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commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Projet de loi

Production d'énergies renouvelables

(1ère lecture)

(n° 889 )

N° COM-420

24 octobre 2022


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. MANDELLI, rapporteur


ARTICLE 12


Article 12

Rédiger ainsi cet article :

I. – Après l’article L. 141-4 du code de l’énergie, il est inséré un article L. 141-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 141-4-1. – I. – Un décret en Conseil d’État identifie, pour chaque façade maritime, une cartographie des zones maritimes et terrestres propices à l’implantation, sur une période de dix ans suivant sa publication, d’installations de production d’énergies renouvelables en mer à partir du vent et de leurs ouvrages de raccordement au réseau public de transport d’électricité.

« Ces zones sont identifiées afin d’atteindre les objectifs de développement des énergies renouvelables mentionnés dans la programmation pluriannuelle de l’énergie prévue à l’article L. 141-3.  

« Pour l’élaboration de la cartographie prévue au premier alinéa du présent I, sont ciblées en priorité des zones propices situées dans la zone économique exclusive.

« II. – Le décret prévu au I est élaboré en concertation avec les conseils maritimes de façade et les comités régionaux de l’énergie concernés. Avant sa publication, il est transmis pour avis, pour chaque façade maritime :

« 1° À l’Office français de la biodiversité ;

« 2° Au Conservatoire national de la mer et des littoraux ;

« 3° Aux conseils régionaux et départementaux concernés ;

« 4° Aux établissements publics de coopération intercommunale ou aux syndicats mixtes chargés de l'élaboration de schémas de cohérence territoriale côtiers concernés ;

« 5°Aux conférences régionales pour la mer et le littoral concernées, lorsqu’elles existent ;

« 6° Aux comités régionaux de la biodiversité concernés ;

« 7° Aux comités régionaux des pêches maritimes ;

« 8° Au chef d’état-major de la marine nationale ;

« 9° Aux préfets coordonnateurs des façades maritimes.

« Les modalités de la concertation prévue au présent II sont précisées par voie réglementaire. Sa durée ne peut être inférieure à quatre mois. 

« III. – Le décret prévu au I du présent article est soumis à évaluation environnementale en application du 1° du II de l’article L. 122-4 du code de l’environnement et fait l’objet d’une saisine de la Commission nationale du débat public en application du IV de l’article L. 121-8 du même code. » 

II. – Pour chaque façade maritime, la cartographie des zones maritimes et  terrestres propices pour accueillir des installations de production d’énergies renouvelables en mer à partir du vent et leurs ouvrages de raccordement au réseau public de transport d’électricité, identifiées par le décret prévu au I de l’article L. 141-4-1 du code de l’énergie, est annexée au document stratégique de façade.

III. – Les cartographies identifiées par le décret prévu au I de l’article L. 141-4-1 du code de l’énergie sont révisées six ans après la publication dudit décret. 

IV. – Le ministre chargé de l’énergie et le ministre de la mer publient un calendrier prévisionnel des procédures de mise en concurrence prévues à l’article L. 311-10 du code de l’énergie relatives à des projets éoliens en mer dont le lancement est envisagé, sur une période de dix ans suivant la publication du décret prévu au I de l’article L. 141-4 du même code, au sein des zones propices identifiées par le même décret. Le calendrier comporte des dates de mise en service indicatives pour les parcs éoliens et leurs ouvrages de raccordement au réseau public de transport d’électricité.

V. – Le premier alinéa de l’article L. 121-8-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° La troisième phrase est complétée par les mots : « , au sein des zones propices identifiées par le décret prévu à l’article L. 141-3 du code de l’énergie » ;

2° À la dernière phrase, après la référence : « L. 121-9 », sont insérés les mots : « du présent code ».

VI. –  Pour les procédures de mise en concurrence prévues à l’article L. 311-10 du code de l’énergie relatifs à des projets éoliens en mer, sont privilégiées des zones d’implantation situées à une distance minimale de 40 kilomètres vis-à-vis des côtes, en tenant compte des contraintes techniques ou technologiques liées à l’implantation de parcs éoliens à cette distance sur les différentes façades maritimes. 

VII. – Le IV du présent article entre en vigueur dans un délai de trois mois à compter de la publication du décret prévu au I de l’article L. 141-1 du code de l’énergie.

VIII. – Le VI du présent article est applicable aux procédures de mise en concurrence lancées à compter de la publication de la présente loi.

Objet

Cet amendement vise à instituer une planification spatiale et temporelle spécifique à l’éolien en mer.

