Table des matières




- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

PJLF pour 2003 - Crédits des charges communes et article 68 rattaché - Examen du rapport

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen des crédits des charges communes et article 68 rattaché, sur le rapport de M. Yves Fréville, rapporteur spécial.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Yves Fréville, rapporteur spécial des crédits des charges communes, a tout d'abord rappelé que le budget des charges communes était fondamentalement un budget de constatation. Il a mis en exergue le poids des charges communes par rapport au budget de l'Etat, notant que celles-ci représentaient en brut 35,2 % du budget général et en net, 20,6 % du budget général, l'écart entre brut et net étant dû à l'importance des remboursements et dégrèvements d'impôts. Il a expliqué que les charges communes représentaient, en exécution, une masse de crédits encore plus importante, en raison du transfert sur ce budget, pour paiement, de l'ensemble des dépenses de pension. Il a détaillé les principaux postes du budget des charges communes, soulignant que la charge brute de la dette, à 41,3 milliards d'euros, progresserait, par rapport au projet de loi de finances initiale pour 2002, de 4,35 % et que les dégrèvements d'impôts locaux, d'un montant de 10,1 milliards d'euros, s'accroîtraient de 1,2 %. Il a noté le poids des primes pour détention de plan épargne logement ou compte épargne logement qui représenteront, en 2003, 1,48 milliard d'euros. Il a rappelé que les crédits des pouvoirs publics qui s'élèveront en 2003 à 0,81 milliard d'euros, étaient également inscrits au budget des charges communes.

M. Yves Fréville a ensuite évoqué l'évolution de la dette des administrations publiques. Il a observé que celle-ci, après avoir effleuré les 60 points de produit intérieur brut (PIB), avait légèrement diminué à partir de 1998 et que son évolution, à la hausse comme à la baisse, était surtout imputable à l'Etat, notant par ailleurs le poids pris depuis le milieu des années 1990 par la dette des organismes divers d'administration centrale (ODAC). Il a remarqué que la dette de l'Etat, qui s'élevait fin 2001 à 724 milliards d'euros, progressait continuellement en valeur. Il a montré que la progression de la charge nette de la dette s'était ralentie au cours des dernières années, attribuant ce ralentissement à la bonne tenue de la conjoncture et à la baisse des taux d'intérêt. Il a rappelé que les hypothèses de taux d'intérêt à court terme et à long terme, sur lesquelles reposait le projet de loi de finances, s'alignaient sur le consensus des économistes. Il a présenté le tableau de financement de l'Etat pour 2003, en indiquant que les besoins de financement, évalués à 124,6 milliards d'euros, correspondaient, pour 44,6 milliards d'euros, au déficit budgétaire, pour 67,9 milliards d'euros à l'amortissement de la dette à moyen et long terme et pour 10,4 milliards d'euros à la réduction des dépôts des correspondants du trésor. Enfin, il a indiqué que l'objectif fixé par le gouvernement dans sa gestion de la dette était de raccourcir la durée moyenne de la dette pour profiter de l'écart entre taux courts et taux longs, signalant que cette politique n'était pas sans risque en cas d'inversion de la courbe des taux.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial des crédits des charges communes, a abordé en deuxième lieu les dégrèvements d'impôts locaux, notant la stabilisation de ceux-ci. Il a souligné que les dégrèvements de taxe professionnelle diminuaient légèrement, tandis que ceux de taxe d'habitation connaissaient une croissance assez nette. Il a démontré que le dynamisme des recettes de taxe professionnelle était moins supporté par les entreprises sur le plan local que par le contribuable national via les dégrèvements et les compensations d'exonération financés par l'État. Il a observé qu'au sein de la part de l'État, les dégrèvements fléchissaient au profit des compensations d'exonérations. Il a relevé de même que les dégrèvements de taxe d'habitation, entre 1997 et 2001, avaient connu une forte augmentation et que la progression des recettes des collectivités locales à ce titre s'expliquait uniquement par la part prise par les exonérations et dégrèvements assumés par l'Etat. Il a enfin signalé l'effet contrepéréquateur des dégrèvements, s'appuyant sur l'exemple de la taxe d'habitation en Ille-et-Vilaine. Il a montré que ces dégrèvements profitaient davantage aux grandes villes et étaient d'autant plus importants que le taux d'imposition de départ était élevé.

M. Yves Fréville a constaté, en troisième lieu, l'explosion des primes d'épargne logement. Il a observé que les crédits correspondants avaient augmenté de 50 % depuis 1998 et correspondaient à une forte croissance du montant des dépôts. Il a relevé dans le même temps la forte dégradation du ratio des prêts sur les dépôts. Il a considéré en conclusion que le plan d'épargne logement, s'il constituait un produit financier attractif en raison de la prime de l'Etat, ne répondait donc pas totalement à son objet initial.

Un large débat s'est alors engagé.

M. Jacques Oudin a remarqué que la dette de l'Etat était largement aujourd'hui une dette perpétuelle et a demandé quelle part de celle-ci finançait le fonctionnement. Il s'est interrogé sur les critères de consolidation de la dette des administrations publiques et sur le statut de celle de la SNCF.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a expliqué que pour la première fois dans l'histoire contemporaine, le stock de la dette ne pourrait être entamé par l'inflation, comme cela avait été le cas au lendemain des deux guerres mondiales. Il a insisté néanmoins sur la nécessité de résorber ce stock, mettant en avant notamment la part de la dette détenue par les non-résidents. Il a reconnu, par ailleurs, que le solde primaire était redevenu négatif en 2002-2003 et que le budget général devrait financer des charges d'intérêt. Il a enfin indiqué que la dette consolidée des administrations publiques était définie par les règles de comptabilité publique européennes qui ne considéraient ni la SNCF, ni Réseau Ferré de France (RFF) comme des administrations publiques.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité néanmoins qu'une image fidèle du patrimoine public puisse être donnée, jugeant que certains engagements de ses entreprises publiques pouvaient entraîner mise en responsabilité et garantie de l'État, et qu'ils constituaient donc un hors-bilan dont il convenait de tracer les contours. Il a par ailleurs regretté que la section de fonctionnement du budget de l'État fasse apparaître un déficit estimé à plus de 14 milliards d'euros.

