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commission des lois

Projet de loi

Justice XXIème siècle

(Nouvelle lecture)

(n° 796 )

N° COM-94

19 septembre 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. DÉTRAIGNE, rapporteur


ARTICLE 18 SEXIES


Supprimer cet article.

Objet

Le présent amendement tend à maintenir l’homologation par le juge de certaines décisions des commissions de surendettement, que l’article 18 sexies veut supprimer.

En effet, s’il s’agit d’une mesure d’allègement de la charge des juridictions, cette modification significative de la procédure de surendettement soulève toutefois de lourdes interrogations.

En premier lieu, les droits des créanciers, qui découlent du droit de propriété, bénéficient d’une protection constitutionnelle, expressément reconnue par le Conseil constitutionnel. L’intervention du juge pour homologation permet de veiller à la protection du droit de propriété des créanciers et à la proportionnalité des décisions prises par les commissions de surendettement.

Selon le Gouvernement, les 90 000 décisions concernées par an atteindraient un taux d’homologation de 98 %.

Le taux d’homologation n’atteint pas aujourd’hui 100 %, de sorte que des centaines de décisions ne sont pas approuvées par le juge : demain ces décisions seront exécutées, alors qu’elles peuvent porter une atteinte excessive aux droits des créanciers. De plus, l’obligation d’homologation par le juge exerce un effet préventif sur les commissions de surendettement, qui sont incitées à veiller à la proportionnalité de leurs décisions entre l’objectif de rétablissement du débiteur et l’atteinte aux droits des créanciers.

Par ailleurs, cette réforme est à mettre en perspective avec la dernière réforme importante de la procédure de surendettement, issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation et pas encore pleinement en vigueur, s’agissant notamment de la réduction de huit à sept de la durée maximale des plans de surendettement. Une telle réduction constituera déjà, pour les commissions de surendettement, une incitation à effacer davantage de dettes.

Cette réforme est également à mettre en parallèle avec la disposition figurant à l’article 25 bis du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, visant à supprimer la phase amiable de la procédure de surendettement lorsque le débiteur ne possède pas de bien immobilier. Cette disposition additionnelle a été supprimée par votre commission, à l’initiative de notre collègue François Pillet, rapporteur de ce texte, considérant qu’elle ne présentait pas de lien avec le projet de loi et qu’au surplus elle soulevait des difficultés analogues à celles développées ici.

Il n’est pas de bonne méthode législative de disperser dans plusieurs textes les éléments d’une même réforme, dont il est difficile d’apprécier la cohérence d’ensemble, d’autant que ces dispositions, introduites par voie d’amendement, n’ont fait l’objet d’aucune étude d’impact.

Les garanties procédurales qui existent aujourd’hui, en particulier pour les créanciers, lesquels peuvent être contraints à renoncer à tout ou partie de leurs créances, n’avaient pas été remises en cause par le Gouvernement à l’occasion de la loi du 17 mars 2014 précitée il y a deux ans : pourquoi le faire aujourd’hui ?

La possibilité pour les créanciers de contester ultérieurement devant le juge les décisions de la commission de surendettement ne suffit pas à conserver l’équilibre actuel de la procédure, qui se trouverait triplement affectée par la combinaison de la réduction de la durée du plan, la suppression de l’homologation des décisions les plus lourdes pour les créanciers, qui se développeront avec la réduction de la durée du plan, et la suppression de la phase amiable.