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commission des lois

Projet de loi

Mariage aux couples de personnes de même sexe

(1ère lecture)

(n° 349 )

N° COM-16

18 mars 2013


 

AMENDEMENT

présenté par

Retiré

Mmes CUKIERMAN et ASSASSI, M. FAVIER, Mme BEAUFILS, MM. BILLOUT et BOCQUET, Mmes COHEN, DAVID et DEMESSINE, MM. FISCHER et FOUCAUD, Mme GONTHIER-MAURIN, MM. Pierre LAURENT, LE CAM et LE SCOUARNEC, Mmes PASQUET et SCHURCH et MM. VERGÈS et WATRIN


ARTICLE ADDITIONNEL AVANT ARTICLE 1ER


I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

A. – L’article L. 2141-2 est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Elle a également pour objet de répondre à la demande parentale d’un couple de femmes. » ;

2° Le dernier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début de la première phrase, les mots : « L’homme et la femme formant le » sont remplacés par les mots : « Les deux membres du » ;

b) À la dernière phrase, les mots : « l’homme ou la femme » sont remplacés par les mots : « l’un des membres du couple ».

B. – Au 1° de l’article L. 2141-10, les mots : « de l’homme et de la femme formant le » sont remplacés par les mots : « des deux membres du ».

II. – Les actes réalisés en application du présent article ne sont pas pris en charge par les organismes de sécurité sociale.

Objet

Les dispositions de cet article additionnel visent à ouvrir l'accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes.

Les auteurs de cet amendement souscrivent à l'annonce d'un texte futur sur la famille qui traitera notamment de la question de la PMA, mais pensent néanmoins que cette question est étroitement liée au présent texte.

En effet, le texte ouvre aux personnes de même sexe mariées, la voie de l'adoption, que ce soit l'adoption conjointe d'un enfant par les deux époux ou l'adoption de l'enfant du conjoint.

Sur l’adoption conjointe par les deux époux : les auditions ont confirmé qu'il y a peu d'espoir sur ce point pour les couples homosexuels qui désirent devenir parents.

Concernant l’adoption de l’enfant du conjoint : pour les couples de femmes particulièrement, le point positif et non négligeable, et que les nombreux enfants nés de femmes lesbiennes pourront être adoptés par leurs conjointes. Mais comment l'enfant sera-t-il conçu si, comme annoncé, la PMA reste fermée aux couples de femmes ?

Il est important de traiter de cette question dans le présent texte car à n’en pas douter, les femmes continueront à recourir aux méthodes actuelles pour concevoir l’enfant, et ensuite le faire adopter par leur conjointe.  En effet, elles continueront à:

 

-          s’exiler pour recourir à une PMA dans le meilleur des cas pour elles.

-          avoir recours à l’aide d’un homme de leur entourage qui accepterait en connaissance de cause de concevoir l’enfant mais de ne pas le reconnaitre. Cette solution n’est pas dans l’intérêt de l’enfant que l’on veut justement préservé, puisqu’il y aura dans son entourage un homme qui pourra à tout moment demander un test de paternité (qui est de droit en en cas d’action en reconnaissance de paternité) pour établir un lien de filiation avec l’enfant.

-          avoir recours à un homme « de passage » qui concevra cet enfant sans jamais le savoir. Outre les problématiques liées aux MST pour la mère, l’enfant sera dans ce cas privé volontairement de son père qui, contrairement au donneur de gamète, ignorera avoir été privé de la possibilité de reconnaitre cet enfant, ce qui n’est pas là aussi dans son intérêt.

Eu égard à ces éléments, l'adoption de l'enfant du conjoint apparait donc comme une demi-mesure, car liée à une PMA en ce qui concerne les couples de femmes. Elle sera une incitation plus forte en faveur du « tourisme procréatif ».

C'est notamment vers la Belgique, l'Espagne, les Pays-Bas  ou encore le Royaume-Uni que les femmes se dirigent aujourd’hui pour pouvoir bénéficier de la PMA. Selon le service des études juridiques du Sénat, la comparaison opérée « montre que la France fait partie des pays qui limitent le plus strictement l'accès à l'assistance médicale à la procréation ». Cependant, il n’est pas question pour les auteurs de cet amendement d’autoriser un système pour la seule raison qu’il existe dans d’autres pays, sans cela nous trouverions là une raison de légaliser la gestation pour autrui. Le débat en séance devra nous permettre de relever le pour et le contre du recours à la PMA pour les couples de femmes, tout en tenant compte de l’intérêt de l’enfant.

L’objection essentielle qui se fait entendre contre l’ouverture de la PMA aux couples de femmes a trait à l'inégalité que cela génèrerait à l'égard des couples d'hommes, inégalité qui ne serait pas compatible avec notre Constitution. Nous serions ainsi tenus selon cet argument (soulevé aussi par les associations qui militent en faveur de l’autorisation de la GPA) de légaliser les conventions de gestation pour autrui au profit des couples d’hommes. Néanmoins, il faut rappeler qu’une inégalité n’existe qu’à la condition que deux personnes se trouvent dans la même situation. Or, la différence entre les hommes et les femmes dans leurs fonctions reproductrices devrait suffire à convaincre qu’ils ne le sont pas. De même, les deux procédés (GPA et PMA) ne sont pas équivalents, donc la libéralisation de l'un seulement ne serait pas source d’inégalité.

Cet amendement permettra aussi d'ouvrir le débat en séance sur le problème de l'accès aux origines pour l'enfant issu de procréation médicalement assistée avec tiers donneur, notre système d'assistance à la procréation étant actuellement fondé sur l'anonymat des dons de gamètes et les revendications d'enfants nés de PMA commencent à apparaître. Si la règle de l’anonymat soulève des difficultés et interrogations pour la généralisation de la PMA, il faut noter qu’elles se posent déjà aujourd’hui pour les enfants nés de PMA au sein de couples stériles et qu’elles devront certainement être tranchées un jour.

Se posera aussi la problématique liée au remboursement de la PMA par la sécurité sociale. L’inscription du non remboursement par les organismes de la sécurité sociale des actes réalisés en application du présent amendement est ainsi rédigée pour satisfaire les conditions de recevabilité financière visées à l’article 40 de la constitution. Mais cet amendement entend lancer le débat sur l’ouverture à l’assistance médicale à la procréation pour les couples de femmes, afin qu’il soit à terme remboursé par les organismes de la sécurité sociale dans les mêmes conditions que pour les autres couples déjà concernés par ce dispositif.