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Direction de la séance

Projet de loi

Organisation du système de santé

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 525 , 524 , 515, 516)

N° 416

28 mai 2019


 

AMENDEMENT

présenté par

C Art. 45
G  
Irrecevable art. 45, al. 1 C (cavalier)

M. ANTISTE


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 7 SEPTIES A


Après l’article 7 septies A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 1110-3 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa, sont insérés huit alinéas ainsi rédigés :

« Sont notamment assimilées à des refus de soins, lorsqu’elles sont fondées sur un des motifs discriminatoires mentionnés au deuxième alinéa, les pratiques suivantes :

« 1° Le fait de proposer un rendez-vous dans un délai manifestement excessif au regard des délais habituellement pratiqués par ce professionnel ;

« 2° Le fait pour un professionnel de santé de ne pas communiquer les informations relatives à la santé du patient au professionnel de la santé qui est à l’origine de la demande de consultation ou d’hospitalisation ;

« 3° Le fait de ne pas respecter les tarifs opposables pour les bénéficiaires de la protection complémentaire en matière de santé mentionnée à l’article L. 861-1 du code de la sécurité sociale ainsi que de l’aide médicale d’État ;

« 4° Le refus d’appliquer le tiers payant, dans les situations où il est imposé par la loi ;

« 5° L’orientation répétée et abusive vers un autre confrère, un centre de santé ou la consultation externe d’un hôpital, sans justification médicale ;

« 6° Le refus d’élaborer un devis ;

« 7° L’attitude et le comportement discriminatoire du professionnel de santé. » ;

2° Après le troisième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Le quatrième alinéa est également applicable quand le refus de soins est commis à l’encontre d’une personne ayant sollicité les soins dans le but de démontrer l’existence du refus discriminatoire. Les modalités et conditions de cette sollicitation sont précisées par un cahier des charges défini par décret en Conseil d’État après consultation notamment de représentants des professionnels de santé et des associations agréées mentionnées à l’article L. 1114-1 du présent code.

« Il appartient au professionnel de santé, au vu des éléments rapportés par la personne l’ayant sollicité, de prouver que le refus en cause est justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. » ;

3° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« Hors cas de récidive, une conciliation est menée dans les trois mois de la réception de la plainte par une commission composée de représentants du conseil territorialement compétent de l’ordre professionnel concerné, de l’organisme local d’assurance maladie, d’un délégué du Défenseur des droits, de deux membres d’une association agréée en application de l’article L. 1114-1. » ;

4° Après le septième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, dont l’objet statutaire comporte le droit à la santé ou la lutte contre les exclusions, peut exercer les droits reconnus à une personne victime d’un refus de soins.

« Toutefois, lorsque le refus de soins a été commis envers une personne considérée individuellement, l’association n’est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l’accord de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, du titulaire de l’autorité parentale ou du représentant légal, lorsque cet accord peut être recueilli. »

II. – Aux première et deuxième phrases du premier alinéa de l’article 2-8 du code de procédure pénale, après le mot : « handicap », sont insérés les mots : « , de sa protection sociale ».

Objet

Il s'agit d'un amendement de l'UNIOPSS Les refus de soins, violations du droit et de la déontologie attachée aux professions de santé , sont un phénomène constaté par nombre d’enquêtes et rapports associatifs ou institutionnels comme le montrent notamment l'enquête de 2016 du Défenseur des droits sur les difficultés d’accès aux soins pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS) et de l’aide médicale de l’État (AME) et la dernière synthèse de l’observatoire des refus de soins de la Fédération des acteurs de la solidarité. Ils touchent en premier lieu les personnes en situation de précarité et génèrent des conséquences sérieuses pour la santé individuelle (renoncements ou retards de soins, aggravation des pathologies, prise en charge en urgence avec complications, …) et la santé publique.

Malgré ce phénomène répandu, le dernier rapport du conciliateur de l’Assurance maladie fait état de seulement 685 saisines pour toute l’année 2017 dont 394 déclarées comme refus de soins avérés. De même les saisines auprès des différents ordres restent très faibles également : 37 auprès de l’ordre des médecins en 2017, dont 28 n’ont donné lieu à aucune sanction. Ceci indiquant bien le flou qui règne à la fois sur l’identification des refus de soin, et également sur la méconnaissance des démarches possibles voire le découragement au regard du risque d’être débouté de se demande.

Ainsi malgré la mise en place des commissions de conciliation au sein des ordres par la loi de modernisation de santé de 2016, force est de constater que ces dispositifs sont totalement insuffisants pour lutter efficacement contre les refus de soins. 

Le dispositif né de la loi HPST instaurant une procédure de conciliation devant l’organisme d’assurance maladie puis une procédure contentieuse devant le Conseil de l’Ordre, même s’il est mis en œuvre, ne sera pas suffisant à lui seul pour répondre à cette problématique si des mesures permettant l’identification des refus de soins indirects et facilitant l’accompagnement des usagers dans leurs recours ne sont pas mises en place.

Enfin, les usagers ne souhaitent pas toujours, lorsqu’ils en ont connaissance, saisir ces instances pour plusieurs raisons : il leur est nécessaire avant tout de trouver une solution à leur problématique de santé, les démarches leur semblent compliquées et peu efficaces.

Alors que le présent projet de loi réforme la pratique de l’activité médicale, sous l’angle de la responsabilité populationnelle, le présent article propose donc de renforcer les dispositifs de lutte contre les refus de soins :

-        en élargissant la définition du refus de soins discriminatoire car le refus direct n’est pas la seule technique discriminatoire employée par les professionnels de santé pour limiter l’accès aux soins de ces populations,

-       en aménageant la charge de la preuve en faveur des victimes de discrimination

-       et enfin, en permettant aux associations d’ester en justice pour défendre les droits des usagers concernés.

Tel est l’objet du présent amendement.


    Déclaré irrecevable au titre de l'article 45, alinéa 1, de la Constitution par la commission saisie au fond