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Direction de la séance

Proposition de loi

Répression des abus de marché

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 576 , 575 , 573)

N° 4

9 mai 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

C Avis du Gouvernement
G Demande de retrait
Retiré

M. PILLET

au nom de la commission des lois


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 4 BIS


Après l'article 4 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 420-6 du code de commerce, il est inséré un article L. 420-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 420-6-1. – Par dérogation à l’article 121-2 du code pénal, l’article L. 420-6 du présent code n’est pas applicable aux personnes morales. »

Objet

Le présent amendement vise à corriger un cas de cumul de poursuites et de sanctions pénales et administratives de même nature au sein d’un même ordre de juridiction, comparable à celui censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 18 mars 2015 et réformé par la présente proposition de loi.

En l’état du droit, les pratiques anticoncurrentielles prohibées par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce (cartels et abus de position dominante) et commises par une personne morale peuvent être cumulativement punies par des sanctions pénales, prononcées par le juge pénal, et des sanctions administratives, prononcées par l’Autorité de la concurrence. Dans les deux cas, les sanctions prononcées relèvent de la compétence du juge judiciaire. De plus, les sanctions peuvent être considérées comme de même nature : dans les deux cas sont encourues une peine d’amende et la publication de la décision.

L’article L. 420-6 du code de commerce prévoit une peine de quatre ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende ainsi que la publication de la décision pour une personne physique responsable d’une pratique anticoncurrentielle. En application des articles 121-2, 131-37 et 131-38 du code pénal, une personne morale encourt donc pour les mêmes faits une amende de 375 000 euros et la publication de la décision. Par ailleurs, l’article L. 464-2 du code de commerce dispose que l’Autorité de la concurrence peut infliger une sanction pécuniaire d’un montant au plus égal à 10 % du chiffre d’affaires aux entreprises responsables d’une pratique anticoncurrentielle et ordonner la publication de sa décision. Selon l’ampleur économique de l’infraction, les amendes encourues peuvent être comparables.

Dans un souci de cohérence et d’efficacité de la répression des infractions en matière de concurrence, le présent amendement écarte l’application des sanctions pénales pour les personnes morales, au bénéfice des seules sanctions prononcées par l’Autorité de la concurrence, reprenant ainsi une recommandation du « rapport Coulon » de 2008 sur la dépénalisation de la vie des affaires. Les sanctions pénales resteraient encourues pour les personnes physiques ayant participé à la conception et à la réalisation de l’infraction.

Par ailleurs, il existe d’autres cas de cumul de sanctions pénales et administratives potentiellement problématiques au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel – deux questions prioritaires de constitutionnalité n° 545 et 546 sont actuellement pendantes devant le Conseil, concernant le cumul de sanctions pénales et fiscales en matière de droits de succession et d’impôt sur la fortune, relevant toutes du juge judiciaire –, mais aussi au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.