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commission des lois

Projet de loi

Code de la justice pénale des mineurs

(1ère lecture)

(n° 228 )

N° COM-6

15 janvier 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

Mme Valérie BOYER


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 6 (NOUVEAU)


Après l'article 6 (nouveau)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 311-5 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Un contrat précisant l’ensemble des obligations ou interdictions auxquelles est soumis le mineur est passé entre l’autorité judiciaire et les titulaires de l’autorité parentale.

« En application de ce contrat, les titulaires de l’autorité parentale sont tenus de s’assurer du respect effectif par le mineur poursuivi ou condamné des obligations ou interdictions mises à sa charge par l’autorité judiciaire.

« Le fait de laisser son enfant mineur, lorsque celui-ci a été poursuivi ou condamné pour une infraction, violer les obligations ou interdictions auxquelles il est soumis en vertu du contrat prévu au présent article, est puni de 30 000 euros d’amende.

« En cas de refus manifeste de respecter les obligations imposées en application du contrat passé entre les parents et la justice prévu au présent article, le juge peut demander au directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales la suspension du versement de la part des allocations familiales due au titre de l’enfant en cause, conformément à un nouvel article L. 552-3 du code de la sécurité sociale qui sera rédigé en ce sens. Les modalités de calcul de la part due au titre de l’enfant en cause sont définies par décret en Conseil d’État. »

Objet

Considérant qu'un mineur ne peut être complètement responsable de ses actes, lorsqu'il commet une infraction, nous devons rappeler aux adultes leurs responsabilités éducatives. Cet objectif paraît plus que jamais d'actualité. Le devoir d'éducation doit primer sur le pouvoir de punir. Or, le devoir d'éducation ne relève pas seulement de la Justice et de l'État : il relève d'abord et avant tout des parents.

L'objet de cet amendement est de restaurer l'autorité que les parents ont le devoir d'exercer sur leur enfant. Parce qu'ils en sont l'auteur, parce qu'ils en sont les ascendants, ils en sont aussi les premiers responsables. Exercer l'autorité sur un enfant, ce n'est pas nécessairement le brimer dans l'exercice de ses libertés, c'est lui donner un cadre, lui imposer des limites dans lesquelles il pourra plus tard s'épanouir. Or, dans un contexte socio-économique souvent difficile, beaucoup de parents ont fini par baisser les bras, dans l'éducation qu'ils étaient censés donner à leur enfant. Disqualifiés socialement, ils ne sentent plus le devoir d'intervenir dans la vie sociale de leur enfant. Lorsqu'un dérapage survient, ils se considèrent eux-mêmes comme victimes, et en renvoient la responsabilité à l'École, à la Justice ou à l'État. Il faut donc leur rappeler que l'autorité parentale n'est pas une affaire privée qui s'arrête à la porte du domicile familial. Elle doit s'exercer en tous lieux et en toutes circonstances, pendant toute la durée où l'enfant se construit.

Ce rappel à la responsabilité parentale doit s'effectuer de façon ferme et solennelle. Il semble qu'aujourd'hui, seule l'institution judiciaire soit en mesure d'avoir un impact réel sur des parents souvent démobilisés. L'objectif premier de ce texte n'est toutefois pas de punir les parents, mais de créer chez eux un électrochoc, afin qu'ils se réinvestissent avec fermeté dans l'éducation et la surveillance de leur enfant.

Les causes de l’aggravation de la violence des mineurs tiennent en partie à un affaiblissement de l’autorité et de l’encadrement parental. Les enfants concernés sont parfois victimes d’une perte de repère et d’un désengagement des parents dans leur éducation. Dès 2002, l’OMS reconnaissait que les « habilités parentales déficientes » constituaient l’un des facteurs contribuant à la criminalité. Les parents, titulaires de l’autorité parentale, peuvent être responsables des comportements déviants de leurs enfants, lorsqu’ils ne sont pas en mesure de les prévenir et de les réprimer.

L’autorité parentale se définit comme l’ensemble des droits et devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. À ce titre, les parents sont tenus d’assurer l’entretien, la sécurité et l’éducation de leurs enfants. En cas de défaillances, les parents peuvent être poursuivis au titre de l’article 227-17 du code pénal, dès lors que par leurs agissements, ils mettent la sécurité, la moralité ou la santé de leurs enfants en danger.

Sur le plan pénal, le principe selon lequel « nul n’est responsable pénalement, que de son propre fait » empêche toute sanction directe des parents pour les faits de leurs enfants. Il ne s’agit pas ici de remettre en cause ce principe en instaurant une responsabilité pénale du fait d’autrui mais de replacer l’autorité parentale au cœur de l’éducation des enfants.

Ainsi, il est proposé de diversifier les possibilités d’actions contre les parents qui resteraient passifs face à l’évolution défavorable des mineurs, et qui maximisent par défaut de surveillance les risques de dérive vers la délinquance.

Le présent amendement propose la mise en place d’un contrat comprenant l’ensemble des mesures de contraintes et de suivi sera établi entre la Justice et les parents.

En vertu de ce contrat, les parents seront dans l’obligation de s’assurer que l’enfant mineur respectera l’ensemble des obligations et interdiction auxquelles il est astreint.

Si, dans un second temps, les mesures prévues par le contrat ne sont pas respectées, les parents, architectes de l’éducation de leurs enfants, pourront faire l’objet de poursuites pénales, (30 000 euros d’amende). Cela pourrait également entraîner la suspension des prestations familiales.

Cet amendement est issu des travaux du député (LR) Eric Ciotti