M. Roland du Luart s'est montré préoccupé par la charge de la dette, notant que sa progression était supérieure à la croissance du PIB. Il s'est demandé si une décentralisation réelle pouvait être engagée quand le contribuable national, par le biais des dégrèvements, se substitue autant au contribuable local.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, s'est montré d'accord pour appeler à une réforme des bases et de la fiscalité locale, considérant que les dégrèvements, qui pouvaient avoir une légitimité à titre temporaire, obscurcissaient les relations entre le contribuable local et la collectivité.

M. Gérard Miquel a également fait part de son souhait de voir réformer la fiscalité locale en liaison avec le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République.

M. Yann Gaillard a observé qu'on ne pouvait tirer de conclusion définitive du stock de la dette et qu'il convenait de comparer celle-ci à celle des autres pays européens, et d'analyser sa variation.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a déclaré que c'était effectivement la variation de la dette qui devait être maîtrisée. Il a souhaité qu'il puisse y avoir une véritable gestion cyclique de la dette, le stock de celle-ci étant résorbé en période de croissance pour qu'il soit, le cas échéant, accru en cas de retournement conjoncturel.

M. Maurice Blin s'est interrogé sur les contreparties réelles de la dette de l'Etat.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a souligné que la dette était avant tout le reflet de la contrepartie des déficits budgétaires. Il a renvoyé à ce sujet au rapport d'information de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur l'évolution de la dette et de ses contreparties entre 1996 et 2000.

Mme Marie-Claude Beaudeau a souhaité avoir des précisions sur l'intégration des pensions de la Poste dans le budget des charges communes.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a indiqué que les dépenses de pension des fonctionnaires de la Poste étaient intégrées dans les charges communes depuis le changement de statut de l'établissement et qu'elles trouvaient leur contrepartie dans les recettes non fiscales correspondant au versement de la Poste au titre du contrat de plan.

M. Joël Bourdin a souligné les risques d'inversion de la courbe des taux et les risques pris par les opérations d'échanges à terme de taux d'intérêt (swaps). Il s'est dès lors interrogé sur la pertinence du raccourcissement de la durée de la dette. Il a enfin souhaité connaître la sensibilité des obligations assimilables du Trésor (OAT) aux variations de taux.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a expliqué que les risques d'inversion de la courbe des taux étaient pris en compte par l'Agence France Trésor qui passait des contre-swaps. Il a montré que la politique de réduction de la durée moyenne de la dette était d'abord une correction, à la marge, de la politique d'allongement de la durée de la dette menée au début des années 90. Il a enfin déclaré que les obligations assimilables du Trésor (OAT), indexées sur l'inflation, représentaient une part limitée de la dette négociable et que le coût de l'indexation était provisionné dans le compte général de l'administration des finances.

M. Bernard Angels s'est montré inquiet de la détérioration du solde primaire.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a relevé que ce qui était important, en la matière, était surtout de dégager des soldes primaires très positifs en période de croissance pour pouvoir supporter des soldes primaires négatifs en période de ralentissement.

Enfin, M. Philippe Adnot a regretté que ne puisse être mise en face de la variation de la dette une variation positive des actifs de l'Etat.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé, sur proposition du rapporteur spécial, de proposer au Sénat d'adopter le budget des charges communes pour 2003. Elle a examiné, sur proposition du rapporteur spécial, un amendement de clarification à l'article 68 du projet de loi de finances pour 2003, rattaché au budget des charges communes. Elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 68 ainsi modifié.

PJLF pour 2003 - Crédits de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche : III - Recherche et nouvelles technologies - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé à l'examen des crédits de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche : III - Recherche et nouvelles technologies, sur le rapport de M. René Trégouët, rapporteur spécial.

M. René Trégouët, rapporteur spécial
, a tout d'abord rappelé que ces crédits représentaient environ 70 % du budget civil de recherche et de développement technologique (BCRD), dont la ventilation, par ministère dépensier et par discipline, était indiquée dans sa note de présentation.

Il a précisé que les seules progressions substantielles prévues pour 2003 concernaient les deux fonds d'intervention du ministère, c'est-à-dire, d'une part, le Fonds national de la science (FNS) et, pour ce qui est seulement des autorisations de programme, le Fonds de la recherche et de la technologie (FRT), en continuité avec les évolutions des exercices précédents.

Cependant, il a estimé que ce budget, malgré les apparences, contribuerait convenablement au financement, en 2003, des activités de recherche. En effet, selon lui :

- un effort louable de sincérité a conduit à prévoir un équilibrage entre les autorisations de programme (AP) et les crédits de paiement (CP), ainsi qu'un ajustement des dotations correspondantes aux besoins réels, compte tenu de leur consommation effective ;

- il a, d'autre part, été fait légitimement appel à une mobilisation des excédents structurels de ressources des organismes qui ne sont, en fait, jamais dépensés depuis plusieurs années.

Le rapporteur spécial a rappelé que 90 % des crédits de ce budget sont directement distribués, en majeure partie sous forme de crédits de paiement automatiquement reportables, à plus d'une vingtaine d'établissements de recherche, dont les ressources propres ont tendance, généralement, à augmenter.

