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Direction de la séance

Projet de loi

Évolution du logement, de l'aménagement et du numérique

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 631 , 630 , 604, 606, 608)

N° 1005 rect. bis

23 juillet 2018


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

MM. DANTEC et GUÉRINI


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 54 QUINQUIES


Après l’article 54 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 751-9 du code de commerce, sont insérés des articles L. 751–10 et L. 751–11 ainsi rédigés :

« Art. L. 751–10 – L’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme peut, après avis de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de schéma de cohérence territoriale, saisir la commission nationale d’aménagement commercial qui reconnaît l’existence d’une stratégie commerciale territoriale robuste dès lors que celle-ci :

« 1° Permet d’assurer un aménagement commercial cohérent du territoire notamment par la revitalisation des centres-urbains et le renouvellement des espaces périphériques ; la protection de l’environnement par une consommation économe de l’espace, la préservation de l’environnement, des paysages et de l’architecture ; et la protection des consommateurs ;

« 2° Ne contrevient pas aux droits et libertés que la Constitution et le droit de l’Union européenne garantis ;

« 3° Est formalisée dans les projets de plan local d’urbanisme intercommunal et de document d’aménagement artisanal et commercial du schéma de cohérence territoriale ;

« 4° Est accompagnée d’une politique active d’animation du tissu économique local qui peut se traduire notamment par la présence sur le territoire intercommunal d’un animateur de centre urbain ou d’un office intercommunal du commerce chargés d’un accompagnement des entreprises et des commerçants, ainsi qu’une politique promouvant une logistique urbaine durable ;

« 5° Est accompagnée d’observation locale et permanente de l’aménagement commercial et du commerce.

« La commission nationale d’aménagement commercial reconnait l’existence d’une stratégie commerciale territoriale robuste par un vote à la majorité absolue des membres présents. Le procès-verbal indique le sens du vote émis par chacun de ses membres. La décision peut être assortie de recommandations.

« La commission nationale d’aménagement commercial se prononce dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Passé ce délai, la stratégie commerciale territoriale robuste est réputée reconnue.

« En cas de refus, la commission nationale d’aménagement commercial se prononce sur l’ensemble des motifs qu’elle estime susceptible de fonder sa décision.

« La décision est notifiée dans les dix jours au président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme.

 « Art. L. 751–11 – Des observatoires locaux du commerce peuvent être créés à l’initiative des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de leurs regroupements. Ces observatoires ont notamment pour mission de suivre les évolutions de la consommation, des surfaces commerciales, de l’emploi dans le commerce, de la vacance commerciale, des loyers commerciaux ainsi que les enjeux d’accessibilité, d’environnement et d’aménagement liés au commerce.

« Ces observatoires recueillent les données relatives au commerce en prenant en compte le bassin de consommation. Ils sont organisés suivant une gouvernance associant les acteurs du commerce, les consommateurs, les acteurs de l’aménagement et de l’environnement. Pour leur mise en œuvre, les collectivités peuvent s’appuyer notamment sur l’expertise des chambres consulaires, des agences d’urbanisme, des établissements publics fonciers ou autres structures intervenant dans le cadre de mission d’intérêt général.

« Les observatoires locaux du commerce transmettent des données à la dans des conditions fixées par décret, en vue d’assurer une mutualisation des connaissances au niveau national dans le cadre de la mission de la commission nationale d’aménagement commercial définie à l’art L. 751-9 du code du commerce. »

II. – Après l’article L. 752-3 du code de commerce, il est inséré un article L. 752-... ainsi rédigé :

« Art. L. 752-... – Sont exonérés de la procédure prévue au chapitre II du titre V du livre VII du présent code ou soumis à cette procédure au-delà d’un seuil défini par le plan local d’urbanisme, les projets entrant dans le champ des articles L. 752-1 ou L. 752-15 s’ils sont situés sur un territoire sur lequel sont exécutoires un plan local d’urbanisme intercommunal et un schéma de cohérence territoriale comprenant la stratégie commerciale territoriale robuste reconnue par la commission nationale d’aménagement commercial en application des dispositions de l’article L. 751-11 du présent code.

