|
commission des lois |
Proposition de loi Simplifier la sortie de l'indivision successorale (1ère lecture) (n° 415 ) |
N° COM-8 8 décembre 2025 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||
|
M. Jean-Baptiste BLANC, rapporteur ARTICLE 3 |
|||||
I. - Alinéas 1et 2
Supprimer ces alinéas.
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - L'article 2 de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. - » ;
2° Sont ajoutés cinq alinéas ainsi rédigés :
« II. - Pour l'application du deuxième alinéa du I, le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l'aliénation du bien indivis.
« Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier le projet de l'acte de vente aux autres indivisaires et procède à sa publication dans un journal d'annonces légales au lieu de situation du bien ainsi que par voie d'affichage et sur un site internet.
« Si l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à l'aliénation du bien indivis dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.
« En cas d'opposition d'un ou plusieurs indivisaires, le tribunal judiciaire peut autoriser l'aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.
« L'aliénation effectuée dans les conditions fixées au présent article est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l'intention d'aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au deuxième alinéa du présent II. »
Objet
Dans sa rédaction transmise au Sénat, l'article 3 abaisse les seuils nécessaires pour aliéner un bien indivis après autorisation judiciaire, de deux tiers à plus de la moitié des droits indivis. L'objectif des députés est de « contribuer à rendre plus attractif ce dispositif destiné à favoriser la sortie des indivisions gelées par des indivisaires "inertes". »
S'il comprend cet objectif, le rapporteur n'a toutefois pas souscrit aux moyens proposés pour l'atteindre, au regard de cinq considérations.
Premièrement, l'article 3 est loin de rassembler l'adhésion des professionnels interrogés. Ceux-ci ont manifesté au mieux un désintérêt pour la mesure, au pire une vive opposition.
Deuxièmement, la procédure régie par l'article 815-5-1 du code civil peut constituer, dans certains cas, une atteinte au droit de propriété puisqu'un indivisaire minoritaire peut être forcé à la vente d'un bien. Si un indivisaire n'a pas, par principe, de droit au blocage, l'article 815-5-1 constitue une procédure dérogatoire, puisque le mode normal de sortie d'une indivision en cas de désaccord est le partage judiciaire, que n'importe quel indivisaire peut provoquer. L'abaissement des seuils de majorité de l'article 815-5-1 risque donc de désinciter le recours au partage judiciaire, un effet de bord important que le rapporteur souhaite éviter.
Troisièmement, cet article n'est pas applicable aux seules indivisions successorales sur des biens immobiliers classiques. Il concerne tous types d'indivisions, y compris les indivisions post-conjugales, ou, par exemple, les indivisions sur des fonds de commerce. Abaisser le seuil pour forcer la vente sur les indivisions non-successorales aurait ainsi des conséquences qui dépassent les objectifs que se fixe le présent texte et qui n'ont fait l'objet d'aucune évaluation.
Quatrièmement, l'abaissement du seuil prévu à l'article 815-5-1 affecterait la cohérence d'ensemble des seuils applicables en matière d'indivision, puisque le seuil pour demander une vente du bien après autorisation judiciaire - plus de la moitié des droits indivis - deviendrait inférieur au seuil nécessaire pour effectuer de simples actes d'administration, qui est fixé aux deux tiers.
Enfin, contrairement aux dérogations temporaires applicables en outre-mer et en Corse, qui prévoient des seuils abaissés pour la vente d'un bien indivis, l'article 815-5-1 est un dispositif pérenne. Par ailleurs, la situation de désordre foncier dans ces territoires est sans commune mesure avec la situation hexagonale. Dans un souci de proportionnalité au regard de cette différence de situation, le droit commun doit donc être plus vigilant sur le respect du droit de propriété.
Pour toutes ces raisons, le I du présent amendement maintient la rédaction actuelle de l'article 815-5-1 du code civil.
Partageant l'objectif de simplification des sorties d'indivision, le II de l'amendement actualise quant à lui l'article 2 de la loi n° 2017-285 du 6 mars 2017 visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété, qui permet, dans la même logique que l'article 815-5-1 précité, la vente d'un bien indivis en Corse à une majorité des deux tiers, sans intervention judiciaire.
Or, cet article 2 est totalement inutilisé en pratique, en raison d'un « manque de formalisme » qui freine son appropriation par les notaires de l'île.
C'est pourquoi, il est proposé de s'inspirer à la fois de la loi Letchimy du 27 décembre 2018 et de l'article 815-5-1 du code civil, pour préciser les modalités selon lesquelles cette vente extrajudiciaire s'effectuera, c'est-à-dire en l'absence d'opposition formelle d'un indivisaire. Si des oppositions sont formulées, ce qui permet de protéger les indivisaires minoritaires, la vente devra être autorisée par le juge, comme c'est le cas en droit commun. En revanche, comme pour les territoires ultramarins, les indivisaires qui ne se manifesteront pas seront réputés donner leur accord à la vente. Cela est justifié par les situations d'indivisions non réglées parfois depuis le XIXe siècle, dans lesquelles les indivisaires se comptent en dizaines, voire centaines de personnes, pour des biens d'une faible valeur.