commission des lois |
Proposition de loi Professionnels de santé des services d'incendie et de secours (1ère lecture) (n° 413 ) |
N° COM-2 5 mai 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. BOURGI et CHAILLOU, Mme de LA GONTRIE, M. DURAIN, Mme HARRIBEY, M. KERROUCHE, Mmes LINKENHELD et NARASSIGUIN et M. ROIRON ARTICLE 1ER |
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
À ces fins de surveillance médicale, les médecins de sapeurs-pompiers complètent, de manière assidue et après chaque intervention à risque identifiée d’un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, une fiche de suivi individuel des risques sanitaires et d’exposition aux facteurs de risque ;
Objet
Cet amendement vise à inscrire dans les cadres d’emplois de santé une prérogative essentielle : la création d’une fiche de suivi permanent des risques sanitaires auxquels sont exposés les sapeurs-pompiers tout au long de leur vie professionnelle. Cette fiche, éditée et renseignée systématiquement après chaque intervention à risques, serait remplie par les personnels de santé des services d’incendie et de secours (SIS).
De nombreux travaux récents ont mis en lumière les enjeux de santé et de sécurité auxquels font face les 254 800 sapeurs-pompiers de notre pays, tous statuts confondus. Le 1er juillet 2022, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé leur exposition professionnelle comme cancérogène pour l’homme (groupe 1), en lien notamment avec des cancers comme le mésothéliome et celui de la vessie. D’autres pathologies sont également suspectées, telles que les cancers colorectal, de la prostate, le mélanome ou encore le lymphome non hodgkinien.
Dès 2003, le rapport Pourny alertait sur la nécessité d’une veille sanitaire structurée, fondée sur une base de données nationale permettant d’initier des études épidémiologiques robustes. Pourtant, aucun suivi médical coordonné ni recueil national des données d’exposition n’a été mis en œuvre à ce jour, laissant les pompiers sans véritable outil de reconnaissance de leurs risques professionnels.
Dans son rapport d’octobre 2019, l’Anses a rappelé l’importance de prendre en compte les expositions chroniques et a préconisé un suivi médical post-professionnel pour les sapeurs-pompiers. L’incendie de Lubrizol, en 2019, a tristement illustré l’exposition des intervenants à des substances toxiques et cancérogènes, relançant l’inquiétude quant à l’insuffisance de la protection sanitaire.
Malgré cela, seuls deux types de cancers sont aujourd’hui reconnus comme maladies professionnelles pour les sapeurs-pompiers en France, bien loin des standards d’autres pays comme le Canada, où jusqu’à 19 cancers sont reconnus.
Le rapport du Sénat du 29 mai 2024 a formulé des recommandations claires : améliorer la prévention, harmoniser les pratiques et faciliter la traçabilité des expositions. La proposition de loi déposée par les sénatrices Émilienne Poumirol et Anne-Marie Nédélec répond à cet objectif, en instaurant une fiche d’exposition nationale obligatoire après chaque intervention à risque. Cette dynamique a été appuyée par une circulaire du 14 janvier 2025 et repose sur le fondement juridique de l’article L.813-2 du Code général de la fonction publique, garantissant un droit à suivi post-professionnel.
Dans ce contexte, cet amendement consolide juridiquement ces avancées en rendant obligatoire, pour les médecins des services d’incendie et de secours, la tenue d’une fiche individuelle de suivi des risques, complétée systématiquement après chaque intervention à risque.
Il s’agit de créer enfin les conditions d’une culture partagée de la prévention, de renforcer la connaissance des expositions et d’améliorer la reconnaissance des pathologies professionnelles, pour mieux protéger ceux qui, chaque jour, mettent leur santé en danger pour la sécurité de tous.