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Direction de la séance

Projet de loi

Programmation militaire pour les années 2024 à 2030

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 740 , 739 , 726, 730)

N° 71

21 juin 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

C Demande de retrait
G Défavorable
Retiré

MM. TEMAL, DEVINAZ et KANNER, Mmes CARLOTTI, CONWAY-MOURET et Gisèle JOURDA, MM. ROGER, TODESCHINI, Mickaël VALLET, VALLINI, VAUGRENARD

et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 9 BIS


Après l’article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 6 decies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 6 … ainsi rédigé :

« Art. 6 … – I – Il est constitué une délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armements, commune à l’Assemblée nationale et au Sénat. Cette délégation est composée de cinq députés et cinq sénateurs.

«  II. – Les présidents des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des affaires étrangères et de la défense sont membres de droit de la délégation à l’évaluation des exportations d’armement.

« La fonction de président de la délégation est assurée, alternativement, pour un an, par un député et un sénateur, désigné par les membres de droit de la délégation. Les autres membres de la délégation sont désignés par les présidents de leur assemblée respective tâchant de reproduire les équilibres politiques de chacune d’entre elles. Les députés qui ne sont pas membres de droit sont désignés au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci. Les sénateurs qui ne sont pas membres de droit sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.

« III. La délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement a pour mission de d’évaluer a posteriori l’action du Gouvernement en matière de contrôle et de soutien aux exportations d’armement. Cette délégation a notamment pour mission d’évaluer la validité des licences d’exportations attribuées par le Gouvernement au regard du respect des traités internationaux et de l’évolution du contexte dans l’État acheteur. La délégation évalue également la procédure de contrôle des biens et technologies à double usage. Cette délégation exercerait une évaluation a posteriori sur certaines demandes d’exportation d’armement et de biens à double usage faisant l’objet d’un examen en Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre et en Commission ministérielle des biens à double usage. Elle évalue les activités du Gouvernement au regard du respect des critères de la position commune de l’Union européenne et du traité de commerce des armes.

« À cette fin, le Gouvernement lui transmet chaque année un rapport comportant une description de l’action du Gouvernement en matière de contrôle des exportations, des éléments relatifs aux critères des procédures d’attributions de licences au sein de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations des matériels de guerre, de la commission interministérielle des biens à double usage et du comité ministériel de contrôle a posteriori des exportations et des transferts de matériels de guerre et assimilés, des critères de la liste des matériels soumis au régime de prohibition et d’éléments d’appréciation relatifs à l’activité générale des entreprises exportatrices de matériel de guerre.

« IV. Les travaux de la délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement sont couverts par le secret des affaires et par le secret de la défense nationale. Les membres de la délégation sont astreints au respect du secret des affaires et de la défense nationale pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissances en ces qualités. Chaque année, la délégation établir un rapport public dressant le bilan de son activité ou présentant ses recommandations. Ce document ne peut faire état d’aucune information ni d’aucun élément d’appréciation portant atteinte au secret des affaires ou de la défense nationale. Les agents des assemblées parlementaires désignés pour assister les membres de la délégation doivent être habilités, dans les conditions définies pour l’article 413-9 du code pénal, à connaître des mêmes informations et éléments d’appréciation.

« V. Dans le cadre de ses travaux, la délégation peut adresser des recommandations et des observations au Président de la République et au Premier ministre ainsi qu’aux ministres compétentes. Elle les transmet au président de chaque assemblée.

« VI. – La délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement établit son règlement intérieur. Celui-ci est soumis à l’approbation du bureau de chaque assemblée.

« VII. Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation financées et exécutées comme dépenses des assemblées parlementaires dans les conditions fixées par l’article 7 de la présente ordonnance. »

Objet

L’objet de cet amendement est de créer une délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement.

Depuis la création et le renforcement de la Délégation parlementaire au renseignement, le Parlement a démontré son efficacité à contrôler les actions du Gouvernement et à proposer une évaluation approfondie des politiques publiques en matière de renseignement. L’objet de cette proposition de loi est de prolonger cette ambition à la stratégie d’évaluation des exportations d’armement. De nombreux rapports parlementaires avaient appelé de leurs vœux la création d’un dispositif de contrôle plus strict. Sur ce sujet, la France est à la traîne au regard de certains de ses homologues européens comme le Bundestag allemand, la Chambre des communes anglaise ou le suédois.

La France se situe, depuis plusieurs années, à la troisième place du classement des pays exportateurs d’armes derrières les États-Unis et la Russie. En 2021, le marché français a représenté 11,7 milliards d’euros soit le double de l’année 2020, selon les derniers chiffres du rapport au parlement sur les exportations d’armement de la France de septembre 2022.

Comme l’ont démontré les auteurs du rapport d’information n° 3581 du 18 novembre 2020 de l’Assemblée nationale, Jacques maire et Michèle Tabarot sur le contrôle des exportations d’armements, plusieurs évolutions plaident aujourd’hui en faveur de la création d’une délégation parlementaire attitrée : l’usage tiers de ces armes pour des conflits comme celui du Yémen, la multiplication des contentieux mettant en cause la responsabilité des entreprises exportatrices d’armements, le développement l’utilisation des biens à double usage comme les technologies d’interception et aujourd’hui les drones, des biens qui font l’objet d’une accélération en matière d’innovation, le fonctionnement même du marché de l’industrie de défense français dont l’équilibre dépend d’une politique d’exportation efficace et pérenne, la dimension diplomatique et stratégique de cette politique qui se renforce du fait de l’évolution des conflictualités et des partenariats, la perspective d’une plus grande intégration européenne en matière de défense, du développement de la BITDE, voire de l’exportation d’équipement produits en commun. Ces enjeux plus complexes, le sentiment de défiance autour d’une politique qui reste à l’écart du débat démocratique justifient aujourd’hui que le Parlement soit plus impliqué et puisse, au-delà d’être destinataire d’un rapport annuel, jouer un rôle d’évaluation et d’interlocuteur crédible de l’exécutif.

Cette délégation a pour mission d’évaluer la validité des licences d’exportations attribuées par le Gouvernement au regard du respect des traités internationaux et de l’évolution du contexte géopolitique dans l’État acheteur. Cette délégation exercerait une évaluation a posteriori sur certaines demandes d’exportation d’armement et de biens à double usage faisant l’objet d’un examen en Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre et en Commission ministérielle des biens à double usage. Elle évalue les activités du Gouvernement au regard du respect des critères de la position commune de l’Union européenne et du traité de commerce des armes.

La délégation parlementaire à l’évaluation des exportations d’armement sera composée de cinq sénateurs et de cinq députés. Les présidents des commissions de la défense nationale de l’Assemblée nationale et de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat seront membres de droit de la délégation.

La délégation publiera un rapport annuel comportant une description de l’action du Gouvernement en matière de contrôle des exportations, des éléments relatifs aux critères des procédures d’attributions de licences au sein de la commission interministériel pour l’étude des exportations des matériels de guerre, la commission interministérielle des biens à double usage et du comité ministériel de contrôle a posteriori des exportations et des transferts de matériels de guerre et assimilés, des critères de la liste des matériels soumis au régime de prohibition et d’éléments d’appréciation relatifs à l’activité générale des entreprises exportatrices de matériel de guerre.

La délégation pourra entendre les personnalités compétentes sur ces sujets et adresser des recommandations et des observations, qui resteraient confidentielles, au Président de la République, au Premier ministre ainsi qu’aux ministres compétents. Ses membres sont soumis au secret de la défense nationale.