Logo : Sénat français

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi « Egalité et citoyenneté »

Projet de loi

Égalité et citoyenneté

(1ère lecture)

(n° 773 )

N° COM-352

8 septembre 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

Mme GATEL, rapporteur


ARTICLE 44 (NOUVEAU)


Supprimer cet article.

Objet

L'article 44 vise à élargir la lutte contre les préjugés sexistes à la télévision et à la radio « aux préjugés menant aux discriminations prévues par l’article 225-1 du code pénal ». Il étend également le champ des indicateurs qualitatifs et quantitatifs sur la représentation des femmes et des hommes dans leurs programmes que doivent transmettre au CSA les éditeurs de programmes, qui devront désormais concerner « la diversité de la société française ».

Outre le fait que cette évolution est contradictoire avec la logique même de la régulation telle qu’elle est exercée par le CSA, qui repose sur des échanges permanents et des engagements librement consentis de la part des éditeurs de programmes, elle pose un problème de fond et de droit. En effet, le dernier alinéa de l’article 1er de la Constitution prévoit que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ». L’article 20-1 A dans sa rédaction actuelle s’inscrit pleinement dans la philosophie de cet article concernant l’accès des femmes aux responsabilités professionnelles et sociales, par exemple en prévoyant la diffusion de programmes contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes. Or l’objectif de promotion de la diversité ne constitue pas un objectif de valeur constitutionnelle et il apparaît difficile, dans ces conditions, d’en faire une obligation légale sur la base de concepts aussi flous que « les préjugés liés à la diversité de la société française ».

Si la régulation telle qu’elle est aujourd’hui conduite par le CSA sur une base volontaire constitue un outil indispensable pour faire évoluer le regard de la société sur elle-même, on ne peut qu’être dubitatif sur l’intérêt d’inscrire dans la loi le fait qu’il y aurait des préjugés (sous-entendus négatifs) à l’égard de la diversité. D’autres raisons expliquent, en effet, les difficultés rencontrées dans l’émergence de nouveaux talents issus de la diversité qui tiennent, par exemple, à la démographie et au fait que de nombreux professionnels des médias exercent leur fonction pendant très longtemps au détriment des plus jeunes, issus ou non de la diversité.

Concernant plus particulièrement les indicateurs quantitatifs et qualitatifs qui devraient intégrer les questions de diversité, les responsables des chaînes privées ont attiré l’attention de votre rapporteur sur la difficulté qu’ils ne manqueraient pas de rencontrer pour « déterminer, au cas par cas, l’appartenance ethnique des personnes présentes à l’antenne et à détenir des fichiers statistiques avec ces informations ». On ne peut qu’être sensible à leur préoccupation et à leur demande lorsqu’ils déclarent qu’« étant donné le caractère très sensible de ces données, il nous semble que cette mission devrait davantage relever de la compétence des pouvoirs publics et du Conseil supérieur de l’audiovisuel ».

Pour autant, le simple fait de vouloir mesurer un indice de diversité et de le comparer à un objectif pose la question de la légitimité de cette démarche au regard des principes fondamentaux de notre droit constitutionnel si cet objectif devait devenir contraignant. Autant les recommandations du CSA en faveur de davantage de diversité sont utiles et légitimes, autant il apparaît délicat que le CSA sanctionne un éditeur de programmes au motif que celui-ci ne respecterait pas un quota de diversité défini par le régulateur.

Pour ces raisons, votre rapporteur vous recommande de supprimer cet article.