Logo : Sénat français

commission des lois

Projet de loi

Lutte contre le crime organisé et le terrorisme

(1ère lecture)

(n° 445 )

N° COM-124

21 mars 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. Michel MERCIER, rapporteur


ARTICLE 31 TER


Supprimer cet article.

Objet

Cet amendement supprime l'instauration d'une sur-amende pénale, douanière, également applicable aux sanctions financières des autorités administratives et indépendantes, dispositif par deux fois censuré par le Conseil constitutionnel.

Ce dispositif complexe soulève d'importantes difficultés constitutionnelles, au regard du principe d'individualisation des peines, de nécessité de la peine mais également au regard du principe d'égalité devant la loi.

Selon ce dispositif, la majoration des amendes devra nécessairement être prononcée par la juridiction, dans la limite de 10 % du montant, en fonction de l'infraction, de la personnalité de son auteur ainsi que de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné. Néanmoins, la peine principale devant être prononcée au regard des mêmes critères, il semble particulier de prévoir que la même juridiction prononce une autre peine qui s'ajouterait à celle qu'elle a jugé nécessaire et proportionnée. A cet égard, ce dispositif semble inefficace et il est fort probable que les juridictions ne modifieront pas la hauteur des peines d'amendes qu'elles prononceraient. 

De plus, alors que le taux de recouvrement des amendes est particulièrement faible en France, ce dispositif risque de compléxifier et de nuire à la lisibilité de la peine prononcée, et donc à son efficacité. Actuellement, aux amendes prononcées, s'ajoute un droit de procédure, taxe variable versée au Trésor public. A cela s'ajoutent les dispositions relatives à la diminution des amendes du fait du paiement volontaire prévues aux articles 707-2 et 707-3 du code de procédure pénale. 

Les magistrats entendus par votre rapporteur s'étonnent de l'introduction d'un tel dispositif, source de complexité supplémentaire, en l'absence de consultation des principaux acteurs de la chaîne pénale. 

Par ailleurs, ce dispositif est contraire au principe constitutionnel d'universalité budgétaire. Sous cette réserve, il ne saurait être procédé à une telle affectation en dehors d'une loi de finances. A défaut, outre son caractère inconstitutionnel et contraire à la loi organique relative aux lois de finances, la disposition selon laquelle cette amende serait affectée à l'aide aux victimes est dénuée de toute portée normative.

Enfin, s'il se comprend d'un point de vue budgétaire, l'instauration d'une majoration des sanctions prononcées par les AAI semble contraire au principe d'égalité devant la loi et la charge publique, en ce qu'elle ferait peser une différence de traitement sur certaines personnes morales sanctionnées par les AAI. Or cette différence de traitement, qui peut être justifiée par l'intérêt général, n'est pas en rapport direct avec l'objet visé : en effet, il semble original de faire financer l'aide aux victimes pénales par des entreprises ayant, par exemple, manqué à leurs obligations de déploiement d'équipement technique.

Comme le suggérait le rapport d'information MM. Christophe Béchu et Philippe Kaltenbach, « Pour une meilleure indemnisation des victimes d’infractions pénales », il semble préférable, afin de sécuriser les ressources des associations d'aide aux victimes, d'affecter à un fonds spécialement créé une fraction des amendes pénales collectées (proposition n° 28). Cette modification permettrait effectivement de sanctuariser les ressources affectées à l'aide aux victimes.