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Direction de la séance

Projet de loi

Lutte contre les dérives sectaires

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 201 , 200 )

N° 30

19 décembre 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

C Défavorable
G  
Rejeté

Le Gouvernement


ARTICLE 1ER A


I. - Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés : 

Après l'article 21 de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, il est inséré un article 21 bis ainsi rédigé :

« Art. 21 bis. - Une administration désignée par décret du Président de la République est chargée de la mise en œuvre de la politique de prévention et de lutte contre les dérives sectaires. Elle a notamment pour missions : » 

 II. - Alinéa 8

1° Première phrase

Rédiger ainsi cette phrase : 

Elle remet un rapport annuel d'activité au Premier ministre qui est rendu public.

2° Seconde phrase 

Supprimer cette phrase.

Objet

Suivant les préconisations du rapport de la commission d’enquête du Sénat du 4 avril 2013 sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé, la commission des lois du Sénat propose d’inscrire la MIVILUDES dans la loi. Sans être dépourvue de précédent, une telle initiative est rare et place la MIVILUDES à un niveau très différent des autres administrations de l’Etat qui ne sont créées que par le niveau règlementaire.

Le présent amendement est d’abord proposé afin de sécuriser juridiquement l’écriture de l’article 1A et éviter un risque de constitutionnalité.

Dans cette perspective, il est proposé de ne pas mentionner directement le nom de la MIVILUDES, au cas où sa dénomination serait appelée à évoluer et pour éviter une censure sur le fondement des articles 20, 34 et 37 de la Constitution qui disposent que l’organisation de l’administration, incluant la dénomination des services qui la composent, relève du Gouvernement.

 L’amendement vise également, sur la forme, à inscrire dans la loi About-Picard et non en disposition « flottante » l’existence d’une administration chargée de la lutte contre les dérives sectaires, dans la mesure où le présent projet de loi n’a pas vocation à conserver de telles dispositions « flottantes ». Il concourt ainsi à une meilleure lisibilité du droit. 

L’amendement supprime enfin l’immunité accordée au président de la MIVILUDES pour les opinions émises dans le rapport annuel d’activité de la mission.

En effet, une telle protection pénale est très strictement encadrée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Dans sa décision sur la loi organique créant le Défenseur des droits et ses adjoints et lui conférant une immunité pénale ainsi qu’à ses adjoints (DC n° 2011-626), le Conseil avait ainsi considéré que : « Nul ne saurait, par une disposition générale de la loi, être exonéré de toute responsabilité personnelle quelle que soit la nature ou la gravité de l’acte qui lui est imputé » et émis deux réserves d’interprétation :

- l’immunité pénale ne saurait s’appliquer qu’aux opinions qu’ils émettent et aux actes qu’ils accomplissent « pour l’exercice de leurs fonctions »,

- elle ne saurait exonérer le Défenseur des droits et ses adjoints des sanctions encourues en cas de méconnaissance des règles prévues par les articles 20 et 29 de la loi organique, sur les secrets protégés par la loi, et par son article 22, sur la protection des lieux privés.

Dans sa décision n° 89-262 DC du 7 novembre 1989, le Conseil constitutionnel avait en outre censuré la disposition qui prévoyait une immunité pour les parlementaires en mission prévoyant que « ne donnera lieu à aucune action, le rapport d’un parlementaire établi pour rendre compte d’une mission confiée par le Gouvernement », au motif que l’immunité pénale créée par cette loi, distincte de l’immunité des parlementaires prévue par l’article 26 de la Constitution, méconnaissait le principe constitutionnel d’égalité devant la loi : « Pour des infractions identiques la loi pénale ne saurait, dans l’édiction des crimes ou des délits ainsi que des peines qui leur sont applicables, instituer au profit de quiconque une exonération de responsabilité à caractère absolu, sans par là même porter atteinte au principe d’égalité ».

Pour ces raisons, la création d’une immunité pénale au bénéfice du président de la MIVILUDES encourrait à coup sûr une censure constitutionnelle. Il est impossible de transposer à son égard le raisonnement tenu pour le Défenseur des droits, autorité administrative indépendante, a fortiori créé par la Constitution ; l’immunité strictement contingentée dont il bénéficie ne saurait être répliquée pour une administration.