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commission des lois

Projet de loi

Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique

(1ère lecture)

(n° 691 , 0, 0)

N° COM-76

20 juin 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Satisfait ou sans objet

Mme Nathalie GOULET


ARTICLE 6 A


Rédiger ainsi cet article :

« Lanceur d’alerte » désigne toute personne qui signale ou révèle, de bonne foi, une information relative à un crime, un délit, un manquement au droit en vigueur, une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général.

Le lanceur d’alerte exerce son droit d’alerte de façon désintéressée.

Objet

La définition adoptée par l’Assemblée Nationale ne protège que deux signalements et sous réserve de quatre conditions (ou tests) préalables : il agit dans l’intérêt général et de bonne foi, sans espoir d’avantage propre ni volonté de nuire à autrui. Les deux signalements protégés (violations de la loi et risques santé, sécurité publiques et environnement) l’étaient déjà par les sept lois sectorielles précédentes - mais sous seule condition de « bonne foi ». Il s’agit donc d’une définition restrictive, n’offrant aucunement une protection pour tous les lanceurs d’alerte dans tout domaine d’activité, amputant les droits précédemment accordés, et déportant lourdement l’attention du fond de l’alerte sur les motivations du lanceur d’alerte. Elle exclut notamment Antoine Deltour.

Conformément aux définitions du Conseil de l’Europe (Recommandation du Comité des ministres aux Etats membres du 30 avril 2014) et de l’ONU (Note A/70/361 du 18 septembre 2015) , ou à l’avis de la CNCDH (26 mai 2016), les signalements ou révélations doivent s’étendre, outre les violations au droit national ou international, aux « actions ou omissions constituant une menace ou un préjudice pour l’intérêt général ». En France la définition de l’intérêt général a donné lieu à un rapport du Conseil d’Etat en 1999. Précédemment à cette définition conceptuelle du Conseil de l’Europe, ouverte, qui permet la protection de lanceurs d’alerte tels Antoine Deltour, les lois étrangères, énumératives, listaient 5 à 19 signalements protégés.

Si la bonne foi, critère objectif, attestant de la véracité du signalement effectué lors de son énoncé, est nécessaire, et si l’affirmation du caractère désintéressé du lanceur d’alerte (conforme à la CEDH) le différencie clairement de l’indicateur de police, de l’informateur ou bien évidemment du repenti (qui participe aux délits), ces deux critères sont suffisants.

Cette définition introduit par ailleurs, en substituant aux verbes « signale » (signalement interne et régulateur) et « révèle »(divulgation publique) du Conseil de l’Europe, les verbes « révèle » et « témoigne», une double confusion entre le « fuiteur » et le lanceur d’alerte, et entre le « témoin » (statut du témoin) et le lanceur d’alerte. Le but du lanceur d’alerte - soit mettre fin aux dysfonctionnements signalés-, est de nature différente de l’un et de l’autre, même si le lanceur d’alerte peut être occasionnellement (subsidiairement) l’un ou l’autre.

L’adjectif « grave », qualifiant dans la définition adoptée, la violation de la loi et du règlement, induit quant à lui une hiérarchie entre des violations graves ou vénielles de la loi, inéquitable, qui peut s’avérer préjudiciable à l’édifice de notre droit.

Enfin le troisième alinéa du 6 A, superfétatoire (voir 6 B alinéa 1), doit être supprimé, sachant que sa rédaction présente exclut par ailleurs les exceptions à ces trois secrets déjà prévues par la loi.