Il a déclaré cependant comprendre la déception, face à la baisse globale de 1,3 % de la dotation du ministère pour 2003, de ceux qui estiment qu'il convient précisément d'accentuer le soutien apporté à la recherche lorsque la conjoncture est difficile. Il a reconnu, en outre, qu'une partie des reports constatés s'expliquait par l'inadaptation de certaines règles du code des marchés publics au fonctionnement des laboratoires, qui avait freiné parfois la consommation des crédits.

Il a estimé, toutefois, que ce phénomène n'expliquait que pour une faible part le niveau de la trésorerie des organismes de recherche évalué globalement, par les services du ministère, à 720 millions d'euros, dont 450 pour les seuls établissements publics scientifiques et techniques (EPST).

M. René Trégouët, rapporteur spécial, a précisé que l'écart entre budget voté et exécuté était resté limité en ce qui concerne la recherche en 2001 : en effet, 0,5 % seulement des autorisations de programme et 1,9 % des crédits de paiement avaient été annulés ; 1,7 % de l'ensemble des crédits a été, d'autre part, reporté, ce qui montre que les excédents des organismes ne se sont pas constitués en un seul exercice et incluent, effectivement, leurs ressources propres.

En tout état de cause, a-t-il fait valoir, les principaux maux dont souffre la recherche française ne sont pas dus à l'insuffisance de ses crédits budgétaires.

L'effort de l'Etat, en pourcentage du produit intérieur brut (PIB), est, en effet, plus important en France que dans les principaux pays de l'organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Mais l'effet de levier des dépenses publiques ne semble pas satisfaisant. On peut se demander, dans ces conditions, si la fiscalité, plus que la subvention, ne serait pas le meilleur moyen d'inciter davantage d'entreprises, et surtout de PME ou d'investisseurs, à s'impliquer plus fortement dans le financement et les activités de la recherche.

M. René Trégouët, rapporteur spécial, a estimé que les principales carences de la recherche française, liées entre elles, concernent ses structures, son évaluation, la valorisation de ses travaux, et le statut des chercheurs.

Notre dispositif de recherche est, selon lui, excessivement morcelé et cloisonné, d'où une complexité, accrue par la multiplication de structures de coordination, qui en rend difficiles la compréhension et le pilotage.

Le déficit d'évaluation stratégique des orientations de la recherche française et du choix de ses priorités s'explique, en partie, par cette complexité structurelle, mais ne fait qu'accroître le problème de gouvernance qui en résulte.

La valorisation de nos activités de recherche reste globalement insuffisante, surtout en termes de brevets, malgré certains progrès dus à la loi de juillet 1999 sur l'innovation et la recherche, en ce qui concerne les créations d'entreprises par des chercheurs du secteur public.

Le statut des chercheurs est un frein à leur mobilité qui, seule, pourrait remédier aux problèmes de cloisonnement des structures de notre recherche.

Au total, a estimé le rapporteur spécial, cette rigidité de notre dispositif de recherche, au niveau des structures et des hommes, explique nos retards dans les disciplines émergentes ou dans les secteurs interdisciplinaires, comme les sciences et technologies de l'information, les sciences du vivant ou les nanotechnologies.

En conclusion, M. René Trégouët, rapporteur spécial, a préconisé l'adoption des crédits de la recherche en raison de l'effort de sincérité budgétaire qui inspire leur présentation, de l'adaptation, aux besoins des chercheurs, du niveau réel des moyens disponibles et compte tenu, enfin, des priorités dont font l'objet les thésards et les jeunes docteurs.

Il a, cependant, souhaité une rationalisation des structures de recherche et une réforme du statut des chercheurs, ainsi que la mise en oeuvre d'incitations fiscales fortes, au profit des activités concernées et de leur valorisation par l'innovation.

Il a déclaré vouloir attirer plus ponctuellement l'attention de la ministre de la recherche et des nouvelles technologies sur l'insuffisance des moyens informatiques de la recherche, ainsi que sur l'urgence d'appliquer enfin la loi précitée sur l'innovation et la recherche dans les universités, en y levant les obstacles administratifs qui entravent encore le fonctionnement de leurs laboratoires.

Enfin, a-t-il déclaré, le contexte budgétaire difficile actuel doit conduire à introduire davantage de sélectivité dans l'attribution des moyens et donc d'émulation entre les unités et les organismes de recherche.

M. Henri Revol, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, a alors annoncé que son avis sur la recherche comporterait des observations inspirées par ses inquiétudes relatives aux secteurs de l'espace et de l'énergie (en particulier en ce qui concerne, dans ce dernier domaine, l'abandon de Superphénix et ses conséquences sur les investigations portant sur la transmutation des déchets radioactifs).

M. Maurice Blin, après avoir déclaré qu'elle représentait, pour notre pays, un enjeu considérable, a déploré les résultats insuffisants de la recherche « à la française », selon lui « en panne de brevets ». Il a fait valoir que l'agence spatiale américaine, la NASA, finançait la recherche de laboratoires privés, tandis qu'en France il appartient plutôt au secteur privé de faire travailler, à l'inverse, les centres de recherche publics.

En écho à ces remarques, M. René Trégouët, rapporteur spécial, a regretté que la loi Chevènement de 1982 conduise à entrer dans la recherche pour « faire carrière » et a déclaré souhaiter une réforme du statut de chercheur. Il s'est inquiété de la désaffection des jeunes Français pour la science et des rémunérations insuffisamment attractives offertes aux jeunes docteurs. Il a estimé que les entreprises françaises, surtout les petites et moyennes entreprises (PME), ne faisaient pas assez de recherche et que le mécanisme du crédit d'impôt recherche avait été dévoyé par le déclenchement systématique de contrôles fiscaux à l'encontre de ses bénéficiaires.

