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Direction de la séance

Projet de loi

Mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 828 , 827 , 822, 825, 826)

N° 148

27 juillet 2022


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

Mmes PONCET MONGE et Mélanie VOGEL, MM. BENARROCHE, BREUILLER et DANTEC, Mme de MARCO et MM. DOSSUS, FERNIQUE, GONTARD, LABBÉ, PARIGI et SALMON


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 4 (SUPPRIMÉ)


Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. –  Les premier, deuxième et quatrième alinéas du I de l’article 24 de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail sont supprimés.

II. – Le livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° Au 5° de l’article L. 2271-1, les mots : « un groupe d’expert désigné à cet effet » sont remplacés par les mots : « la commission mentionnée à l’article L. 2273-1 du présent code » ;

2° Après le titre VII, il est inséré un titre … ainsi rédigé :

« Titre …

« Commission salaires décents

« Chapitre I

« Missions

« Art. L. 2273-…. – La Commission salaires décents est un observatoire sur les bas salaires. Elle est chargée de :

« 1° Mener des travaux sur les bas salaires pour éclairer le Gouvernement et les partenaires sociaux. Pour cela, elle s’intéresse notamment aux questions de rémunérations, de conditions de travail, de qualifications et de parcours professionnels ;

« 2° Remettre des recommandations au Gouvernement et aux partenaires sociaux sur l’évolution du salaire minimum ;

« 3° Remettre un rapport annuel à la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle et au Gouvernement. La Commission mène des travaux réguliers durant l’année pour construire ce rapport. Ce rapport doit être validé par les membres de la Commission.

« Chapitre II

« Organisation et fonctionnement

« Art. L. 2274-…. – La Commission salaires décents est composée d’experts pluridisciplinaires et de représentants des organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national.

« Elle est coprésidée par un représentant des organisations d'employeurs représentatives au niveau national et par un représentant des organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national.

« Pour réaliser ses missions, elle s’appuie sur les services de l’administration et sur les institutions productrices de données utiles à ses travaux.

« Art. L. 2274-…. – Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'organisation et de fonctionnement de la Commission salaires décents. »

Objet

En France, la politique relative aux bas salaires se réduit depuis longtemps à la question du SMIC. Pourtant, ce dernier est loin de constituer un revenu minimum décent. Selon le baromètre 2019 de la DREES, les français estimaient il y a trois ans déjà qu’une personne seule devait disposer d’au moins 1712 euros pour vivre dignement ce qui représente un niveau largement supérieur au RSA mais aussi au SMIC net à temps plein.

Malgré cela, depuis de nombreuses années, le Groupe d’Expert sur le SMIC martèle la même préconisation de ne surtout pas donner de coup de pouce au salaire minimum alors même que des études semblent démontrer que l’augmentation du SMIC n’a pas d’effet négatif sur l’emploi. C’est le cas des études menées par le prix Nobel d’économie David Card au milieu des années 90, et confirmées plus tard par Hristos Doucouliagos et T. D. Stanley qui affirment que : « La littérature sur les effets du salaire minimum est contaminée par un biais de sélection des publications. Une fois ce biais corrigé, il ne reste que peu ou pas d’éléments permettant de valider un lien négatif entre le salaire minimum et l’emploi. ». De même en France, Jérôme Gautié et Patrice Laroche concluaient également « Toutes études confondues », l’effet du salaire sur l’emploi « n’est pas statistiquement significatif. ». Cela a déjà poussé de nombreux pays en Europe à augmenter significativement leur salaire minimum depuis quelques années afin de lutter contre la baisse de pouvoir d’achat et la pauvreté des travailleurs.

La lutte contre la déflation salariale passera obligatoirement par une augmentation des salaires évitant l’effet de tassement vers le bas et l’explosion des plus hautes rémunérations.

Enfin, les partenaires sociaux n’entrent pas dans la composition du Groupe d’Expert sur le SMIC diminuant le dialogue social et le partage d’expertise, si nécessaire à l’élaboration de recommandations politiques.

La création d’une Commission sur les salaires décents viserait à élargir le champ de discussion au-delà du SMIC afin de prendre la problématique des bas salaires dans l’ensemble de ses dimensions et y ajouter les critères nécessaires à la poursuite d’une vie digne.

Positionnée comme un observatoire sur les bas salaires, elle aurait également un champ de réflexion étendu : rémunérations, conditions de travail, parcours professionnels, qualifications, répartition de la richesse, etc. lui permettant d’influer plus globalement sur l’amélioration de la qualité de vie et du bien-être au travail tout en engageant des réflexions sur les alternatives quant aux partages des richesses (Garantie Emploi, Salaire à vie, effets substitutifs des primes défiscalisées sur les AGS…).

Le présent amendement vise donc à renouveler l’approche sur les bas salaires en ouvrant sa composition aux organisations syndicales et à la diversité des expertises pluridisciplinaires via la création d’une Commission sur les salaires décents, qui remplacerait le Groupe d’Expert sur le SMIC, afin de sortir du champ unique du SMIC et viser l’atteinte certes d’un revenu minimum décent y compris dans le contexte de forte inflation mais aussi la prise en compte des autres déterminants du travail ouvrant une perspective dynamique aux salariés des premiers niveaux de rémunérations.