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Direction de la séance

Projet de loi

Organiser la sortie de l'état d'urgence sanitaire

(Nouvelle lecture)

(n° 578 , 582 )

N° 1

1 juillet 2020


 

Question préalable

Motion présentée par

C Favorable
G Défavorable
Adopté

M. BAS

au nom de la commission des lois


TENDANT À OPPOSER LA QUESTION PRÉALABLE


En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire (n° 578, 2019-2020).

Objet

Après l’échec de la commission mixte paritaire, cette motion a pour objet d’opposer la question préalable au projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, organisant la fin de l’état d’urgence sanitaire.

Si certaines dispositions ont fait l’objet d’un rapprochement entre les deux assemblées, le désaccord constaté en commission mixte paritaire sur la stratégie de sortie de crise persiste. Le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture ne tient en effet pas compte de deux préoccupations que le Sénat avait formulées lors de son examen en première lecture.

Tout d’abord, la gradation entre l’état d’urgence sanitaire et le régime transitoire qui sera mis en œuvre à compter du 11 juillet demeure trop ténue. La nécessité de gérer l’apparition de « clusters » est légitime, mais elle ne peut se traduire par le maintien, aux mains du Premier ministre, de prérogatives très exorbitantes du droit commun, lui permettant de restreindre la liberté d’aller et de venir et  l’ouverture au public de certains lieux sur des pans entiers du territoire. Sinon la sortie de l’état d’urgence sanitaire ne serait qu’un faux-semblant. 

Il ne s’agit, en aucun cas, de priver le Gouvernement des moyens d’agir en cas de recrudescence de l’épidémie. Celui-ci conservera en effet la possibilité, jusqu’au 1er avril 2021, de rétablir l’état d’urgence sanitaire à tout moment, de manière généralisée ou territorialisée, par simple décret, en cas de situations critiques justifiant à nouveau l’application de mesures fortes.

Au surplus, la gestion de l’épidémie de covid-19 ne saurait reposer durablement sur des mesures de police administrative. Au mois de mars, l’instauration de restrictions fortes aux libertés des Français est apparue inévitable faute, pour l’État, de disposer de moyens matériels et humains suffisants pour éviter un confinement de la population. Le renforcement engagé des capacités sanitaires, l’approvisionnement en moyens de protection, la mise en œuvre de systèmes d’information de suivi de l’épidémie et les progrès réalisés dans la connaissance scientifique du virus justifient, désormais, que soit privilégiée une stratégie nouvelle de lutte contre l’épidémie, reposant principalement sur le respect des « mesures barrières », la mise en œuvre d’une politique de tests systématique et la responsabilisation de la population en cas de contamination.

Le second point important de désaccord avec le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture concerne les prérogatives dont le ministre de la santé continuerait d’être doté dans le cadre du régime applicable aux situations de menaces sanitaires, prévu par l’article L. 3131-1 du code de la santé publique.

Par la suppression complète de l’article 1er bis A introduit à l’initiative du Sénat, l’Assemblée nationale maintient la possibilité, pour le ministre de la santé, pendant la période transitoire de quatre mois qui s’ouvrira le 11 juillet, mais également à son issue, de mettre en œuvre « toute mesure proportionnée » pour lutter contre l’épidémie.

La fragilité juridique de ce régime a justifié, il y a quatre mois, l’instauration d’un régime d’exception ad hoc, afin de sécuriser l’action des pouvoirs publics et d’encadrer les atteintes portées aux libertés. Il serait pour le moins contradictoire qu’il constitue, pour les mois à venir, la principale base juridique mobilisée par le Gouvernement pour gérer l’épidémie.



NB :En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, cette motion est soumise au Sénat avant la discussion des articles.