Après avoir estimé qu'un budget qui diminue n'est pas nécessairement bon, M. François Marc s'est enquis des recherches sur le développement durable dans notre pays et de la spécialisation des différents pays dans le domaine de la recherche qui nourrit, chez chacun d'entre eux, des préoccupations particulières qu'il serait intéressant d'analyser. Il a fait valoir que la mondialisation de la recherche pouvait conduire des chercheurs français à déposer des brevets à l'étranger, au bénéfice de filiales étrangères de groupes internationaux. Il a jugé, enfin, que l'importance de la recherche publique en France, héritée de notre histoire, pouvait être un atout.

M. Yves Fréville a alors présenté à la commission trois observations :

- la première sur les féodalités que représentent les grands organismes de recherche, dont les relations avec l'Etat devraient être clarifiées ;

- la deuxième relative aux singularités du statut des chercheurs français qui passent, sans transition, de la situation de thésard allocataire à celle de chercheur à vie ;

- la troisième, enfin, sur la persistance, malgré un statut unique, d'un cloisonnement entre les chercheurs qui, le plus souvent, n'enseignent pas, et les universitaires qui ne font que rarement de la recherche.

M. Joël Bourdin a souhaité être éclairé sur la coexistence entre des excédents de ressources dans les établissements de recherche et le blocage du financement de certains projets des unités de base. Il s'est interrogé sur l'évaluation de la recherche française et le problème de l'exode des cerveaux.

M. Jacques Chaumont s'est inquiété de la baisse du nombre de post-doctorants étrangers accueillis dans notre pays.

Enfin, le président Jean Arthuis a souhaité connaître les premiers effets de la loi sur l'innovation et la recherche de juillet 1999.

M. Philippe Marini, rapporteur général, citant l'exemple des échanges universitaires franco-québécois, a déploré le caractère de moins en moins attractif des établissements français.

M. René Trégouët, rapporteur spécial, a remercié les différents intervenants pour leurs observations pertinentes et enrichissantes.

Il a déclaré, en réponse à M. François Marc, regretter non pas que l'effort public de recherche français soit important, mais que l'effet de levier des dépenses correspondantes soit trop faible et les incitations vis-à-vis des entreprises insuffisantes.

Il a précisé à M. Jean Arthuis, président, que, selon le quotidien « Les Echos », 250 chercheurs du secteur public s'étaient lancés dans la création d'entreprises, 550 projets académiques étant actuellement au stade de l'incubation. Il semble, en revanche, que les services d'activités industrielles et commerciales (SAIC) universitaires, prévus par la loi « Allègre » de juillet 1999, n'aient toujours pas commencé à fonctionner, faute de décret d'application.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la recherche et des nouvelles technologies.

Contrôle budgétaire - Mesures de régulation budgétaire - Communication

Puis la commission a entendu une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur les mesures de régulation budgétaire.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a présenté les deux dispositifs de régulation budgétaire ayant été mis en place durant l'année 2002, le premier, institué le 25 février 2002, ayant eu pour but de limiter prorata temporis les crédits dont pouvait disposer le gouvernement en charge des affaires jusqu'aux élections et de conserver les marges de manoeuvre du nouveau gouvernement, le second, institué le 12 août 2002, consistant en des « mesures conservatoires permettant le respect des engagements du gouvernement en matière de déficits publics ». Il s'est au préalable félicité de la meilleure information de la commission des finances du Sénat en matière de régulation budgétaire, due à l'entrée en application, au premier janvier 2002, de l'article 14 de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, qui dispose d'une part qu'« avant sa publication, tout décret d'annulation est transmis pour information aux commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances et aux autres commissions concernées » et d'autre part que « tout acte, quelle qu'en soit la nature, ayant pour objet ou pour effet de rendre des crédits indisponibles, est communiqué aux commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances », et à une interprétation souple de cet article qui concerne en pratique toute régulation en période électorale, les mesures de gel des crédits et les mesures définissant des objectifs de report.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a rappelé l'objet de la régulation du 25 février 2002, dite « régulation républicaine », qui a consisté à prendre en compte les échéances électorales dans la gestion des crédits budgétaires, en limitant les montants d'engagement ou de délégation des crédits au 31 juillet 2002 à 60 % des crédits disponibles sur les chapitres du titre III hors rémunérations et à 50 % des crédits disponibles sur le titre IV. Il a constaté que, selon les informations fournies à la commission, cette régulation s'était appliquée, globalement, de manière satisfaisante, certains aménagements ayant été néanmoins parfois consentis sur arbitrage du Premier ministre de l'époque, et certains abus ayant pu être constatés comme au ministère de la culture, où le nouveau ministre avait trouvé un titre IV aux dotations très dégradées. Il a jugé néanmoins que ces mesures de régulation budgétaire apparaissaient dérisoires au regard de la dérive des dépenses constatée par l'audit de MM. Bonnet et Nasse et qu'elles n'avaient pas été à la mesure de la dégradation du solde budgétaire.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a expliqué que des mesures conservatoires avait dû dès lors être prises le 12 août 2002 pour veiller à la stricte application du collectif budgétaire et favoriser le respect du solde inscrit dans ce collectif. Il a montré que le dispositif mis en place, qui consiste en 3,8 milliards d'euros de gel de crédits et un objectif de reports de 6,5 milliards d'euros, visait à stabiliser les déficits au niveau constaté lors de l'audit de MM. Bonnet et Nasse, et enregistré par le collectif de juillet 2002, c'est-à-dire à 44,6 milliards d'euros. Il a estimé cependant que rien n'indiquait aujourd'hui, au regard des dernières situations hebdomadaires, que ce déficit puisse être tenu sans mesures conservatoires supplémentaires, considérant que tout dépendrait de l'évolution des recettes, et notant que la progression des dépenses présentée par la dernière situation était de 4,3 %, alors que la hausse prévue en loi de finances initiale s'élevait à 2 %. Il a considéré que les mesures de régulation budgétaire du 12 août 2002 ne constituaient sans doute que le volet réglementaire accompagnant le collectif du 6 août 2002 et ne tenaient compte probablement que de la situation budgétaire telle qu'elle était connue à l'époque, jugeant probable une nouvelle régulation budgétaire accompagnant le collectif de fin d'année.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a souligné pour finir deux points majeurs. Il a observé que les reports de crédits de 2001 à la gestion 2002, qui se sont élevés à 14,13 milliards d'euros, s'ils avaient facilité l'exercice budgétaire 2001, avaient rendu très difficile la maîtrise des dépenses en 2002 et que les reports constituaient une épée de Damoclès pour l'exécution budgétaire. Il a considéré que deux mesures pourraient être prises pour limiter l'effet-report : annuler une large proportion de crédits qui font l'objet actuellement d'un objectif de report avant fin 2002 et limiter le nombre de chapitres inscrits à l'état H du projet de loi de finances 2003 et pouvant faire à ce titre l'objet d'arrêtés de reports. Il a enfin expliqué la nécessité d'une régulation ex-ante, plutôt qu'en cours ou en fin d'année, relevant que la pratique des régulations budgétaires, telle qu'elle a été pratiquée en 2002, régulation puis gel de crédits, n'était plus satisfaisante. Il a souhaité que plus de lisibilité et de responsabilité soient données aux gestionnaires, en appelant le gouvernement à opérer au plus tôt dans l'année les éventuelles mises en réserve de crédits nécessaires au respect de l'objectif de norme de dépenses, tel qu'il résulte de la loi de finances adoptée par le Parlement. Il a jugé, en effet, qu'il valait mieux des crédits garantis, même minorés, que des montants plus élevés, mais aléatoires.

