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Direction de la séance

Projet de loi

Réforme de l'asile

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 426 , 425 , 394)

N° 231

11 mai 2015


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Favorable
Rejeté

Le Gouvernement


ARTICLE 8


Alinéas 31 à 52

Supprimer ces alinéas.

Objet

Le présent amendement a pour objet de supprimer la disposition, introduite par la Commission des lois, conférant, de manière différée (le 1er janvier 2017), le contentieux des refus d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile à la CNDA.

Le Gouvernement est en effet opposé à ce transfert de contentieux. 

En effet, le contentieux en cause est distinct du contentieux de l’asile. La décision de refus d’entrée au titre de l’asile est une décision du ministre chargé de l’immigration (et non de l’OFPRA) qui a estimé, après avis de cet office, que la demande d’asile était manifestement infondée. Il n’est pas approprié de confier à une juridiction administrative spécialisée dans le contentieux des décisions de l’OFPRA et le bien-fondé des demandes d’asile présentées en France le soin de connaître de décisions ministérielles de refus d’entrée en France, dont le juge naturel est la juridiction administrative de droit commun.

Le contentieux de l’asile à la frontière est traité normalement par le juge administratif de droit commun, principalement par le tribunal administratif de Paris, très familier des procédures d’urgence ; ce juge est celui de « l’apparence » ou du caractère manifestement infondé ou purement dilatoire d’une demande d’asile ; et son office est bien défini par la jurisprudence (voir l’arrêt de principe CE 28 novembre 2011, n° 343248). Le transfert de ce contentieux à la CNDA aurait pour effet de brouiller les repères, la CNDA étant avant tout la juridiction nationale des décisions de l’OFPRA et du bien-fondé des demandes d’asile présentées en France.

En outre, les décisions du ministre peuvent être fondées non seulement sur le caractère manifestement infondé de la demande d’asile, mais également sur une réserve d’ordre public. Sur ce dernier point, il importe de relever que le projet de loi prévoit expressément que, même si l’avis de l’OFPRA est favorable à l’entrée en France de la personne concernée, le ministre peut refuser cette entrée en cas de menace grave pour l’ordre public. Ce serait donc à la CNDA de connaître de ce contentieux alors que cette juridiction n’est familière ni des procédures d’urgence, ni de cette problématique de la menace grave à l’ordre public susceptible de justifier un refus d’entrée sur le territoire. 

Enfin, le projet de loi a pour objet de transformer en profondeur la juridiction de l’asile : formations de jugement regroupées en chambres elles-mêmes regroupées en sections ; institution du juge statuant seul ; encadrement de son office ; délais impartis par la loi (5 mois ou, en cas de procédure accélérée, 5 semaines), etc. La réussite de cette réforme, alors que la juridiction en cause a connu très récemment un conflit social difficile et affronte un enjeu de maîtrise des délais, pourrait être contrecarrée par une modification supplémentaire et d’importance, même différée de quelques mois, à savoir le transfert d’un contentieux nouveau – celui des refus d’entrée au titre de l’asile – qui nécessiterait un supplément d’efforts et de moyens : magistrats en nombre suffisant, moyens en communication audiovisuelle dans toutes les zones d’attente, mise en place de permanences et d’astreintes, audiences quasi quotidiennes, etc. Un tel transfert et sa gestion au quotidien (alors que les flux peuvent être très variables d’une année sur l’autre) risquent d’impacter fortement la réforme en elle-même de la juridiction.