Direction de la séance |
Proposition de loi Sécurité des professionnels de santé (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 563 , 562 ) |
N° 11 rect. ter 5 mai 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme BOURCIER, M. CAPUS, Mme Laure DARCOS et MM. Alain MARC, CHASSEING, ROCHETTE, BRAULT et CHEVALIER ARTICLE 3 |
I. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
déposer plainte
par les mots :
adresser un signalement auprès du procureur de la République compétent
II. – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
III. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« En l’absence de dépôt de plainte et sous réserve de l’accord préalable du professionnel de santé, son ordre professionnel peut adresser un signalement auprès du procureur de la République compétent. »
Objet
L’article 3 prévoit le dépôt de plainte par un tiers (employeur, ordre ou organisme représentatif déterminé par décret), en lieu et place de la victime.
Cet article pose difficulté pour les raisons suivantes.
Il n’existe aucune disposition similaire permettant à un tiers de déposer plainte à la place d’une victime directe ayant la capacité juridique (à l’exclusion donc des mineurs ou majeurs incapables). La plainte constitue un droit fondamental que la personne doit pouvoir exercer en son nom propre.
La rédaction actuelle ne précise pas à qui incombe la mise en œuvre des droits de la victime, et donc l’étendue de la responsabilité des Ordres dans le suivi de la procédure.
En effet, cette immixtion pose en effet un certain nombre de questions sur les points suivants :
- Recueil des informations nécessaires et suffisantes pour le dépôt de plainte et le bon déroulé de l’enquête : ce recueil doit se faire directement auprès de la victime par un enquêteur formé pour ce faire. Or le tiers, n’est ni victime ni témoin, il n’aura pas le détail de l’agression. En outre, il lui faudra également s’assurer que les informations portées à sa connaissance soient suffisamment circonstanciées pour le préserver d’une plainte en dénonciation calomnieuse.
- Exercice des droits tout au long de la procédure : la victime doit être informée en temps réel de la date de l’audience correctionnelle afin de préparer le procès et la constitution de partie civile en vue de demander la réparation du préjudice. Par ailleurs, le texte ne précise pas les modalités de mise en œuvre des voies de recours si le procureur ne répond pas dans les 3 mois donnant la possibilité à la victime de déposer plainte avec constitution de partie civile ou encore en cas de classement sans suite de la plainte, ni qui en porte la responsabilité. A cet égard, le texte ne précise pas que les Ordres n’ont pas la qualité de victime. Enfin que se passe-t-il si le professionnel n’est plus salarié, plus membre du tiers (plus inscrit au tableau de l’Ordre) ?
Par ailleurs, cette mesure créerait une différence de traitement par les Ordres entre les professionnels de santé salariés et libéraux.
Si l’objectif de cette mesure est de mettre en mouvement l’action publique, il semble que le signalement au procureur de la République par les Ordres, avec l’accord de la victime, soit plus adapté pour les faits de violence commis à l’encontre d’un professionnel de santé, quel que soit son type d’exercice. Cela permettrait, sous réserve de l’accord de la victime, de porter à la connaissance du procureur ces faits, qui lui-même pourra mettre en œuvre l’action publique sans que l’Ordre ou l’employeur en porte la responsabilité. Cette disposition permet plus de lisibilité de l’action et des responsabilités de chacun, tout en s’appuyant sur des dispositifs existants de recueil des déclarations d’agression aujourd’hui réalisé par la plupart des Ordres ou dont ils ont connaissance par le site de l’ONVS.
Si la procédure est ensuite audiencée devant le tribunal correctionnel, la victime directe et l’Ordre pourront se constituer partie civile, la première pour obtenir réparation de son propre préjudice et le second au nom de la défense de l’intérêt collectif de la profession que les Ordres ont vocation à défendre (au titre de l’article L. 4233-1 du CSP pour les pharmaciens).
Ce principe de signalement pourrait également s’appliquer aux employeurs privés ou publics, en complément de la protection fonctionnelle des agents publics déjà existante.
Tel est le sens de la proposition d’amendement.