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commission des finances

Proposition de loi

Nationalisation du groupe Électricité de France

(1ère lecture)

(n° 341 )

N° COM-7

27 mars 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. LONGUET, rapporteur


ARTICLE 3 BIS (NOUVEAU)


Rédiger ainsi cet article :

Au I de l’article L. 337-7 du code de l’énergie, après les mots : « à leur demande », les mots : « , pour leurs sites souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères » sont supprimés.

Objet

Cet amendement vise à étendre le bénéfice des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVe) à l’ensemble des très petites entreprises (TPE) et des petites communes, sans considération de puissance de compteur électrique. Cette évolution attendue par les petits artisans et commerçants durement affectés par la crise actuelle des prix de l’électricité, leur apportera, au-delà des mesures budgétaires d’urgence (abaissement des tarifs d’accise sur l’électricité à leur niveaux minimums autorisés par le droit de l’Union européenne, « amortisseur », « sur-amortisseur », aides au guichet, etc) une protection structurelle et pérenne face aux fluctuations des prix de marché de l’électricité.

Aujourd’hui, sans que cette condition soit requise par le droit de l’Union européenne, le bénéfice de ces TRVe est limité aux TPE et aux petites communes qui disposent d’un compteur électrique d’une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères (kVA). Cette condition imposée par le droit national exclut notamment une grande majorité de boulangers, de restaurateurs, de fleuristes ainsi que d’autres secteurs économiques dont les activités exigent une importante consommation d’électricité.

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) est favorable à cette extension du périmètre des TRVe à l’ensemble des TPE et petites communes sans considération de puissance électrique souscrite. Il est regrettable que le Gouvernement n’ait pas suivi les conseils de cette autorité plus tôt. Si cette extension avait été anticipée, de nombreuses TPE aujourd’hui en grande difficulté n’auraient pas été si exposées à la crise des prix de l’électricité et les mesures budgétaires complémentaires improvisées en urgence au mois de février dernier par le Gouvernement, et qui commencent tout juste à produire leurs effets, n’auraient pas été nécessaires.

Dans sa version actuelle, l’article 3 bis présente cependant plusieurs difficultés d’ordre juridique qu’il convient de traiter.

Premièrement il étend, pour 2023, le bénéfice des TRVe à l’ensemble des entreprises jusqu’à celles qui répondent aux critères des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Cette disposition, contraire au droit de l’Union européenne [1], serait inapplicable.

Deuxièmement, il prévoit que pour 2023, des offres aux TRVe se substitueraient aux contrats de fournitures en cours. Cette disposition présente un risque significatif d’inconstitutionnalité dans la mesure où elle porterait une atteinte disproportionnée au principe constitutionnel de la liberté contractuelle. En toute hypothèse, cette disposition ferait l’objet de contentieux de la part des fournisseurs qui, à travers un contrôle de conventionalité de la loi et au titre des exigences du droit de l’Union européenne, devraient se voir allouer des indemnités massives, qui se chiffreraient en milliards d’euros, et seraient versées par les consommateurs ou la puissance publique. Par ailleurs, cette disposition ne serait pas opérationnelle dans la mesure où, d’une part la construction par la CRE des nouveaux TRVe prendra plusieurs mois et, d’autre part, à court terme, sans application du dispositif de bouclier tarifaire, ces nouveaux TRVe ne seraient pas plus intéressants pour leurs bénéficiaires que les dispositifs existants. À très court terme, le seul moyen de réduire la facture d’électricité des TPE est d’accélérer la mise en œuvre des dispositifs budgétaires en place et, le cas échéant, de les renforcer.

Troisièmement, il prévoit que l’ensemble des fournisseurs d’électricité, et non plus seulement EDF et les entreprises locales de distribution (ELD), proposent des TRVe. Cette mission, qui s’accompagne d’obligations de service public prévues par le code de l’énergie comme celle de jouer le rôle de fournisseur en dernier ressort, ne peut pas être imposée à l’ensemble des fournisseurs.

Cet amendement propose ainsi de recentrer l’article 3 bis sur l’extension des TRVe à l’ensemble des TPE et des petites communes afin de leur apporter une protection pérenne face aux fluctuations des prix de l’électricité.

 

[1] Article 5 de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE.