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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2024

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 127 , 128 , 132)

N° I-1819

23 novembre 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

MM. SALMON, Grégory BLANC et DOSSUS, Mme SENÉE, MM. BENARROCHE, DANTEC, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, M. JADOT, Mme de MARCO, M. MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. PARIGI et Mmes PONCET MONGE, SOUYRIS et Mélanie VOGEL


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 3 TER


Après l’article 3 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La section II du chapitre IV du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par une sous-section ainsi rédigée : 

« … : Crédit d’impôt mécanisation collective 

« Art.  244 quater Z. – I. – Les exploitations agricoles redevables de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu peuvent bénéficier, pour les dépenses engagées au titre des années 2023 à 2026, d’un crédit d’impôt annuel assis sur les dépenses d’utilisation de matériel agricole qui leurs sont facturées par la coopérative d’utilisation de matériel agricole dont ils sont coopérateurs. 

« II. – Le crédit d’impôt annuel est égal à 20 % des dépenses d’utilisation des biens des coopératives d’utilisation de matériel agricole effectuées par l’exploitation agricole. 

« III. – Le crédit d’impôt annuel est plafonné à 3 000  € pour chaque exploitant agricole. Pour les exploitants agricoles qui exercent leur activité depuis moins de trois ans, le crédit d’impôt n’est pas plafonné. 

« IV. – Un décret définit les modalités d’application du présent article.  »  

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Objet

Depuis 1979, les exploitants agricoles bénéficient d’une exonération des plus-values réalisées à l’occasion de la cession de matériels agricoles. Ce dispositif fiscal, renforcé dans le présent projet de loi de finances, vise de facto à favoriser la consommation individuelle de machines agricoles.  

Ainsi, alors que la mécanisation représente entre 30 et 40 % des charges sur une exploitation, il n’existe pas de dispositif fiscal d’incitation, lorsque les exploitants agricoles décident de se regrouper en coopérative pour acheter et mutualiser l’utilisation de ces matériels agricoles.  

Il s’agit là d’un non-sens, l’agroécologie et la prise en compte de la transition énergétique doivent inciter les pouvoirs publics à privilégier la mutualisation des matériels et ainsi limiter la surconsommation des machines. En plus des bénéfices environnementaux d’une telle mesure, la mutualisation de matériel limite les risques de suréquipement et de surendettement des fermes, l’incitation à l’agrandissement pour rentabiliser un parc de matériel toujours plus important et puissant. On peut également considérer que la mutualisation est facteurs de lien social et limite les risques psychosociaux, importants en agriculture.  

Aujourd’hui, les coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA), qui permettent de mettre en place cette mutualisation, bénéficient d’un soutien public qui reste limité :  le Dispositif National d’Accompagnement (DINA) qui permet d’accorder aux CUMA une aide aux investissements immatériels, pour des conseils stratégiques, dans le but d’améliorer leurs performances économiques, environnementale et sociale. Toutefois, le DINA ne représente qu’une enveloppe inférieure à 2 millions d’euros dans le budget de l’État. Malgré cette aide, seulement 20  % du parc de matériel agricole est mutualisé. La charge cumulée des frais de mécanisation pour l’ensemble des exploitations françaises représente aujourd’hui 18 milliards d’euros. Le chiffre d’affaires des CUMA s’élevant à 670 millions d’euros, ces dernières ne représentent donc que 3,72  % de la mécanisation totale française.  

Il manque un outil pour inciter une partie des exploitations agricoles à participer à une mutualisation des matériels agricoles au travers de coopératives agricoles. L’incitation fiscale en faveur de la mécanisation collective pourrait prendre la forme d’un « crédit d’impôt mécanisation collective » imputable sur l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés. 

La mise en place de cette mesure aurait plusieurs effets : elle baisserait le coût des charges de mécanisation des matériels agricoles et inciterait à une utilisation plus responsable des matériels agricoles, ce qui répond aux enjeux de transition écologique.  

Dans ce cadre, le crédit d’impôt mécanisation agricole mutualisé aurait les caractéristiques suivantes  :  

- Il serait calculé au titre des dépenses d’utilisation du matériel agricole des coopératives d’utilisation de matériel agricole effectuée par l’exploitation ;  

- il serait plafonné à 3000 € par an, sauf pour les agriculteurs installés depuis moins de trois ans,  

La dépense fiscale liée à ce crédit d’impôt mécanisation collective serait financée par la baisse progressive de l’avantage fiscal sur le Gazole Non Routier lié au remboursement partiel de l’accise sur les produits énergétiques. 

Il s’agit ici d’une compensation de l’augmentation sur la fiscalité sur le GNR pour les agriculteurs plus vertueuse que cette proposée par le présent projet de loi de finances, à savoir l’exonération des plus-values réalisées à l’occasion de la cession de matériels agricoles, qui incite au suréquipement des exploitations, avec tous les effets négatifs que cela entraine, en terme sociaux, économiques et environnementaux.