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commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Projet de loi

Évaluation environnementale

(1ère lecture)

(n° 666 )

N° COM-2

3 octobre 2017


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

MM. BONNECARRÈRE, CABANEL et RAISON


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 2 (NOUVEAU)


Après l'article 2 (nouveau)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À titre expérimental, la Commission nationale du débat public peut, sur les projets dont elle est saisie dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, nommer un garant, dans les conditions fixées par l’article L. 121-1-1 du code de l’environnement, chargé de veiller au bon déroulement de l’ensemble des procédures de participation du public prévues au titre II du livre Ier du même code et au chapitre Ier du livre Ier du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

 

Seuls les projets pour lesquels les maîtres d’ouvrage se portent candidats à cette expérimentation auprès de la Commission nationale du débat public peuvent être retenus.

 

Les projets retenus sont soumis au présent article pour une durée maximale de quinze ans à compter de leur sélection par Commission nationale du débat public.

 

Si elle constate des difficultés dans la mise en œuvre de l’expérimentation pour un ou plusieurs projets, la Commission nationale du débat public peut décider d’y mettre fin, sur proposition du garant et avec l’accord du maître d’ouvrage. Cette décision n’a pas d’effet sur les procédures de participation du public réalisées dans le cadre de l’expérimentation.

 

Au cours de l’expérimentation, le garant s’assure de la bonne articulation entre les différentes procédures de participation du public. Il veille à la lisibilité des objectifs de ces procédures pour les citoyens.

 

Par dérogation à la section 1 du chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement et du chapitre Ier du livre Ier du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le garant veille au bon déroulement des enquête publiques, en lieu et place de la commission d’enquête ou du commissaire enquêteur.

 

Les rapports du garant sont rendus publics. Ils peuvent faire état de recommandations sur le déroulement des différentes procédures de participation du public et leur enchaînement ; ils n’ont pas vocation à prendre position pour la poursuite ou pour la cessation du projet, par dérogation aux articles L. 123-5 et L. 123-6 du code de l’environnement.

 

Chaque garant informe la Commission nationale du débat public du déroulement de l’expérimentation dont il a la charge ainsi que les maîtres d’ouvrage et les collectivités territoriales concernés par le projet.

 

L'expérimentation fait l'objet d'un bilan intermédiaire dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, puis d'un second bilan définitif à la fin de l’ensemble des procédures de participation du public des projets retenus. Chacun de ces bilans prend la forme d'un rapport du Gouvernement, qui le transmet au Parlement, avec, le cas échéant, les observations des maîtres d’ouvrage concernés et de la Commission nationale du débat public.

 

 

 

Objet

Cet amendement vise à créer, à titre expérimental, une procédure continue de consultation du public, couvrant toutes les phases des projets d’infrastructure et placée sous l’égide d’un garant désigné par la Commission nationale du débat public.

 

Il reprend la proposition n° 6 du rapport « Décider en 2017 : le temps d'une démocratie "coopérative" » adopté le 17 mai par la mission d’information sénatoriale.

 

En l’état du droit, pour un même projet, un garant intervient dans la phase amont (débat public et concertations préalables) puis un commissaire enquêteur dans la phase aval (enquête publique), ce qui représente trois difficultés :

 

- le public peine à comprendre cette distinction et confond souvent les procédures;

 

- il peut s’écouler plusieurs mois voire plusieurs années entre la phase amont et la phase aval. On constate donc des « temps faibles » dans la participation du public : le temps passe, le contexte environnemental évolue et la concertation du public est suspendue, ce qui est très préjudiciable au bon déroulement du projet ;

 

- le rapport des commissaires-enquêteurs peut être sujet à caution et instrumentalisé par les personnes en faveur du projet et les opposants, au contraire du travail du garant, lequel veille à la bonne tenue du débat, sans prendre position sur le projet et se borne à émettre des recommandations sur le déroulement de la consultation.

 

Concrètement, cette expérimentation permettrait à la CNDP de désigner un garant dès le début du projet de conception et de réalisation d’une infrastructure. Pour assurer un continuum dans les procédures de participation, le garant suivrait l’ensemble du projet en organisant les phases de consultation amont et aval ; il garantirait leur bon déroulement ainsi que leur bonne articulation et leur lisibilité pour le public. Il pourrait émettre des recommandations sur l’organisation des consultations mais ne prendrait pas position sur le fond du dossier, ce qui permettrait d’éviter toute instrumentalisation de son avis par les personnes favorables ou opposés au projet.

 

L’expérimentation s’inscrirait sur le long terme afin de pouvoir y intégrer des projets de grande ampleur dont la réalisation nécessite plusieurs années de travail.

 

Cet amendement s’inscrit dans la volonté énoncée par le Président de la République lors du congrès de Versailles le 3 juillet dernier d’avoir « une administration plus déconcentrée (…) qui innove et expérimente plus qu’elle ne contraigne ».