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commission de la culture

Projet de loi

Liberté de création, architecture et patrimoine

(1ère lecture)

(n° 15 , 0 )

N° COM-122

20 janvier 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Retiré

M. KERN


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 10 TER (NOUVEAU)


Après l'article l'article 10 ter (nouveau)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

 

I. Modifier comme suit le code de la propriété intellectuelle :

A. Le premier alinéa de l’article L. 122-8 du code la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1- A la première phrase, le mot « inaliénable » est supprimé.

2- A la fin de l'alinéa est insérée la phrase suivante :

« Il ne peut pas être cédé entre vifs. Sous réserve des droits des héritiers réservataires, il peut être transmis par legs. A défaut de legs, et en l’absence d’héritiers réservataires, il revient au titulaire du droit moral ou du droit d’exploitation de l’œuvre, à la date de la vente à laquelle il se rattache. »

B. L’article L. 123-7 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :

«  Après le décès de l’auteur, l’usufruit prévu à l’article L. 123-6 subsiste au profit de son conjoint, à l’exclusion de tous légataires et ayants cause, pendant l’année civile en cours et les soixante-dix années suivantes. »

II. Ces nouvelles dispositions sont immédiatement applicables aux ventes à venir. 

Objet

Le droit de suite permet aux auteurs d’œuvres d’arts graphiques et plastiques de percevoir, à chaque revente d’une de leurs œuvres, une fraction du prix. Alors que les manuscrits originaux sont édités en exemplaires innombrables, les œuvres d’art, elles, ne s’incarnent que dans un original unique ou des originaux en nombre très limité. C’est pour compenser la faiblesse du droit de reproduction en ce domaine qu’a été créé le droit de suite.

La plupart des Etats ont naturellement laissé ouverte la possibilité, pour l’auteur, de léguer son droit de suite à la personne de son choix. Les lois européennes et américaines (allemande, anglaise, espagnole, danoise, hongroise, irlandaise...) s’assurent ainsi que l’auteur ne puisse, de son vivant, céder ce droit ou y renoncer, mais ne lui imposent aucune restriction dans la disposition pour cause de décès.

Seul le droit français en restreint le bénéfice à ses seuls héritiers légaux, à l’exclusion des légataires. Il peut donc échoir à des personnes n’ayant que des liens très indirects avec l’auteur défunt, sans aucun lien de sang ni connaissance personnelle. En revanche, les héritiers que l’auteur s’est choisis par testament, telle une fondation à qui est confiée la responsabilité de l’œuvre et de son rayonnement, en sont privés.

Cette privation du droit de suite pénalise les fondations d’artiste et les autres institutions créées par testament qui, dédiées à la diffusion et à la préservation de l’œuvre, servent un intérêt général. Elle affaiblit donc spécifiquement les fondations françaises reconnues d’utilité publique qui, sans être administrées par la famille de l’artiste, ont la charge de favoriser le rayonnement des artistes de la scène française, tels que Dubuffet, Hartung ou Giacometti.

La capacité pour un artiste de léguer son droit de suite ne bénéficierait pas seulement aux fondations privées mais peut également largement favoriser l’enrichissement des collections nationales et des musées. Il s’agirait donc d’une avancée majeure pour le financement de l’ensemble de la sphère muséale française, aujourd’hui pénalisée par rapport à nos voisins européens sur ce plan.

Tel est l’objet de cet amendement.