La commission a alors donné acte au rapporteur général de sa communication.

PJLF pour 2003 - Crédits de l'équipement, des transports et du logement : III - Transports et sécurité routière : Routes et sécurité routière - Examen du rapport

Au cours d'une deuxième séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et du logement : III - Transports et sécurité routière : Routes et sécurité routière, sur le rapport de M. Gérard Miquel, rapporteur spécial.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a indiqué que, pour 2003, les crédits consacrés aux routes et à la sécurité routière atteignaient 1,3 milliard d'euros en moyens de paiement, soit une hausse importante de 10,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. Cependant, il a rappelé que le budget 2002 avait bénéficié de reports des crédits de l'ex-« fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables » (FITTVN). Il a ajouté que les moyens d'engagement demandés pour les routes et la sécurité routière en 2003 revenaient à 1,48 milliard d'euros, soit une diminution de 2,2 % par rapport au budget 2002.

Puis le rapporteur spécial a fait plusieurs observations.

Il a tout d'abord souligné que l'investissement routier poursuivait son ralentissement. Selon les chiffres de la commission des comptes des transports de la Nation, les dépenses en infrastructures routières ont fortement diminué sur la période 1996-2001. Les moyens du budget de l'Etat et ceux des sociétés concessionnaires d'autoroutes ont fortement chu et, seule, la hausse des investissements des collectivités locales a permis de limiter la réduction des programmes d'investissements. En 1996, le budget « infrastructures routières » des collectivités locales était le double de celui de l'Etat ; il est désormais plus du triple.

Par ailleurs, M. Gérard Miquel a noté un retard croissant dans la mise en oeuvre des contrats de plan Etat-régions.

Il a rappelé que le Gouvernement avait décidé d'affecter 5,1 milliards d'euros aux volets routiers du XIIe plan. La dotation 2000 était inférieure au 1/7e du montant inscrit pour la période 2000-2006, de même que la dotation 2001. Par ailleurs, en juillet 2002 a été décidé un gel des autorisations de programme d'environ 40 % pour les investissements routiers, ce qui a conduit à « neutraliser » 269,7 millions d'euros. Compte tenu de ce gel et des moyens prévus dans le budget pour 2003, le rapporteur spécial a relevé que le taux prévisionnel d'exécution des contrats de plan en 2003 serait de 46 %, c'est-à-dire nettement inférieur au taux moyen d'exécution de 57,1 %.

M. Gérard Miquel a ajouté que le lancement de nouvelles liaisons autoroutières concédées prenait du retard. En 2001, seulement 51 kilomètres d'autoroutes avaient été mis en chantier, contre 118 kilomètres annoncés, et 116,5 kilomètres d'autoroutes devaient être lancés en 2002 contre 275 annoncés. Pour 2003, il a toutefois relevé que le lancement de 312 kilomètres d'autoroutes était annoncé. Une dotation de 80,5 millions d'euros devrait figurer dans la loi de finances rectificative pour 2002 sur la ligne de subvention aux autoroutes concédées.

Dans une deuxième observation, M. Gérard Miquel a relevé que l'avenir des investissements routiers était encore incertain.

Le schéma directeur routier national (SDRN), approuvé par le décret du 1er avril 1992, est réalisé à 85,4 % au début de l'année 2002. La loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire a toutefois prévu que les anciens schémas sectoriels, dont le SRDN, sont remplacés par des schémas de services. A l'exception de quelques projets, les opérations prévues au SRDN sont reprises dans les schémas de services transport, sans que les calendriers de réalisation soient pour autant modifiés.

