Logo : Sénat français

Direction de la séance

Projet de loi

Bioéthique

(1ère lecture)

(n° 238 , 237 )

N° 54 rect. bis

21 janvier 2020


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G  
Non soutenu

MM. REICHARDT, KENNEL, MAYET et PIEDNOIR, Mme NOËL et M. DUPLOMB


ARTICLE 4


Supprimer cet article.

Objet

Tirant les conséquences de l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes ou à une femme seule, prévue à l’article 1er du présent projet de loi, cet article crée un nouveau mode de filiation, exclusivement fondé sur la volonté et détaché de toute référence à l’engendrement de l’enfant pour conduire à la parentalité.

Actuellement, il existe deux types de filiations, la filiation de droit commun, fondée sur une réalité biologique ou vraisemblable, et la filiation adoptive. 

Dès lors, l’inscription, sur l’acte de naissance de l’enfant de l’existence de deux mères, suite à une reconnaissance conjointe, bouleverserait le sens de la filiation d’origine en rompant non seulement avec le principe, hérité du droit romain, « mater semper certa est » (la mère est celle qui a accouché de l’enfant), mais également avec le principe de la vraisemblance incontournable qui gouverne l’organisation de la filiation de notre pays, soulevant, à plus ou moins long terme, la question du régime de la filiation des enfants issus de conventions de mères porteuses.

Cela risque, en effet, de semer un certain trouble dans le délicat équilibre trouvé par la Cour de cassation en matière de gestation pour autrui. En l’état de la jurisprudence, faisant application de la règle « Mater semper certa est », la convention de mère porteuse fait obstacle à la transcription de l’acte de naissance en ce qui concerne la mère d’intention désignée comme mère légale. Dès lors, sur le fondement de la vérité biologique ou vraisemblable, la Cour de cassation n’admet ainsi qu’une transcription partielle de l’acte étranger, seulement en ce qu’il désigne le père biologique comme père légal (Cass. Ass. plén., 3 juill. 2015, nos 14-21323 et 15-50002 ; Cass., civ. 1ère, 5 juill. 2017, nos 16-16901 et 16-16455).

Si la Cour européenne des droits de l’homme, suite à la demande d’avis consultatif de la Cour de cassation, transmis par un arrêt du 5 octobre 2018, impose à l’État, au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant, de permettre la reconnaissance en droit interne de la filiation entre l’enfant issu d’une gestation pour autrui et la mère d’intention, elle admet néanmoins que, compte tenu de l’état du droit interne du pays concerné, cette reconnaissance puisse se faire par une autre voie que celle de la transcription, telle que l’adoption de l’enfant par ladite mère d’intention (CEDH, Gr. ch., 10 avr. 2019, n° P16-2018-001, faisant suite à l’avis consultatif, Cass. Ass. plén. 5 oct. 2018, n° 10-19053).

En outre, cela priverait le régime de la filiation de toute cohérence, en rendant par exemple incompréhensibles les actions en recherche ou en contestation de paternité et de maternité, fondées sur la réalité biologique, si l’intention était promue comme fondement de la nouvelle filiation.  

Le présent amendement propose donc de supprimer cet article.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.