« En cas d’exonération prévue à l’alinéa précédent, le permis de construire ou, le cas échéant, l’autorisation de travaux requise au titre de l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation est délivré après accords du président de l’établissement public de coopération intercommunal compétent en matière de plan local d’urbanisme et du président de l’établissement public de schéma de cohérence territoriale et vaut autorisation d’exploitation commerciale.

« Le régime d’exception décrit dans le présent article s’applique tant que le plan local d’urbanisme intercommunal et le schéma de cohérence territoriale comportent les dispositions contenues dans la stratégie territoriale robuste telle que reconnue par la commission nationale d’aménagement commercial en application des dispositions définis à l’article L. 751-11 code de commerce. »

III. – L’article L. 425-4 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa, dans les cas prévus par l’article L. 751-11 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale après accords du président de l’établissement public de coopération intercommunal compétent en matière de plan local d’urbanisme et du président de l’établissement public porteur du schéma de cohérence territoriale et vaut autorisation d’exploitation commerciale. »

IV. – L’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les cas prévus à l’article L. 751-11 du code de commerce, l’autorisation de travaux au titre du présent article tient lieu d’autorisation d’exploitation commerciale après accords du président de l’établissement public de coopération intercommunal compétent en matière de plan local d’urbanisme et du président de l’établissement public porteur du schéma de cohérence territoriale et vaut autorisation d’exploitation commerciale. »

V. – Le chapitre Ier du titre V du livre Ier du code de l’urbanisme est complété par une section ainsi rédigée :

« Section…

« Plan local d’urbanisme intercommunal portant stratégie d’aménagement commercial

« Art. L. 151-49. – Lorsqu’il est élaboré par un établissement public de coopération intercommunale dont la stratégie commerciale territoriale robuste a été reconnue par la commission nationale d’aménagement commercial dans les conditions définies à l’article L. 751-11 du code de commerce, le plan local d’urbanisme comprend :

« 1° Dans le rapport de présentation, une explication des choix et des mesures retenus pour permettre, dans le respect des principes d’égalité devant la loi et de proportionnalité, d’assurer un aménagement commercial cohérent du territoire, de garantir un développement durable et la protection des consommateurs au sens de l’article L. 752-6 du code de commerce ;

« 2° Dans le projet d’aménagement et de développement durables, les orientations concernant l’équipement commercial et peut fixer des objectifs chiffrés ;

« 3° Dans les orientations d’aménagement et de programmation, des actions et opérations d’aménagement relatives à l’équipement commercial ;

« 4° Dans le règlement, une délimitation, en fonction des situations locales, des zones ou secteurs pouvant accueillir des équipements commerciaux en fonction de seuils, des secteurs où les implantations commerciales sont interdites au-delà ou en-deçà de certains seuils et, le cas échéant, les zones ou les projets qui restent soumises à la procédure prévue au chapitre II du titre V du livre VI du code de commerce. »

VI. – Au premier alinéa de l’article L. 143-34 du code de l’urbanisme, les références : « L. 141-16, L. 141-17 » sont supprimées.

VII. – À l’article L. 143-37 du code de l’urbanisme, après la référence : « L. 143-34 », sont insérés les mots : « et lorsqu’il porte sur des dispositions prises en application de l’article L. 421-27 après reconnaissance de la commission nationale d’aménagement commercial dans les conditions fixées par l’article L. 751-11 du code de commerce, ».

VIII. – À l’article L. 143-38 du code de l’urbanisme, après la référence : « L. 132-8 », sont insérés les mots : « , l’évaluation environnementale et la décision de la commission nationale d’aménagement commercial rendue dans les conditions définies à l’article L. 751-11 du code de commerce ».

IX. – À l’article L. 153-45 du code de l’urbanisme, après la référence : « L. 153-41, » le mot : « et » est supprimé et après la référence : « L. 151-28, », sont insérés les mots : « et lorsqu’elle porte sur des dispositions prises en application de l’article L. 151-49 après reconnaissance de la commission nationale d’aménagement commercial dans les conditions fixées par l’article L. 751-11 du code de commerce, ».

