Logo : Sénat français

commission des lois

Proposition de loi

Régime juridique des actions de groupe

(1ère lecture)

(n° 420 )

N° COM-8

19 janvier 2024


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. FRASSA, rapporteur


ARTICLE 1ER BIS (NOUVEAU)


I. – Alinéas 1 à 4

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

I. – L’action de groupe est exercée par les associations agréées à cette fin. L’agrément peut être octroyé par l’autorité administrative chargée de sa délivrance à toute association régulièrement déclarée, à but non lucratif, dès lors qu’elle remplit les conditions suivantes :

1° Elle justifie à la date du dépôt de sa demande d’agrément de l’exercice d’une activité effective et publique de douze mois consécutifs en vue de la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte ;

2° Son objet statutaire comporte la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte ;

3° Elle ne fait pas l’objet, à la date du dépôt de sa demande d’agrément, d’une procédure collective prévue au livre VI du code de commerce ;

4° Elle est indépendante et n’est pas influencée par des personnes, autres que celles dont elle défend les intérêts, ayant un intérêt économique dans l’introduction d’une action de groupe. Elle a adopté à cette fin des procédures écrites de prévention et de gestion des conflits d'intérêts ;

5° Elle met à disposition du public, par tout moyen approprié, des informations sur son objet statutaire, ses activités, les sources principales de son financement et son organisation.

L’agrément peut être retiré par l’autorité administrative chargée de sa délivrance dès lors qu’elle constate que l’une des conditions prévues au présent I n’est plus remplie.

II. – Alinéa 5

Au début, ajouter la référence :

I bis. –

III. – Alinéa 12

Remplacer la première occurrence du mot

et

par le mot :

à

IV. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

V. – Les personnes mentionnées aux I à II du présent article mettent à disposition du public, par tout moyen approprié, des informations sur les actions de groupe qu’elles ont décidé d’engager, l’état d’avancement de celles qu’elles ont engagées ainsi que, pour chacune d’entre elles, leur résultat.

VI. – Les personnes remplissant les conditions pour exercer une action de groupe à la date de l’entrée en vigueur de la présente loi conservent cette faculté jusqu’à l’échéance d’un délai de deux ans à compter de celle-ci.

Objet

Le présent amendement tend à modifier les conditions de reconnaissance de la qualité pour agir dans le cadre d’une action de groupe. Si la rédaction de l’article 1er bis adoptée par l’Assemblée nationale présente le mérite d’unifier le régime de la qualité pour agir dans le cadre d’une action de groupe, elle présente quatre inconvénients majeurs.

En premier lieu, en ouvrant très largement l’action à des acteurs dont la crédibilité et la sincérité ne pourront être diligemment vérifiées, les conditions ainsi prévues de la qualité pour agir pourraient conduire à l’engagement de procédures d’actions de groupe malveillantes, visant à faire porter un coût réputationnel lourd à des acteurs économiques dont tous n’auront pas les moyens financiers et juridiques de s’en défendre.

En deuxième lieu, il est impératif que les associations exerçant des actions de groupe présentent, au regard de l’importance des intérêts qu’elles représentent, de la sensibilité des données personnelles qu’elles sont amenées à recueillir ainsi que des aspirations dont elles se feront le relais, toutes les garanties de sérieux nécessaires pour mener à bien ces procédures de bout en bout. En la matière, décevoir les espoirs légitimes de personnes ayant subi des préjudices en accordant à des personnes incapables de conduire à leur terme de telles procédures pourrait in fine nuire à la crédibilité de l’action de groupe.

En troisième lieu, le choix de l’ouverture large du prétoire déportera nécessairement la responsabilité de la vérification du respect, par les personnes arguant de leur qualité pour agir, de nécessaires exigences de transparence et de probité, d’autorités administratives – aujourd’hui responsables de la délivrance d’agréments qui ouvrent qualité pour agir en action de groupe en matière de consommation, de santé ou d’environnement par exemple – vers les juridictions. La création de ce contentieux de la qualité pour agir, en particulier en matière de vérification des conflits d’intérêts, pourrait mettre les juridictions – qui ne disposent pas des mêmes moyens que des autorités administratives en la matière – dans une position délicate.

En dernier lieu, la transposition par la présente proposition de loi de la directive 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs est l’occasion de créer un régime aussi lisible que possible pour l’ensemble des justiciables, demandeurs comme défendeurs potentiels. À cet égard, il apparaît primordial de limiter autant que faire se peut toute sur-transposition.

Dans ces conditions, le présent amendement tend à soumettre la reconnaissance de la qualité pour agir en action de groupe à l’octroi d’un agrément par une autorité administrative – dont il appartiendra au pouvoir réglementaire de préciser laquelle, éventuellement en distinguant plusieurs autorités selon le champ du droit susceptible de faire l’objet d’actions de groupe. Au surplus, les conditions à remplir pour l’octroi de cet agrément, qui se borneraient pour l’essentiel au contrôle d’une activité publique et réelle d’un an en vue de la défense des intérêts lésés ainsi que de la solvabilité de l’association demanderesse, seraient alignées sur celles prévues par la directive 2020/1828 précitée pour les actions transfrontières en matière de consommation. Ce dispositif présente le double avantage de garantir un cadre unifié et lisible, évitant toute forme de sur-transposition, et de prévenir le risque d’instauration d’un contentieux de la recevabilité des actions de groupe engagées, en particulier sur le fondement du nécessaire respect des obligations de transparence et de probité posées par la directive 2020/1828 précitée.

Par ailleurs, le présent amendement maintient à titre transitoire la possibilité pour des associations disposant aujourd’hui de la qualité pour agir d’exercer des actions de groupe. Elles disposeraient d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité avec les exigences posées par le cadre prévu par le présent amendement.

Enfin, le présent amendement tend à parfaire la transposition par la présente proposition de loi de la directive 2020/1828 précitée, en prévoyant que les personnes ayant qualité pour agir, tant au niveau national qu’au niveau européen, soient tenues de mettre à disposition du public des informations quant aux actions de groupe envisagées, engagées, ainsi que le résultat de ces dernières.