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commission des lois

Proposition de loi

Renforcer l'efficacité de la justice pénale

(1ère lecture)

(n° 126 )

N° COM-20

24 janvier 2017


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. PILLET, rapporteur


ARTICLE 11


Rédiger ainsi cet article :

La section 2 du chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi modifiée :

1° Le premier alinéa de l’article 132-42 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;

b) À la deuxième phrase, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;

c) À la dernière phrase, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « dix » ;

2° Au premier alinéa de l’article 132-47, les mots : « peut être » sont remplacés par les mots : « est » ;

3 ° L’article 132-48 est ainsi modifié :

a) A la première phrase du premier alinéa, les mots : « peut, après avis du juge de l’application des peines, ordonner » sont remplacés par les mots : « ordonne, après avis du juge de l’application des peines » ;

b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, faire obstacle à la révocation du sursis antérieurement accordé. »

4 ° Au début de l’article 132-49, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La révocation partielle du sursis ne peut être ordonnée qu’une fois » ;

5 ° L’article 132-50 est ainsi rédigé :

« Art. 132-50. – Si la juridiction ordonne l’exécution de la totalité de l’emprisonnement et si le sursis avec mise à l’épreuve a été accordé après une première condamnation déjà prononcée sous le même bénéfice, la première peine est d’abord exécutée à moins que, par décision spéciale et motivée, la juridiction ne dispense le condamné de tout ou partie de son exécution. ».

 

Objet

Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’article 11 de la proposition de loi, qui vise à réformer le régime du sursis avec mise à l’épreuve, afin de l’aligner partiellement sur le régime applicable au sursis simple.

En premier lieu, l'article 11 tend à ajouter au délai d’épreuve fixé par la juridiction un second délai de cinq ans, au cours duquel le sursis pourrait être révoqué en cas de nouvelle condamnation.

Outre le manque de lisibilité d’un tel dispositif, cette évolution reviendrait à changer la nature du régime du sursis avec mise à l’épreuve. L’objectif de la mise à l’épreuve est de favoriser la réinsertion de la personne condamnée, en la soumettant à un suivi socio-éducatif personnalisé, au terme duquel, si elle a respecté l’ensemble des obligations qui lui étaient imposées, sa dispense de peine devient définitive. L’ajout d’un nouveau délai de révocation, plus long que le délai de mise à l’épreuve, bouleverse cette logique, le sursis étant maintenu alors même que le condamné a satisfait aux exigences de sa mise à l’épreuve et sans qu’il fasse l’objet d’un quelconque suivi.

Le présent amendement propose toutefois d’allonger le délai maximal du délai d’épreuve au cours duquel le sursis avec mise à l’épreuve peut être révoqué, en le passant de trois à cinq ans. Ce même délai serait porté de cinq à sept ans en cas de récidive légale, et de sept à dix après une seconde récidive.

En deuxième lieu, l’article 11 de la proposition de loi rend systématique la révocation du sursis avec mise à l’épreuve par la juridiction en cas de commission d’une nouvelle infraction au cours du délai d’épreuve et supprime l’avis préalable du juge de l’application des peines.

La révocation automatique du sursis est susceptible de porter atteinte au principe à valeur constitutionnelle de l’individualisation des peines. Par ailleurs, l’avis du juge de l'application des peines parait essentiel dans la mesure où il dispose d’une connaissance précise des conditions de mise en œuvre de la mise à l’épreuve et de son déroulement.

En conséquence, le présent amendement introduit la possibilité pour la juridiction de faire obstacle, par une décision spéciale et motivée, à la révocation du sursis, ainsi que l’avis préalable du juge de l’application des peines.  

En troisième lieu, l’article 11 tend à durcir les effets de la révocation automatique du sursis avec mise à l’épreuve. Le présent amendement maintient deux dispositions du code de procédure pénale qu’il visait à supprimer :

- d’une part, la règle en vertu de laquelle, lorsque le bénéfice du sursis n’a été accordé que pour une partie de la peine d’emprisonnement, le condamné est dispensé de l’exécution de l’ensemble de sa peine si la révocation du sursis n’a pas été prononcée. La suppression de cette disposition entrerait en contradiction avec le principe du « non-avenu », en vertu duquel une condamnation « perd son caractère exécutoire » (Cour de cassation, chambre criminelle, 28 avril 2011, n° 10-87.978.) dans tous ses éléments, même lorsqu’elle n’est assortie que partiellement du sursis, et ne peut donc être mise à exécution. La suppression de l’application du caractère non-avenu à tous les éléments de la condamnation, qui pourrait conduire à ce qu’un condamné se retrouve à exécuter une peine d’emprisonnement alors même que sa condamnation est réputée non avenue, parait contraire à l’objectif de réinsertion du sursis avec mise à l’épreuve;

- d’autre part, la règle en vertu de laquelle, lorsqu’une condamnation avec sursis avec mise à l’épreuve a été prononcée alors que le condamné fait déjà l’objet d’un sursis avec mise à l’épreuve, la déclaration "non-avenue" de cette condamnation entraine la déclaration "non-avenue" de la précédente. Cette règle est le corollaire de la possibilité pour une juridiction de révoquer plusieurs sursis qui auraient été accordés à une même personne, prévue à l’article 132-50 du code pénal.