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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2022

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 162 , 163 , 167)

N° I-622

18 novembre 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

M. CAPUS et Mme PAOLI-GAGIN


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 5


Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La première phrase du II de l’article 150-0 B ter code général des impôts est ainsi rédigée : « Si une transmission par voie de donation ou de don manuel des titres mentionnés au 1° du I du présent article intervient, soit dans le délai de trois ans à compter de l’apport des titres mentionné au 2° du I ; soit au cours du délai du réinvestissement prévu au 2° du I du présent article auquel est tenu la société bénéficiaire de l’apport à la suite de la cession des titres apportés, le donataire mentionne, dans la proportion des titres transmis, le montant de la plus-value en report dans la déclaration prévue à l’article 170 si la société mentionnée au 2° du même I est contrôlée par le donataire dans les conditions prévues au 2° du III. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

L’article 150-0 B ter permet d’encadrer les opérations dites « d’apport-cession », qui consistent pour un dirigeant envisageant de vendre à court terme son entreprise à un tiers, à réaliser préalablement un apport de ses titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés, afin de bénéficier d’un report d’imposition de la plus-value qui est alors rattachée aux titres de la société bénéficiaire de l’apport. L’article 150-0 B ter prévoit à cet effet que le report d’imposition de la plus-value de l’apporteur n’est pérennisé que sous la condition que la société qui reçoit les titres ne les revende dans les trois ans suivant l’apport, sauf à réinvestir elle-même dans le délai de deux ans au moins 60% du prix de cession dans des activités économiques.

En application du II de l’article 150-0 B ter, si les titres grevés d'une telle plus-value en report d'imposition font ensuite l’objet d’une donation ou d’un don manuel, le donateur est définitivement exonéré. Mais le report d'imposition de cette plus-value est alors transféré, dans la proportion des titres donnés, au donataire qui doit ensuite les conserver pendant un délai de 5 ans (ou 10 ans) à compter de la donation, faute de quoi la plus-value en report est imposée de son chef. Ce délai a été fixé comme devant correspondre à celui imposé à la société bénéficiaire pour réinvestir, dans l’hypothèse où elle aurait revendu les titres avant la fin du délai de trois ans suivant l’apport. 

Cette dernière disposition pose toutefois de graves difficultés dans le cadre des donations d’entreprises, qui peuvent survenir de nombreuses années après l’apport, et qui n’ont aucun rapport avec une opération « d’apport-cession ».

En effet, il est souvent souhaité que les donataires, immédiatement après la donation, apportent les titres qu’ils ont reçus à une société holding afin de reconstituer le contrôle majoritaire sur l’entreprise, ou parfois pour refinancer des soultes dues entre eux dans le cadre de la donation-partage. Cette dernière opération est d’ailleurs encouragée par le législateur qui a assoupli du dispositif Dutreil, lors de la loi de finances pour 2019, pour permettre qu’un tel apport puisse avoir lieu juste après la donation-partage, même si l’engagement collectif de conservation n’est pas encore achevé.

Or lorsque la donation porte sur des titres grevés d’une plus-value en report d’imposition du chef du donateur en application de l’article 150-0 B ter, ces apports, s’ils interviennent moins de cinq après la donation, entrainent l’imposition du chef des donataires des plus-values en report, alors même qu’ils ne reçoivent pas de liquidités dans l’opération leur permettant d’acquitter l’impôt.

Il faut aussi relever que dans le cas où la transmission des titres résulte du décès du dirigeant, et non d’une donation de son vivant, les héritiers ne rencontrent pas cette difficulté et sont libres d’apporter leurs titres immédiatement à une holding.

Cette imposition d’une plus-value non réellement encaissée est un frein aux transmissions entre vifs des entreprises intervenant dans un cadre familial, pourtant vivement encouragées par le législateur.

Le présent amendement a pour objet de résoudre cette difficulté, sans porter atteinte à l’objectif de l’article 150-0 B ter. Il est proposé de préciser que le transfert à la charge du donataire de la plus-value en report du chef du donateur, ne s’imposerait plus lorsque la donation serait réalisée au-delà des hypothèses prévues par le législateur comme pouvant mettre fin au report de l’apporteur primitif, c’est à dire : soit au-delà du délai de trois ans, décomptés de date à date, de l’apport si la société bénéficiaire a bien conservé les titres apportés ; soit au-delà du délai total de son obligation de réinvestissement (5 ou 10 ans) lorsqu’elle a cédé les titres dans les trois ans après l’apport.

Ainsi les transmissions familiales portant sur des titres grevés d’une plus-value en report, pourront être réalisées et suivies immédiatement d’un apport par les donataires à une holding, dès lors que l’opération en report d’imposition aura été réalisée par leur auteur depuis plus de trois ans avant la donation, et que la société bénéficiaire aura conservé les titres apportés, ce qui est le cas par hypothèse dans le cadre des transmissions familiales.

Par ailleurs aucun contournement de l’objectif de l’article 150-0 B ter ne sera à craindre puisque la plus-value en report demeurera imposable du chef du donataire dans tous les cas où elle aurait pu l’être du chef de l’apporteur.