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commission des finances

Proposition de loi organique

Modernisation de la gestion des finances publiques

(1ère lecture)

(n° 780 rect. )

N° COM-5

13 septembre 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

MM. LECONTE, FÉRAUD et KANNER, Mme BRIQUET, MM. COZIC et ÉBLÉ, Mme ESPAGNAC et MM. JEANSANNETAS, Patrice JOLY et LUREL


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 8


Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est ainsi modifiée :

1° La seconde phrase de l’article 16 est complétée par les mots : « ainsi que de l’autonomie financière accordée dans les conditions prévues à l’article 24-1. » ;

2° Après l’article 24, il est inséré un article 24-1 ainsi rédigé :

« Art. 24-1 – Par arrêté conjoint du ministre chargé des finances, du ministre chargé des affaires étrangères et, le cas échéant, du ministre chargé de l’enseignement supérieur, l’autonomie financière peut être accordée à des établissements de diffusion culturelle ou d’enseignement situés à l’étranger, non dotés de la personnalité morale et rattachés au ministère des affaires étrangères.

 « Ces établissements bénéficient de l’affectation des recettes, des droits de participation, des subventions et des autres produits perçus dans le cadre de leurs activités. Ils sont directement portés en recettes au budget général et un crédit supplémentaire de même montant est immédiatement ouvert par arrêté conjoint du ministre chargé des finances, du ministre chargé des affaires étrangères et, le cas échéant, du ministre chargé de l’enseignement supérieur sur le programme concerné.  

« Les crédits non-utilisés par chaque établissement sont reportés sur l’année suivante. 

« Les plafonds de dépenses et de charges prévus au 6° du I de l’article 34 ne sont pas applicables. »

Objet

Pour assurer notre présence à l’étranger dans les domaines linguistiques, culturels ou dans le domaine de la coopération et de la recherche, nos postes diplomatiques s’appuient sur des établissements à autonomie financière (EAF), établis par le décret 76-832 du 24 août 1976 pris en application de l’article 66 de la loi de finances pour 1974. Ces établissements se passent de disposer d’une existence juridique propre dans leur pays d’action et sont rattachés, pour ce qui est de leur existence en droit local, aux services de nos ambassades. Ainsi, ils peuvent disposer de recettes propres, leur permettant d’adapter le volume de leur action à leurs revenus locaux. Les Instituts français à l’étranger, les Instituts français de recherche, sont dans la quasi-totalité des cas des établissements à autonomie financière (EAF). Ainsi, les recettes d’un cours de langue, d’un contrat de recherche, d’une pièce de théâtre ou d’un mécénat permettent de financer directement les dépenses qu’ils engendrent sans que la recette ne revienne au budget général de l’État et sans que la dépense ne soit impérativement programmée par le budget annuel du poste diplomatique.

Mais le statut des EAF n’est pas conforme aux principes d’unité et d’universalité budgétaires posés par l’article 6 de la LOLF, qui imposent l’enregistrement intégral des recettes et dépenses dans le budget général de l’État et interdisent d’affecter des recettes à des dépenses.

Cette situation est donc particulièrement préoccupante pour la présence de la France à l’étranger si elle devait conduire à la suppression des EAF. En effet, celle-ci engendrerait une absence totale de flexibilité de nos dispositifs de présence à l’international. Nos instituts ne pourraient plus rapidement adapter leurs prestations à une nouvelle demande, car la réalisation de celle-ci engendrerait des dépenses qui n’auraient pas été budgétées. Concernant les activités financées par du mécénat, celles-ci seraient probablement réduites à néant, car un EAF peut faire appel à un tel mécanisme pour financer une activité spécifique, par exemple un concert ou une exposition, mais il est plus difficile de convaincre un sponsor d’abonder le budget de l’État afin de programmer l’année suivante l’activité, sous réserve que le Parlement vote le budget nécessaire à la mise en place de l’activité sponsorisée… Bien entendu, des prévisions annuelles d’activité ou de sponsoring pourraient être réalisées, mais nous perdrions toute flexibilité et capacité d’accompagner rapidement l’offre à la demande. Pourtant la croissance de l’activité de nos instituts et leur adaptation aux besoins et capacités locales sont au cœur de leur mission.

 Résoudre le problème de l’attribution de l’autonomie financière à des établissements qui ne disposent pas de la personnalité juridique consiste donc à prévoir par le biais de cet amendement, au sein du chapitre III de la LOLF, relatif aux affectations de recettes, un article spécifique faisant de l’autonomie financière une modalité d’affectation. Ce dispositif prévoit les dérogations aux principes d’unité et d’universalité nécessaires à la mise en conformité du statut actuel des EAF avec la LOLF, à savoir :

- l’octroi de l’autonomie financière est décidé par un arrêté conjoint des ministres chargés du Budget, des Affaires étrangères et, le cas échéant, de l’Enseignement supérieur, ce qui permet à ce dernier d’avoir voix au chapitre en matière d’instituts français de recherche à l’étranger [alinéa 1er du nouvel article 24-1] ;

- l’affectation des recettes perçues par les EAF à leurs bénéfices, sur le modèle de la procédure d’attribution de produits, à la différence que cette affectation est de droit [première phrase de l’alinéa 2];

- leur intégration au budget général sur le modèle des fonds de concours (article 17 II) par le truchement d’une inscription des recettes perçues en crédits supplémentaires au sein du programme concerné [1], avec une double « sécurité » pour les EAF : cette inscription est obligatoirement du même montant que les recettes (1) et l’arrêté d’inscription de crédits est conjoint (2) [deuxième phrase de l’alinéa 2];

- la conservation des crédits non-utilisés en fin d’année, via un report de crédits sur l’année suivante [alinéa 3] ;

- le non-plafonnement des dépenses et des charges des EAF, à la différence des fonds de concours [alinéa 4].

[1] : en l’espèce le programme 185 - Diplomatie culturelle et d’influence