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commission des affaires économiques

Projet de loi

Industrie verte

(1ère lecture)

(n° 607 )

N° COM-147 rect. bis

13 juin 2023


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

Mmes Marie MERCIER, BELLUROT, BELRHITI et BILLON, MM. BOUCHET, BRISSON, BURGOA, CADEC et CAMBON, Mme CANAYER, MM. CARDOUX, CHARON, CHATILLON, CUYPERS et DARNAUD, Mmes DEMAS, DI FOLCO, DUMONT et ESTROSI SASSONE, M. FOLLIOT, Mmes GARRIAUD-MAYLAM et HERZOG, M. HINGRAY, Mme LASSARADE, M. LEVI, Mme MALET, M. MANDELLI, Mme MICOULEAU, MM. MILON et MOUILLER, Mme MULLER-BRONN, M. PANUNZI, Mme PERROT, MM. PIEDNOIR, POINTEREAU, SAUTAREL, SAVARY et TABAROT, Mmes VENTALON et VÉRIEN et M. Cédric VIAL


ARTICLE 4


Après l'alinéa 4

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

1° bis Après le IV de l’article L. 541-4-3, il est inséré un V ainsi rédigé :

« V. – Dans le cadre de leurs transferts entre États membres, les substances ou objets ayant cessé d'être des déchets dans un État membre de l’Union européenne, conformément aux dispositions de l’article 6 de la directive-cadre européenne sur les déchets (Directive 2008/09/CE), conservent leur statut de produit lors de leur entrée sur le territoire français.

« L’autorité administrative compétente peut, le cas échéant, vérifier la conformité de la sortie du statut déchet aux dispositions de l’article 6 de la directive-cadre européenne sur les déchets. En cas de non-conformité auxdites dispositions l’autorité administrative compétente peut remettre en cause la sortie du statut de déchet de la substance ou objet sur le territoire français.

« En conséquence, au même article, substituer le numéro VI au numéro V initial. »

Objet

Le défi au cœur du développement durable spécifique à l’industrie est celui de l’économie circulaire, pour une utilisation efficiente des ressources. A ce titre, l’incorporation de matériaux issus du recyclage (mécanique ou physique ou chimique) est le principe d’action au cœur d’une industrie circulaire.

L’intégration dans nos produits manufacturés de matériaux secondaires est ainsi un enjeu écologique, mais également un levier d’indépendance et un facteur-clef de relocalisation industrielle.

En effet, alors que notre pays possède de très nombreux atouts au service de ses filières industrielles : empreinte historique, savoirs et savoir-faire, recherche et développement, partenariats publics-privés... nous sommes dépendants de l’importation des matières premières nécessaires à l’élaboration de la plupart de nos produits manufacturés. Cette réalité ne vaut pas seulement pour les matières premières fossiles ou minérales, mais également pour celles végétales et renouvelables en raison, pour l’essentiel, de paramètres climatiques.

Le développement du recours à des matériaux secondaires, c’est-à-dire issus de déchets et de leur transformation en vue du recyclage – que ce soit en boucle courte ou en boucle fermée – offre une alternative unique à cette dépendance structurelle de notre industrie.

Enfin, l’absence actuelle de reconnaissance en droit français des sorties de statut de déchet réalisées de manière encadrée dans d’autres états membres de l’UE pénalise notre tissu industriel et ses emplois, au profit des sites industriels d’autres pays vers lesquels sont orientés de tels produits issus de déchets.

Concrètement, dans le cadre réglementaire européen actuel, tout matériau obtenu à partir de déchets est considéré comme un déchet et non comme un produit tant qu’il ne satisfait pas des critères définis appelés critères de sortie du statut déchet (SSD). Là où il n’y a pas de critères, les matériaux issus de recyclages sont considérés comme des déchets du point de vue réglementaire.

L’article L.541-1-1 du Code de l’environnement définit un déchet comme « toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire. » Ainsi, lorsque le détenteur d’un bien considère qu’il cesse d’en avoir l’utilité, celui-ci bascule dans la catégorie des déchets, et, dès lors, est associé à une famille de risque différente des produits, qui fonde des règlements et des régimes d’autorisation spécifiques.

Ce statut de « déchet » crée de nombreuses complications administratives et financières, à la fois pour le transport, la transformation (recyclage), le commerce et l’utilisation des matériaux issus du recyclage (par exemple, granulat et poudrettes de caoutchouc issus de recyclage mécanique de pneus en fin de vie, huiles et noir de carbone issus de pyrolyse de pneus en fin de vie).

A ce jour, seuls quatre flux de déchets bénéficient de critères harmonisés établis au niveau de l’union européenne, ce qui est absolument insuffisant au regard aussi bien des ambitions européennes en matière de transition écologique, que, fondamentalement, l’urgence environnementale et de ses enjeux.

L’Union européenne a défini un cadre de référence dans le respect duquel les Etats membres peuvent encadrer la sortie du statut de déchet de matériaux, en définissant eux-mêmes leurs critères.

La mise en œuvre de ce cadre est un processus complexe et particulièrement long. Or, en l’absence de reconnaissance en droit national des sorties de statut de déchet encadrées conformément au cadre européen, le processus doit être reproduit à l’intérieur de chaque état du marché unique.

Sans transiger avec l’exigence environnementale et sanitaire, la réglementation relative au statut de déchet doit évoluer afin de favoriser le développement d’une industrie circulaire.

L’article 4 du projet de loi introduit la possibilité d’une « sortie du statut de déchet » sans une nécessité systématique de définition de critères spécifiques au niveau national. Bien cela constitue un progrès, cette disposition reste encore insuffisante car elle ne clarifie ni ne facilite pas davantage les flux l’entrée en France de matériaux eu de substances ayant fait l’objet de sorties du statut déchet dans d’autres Etats membres de l’Union européenne, en l’absence de critères harmonisés au niveau européen.

Un objet ou une substance qui a fait l’objet d’une sortie du statut déchet au sein d’un Etat membre ne devrait pas changer de statut au moment où il entre sur le territoire national : l’Etat membre de destination doit reconnaître de facto la sortie de statut de déchet encadrée par l’Etat membre d’origine.

Dès lors, nous sommes ici au cœur de l’ambition portée par le projet de loi Industrie verte : il est à la fois stratégique et urgent pour la France de se doter d’un régime d’équivalence qui maintiendrait sur le territoire national le statut de produit aux substances ou objets qui ont fait l’objet d’une sortie de statut de déchet dans tout pays de l’Union européenne conformément aux principes de la directive- cadre européenne.

Bien entendu, l’autorité administrative compétente conserve toutes capacités de remise en cause de la sortie du statut de déchet, en cas de non-conformité avérée auxdites dispositions.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.