Le rapporteur spécial a souligné que rien n'était véritablement précisé pour les nouvelles liaisons autoroutières, en particulier du fait de la fin du régime de l'adossement, qui avait permis de développer notre système autoroutier. Les autoroutes nouvelles à concéder le seront dans le cadre de concessions particulières, ce qui rendra généralement nécessaire l'attribution de subventions publiques aux nouveaux concessionnaires. Le financement de ces subventions publiques sera partagé entre l'État et les régions dans le cadre d'une convention, comme le sont les investissements routiers non concédés des contrats de plan Etat-Région.

Le rapporteur spécial a donc rappelé que le Gouvernement avait chargé le Conseil général des ponts et chaussées et l'Inspection générale des finances d'un audit qui devrait être rendu d'ici le 31 décembre 2002. Il établira l'état précis des projets, leur faisabilité technique, le calendrier prévisible et leur coût pour l'Etat. Il évaluera par ailleurs l'intérêt socio-économique et les enjeux en termes d'aménagement du territoire de chaque projet, tant au plan français qu'au plan européen.

Le rapporteur spécial a ensuite indiqué qu'en conséquence de la chute des investissements et de l'allongement des concessions des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA), la situation des SEMCA s'améliorait fortement. Le montant de l'endettement total des six principales SEMCA devrait atteindre vers 2003 un montant maximum d'environ 22,4 milliards d'euros. Il devrait se résorber rapidement après 2005, pour s'éteindre avant la fin des concessions. Cependant, deux sociétés devraient faire face, conjoncturellement, à des problèmes spécifiques : la Société des autoroutes Paris-Normandie (SAPN) et la Société du tunnel routier du Fréjus (SFTRF). Un plan de recapitalisation de la SAPN sera mis en oeuvre sur la période 2002-2006 reposant sur le versement, à parts égales, de subventions d'exploitation et de dotations en capital, représentant chacune un montant global de 267 millions d'euros, mais le traitement de la situation financière de la SFTRF et d'autoroutes-tunnel du Mont-Blanc (ATMB) reste encore en suspens.

Le rapporteur spécial s'est ensuite interrogé sur l'avenir de l'intermodalité.

Il a rappelé qu'en janvier 2001, le Premier ministre avait annoncé la création d'un pôle multimodal alpin, qui s'inscrivait dans une politique de rééquilibrage entre les différents modes de transports, en particulier pour les franchissements des massifs alpins et pyrénéens. Dans ce contexte, la loi du 3 janvier 2002 relative à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport a créé deux nouveaux établissements publics administratifs nationaux : le « Fonds pour le développement de l'intermodalité dans les transports » (FDIT) et le « Fonds pour le développement d'une politique intermodale des transports dans le massif alpin » (FDPITMA). Le rapporteur spécial s'est interrogé sur l'opportunité de la création de ces établissements publics multimodaux, qui créent une véritable débudgétisation de la politique des transports, sans lui garantir aucunement des ressources supplémentaires. Il a relevé en effet que les recettes issues de l'ouverture du capital d'Autoroutes du Sud de la France (ASF) n'avaient été versées que très marginalement au secteur des transports (à peine 15 %, soit 280 millions d'euros sur un total de 1.800 millions) pour financer la part de concours publics de la France dans la concession de la section internationale Perpignan/Figuéras.

En quatrième observation, M. Gérard Miquel a indiqué qu'il souhaitait que l'effort en matière d'entretien et de réhabilitation du réseau routier national se poursuive.

Il a rappelé que les moyens consacrés à l'entretien courant du réseau routier national avaient évolué sensiblement depuis cinq ans, de même que les moyens de la réhabilitation du réseau. Dans le domaine des ouvrages d'art, les moyens nouveaux ont notamment permis les opérations de mise en sécurité des tunnels. Au total, depuis 1997, il a relevé que les crédits consacrés à l'entretien et à la réhabilitation du réseau avaient augmenté de plus de 28 %. Il a toutefois rappelé que les besoins restaient importants, puisque l'estimation globale des moyens financiers nécessaires à la remise en état du réseau national était de 2,2 milliards d'euros pour un patrimoine dont la valeur à neuf était estimée à plus de 122 milliards d'euros. Il a donc considéré essentiel que les moyens pour l'entretien et la réhabilitation du secteur routier ne fassent pas l'objet de régulations en cours d'année.

Puis le rapporteur spécial a présenté le « jaune budgétaire » consacré à la sécurité routière et créé à l'initiative de la commission. Il a indiqué que pour 2003, les crédits consacrés à la sécurité routière par l'Etat étaient estimés à 1,6 milliard d'euros, en hausse de 4,6 % par rapport au budget pour 2002.

Il a souligné que la création du « jaune budgétaire » répondait à deux préoccupations : d'une part, grâce à la nouvelle présentation des crédits de la sécurité routière, développer une analyse sur l'efficacité de cette politique interministérielle ;  d'autre part, mieux prendre en compte les différents acteurs de la sécurité routière, et notamment l'action des collectivités locales.

Pour mettre en oeuvre ces préconisations, il a rappelé qu'il avait mené une mission sur le thème de la recherche en sécurité routière, dont il allait présenter les conclusions après les questions des commissaires sur le budget 2003.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Jacques Oudin a salué le travail effectué par le rapporteur spécial sur un secteur difficile à analyser, car en pleine mutation. Il a ensuite fait plusieurs observations : l'Etat n'a plus les moyens de développer l'investissement routier ; les schémas de service, qui partaient d'une idée intéressante, ne sont plus la référence ; aucune solution n'a été trouvée pour remplacer le régime de l'adossement autoroutier, alors que le seul véritable instrument de péréquation que constituait le FITTVN, créé à l'initiative du Sénat, a été supprimé ; enfin la décentralisation créera bientôt un contexte nouveau pour les investissements et l'entretien du réseau routier. Il a estimé que la commission devait faire des propositions concrètes, notamment recenser les besoins des collectivités locales, évaluer les coûts des investissements dans le prolongement du rapport d'audit qui sera rendu prochainement, enfin réfléchir à une tarification des infrastructures au niveau européen. Il a rappelé que l'Allemagne allait mettre en place un système de télépéage pour les poids lourds. Puis il a souhaité un rééquilibrage des contributions respectives de l'usager et du contribuable au système de transport, tout en fixant une norme nationale de dépense en infrastructures de 0,5 à 0,6 % du PIB.

