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commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Projet de loi

Économie circulaire

(1ère lecture)

(n° 660 )

N° COM-50

12 septembre 2019


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

Mme ESTROSI SASSONE


ARTICLE ADDITIONNEL AVANT ARTICLE 12


Avant l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du Titre VII du code de l’environnement est complété par un article L. 173-13 ainsi rédigé :

Art. L. 173-13. – L’abandon de déchets tel que défini par l’article L. 541-3 du présent code constitue un délit punissable d’une peine d’amende allant jusqu’à 50 000 euros assortie d’une peine de prison de deux ans s’agissant d’une personne physique et d’une peine d’amende allant jusqu’à un million d’euros s’agissant des personnes morales. 

En cas de constat d’un préjudice causé à l’environnement ou à la santé publique, le délit est punissable d’une peine d’amende allant jusqu’à 50 000 euros assortie d’une peine de prison de cinq ans s’agissant d’une personne physique et d’une peine d’amende allant jusqu’à 10 millions d’euros s’agissant des personnes morales.

Objet

Cet amendement tend à créer un délit pour dépôt sauvage.

L’enjeu principal pour notre société plus largement pour notre civilisation est la protection de l’environnement au cours des prochaines décennies. De nombreuses transformations dans la société voient le jour afin de protéger la nature et sensibiliser les citoyens à la préservation de notre patrimoine commun face au dérèglement climatique, à la chute de la biodiversité.

Ces problématiques mises en exergues par des scientifiques et des organisations partout dans le monde rappellent le devoir d’agir et de replacer la nature et la protection de l’environnement au cœur de nos habitudes quotidiennes.

Cette cause relève du civisme mais il est impératif de donner aux pouvoirs publics les moyens de lutter contre toutes les formes d’attaques de l’environnement. La question des dépôts sauvages dans les communes devient alors un sujet préoccupant. En 2018, 80 000 tonnes de déchets sauvages ont été recensées en France.

Bien que difficilement quantifiable, l’association des villes pour la propreté urbaine (AVPU) évalue à 11,8 kilogrammes par habitant la quantité totale de dépôts sauvages en France. Une partie importante de ces déchets sauvages se retrouve in fine transportée dans les mers et les océans : selon l’ONG Surfrider, 80 % des déchets marins ont une origine terrestre avec en mémoires les tristes images de plastification des océans.

Malgré les efforts faits par les communes pour permettre aux particuliers et aux professionnels de se débarrasser de leurs encombrants, on voit en France des espaces où des amas d’ordures sont déposés régulièrement par des citoyens peu scrupuleux et peu respectueux de l’environnement.

Les opérations de nettoyage représentent un coût important pour les collectivités et le droit actuel n’est pas suffisamment répressif pour décourager les comportements incivils.

En effet, la loi prévoit seulement une amende définie par des contraventions de troisième classe, soit un montant maximum de 450 euros.

Alors que les décharges sauvages sont source de pollutions diverses et ce en fonction du lieu et de la nature du dépôt :

– dégradation des sites naturels et des paysages ;

– pollution des cours d’eau et des nappes souterraines (notamment en raison du ruissellement de la pluie sur les déchets) ;

– pollution de l’air (la fermentation des déchets peut produire du méthane, un gaz à fort effet de serre) ;

– augmentation du risque incendie (5 % des causes de départ de feu) ;

Les décharges sauvages sont également génératrices de risques pour la santé humaine car elles dégagent des gaz toxiques et permettent le développement de gènes pathogènes.

Cela sans compter l’introduction d’espèces exotiques envahissantes dans les milieux naturels : les espèces exotiques envahissantes sont reconnues comme la troisième cause de l’érosion de la biodiversité mondiale.

Selon les dernières estimations de la Liste rouge de l’UICN, elles constituent une menace pour près d’un tiers des espèces terrestres menacées et sont impliquées dans la moitié des extinctions connues) :

– contamination du milieu marin et des eaux de surface par le déversement direct des déchets ;

– contribution à la plastification des mers et des océans ;

– prolifération des rongeurs et des insectes : les déchets, avant fermentation, constituent la nourriture principale des rats agents directs ou indirects de propagation de graves maladies (peste, fièvre, etc.). Ils sont aussi des pôles d’attraction pour les mouches et autres insectes, vecteurs passifs de germes et de virus ;

Au regard des enjeux de santé et de salubrité publiques, des impacts sur la nature et le nombre croissant d’infractions, ces peines contraventionnelles paraissent aujourd’hui dérisoires et il convient d’élever ces incivilités au rang de délit.