X. – Au premier alinéa de l’article L. 153-47 du code de l’urbanisme, après la référence : « L. 132-9, », sont insérés les mots : « l’évaluation environnementale et la décision de la commission nationale d’aménagement commercial rendue dans les conditions définies à l’article L. 751-11 du code de commerce ».

Objet

Depuis près de 40 ans, l’implantation commerciale fait l’objet d’un système d’autorisation préalable dont on constate qu’il n’a pas su protéger les territoires de dysfonctionnements majeurs révélés aujourd’hui par la dévitalisation de nombreux centres-villes et centres-bourgs et par les risques de friches qu’encourent de nombreux pôles périphériques.

L’application de ce système d’autorisations préalables de manière uniforme sur l’ensemble du territoire national n’a pas permis de responsabiliser les collectivités dans l’élaboration et la conduite de politiques locales du commerce adaptées aux spécificités de leur territoire. En attribuant aux communautés de communes et d’agglomération une compétence « politique locale du commerce et actions de soutien aux activités commerciales et artisanales d’intérêt communautaire », la loi NOTRe du 7 août 2015 appelle à un renouveau de la gouvernance locale de cette problématique à l’échelle intercommunale et à l’élaboration de stratégies commerciales territoriales.

Le présent amendement vise à encourager et à accélérer ces évolutions en responsabilisant davantage les territoires. Il dispose que les intercommunalités peuvent décider des règles applicables en matière d’implantation commerciale dès lors qu’elles peuvent attester de l’élaboration d’une stratégie commerciale, de la mise en place d’une gouvernance locale adaptée, d’une politique active d’animation du tissu économique local, de l’instauration d’un système local d’observation pérenne des dynamiques commerciales, et de la possibilité de décliner (en bénéficiant d’un usage de la procédure de modification simplifiée) cette stratégie commerciale territoriale dans leur SCOT et leur PLUi.

Dès lors qu’est reconnue la robustesse de sa stratégie commerciale locale par la Commission nationale d’aménagement commercial et que ces orientations sont effectivement traduites dans le document d’aménagement artisanal et commercial (DAAC) du SCOT et dans le PLUi, une communauté de communes, une communauté d’agglomération ou urbaine, une métropole doit pouvoir se prononcer sans avoir besoin de s’en remettre à l’avis de la CDAC,  organe externe à la gouvernance du territoire qui se prononce au cas par cas sur des projets individuels sans mesurer l’impact cumulé des autorisations et sans connaître réellement les enjeux de l’urbanisme du territoire. La communauté doit pouvoir décider d’exonérer, sur toute ou partie de son territoire ou en fonction des seuils qu’elle détermine, les projets d’un examen en CDAC et assumer pleinement ses décisions sur la base de son projet local. Le cas échant, le permis de construire tenant lieu d’autorisation préalable d’exploitation commerciale (PC-AEC) est délivré après avis conforme du président de la métropole ou de la communauté et du président de l’établissement public en charge du SCOT. Cette autorisation à adapter localement le droit applicable en matière d’urbanisme commercial est accordée à l’intercommunalité tant que restent exécutoires les SCOT et PLUI intégrant les dispositions contenues dans la stratégie commerciale territoriale reconnue par la CNAC.

Telle que proposée, cette évolution du droit veille à s’inscrire dans le cadre légal issu du droit constitutionnel (libre administration des collectivités territoriales ; principe d’égalité) et de l’Union européenne (Directive services ; liberté d’établissement ; évaluation environnementale).

Le présent amendement complète, sans interférence, les dispositions du présent projet de loi en ce qu’il porte des dispositions sur la revitalisation des centres-villes (article 54 et suivants). Il s’inspire notamment des conclusions du rapport Marcon ( du 15 mars 2018) appelant à une responsabilisation plus affirmée des intercommunalités sur ces enjeux commerciaux.