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commission des affaires économiques

Projet de loi

Consommation

(1ère lecture)

(n° 725 )

N° COM-73

22 juillet 2013


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

MM. FAUCONNIER et Martial BOURQUIN, rapporteurs


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 17 TER (NOUVEAU)


Après l'article 17 ter, insérer un article ainsi rédigé :

I. Le titre VI du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L'article L. 4362-9 est ainsi rédigé :

"Art. L. 4362-9. - La délivrance de verres correcteurs d'amétropie et de lentilles de contact oculaire correctrices est réservée aux personnes autorisées à exercer la profession d'opticien-lunetier dans les conditions du présent chapitre.

Le colportage des verres correcteurs ou de lentilles de contact oculaire correctrices est interdit.

2° L'article L. 4362-10 est ainsi modifié :

a) Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

"La délivrance de verres correcteurs est subordonnée à l'existence d'une prescription médicale en cours de validité."

b) Au premier alinéa, les mots : "trois ans" sont remplacés par les mots "cinq ans" ;

c) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

"La délivrance de verres correcteurs multifocaux ou de verres correcteurs de puissance significative est soumise à une prise de mesure."

3° L'article L. 4362-11 est ainsi rédigé :

"Art. L. 4362-11 - Sont déterminées par décret, par dérogation aux dispositions de l'article L. 5211-5 :

"1° Les règles d'exercice et, en tant que de besoin, d'équipement ;

"2° Les conditions de validité de la prescription médicale mentionnée au premier alinéa de l'article L. 4362-10 ;

"3° Les conditions dans lesquelles est réalisée la prise de mesure mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 4362-10."

4° L'article L. 4363-4 est ainsi rédigé :

"Art. L. 4363-4. - Est puni de 3 750 € d'amende le fait :

1° De colporter des verres correcteurs ou des lentilles de contact oculaire correctrices ;

2° De délivrer des verres correcteurs en méconnaissance de l'article L. 4362-10."

II. Le titre Ier du livre II de la cinquième partie du même code est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

"Chapitre V

"Verres correcteurs et lentilles de contact oculaire correctrices

"Art. L. 5215-1. - Lorsqu'il recourt à une technique de communication à distance pour conclure le contrat, le vendeur de verres correcteurs ou de lentilles de contact oculaire correctrices met à disposition du patient un opticien-lunetier.

"Les modalités de cette mise à disposition, les modalités de vérification de la prescription médicale prévue à l'article L. 4362-10 et les mentions et informations précontractuelles données au patient sont fixées par décret."

III. Après l'article L. 5461-6, il est inséré un article L. 5461-6-1 ainsi rédigé :

"Art. L. 5461-6-1. - Le fait de commercialiser à distance des verres correcteurs ou des lentilles de contact oculaire correctrices en méconnaissance des règles prévues à l'article L. 5215-1 est puni de 10 000 euros d'amende."

IV. Le premier alinéa de l'article L. 4362-10 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la présente loi, entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le premier jour du dix-huitième mois à compter de la publication de la même loi. Jusqu'à cette date, le troisième alinéa de l'article L. 4362-9 du même code, dans sa rédaction antérieure à ladite loi, demeure en vigueur.

V. Le troisième alinéa de l'article L. 4362-10 du même code, dans sa rédaction résultant de la présente loi, entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le premier jour du vingt-quatrième mois à compter de la publication de la même loi.  

Objet

Cet amendement reprend l'esprit du dispositif relatif aux opticiens-lunetiers qui figurait dans le projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs tel qu’adopté en décembre 2011 par le Sénat suite notamment aux amendements introduits par notre collègue Gérard Cornu.

Le dispositif équilibré adopté à l’initiative de notre collègue Cornu prenait en compte les trois enjeux suivants :

–        Le respect du droit communautaire : la profession d’opticien-lunetier est concernée par plusieurs décisions prises au niveau européen. Le Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a rendu un arrêt le 21 avril 2005 interdisant la condition de détention d’un diplôme d’opticien-lunetier pour gérer et diriger une structure commerciale d’optique lunetterie. En septembre 2008, la Commission européenne a envoyé un avis motivé à la France l’invitant à modifier sa réglementation nationale relative à la vente de produits d’optique-lunetterie, considérant notamment que l’interdiction de la vente à distance de produits d’optique-lunetterie entravait la liberté d’établissement et la libre circulation des services. Enfin, le 2 décembre 2010, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt interdisant aux États membres d’interdire la commercialisation des lentilles de contact par Internet.

–        La protection de la santé publique : les produits d’optique-lunetterie, et notamment les lentilles de contact, ne sont pas des produits comme les autres ;

–        La démographie médicale : la profession d’ophtalmologiste est révélatrice de l’existence de « déserts médicaux », c’est-à-dire des grandes difficultés à avoir accès, dans certaines parties du territoire national, à un spécialiste. D’après un sondage réalisé en octobre 2011, l’ophtalmologue est le spécialiste pour lequel les délais d’attente pour obtenir un rendez-vous sont les plus importants : 103 jours, contre 4 jours pour un généraliste ou 28 jours pour un rhumatologue ou un psychiatre.

Le présent amendement reprend les principaux aspects du dispositif adopté en 2011 :

–        Il supprime la condition de détention d’un diplôme d’opticien-lunetier pour le directeur ou le gérant d’un établissement d’optique-lunetterie ;

–        il consacre la réserve d’activité, autrement dit le monopole de délivrance, des opticiens lunetiers ;

–        il autorise, tout en l’encadrant, la vente à distance de verres correcteurs et de lentilles correctrices : il impose notamment aux prestataires de vente à distances de verres correcteurs la présence d’un opticien-lunetier ;

–        il impose désormais, pour la délivrance de verres correcteurs, l’existence d’une ordonnance en cours de validité ;

–        il prévoit que la délivrance de verres correcteurs multifocaux ou de verres correcteurs de puissance significative est soumise à une prise de mesure réalisée dans des conditions définies par décret ;

–        il relève de trois à cinq ans la durée pendant laquelle les opticiens-lunetiers peuvent adapter une prescription de verres correcteurs.

Quelques ajustements rédactionnels sont effectués par rapport au dispositif adopté par le Sénat en 2011. Par ailleurs, une modification de fond est introduite : l'obligation de prescription médicale est limitée aux verres correcteurs. L'obligation d'une prescription médicale pour les lentilles correctrices se traduirait en effet par une contrainte nouvelle et donc une dépense supplémentaire pour les patients.

Cet amendement trouve pleinement sa place dans le présent projet de loi en permettant de renforcer la concurrence dans le secteur de l’optique-lunetterie. Dans une étude publiée en avril 2013, l’association « UFC-Que Choisir ? » mettait en effet en cause les « marges exorbitantes des opticiens ».