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commission des affaires économiques

Projet de loi

Consommation

(1ère lecture)

(n° 725 )

N° COM-237

23 juillet 2013


 

AMENDEMENT

présenté par

Retiré

MM. Martial BOURQUIN et FAUCONNIER, rapporteurs


ARTICLE 72 TER (NOUVEAU)


Supprimer le II de cet article.

Objet

Si l'on ne peut qu'accueillir favorablement  le I de cet article, qui renforce et élargit l’obligation d’information des opérateurs à l’égard des utilisateurs de services de communications électroniques, tel n’est pas le cas pour son II.

Celui-ci se propose en effet de modifier en profondeur le processus décisionnel pour ce qui touche aux communications électroniques dans un sens préjudiciable aux consommateurs.

D’une part, la rédaction proposée pour le 12° de l’article L. 32-1 du code des postes et communications électroniques abaisse le standard de protection des consommateurs pris en compte par les pouvoirs publics. Alors que dans la version actuelle, le ministre en charge des communications électroniques doit veiller « à un niveau élevé de protection des consommateurs, grâce notamment à la fourniture d'informations claires, notamment par la transparence des tarifs et des conditions d'utilisation des services de communications électroniques accessibles au public », le texte adopté par les députés prévoit la seule prise en compte de « l’intérêt des consommateurs ». Le niveau de protection des consommateurs n’est donc plus précisé, et la référence à la fourniture d’informations claires, et notamment sur les tarifs et les conditions d’utilisation, disparaissant.

En outre, cette prise en compte doit se faire « conjointement avec le ministre chargé de la consommation ». Le processus est ainsi compliqué par l’intervention d’une troisième partie prenante : le ministre en charge de la consommation. Deux ministres, et par voie de conséquence, l’ARCEP d’une part et la DGCCRF d’autre part, devront prendre conjointement les mesures nécessaires à la régulation du secteur.

Si l’implication du ministre en charge de la consommation semble a priori une bonne chose, il convient de relever les risques de conflits possibles entre les diverses administrations impliquées. Et ce alors que les rôles respectifs de l’ARCEP, autorité administrative indépendante, et de la DGCCRF, administration ministérielle, ne peuvent se comparer.

Enfin, le fait de confier de nouvelles missions à la DGCCRF, dont les moyens sont en baisse constante – avec une perte notamment de 15 % des contrôleurs de la répression des fraudes depuis 2007 – est discutable du point de vue de l'effectivité de la mesure.

D’autre part, la rédaction proposée pour le n) de l’article L. 33-1 du même code constitue également un recul pour la protection des consommateurs.

En premier lieu, il n’est plus fait référence à la soumission, par les opérateurs, à une obligation générale d’information des consommateurs, notamment sur les conditions contractuelles de fourniture du service, et à la protection des utilisateurs.

Au-delà, la suppression de cette référence retire à l’ARCEP ses moyens d’intervention au titre de l’information extracontractuelle des consommateurs, portant sur les aspects techniques des offres d’abonnement proposées par les opérateurs (technologie utilisée, débits assurés …).

Or, le droit communautaire, et plus particulièrement l’article 21 de la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 exigent des Etats membres qu’ils « veillent à ce que les autorités réglementaires nationales soient en mesure d’exiger des entreprises fournissant des réseaux publics de communications électroniques et/ou des services de communications électroniques accessibles au public la publication d’informations transparentes, comparables, adéquates et actualisées concernant les prix et les tarifs pratiqués, les frais dus au moment de la résiliation du contrat ainsi que les conditions générales en ce qui concerne l’accès aux services fournis par lesdites entreprises aux utilisateurs finals et aux consommateurs et l’utilisation de ces services ». La première phrase du n) de cet article constituait une application de cette disposition de la directive ; l’enlever rendrait sa transposition moins effective.

De plus, cette référence constituait une base légale asseyant l’intervention future de l’Autorité pour mesurer et surveiller la qualité de service des opérateurs opérant en France. Sa décision du 29 janvier 2013 à ce propos a été homologuée par le ministre chargé des communications électroniques et validée a posteriori par le Conseil d’Etat[1] à l’occasion d’un contentieux l’opposant à deux opérateurs américains et leurs filiales françaises. Elle doit lui permettre de collecter des informations en matière d'acheminement du trafic internet auprès des acteurs opérant sur le territoire français, afin de vérifier le respect par ces derniers du principe de neutralité de l’Internet, conformément aux compétences qui lui ont été reconnues par le « troisième paquet télécom ». Or, une telle suppression fragiliserait l’assise de l’intervention de l’ARCEP à ce titre, et ce alors qu’elle a prévu d’engager la réalisation des mesures en vue d'une première publication en décembre de cette année.

Aussi, pour toutes ces raisons, le présent amendement propose de supprimer le II de cet article.

[1] CE, 10 juillet 2013, société AT&T Global Network Services France SAS et autres.