M. Gérard Miquel a répondu en souscrivant à plusieurs de ces points, et notamment au fait que l'Etat ne disposait plus des moyens financiers nécessaires pour entretenir des routes nationales, où par ailleurs les poids lourds circulent gratuitement. Il a souhaité que les pouvoirs publics réfléchissent davantage à la notion d'itinéraire et qu'une réflexion s'engage sur une nouvelle répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités locales.

M. Jean Arthuis, président, a fait observer qu'il faudrait accompagner tout transfert de compétence sur le réseau routier des moyens financiers correspondants.

M. Yves Fréville a indiqué qu'il n'était pas favorable aux mécanismes de péréquation par des fonds ou comptes spéciaux du Trésor, en soulignant que les dotations du budget de l'Etat présentaient plus de clarté. Il s'est déclaré inquiet des conséquences financières d'un éventuel transfert de compétence aux collectivités locales pour l'entretien du réseau national. Il a proposé de mettre en place un système de péage autoroutier variable en fonction de l'engorgement du réseau. Enfin, il a exprimé son hostilité au système actuel des contrats de plan Etat-régions, qui consiste en ce que l'Etat verse des dotations aux régions, qu'elles lui restituent sous forme de fonds de concours.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a répondu qu'un système de péage variable en fonction de l'encombrement d'une autoroute, pour séduisant qu'il soit, lui semblait difficilement réalisable. Il a rappelé sa préférence pour la définition d'itinéraires structurants qui seraient entièrement payants, car la division actuelle entre liaisons autoroutières gratuites et payantes ne répond à aucune logique, surtout lorsque ces liaisons s'enchaînent sur un même itinéraire, comme pour l'autoroute A 20. Il a ajouté que certaines routes devraient être rattachées au réseau autoroutier payant. Il a enfin indiqué que le viaduc de Millau ne pouvait être réalisé dans des délais raisonnables que par la mise en place d'un péage.

M. Michel Sergent a remercié le rapporteur de sa présentation. Il a fait observer que, selon les informations qu'il avait recueillies, le coût du viaduc de Millau serait très élevé. Il a rejoint les propos de M. Yves Fréville sur les travaux d'investissement des contrats de plan Etat-régions, pour lesquels l'Etat récupère de surcroît la TVA. Il a enfin fait observer, en matière de sécurité routière, les différences importantes en matière d'application de la législation sur les horaires de travail, entre les conducteurs de poids lourds français et certains de leurs homologues européens. Il s'est interrogé sur l'opportunité d'une harmonisation européenne sur cette question.

M. Gérard Miquel a souscrit aux observations formulées par M. Michel Sergent, en souhaitant notamment que l'harmonisation européenne progresse sur des questions essentielles à la sécurité dans les transports.

Puis la commission a réservé son vote sur les crédits de l'équipement, des transports et du logement : III - Transports et sécurité routière : Routes et sécurité routière jusqu'à l'examen des crédits de l'urbanisme et du logement, le président rappelant qu'il serait procédé à un vote unique sur l'ensemble des crédits de l'équipement.

Recherche en sécurité routière - Communication

La commission a ensuite entendu une communication de M. Gérard Miquel, rapporteur spécial des crédits des routes et de la sécurité routière, sur la recherche en sécurité routière.

Le rapporteur spécial a indiqué que la mission qu'il avait menée sur la recherche en sécurité routière partait d'un constat : chaque année, la France compte environ 8.000 tués sur les routes, et plus de 150.000 blessés, ce qui la situe dans le peloton de queue des pays européens, juste devant le Portugal ou la Grèce, mais loin derrière l'Allemagne ou la Grande-Bretagne.

M. Gérard Miquel a observé que les pouvoirs publics avaient pris conscience de la gravité de cette situation et consacraient des moyens croissants à la promotion de la sécurité routière. Toutefois, il a relevé que ces crédits n'étaient pas toujours consommés, et qu'il était permis de s'interroger sur leur efficacité, compte tenu du nombre persistant de victimes de la route dans notre pays. De surcroît, le rapporteur spécial a rappelé que jusqu'à une date récente, le budget de la sécurité routière ne représentait qu'une faible part des moyens consacrés à lutter contre la violence routière, si bien que son examen ne permettait absolument pas aux parlementaires de connaître l'ampleur des moyens engagés, ni les résultats de la politique menée en ce domaine.

Avec la publication d'un document de synthèse sur l'effort de la Nation en faveur de la sécurité routière, sous forme de « jaune budgétaire », le rapporteur spécial a souligné que les grands axes du problème étaient désormais mieux connus des décideurs publics. Pour prolonger cette démarche, il a rappelé qu'il avait souhaité apporter un éclairage particulier sur les moyens consacrés au domaine de la recherche en sécurité routière, en réalisant une mission sur cette question.

M. Gérard Miquel a tout d'abord fait observer que la recherche était devenue un élément essentiel pour progresser dans la lutte contre l'insécurité routière. En effet, si les années 70 et 80 avaient connu de fortes baisses du nombre de tués sur les routes grâce à des politiques nouvelles (limitation de vitesse, lutte contre l'alcoolémie, ceinture de sécurité etc..), la courbe de diminution globale des accidents s'était arrêtée et les progrès étaient plus difficiles à atteindre, quand l'on n'enregistrait pas des inversions de tendance, comme en 1998 ou en 2001.