À l’heure actuelle, les documents stratégiques de façade ne permettent d’identifier que des zones de « vocation » présentant la répartition des différents usages sur l’espace maritime, à une échelle souvent large et imprécise. C’est donc au stade du lancement des procédures de mise en concurrence sur les projets éoliens en mer que la question des zones d’implantation des installations est essentiellement abordée, notamment à l’occasion du débat public ou de la concertation préalable organisés par la Commission nationale du débat public.

Nombre d’acteurs critiquent cette méthode consistant à traiter les projets « par à-coups », sans visibilité que ce soit sur le nombre de projets envisagés à moyen terme sur une même façade maritime ou sur les zones dans lesquelles des projets éoliens pourront être implantés.

Afin de remédier à ces lacunes, le dispositif proposé prévoit la réalisation d’une cartographie des zones destinées à accueillir des installations éoliennes en mer à l’échelle nationale, en privilégiant une concertation large associant l’ensemble des parties prenantes ainsi que le public sur les quatre façades maritimes. Ces zones ont vocation à être identifiées pour dix ans, avec une révision des cartographies six ans après leur publication initiale.

Le ministre chargé de l’énergie et le ministre chargé de la mer s’appuieront ensuite sur ces zones propices pour lancer les futurs appels d’offre pour les projets éoliens en mer. Afin de renforcer la prévisibilité des projets, ils publieront un calendrier prévisionnel des futurs appels d’offre envisagés dans ces zones comportant des dates de mise en service indicatives pour les parcs éoliens et leurs ouvrages de raccordement au réseau public de transport d'électricité.

Enfin, afin de garantir une meilleure acceptabilité des parcs éoliens en mer, ce dispositif propose, d’une part, d’identifier en priorité les zones propices au sein de la zone économique exclusive et, d’autre part, de privilégier pour les appels d’offre qui seront lancés à compter de la publication de la présente loi des zones d’implantation situées à une distance minimale de 40 kilomètres du rivage.

Dans un souci de pragmatisme, l’amendement prévoit toutefois deux aménagements à cette règle des 40 kilomètres :

-        l’application de cette règle de distance ne s’appliquera qu’aux appels d’offre qui seront lancés postérieurement à la publication de la présente loi, afin de ne pas déstabiliser les appels d’offre en cours ;

-        l’État tiendra compte, pour l’application de cette règle, des contraintes techniques et technologiques liées à l’implantation de parcs éoliens à plus de 40 kilomètres du rivage.

Ces contraintes techniques et technologiques sont en particulier liées aux difficultés d’implantation d’installations éoliennes au-delà d’une certaine profondeur et au degré de maturité commerciale de l’éolien flottant. Si cette technologie permettra, à terme, d’éloigner les installations éoliennes à plus grande distance des côtes, les premières mises en service de parcs flottants ne devraient être possibles qu’à l’horizon 2030-2035.

Or, l’éolien posé ne peut être installé que jusqu’à une profondeur d’environ 50 mètres, ou plus exceptionnellement jusqu’à 70 à 80 mètres de profondeur. À l’exception de la façade Manche, cette profondeur est atteinte à une faible distance des côtes (5 à 10 kilomètres en Méditerranée et au sud et nord-ouest de la Bretagne, en Gironde et dans les Pyrénées-Atlantiques et 30 à 35 kilomètres au large des Pays de la Loire et de la Charente). Ainsi, exclure l’implantation de parcs éoliens à moins de 40 kilomètres du rivage avant l’entrée en phase industrielle de l’éolien flottant pourrait conduire, soit à concentrer les projets sur certains territoires comme la Manche, ce qui ne serait ni acceptable ni satisfaisant, soit à risquer de freiner les projets éoliens pour les dix prochaines années.

Le dispositif proposé vise donc à encourager le recours à l’éolien flottant pour les futurs appels d’offre, selon une approche équilibrée.

Pour rappel, le délai nécessaire à la mise en service d’un parc éolien est actuellement supérieur à dix ans. Or, les derniers appels d’offre lancés par le Gouvernement prévoient des dates de mise en service entre 2030 et 2032.  En faisant l’hypothèse que l’éolien flottant atteindra la maturité nécessaire en 2035, les appels d’offre qui seront lancés dans les deux à trois prochaines années pourraient constituer le point de bascule vers cette technologie. Le présent amendement a donc pour objectif d’inciter l’État à opérer ce basculement dans les appels d’offre aussitôt que les prévisions technologiques le permettront.