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Direction de la séance

Projet de loi

Lutte contre le dérèglement climatique

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 667 , 666 , 634, 635, 649, 650)

N° 1041

9 juin 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

Mme BENBASSA, MM. DANTEC, FERNIQUE, LABBÉ, SALMON

et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 69


Après l’article 69

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur l’impact sanitaire et environnemental de l’utilisation du chlordécone comme insecticide agricole dans les territoires de Guadeloupe et de Martinique et sur les responsabilités publiques comme privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d’une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires.

Objet

En 2011, un rapport parlementaire fait au nom de la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale a mis en lumière, au niveau national les conséquences économiques, sanitaires et environnementales de l’utilisation du chlordécone (pesticide organochloré) entre 1972 et 1993 en Guadeloupe et en Martinique pour lutter contre le charançon du bananier.

 Comme le rappelle l’exposé des motifs de ce rapport, le chlordécone a reçu une autorisation provisoire de commercialisation en février 1972, mais dès 1976, ses dangers potentiels pour la santé humaine et animale étaient connus. Dès septembre 1989, à la suite du réexamen d’un ensemble de dossiers ayant trait à l’utilisation de ce pesticide, la commission d’étude de la toxicité s’était prononcée pour l’interdiction du chlordécone. Cet avis a été suivi, en février 1990, du retrait de l’autorisation de vente de la spécialité commerciale, le Curlone, puis en juillet 1990 de l’interdiction de la substance active, c’est-à-dire le chlordécone.

 Pour autant, la réglementation applicable à l’époque prévoyait que, lorsqu’une spécialité était l’objet d’un retrait d’homologation, la vente de ce produit sur le marché français ne devait cesser qu’un an après la notification de ce retrait, et un délai d’un an supplémentaire pouvait être toléré avant le retrait définitif du produit. Ces dispositions signifiaient que le Curlone a pu légalement être employé aux Antilles jusqu’en février 1992. Cependant, son utilisation s’est poursuivie jusqu’en septembre 1993, sur le fondement des deux dérogations successives accordées par le ministère de l’agriculture, à la demande des professionnels du secteur. Les distributeurs de ce produit auraient pu bénéficier de ces dérogations afin d’écouler leurs stocks, entraînant la prolongation de l’usage de ce produit.

 Mais il s’agissait là d’un choix politique et de société, un choix productiviste et économique, d’autoriser le chlordécone afin d’être compétitif face à la banane américaine. Ce productivisme à outrance est estimé être la cause de nombreuses conséquences néfastes pour l’environnement et pour l’Homme (pollution des sols, taux élevé des cancers de la prostate, par exemple, etc.).

 Face à ce que l’actuel Président de la République appelait en 2018 un « scandale environnemental », il revient maintenant au Gouvernement, après les travaux menés par le Parlement, de se pencher sérieusement sur l’urgente question de l’utilisation du chlordécone aux Antilles françaises, pour une appréciation des responsabilités publiques comme privées ; pour une sanction des dégâts environnementaux causés et que les auteurs de cet amendement souhaitent qualifier « d’écocide » ; ainsi que pour une indemnisation des victimes de l’utilisation de ce pesticide.