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Direction de la séance

Projet de loi

Dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 10 , 9 )

N° 81

14 octobre 2014


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

Le Gouvernement


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 15 QUINQUIES


Après l'article 15 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le dernier alinéa de l’article L. 222-1 du code de la sécurité intérieure est supprimé.

II. – Le premier alinéa de l'article 32 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers est supprimé.

Objet

Dans une logique d’adaptation permanente de la législation française à la menace terroriste, la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant diverses dispositions relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers a introduit des dispositions expérimentales. Celles-ci concernent  les contrôles d’identité à bord des trains internationaux (article 3), l'accès administratif aux données de connexion (article 6) et l'accès à des fichiers de police administrative (article 9).

Prévues à titre expérimental par le législateur pour une durée de trois ans, reconduites par la loi n° 2008-1245 du 1er décembre 2008 jusqu’au 31 décembre 2012 et par celle du 21 décembre 2012 (loi n°2012-1432) jusqu’au 31 décembre 2015, ces dispositions ont toutes fait la preuve de leur pertinence opérationnelle et de leur efficacité. L'accès aux données de connexion a été pérennisé par la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013, qui fusionne au 1er janvier 2015 les régimes administratifs d'accès à ces données par l'ensemble des services concernés dans trois ministères (intérieur, défense et budget). La pérennisation des deux dispositions restées temporaires s’impose donc aujourd’hui, dans le souci constant de concilier la nécessité de lutter contre le terrorisme avec le respect des libertés individuelles.

La première de ces dispositions, issue de l’article 3 de la loi du 23 janvier 2006, permet d’adapter les conditions de mise en œuvre des contrôles d’identité effectués dans les zones frontalières au cas particulier des liaisons ferroviaires internationales en autorisant ces contrôles d’identité durant une plus grande partie du trajet. Sont ainsi autorisés par l’article 78-2 du code de procédure pénale les contrôles d'identité préventifs entre le premier arrêt situé à 20 kilomètres de la frontière et un autre arrêt situé dans la limite des 50 kilomètres suivants, sur les lignes désignées par arrêté ministériel.

Ces modalités sont adaptées à la circulation rapide des trains internationaux. Les contrôles dans les trains sont en effet préférables à ceux effectués en gare à la descente du train : ils permettent de réduire la gêne occasionnée aux passagers et le nombre de policiers mobilisés.

Ces contrôles inopinés ont fait la preuve de leur efficacité depuis 2006. Ils permettent fréquemment la collecte d’informations utiles concernant des personnes qui sont sous la surveillance des services spécialisés. Ils donnent en outre fréquemment lieu à l'interpellation de personnes recherchées. Ainsi le n°3 de l'organisation terroriste basque ETA a-t-il été interpellé en juin 2011 à la faveur d'un contrôle de la police aux frontières de Modane à bord du TGV Milan-Paris. En 2013, les seules patrouilles mixtes, réalisées avec les services de police des États frontaliers de la France, ont permis la découverte de 56 personnes faisant l’objet d’une fiche de recherche et de 28 mineurs en fugue.

L’accroissement récent du nombre de lignes ferroviaires internationales (ouverture de la ligne à grande vitesse entre Barcelone et Perpignan en décembre 2013, nouvelles lignes de la société Thello entre l’Italie et la France) renforce l’intérêt de cette disposition.

Donnant lieu à des contrôles dans les trains entrant et sortant du territoire national, cette disposition est, enfin, de nature à permettre de renforcer l’effectivité de l’interdiction administrative de sortie du territoire créée par l’article 1er du présent projet de loi.

La deuxième de ces dispositions, issue de l’article 9 de la loi du 23 janvier 2006 et codifiée à l'article L.222-1 du code de la sécurité intérieure, permet aux agents des services chargés de la lutte contre le terrorisme d'accéder directement à certains fichiers administratifs.

La consultation de sept fichiers administratifs du ministère de l'intérieur permet de collecter et de recouper certains renseignements. Elle constitue ainsi un outil indispensable pour obtenir rapidement des informations précises et fiables dont l'obtention par d'autres moyens causerait une perte considérable de temps.

C'est ainsi, que, dans le cadre d'une enquête judiciaire ou en amont de celle-ci, cette disposition permet d'accéder notamment aux systèmes de gestion des cartes nationales d'identité et à celui des passeports. La consultation de ces traitements permet ainsi d'établir un environnement complet des individus objets d'investigations et d'obtenir ou confirmer une identité, une filiation, une adresse précise, voire une photo récente, des empreintes digitales ou un numéro de téléphone. 

Dans le cadre de la coopération internationale, l'intérêt opérationnel est également important compte tenu des nombreux déplacements internationaux des terroristes. Ainsi,  il arrive que les ressortissants ou résidents français qui se rendent en Syrie soient contrôlés ou arrêtés pendant leur voyage. L'interrogation des fichiers relatifs aux cartes nationales d’identité et aux passeports peut alors permettre leur identification formelle. Un Français détenteur d'un titre d'identité appartenant à un homonyme non recherché a ainsi été contrôlé en Turquie en juillet dernier. La photographie enregistrée dans le fichier des passeports a permis d'établir que l'individu contrôlé n'était pas le titulaire du titre d'identité présenté et d'en informer les autorités turques.

Plus récemment encore, la consultation des fichiers des passeports et des cartes d'identité a permis d'établir formellement et rapidement les liens familiaux entre les onze Niçois ayant fait l'objet de  signalements distincts concernant leur probable départ pour faire le jihad.

De la même façon, la consultation des fichiers des passeports et des cartes d'identité permet de vérifier l'authenticité d'un titre d’identité trouvé en possession d'un individu interpellé à l'étranger, impliqué ou soupçonné d'activités terroristes.

Par ailleurs, en matière d'apologie ou de provocation aux actes de terrorisme sur internet, l'accès à ces fichiers facilite les recherches approfondies conduites sur la base d’un signalement aux services de police.

Aussi l'accès aux données déjà détenues par l'administration dans ces fichiers administratifs dans un dispositif encadré par la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés constitue-t-il une aide efficace à l'investigation et un facteur de célérité des recherches.

L'aggravation de la menace terroriste, avec en particulier une implication croissante et sans précédent de ressortissants français ou de ressortissants étrangers résidant régulièrement en France, implique nécessairement que les dispositifs autorisés à titre provisoire en 2006 et prolongés à deux reprises, dont l'intérêt a été largement démontré, soient maintenant pérennisés.