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Direction de la séance

Projet de loi

Croissance et transformation des entreprises

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 255 , 254 )

N° 896 rect.

29 janvier 2019


 

AMENDEMENT

présenté par

C Favorable
G Favorable
Adopté

MM. MÉZARD, ARTANO et Alain BERTRAND, Mmes Maryse CARRÈRE et Nathalie DELATTRE, MM. GABOUTY, GOLD et GUÉRINI, Mme LABORDE et MM. MENONVILLE, REQUIER, ROUX et VALL


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 42 BIS


Après l’article 42 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L’article L. 521-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3. – L’action civile en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer. » ;

2° Après l’article L. 521-3-1, il est inséré un article L. 521-3-… ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3-... – L’action en nullité d’un dessin ou modèle n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

3° L’article L. 615-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 615-8. – Les actions en contrefaçon prévues par la présente section sont prescrites par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer. » ;

4° Après l’article L. 615-8, il est inséré un article L. 615-8-… ainsi rédigé :

« Art. L. 615-8-... – L’action en nullité d’un brevet n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 622-7, après la référence : « L. 615-8 » est insérée la référence : « L. 615-8-1, » ;

6° L’article L. 623-29 est ainsi rédigé :

« Art. L. 623-29. – Les actions civiles prévues par le présent chapitre, à l’exception de celle prévue par l’article L. 623-23-1, se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer. » ;

7° Après l’article L. 623-29, il est inséré un article L. 623-29-… ainsi rédigé :

« Art. L. 623-29-... – L’action en nullité d’un certificat d’obtention végétale n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

8° Après l’article L. 714-3, il est inséré un article L. 714-3-… ainsi rédigé :

« Art. L. 714-3-... – Sans préjudice du troisième alinéa de l’article L. 714-3 et de l’article L. 714-4, l’action en nullité d’une marque n’est soumise à aucun délai de prescription. » ;

9° Le troisième alinéa de l’article L. 716-5 est complété par les mots : « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre le dernier fait lui permettant de l’exercer ».

II. – À l’article L. 152-2 du code de commerce, les mots : « des faits qui en sont la cause » sont remplacés par les mots : « du jour où le détenteur légitime du secret des affaires a connu ou aurait dû connaître le dernier fait qui en est la cause. »

III. – Les 2°, 4°, 5°, 7°et 8° du I du présent article s’appliquent aux titres en vigueur au jour de l’entrée en vigueur de la présente loi. Ils sont sans effet sur les décisions ayant force de chose jugée.

IV. – Les articles 12 et 13 et le II de l’article 23 de l’ordonnance n° 2018-341 du 9 mai 2018 relative au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet sont abrogés.

Objet

Cet amendement tend à harmoniser et clarifier les règles de prescription des actions en contrefaçon et d’atteinte au secret des affaires et à rendre imprescriptible l’action en nullité des titres de propriété industrielle (brevets, marques, certificats complémentaire de protection, certificats d’utilité, dessins et modèles, topographies de semi-conducteurs et certificats d’obtention végétale).

S’agissant des actions en contrefaçon, le point de départ du délai de prescription n’est plus le jour de la réalisation des actes de contrefaçon mais le jour où le requérant a eu connaissance ou avait raisonnablement lieu d’avoir connaissance du dernier fait justifiant l’action, conformément à l’esprit du code civil et des textes européens. Cette disposition allonge le délai pour agir en contrefaçon, en permettant d’engager une action tant que la contrefaçon se poursuit et de viser des faits ayant débuté plus de 5 ans auparavant (contre une réparation limitée à cinq ans aujourd’hui). Cette disposition permet de renforcer la lutte contre la contrefaçon et d’améliorer l’indemnisation des préjudices résultant des faits de contrefaçon. La même modification est apportée dans le code de commerce en ce qui concerne la prescription de l’action relative à une atteinte au secret des affaires, dans un souci de cohérence. L’entrée en vigueur de ces modifications sera soumise au droit commun, à savoir l’article 2222 du code civil.

S’agissant des actions en nullité, dans le silence du code de la propriété intellectuelle, les juridictions appliquent la prescription de droit commun, à savoir 5 ans depuis la réforme de 2008 (article 2224 du code civil, introduit par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile). Cette solution conduit à empêcher, au-delà d’une courte durée, la remise en cause d’un titre affecté d’un vice intrinsèque, bloquant abusivement un marché pour de nouveaux entrants (par exemple le titulaire d’un brevet dénué d’activité inventive pourrait empêcher ses concurrents d’utiliser un procédé qui devrait être dans le domaine public) ou portant atteinte à l’ordre public (par exemple, un brevet portant sur le corps humain). En outre, la situation actuelle est source d’une grande insécurité juridique, les juridictions ayant des appréciations divergentes du point de départ du délai de prescription de cinq ans. 

L’absence de prescription de l’action en nullité permettra ainsi d’assainir la concurrence en éliminant les titres nuls et de faire disparaître à tout moment un titre qui occupe sans droit le domaine public.

Le III du présent amendement vise à rendre applicable immédiatement la modification de la prescription de la nullité afin de lever l’insécurité juridique, étant entendu que les décisions ayant force de chose jugée ne sont pas impactées. 

Le IV du présent amendement vise à abroger des dispositions prévues dans l’ordonnance n° 2018-341 du 9 mai 2018 relative au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet qui modifient dans les mêmes termes les délais de prescription des actions en nullité et en contrefaçon du brevet d’invention mais dont l’entrée en vigueur, subordonnée à la ratification d’un accord international, pourrait être retardée. Par cohérence, il est donc proposé de traiter tous les titres dans le présent amendement.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.