Direction de la séance |
Proposition de loi Personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982 (2ème lecture) (n° 565 , 564 ) |
N° 10 5 mai 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mme Mélanie VOGEL, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mmes OLLIVIER et PONCET MONGE, M. SALMON et Mmes SENÉE et SOUYRIS ARTICLE 1ER |
Rédiger ainsi cet article :
La Nation reconnaît que l’application par l’État des dispositions pénales suivantes a constitué une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et une violation du droit au respect de la vie privée :
1° Le 1° de l’article 334 du code pénal dans sa rédaction résultant de la loi n° 744 du 6 août 1942 modifiant l’article 334 du code pénal, s’agissant des dispositions relatives aux actes qualifiés d’impudiques ou de contre nature commis avec une personne de même sexe ;
2° Le deuxième alinéa de l’article 330 et le troisième alinéa de l’article 331 du code pénal, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 80-1041 du 23 décembre 1980 relative à la répression du viol et de certains attentats aux mœurs ;
3° Le deuxième alinéa de l’article 331 du code pénal, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 82-683 du 4 août 1982 abrogeant le deuxième alinéa de l’article 331 du code pénal ;
Elle ouvre aux personnes condamnées sur le fondement de ces dispositions le bénéfice d’une réparation dans les conditions prévues à l’article 3 de la présente loi.
Objet
Cet amendement proposé par le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires, propose de revenir à la version du texte telle qu’adoptée par l’Assemblée Nationale en première lecture.
Tout d’abord, alors que les dispositions promulguées par le régime de Vichy n’ont pas été abrogées à la libération, mais ont bien perduré jusqu’aux années 80, ne pas prendre en compte la continuité des actes de l’État et l’origine de ces politiques discriminatoires dans la reconnaissance des préjudices causés, revient à abandonner une partie des victimes et une partie de la reconnaissance due. Cela revient aussi à taire le fait que la République post-Vichy ait maintenu des politiques précisément mises en place par ce régime. Par ailleurs, lors de l’examen en première lecture, le rapporteur estimait que “Pour des raisons de morale politique, la République ne peut endosser la responsabilité des crimes de Vichy”. Mais alors à qui revient-il d’endosser cette responsabilité ? Si l’État d’aujourd’hui refuse de reconnaître les responsabilités des régimes d’hier, si nous le refusons, alors personne ne le fera.
Contrairement à ce qui a été soutenu, les discriminations qui ont été légalement mises en place ne peuvent être assimilées à la déportation qui fut organisée. Ainsi, la reconnaissance apportée par le statut de Nuremberg n’inclut nullement celle de la stigmatisation généralisée orchestrée par l’État.
Par ailleurs, en ne proposant qu’une reconnaissance symbolique au préjudice causé, ce texte de loi manquerait de moitié son objectif. Reconnaître sans réparer, c’est oublier le principe même de responsabilité civile ouvrant droit à réparation pour les préjudices encourus. Il ne s’agit pas non plus d’engager les finances publiques dans des dépenses insoutenables, les dernières condamnations ayant eu lieu il y a plusieurs décennies. Bien que l’ampleur du préjudice soit difficile à définir précisément, le nombre de victimes à dédommager est vraisemblablement résiduel, comme le souligne le rapport sénatorial. Inversement, reconnaître et réparer les fautes qui entachent l’histoire de la Nation, est le seul moyen pour l’État d’être à la hauteur de ses erreurs, et pour les victimes d’obtenir la pleine reconnaissance qu’elles méritent.