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commission des lois

Projet de loi

Immigration, droit d'asile et intégration

(Nouvelle lecture)

(n° 697 )

N° COM-10

30 juillet 2018


 

AMENDEMENT

présenté par

Satisfait ou sans objet

MM. LECONTE, SUEUR et Jacques BIGOT, Mme de la GONTRIE, MM. DURAIN et FICHET, Mme HARRIBEY, MM. KANNER, KERROUCHE, MARIE et ASSOULINE, Mmes BLONDIN et CONWAY-MOURET, MM. DEVINAZ, IACOVELLI et JOMIER, Mmes Gisèle JOURDA, LEPAGE, LIENEMANN, MEUNIER, Sylvie ROBERT, ROSSIGNOL et TAILLÉ-POLIAN, M. TEMAL

et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 19 TER


Après l’article 19 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre II du titre II du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est ajouté un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre ...

« Entrave à l’exercice du droit d’asile et à l’entrée ou au séjour des étrangers

« Art. L. 622-11. – Toute personne qui aura intentionnellement entravé ou tenté d’entraver l’exercice du droit d’asile, l’entrée, ou le séjour d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 euros.

« Ce délit n’est pas constitué si ces faits sont réalisés, dans le cadre de leurs fonctions, par des agents relevant d’un service de la police nationale ou des douanes, ou d’un service de gendarmerie.

« Art. L. 622-12. – Les personnes physiques coupables de l’un des délits prévus à l’article L. 622-11 encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire. Cette durée peut être doublée en cas de récidive ;

« 2° Le retrait temporaire ou définitif de l’autorisation administrative d’exploiter soit des services occasionnels à la place ou collectifs, soit un service régulier, ou un service de navettes de transports internationaux ;

« 3° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction, notamment tout moyen de transport ou équipement terrestre, fluvial, maritime ou aérien, ou de la chose qui en est le produit. Les frais résultant des mesures nécessaires à l’exécution de la confiscation seront à la charge du condamné. Ils seront recouvrés comme frais de justice.

« Art. L. 622-13. – Les infractions prévues à l’article L. 622-11 sont punies de dix ans d’emprisonnement et de 750 000 euros d’amende :

« 1° Lorsqu’elles sont commises en bande organisée ;

« 2° Lorsqu’elles sont commises dans des circonstances qui exposent directement les étrangers à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;

« 3° Lorsqu’elles ont pour effet de soumettre les étrangers à des conditions de vie ou de transport incompatibles avec la dignité de la personne humaine ;

« 4° Lorsqu’elles sont commises au moyen d’une habilitation ou d’un titre de circulation en zone réservée d’un aérodrome ou d’un port ;

« 5° Lorsqu’elles ont comme effet, pour des mineurs étrangers, de les éloigner de leur milieu familial ou de leur environnement habituel.

« Art. L. 622-14. – Outre les peines complémentaires prévues à l’article L. 622-12, les personnes physiques condamnées au titre des infractions visées à l’article L. 622-13 encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.

« Art. L. 622-15. – Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2 du code pénal, des infractions définies aux articles L. 622-11 et L. 622-13 encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du code pénal, les peines prévues par les 1° à 5° , 8° et 9° de l’article 131-39 du même code.

« L’interdiction visée au 2° de l’article 131-39 du code pénal porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.

« Art. L. 622-16. – En cas de condamnation pour les infractions prévues à l’article L. 622-13, le tribunal pourra prononcer la confiscation de tout ou partie des biens des personnes morales condamnées, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

Objet

Disposition "miroir" de la suppression du délit de solidarité, cet amendement crée un délit d’entrave à l’exercice du droit d’asile et à l’entrée ou au séjour des étrangers.

En l’état du droit actuel, seule "l’aide à l’entrée et au séjour irrégulier" est pénalisée dans le CESEDA. De plus, en dépit des modifications successives apportées par le législateur, la pénalisation des actions menées par des citoyens à l’égard de personnes migrantes dans la détresse, demeure. C’est d’ailleurs l’objet d’un autre amendement, également porté par les présents auteurs, que de permettre d’enfin supprimer ce qu’on appelle communément le "délit de solidarité".

Or, pendant que des citoyens solidaires sont injustement inquiétés et font l’objet de poursuites (là où seuls les trafiquants et passeurs doivent être sanctionnés avec fermeté pour l’exploitation qu’ils font de l’exil de personnes migrantes), d’autres individus, souvent animés par des idéologies racistes et xénophobes, participent en toute impunité à des actions scandaleuses destinées à entraver l’exercice du droit d’asile, l’entrée, ou le séjour des étrangers.

Il apparaît particulièrement inadmissible que de telles actions, parfois d’une extrême violence psychologique ou physique, puissent perdurer, et que leurs auteurs ne soient pas inquiétés.

Malheureusement, des exemples récents démontrent que les étrangers sont fréquemment victimes de tels actes malveillants. Ainsi, des personnes physiques, ou des groupuscules extrémistes constitués en associations, montent des opérations consistant à empêcher des personnes étrangères d’entrer en France et d’y solliciter l’asile, postant des kilomètres de barrières à la frontière franco-italienne, à renfort d’hélicoptères ; d’autres détériorent intentionnellement à Paris, Calais, ou ailleurs, les tentes et abris provisoires de demandeurs d’asile, leurs dérobant leurs objets et effets personnels, dont leurs documents pourtant utiles au dépôt d’une demande d’asile ; et certains encore leur communiquent de fausses informations, ou les empêchent de se rendre auprès des autorités compétentes en vue de déposer une demande . Sans êtres poursuivis, les uns et les autres, se vantent pourtant de leurs odieux exploits sur les réseaux sociaux.

Ces situations ne pouvant rester davantage impunies, le présent amendement prévoit donc la création d'un délit d’entrave à l’exercice du droit d’asile, l’entrée, ou le séjour d’un étranger en France, puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30.000 Euros. Évidemment, cet amendement prévoit que ce délit ne sera pas constitué si ces faits sont réalisés, dans le cadre de leurs fonctions, par des agents relevant d’un service de la police nationale ou des douanes, ou d’un service de gendarmerie.

Le présent amendement met en place un système de peines complémentaires pour les personnes physiques et morales, et prévoit une série de circonstances aggravantes (lorsque les infractions sont commises en bande organisée, qu’elles exposent l’étranger à un risque immédiat de mort ou blessures d’une extrême gravité, qu’elle concerne des mineurs étrangers, etc...) portant ainsi les peines encourues à dix ans d’emprisonnement et de 750 000 Euros d’amende