu'elles présentent contrariété aboutissant à un déni de justice.

IV. – À compter de l’entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal des conflits résultant du I du présent article, les mots : « vice-président du Tribunal des conflits » figurant à l’article 23 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sont remplacés par les mots : « président du Tribunal des conflits ».

Objet

L’article 7 du présent projet de loi abroge et remplace les dispositions des articles 25 à 27 de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du tribunal des conflits.  Il réforme le Tribunal des conflits en :

 -          modifiant la composition et la présidence du Tribunal des conflits.

 -          donnant la possibilité au président du Tribunal des conflits de statuer par ordonnance lorsque la solution du litige emporte une solution évidente

 -          étendant les compétences du Tribunal des conflits au profit du justiciable

 -          actualisant les textes régissant la procédure devant le Tribunal des conflits

Le rapport du groupe de travail sur la « Réforme du Tribunal des conflits » présidé par M. Jean-Louis Gallet, conseiller à la Cour de cassation, vice-président du Tribunal des conflits, remis à la garde des sceaux, ministre de la justice, le 10 octobre 2013 a fait à ce titre un nombre important de propositions.

Il apparaît, au regard des conclusions de ce rapport, nécessaire d’adapter le Tribunal des conflits aux exigences constitutionnelles et conventionnelles actuelles qui imposent de mettre fin à sa présidence par le garde des sceaux. Cette modification nécessite de prévoir un mode de départage en cas d’égalité des voix.

En outre, il apparaît inutile de recourir à des audiences collégiales pour tous les dossiers, y compris ceux ne présentant pas de difficulté. Il convient ainsi de donner la possibilité au président du Tribunal de statuer par ordonnance lorsque la solution du litige emporte une solution évidente. La procédure suivie devant le Tribunal des conflits se rapprocherait en cela de celle des juridictions de droit commun.

En outre, il est opportun que le Tribunal des conflits se voie attribuer une compétence pour connaître d’une action en indemnisation du préjudice découlant d’une durée totale excessive des procédures afférentes à un même litige et conduites entre les mêmes parties devant les juridictions des deux ordres en raison des règles de compétence applicables. Une telle évolution permet de simplifier les démarches des justiciables.

Enfin, l’ancienneté et l’empilement des textes régissant le Tribunal des conflits rendent leur accès difficile pour les justiciables et leurs conseils. L’habilitation doit donc permettre de refondre ces textes afin de supprimer ceux devenus obsolètes, rendre compte de la distinction entre les dispositions relevant de la loi et celles relevant du règlement, et en assurer l’accessibilité en substituant une loi à l’ensemble des textes actuels de nature législative.

La réflexion sur la réforme du Tribunal des conflits est suffisamment aboutie pour qu’il apparaisse inutile de renvoyer à une ordonnance le soin de définir son contenu. Ainsi le présent amendement vise à insérer directement les dispositions de fond dans le projet de loi afin de ne pas retarder une réforme qui semble s’imposer.