Le rapporteur spécial a précisé que la recherche en sécurité routière était une discipline multiforme, qui associait de nombreux acteurs et mettait en oeuvre des techniques diverses. Il a souligné qu'elle représentait l'avenir de la politique de sécurité routière, les gisements de sécurité non exploités, et l'espoir grâce aux études techniques ou comportementales de prévenir la survenue d'un accident ou d'en limiter les conséquences. Il semblait dès lors impératif de faire le point sur les projets à venir, porteurs d'autant d'espoirs pour la sécurité de nos concitoyens.

Le rapporteur spécial a donc indiqué que dans le cadre de sa mission, il avait entendu les principaux responsables des établissements publics de recherche, l'Institut national de recherche sur les transports et la sécurité (INRETS) et le Laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC), les autorités de tutelle que sont les ministères chargés respectivement de la recherche et des transports, la déléguée interministérielle à la sécurité routière et les constructeurs privés. Il a également indiqué s'être rendu au centre de l'INRETS de Lyon-Bron et au Laboratoire d'accidentologie et de biomécanique (LAB) de Renault et Peugeot à Nanterre.

Le rapporteur spécial a ensuite fait plusieurs observations.

Il a tout d'abord fait observer que la recherche en sécurité routière impliquait avant tout les nouvelles technologies, ce qui conduisait à des réussites, mais laissait de côté de nombreux «gisements» de sécurité routière. Les établissements publics et privés de recherche sont particulièrement présents dans les programmes européens de recherche, impliquant l'utilisation des nouvelles technologies, la réalisation d'essais biomécaniques et la modélisation du corps humain.

M. Gérard Miquel a cependant souligné que cette recherche technologique de pointe négligeait bien des aspects de la sécurité routière.

Il a relevé que la majorité des accidents de la route se produisait en zone rurale, dans des zones qui se prêtaient encore peu aux innovations technologiques et qu'aucune recherche spécifique n'était développée sur ces accidents.

Il a fait observer que la recherche technologique ciblait les automobilistes, car l'Union européenne et la France disposaient de grands constructeurs. Il a regretté que les autres véhicules (deux-roues, poids lourds) dont le taux d'accident était considérablement plus élevé, et pour lesquels les marges de progrès semblaient les plus grandes, soient négligés, notamment par manque d'intérêt industriel.

Il a indiqué que la recherche humaine et comportementale était bien moins avancée que la recherche technologique, or se trouvaient là des marges importantes de progrès, notamment dans le domaine de l'évaluation du contrôle-sanction, ou de l'éducation.

Puis il a observé que la recherche publique n'était pas clairement positionnée comme complément à la recherche privée, sur les thèmes que celle-ci pourrait être amenée à négliger comme les accidents de piétons. Il a estimé nécessaire de définir clairement les spécificités de la recherche publique.

Enfin, il a noté qu'il existait toujours un frein à l'application rapide des nouvelles technologies, puisque la réglementation des véhicules était établie au niveau mondial (le WP 29 à Genève) et au niveau européen. Les réticences de certains de nos partenaires peuvent, dès lors, considérablement freiner l'application de la recherche, comme pour le limiteur-adaptateur de vitesse, qu'il a approuvé. Sur l'équipement des véhicules, il a rappelé que rien ne pouvait se faire isolément dans l'Union européenne.

En seconde observation, M. Gérard Miquel a expliqué que la recherche en sécurité routière devait impliquer l'ensemble des acteurs, et développer une évaluation des politiques publiques.

Il a rappelé que la recherche en sécurité routière impliquait aujourd'hui deux ministères, chargés respectivement de la recherche et des transports. Ainsi, il a noté que la recherche en sécurité routière n'associait pas encore l'ensemble des acteurs, en laissant de côté le ministère de la santé, les acteurs locaux ou certains acteurs privés, notamment les assurances, qui avaient des informations essentielles à délivrer. Si l'importance de solliciter le ministère de la santé était récemment apparue avec les questions relatives à l'usage des stupéfiants, le rapporteur spécial a estimé qu'il s'agissait, à plus long terme, de développer une approche médicale de l'accidentologie routière.

M. Gérard Miquel a aussi noté que la recherche était trop morcelée, sans directive précise de la part d'une institution unique et qu'il convenait dès lors d'organiser une vraie programmation. Il a noté que le programme national de recherche et d'innovation dans les transports terrestres (PREDIT) était un instrument de programmation, mais qu'il avait jusqu'à présent plutôt négligé l'aspect sécurité routière. D'un autre côté, il a noté que les directives de la direction de la sécurité et de la circulation routière (DSCR) étaient peu suivies d'effets. Il a enfin observé que la création du Conseil national de la sécurité routière (CNSR) en 2001, qui disposait de crédits très modiques, ne répondait pas encore à cette attente d'interlocuteur unique en matière de recherche, alors que cette institution avait le mérite de regrouper tous les acteurs de la sécurité routière (ministères, experts, usagers, constructeurs, assurances) et de pouvoir commander des études, et pourrait dès lors jouer le rôle de relais entre les pouvoirs publics et les chercheurs.

Enfin, il a souhaité, que comme toute politique publique, la recherche en sécurité routière se fixe des objectifs précis. Les pouvoirs publics gagneraient à établir une échelle de priorités en matière de recherche, avec des objectifs quantitatifs précis, sur le mode des évaluations de l'Union européenne, qui fixe des priorités en fonction du nombre de vies potentiellement sauvées.

En dernière observation, M. Gérard Miquel a souhaité améliorer les « bases » de connaissances actuelles et favoriser les expérimentations.

Il a expliqué que les statistiques actuelles ne recensaient pas tous les tués sur les routes, contrairement aux autres pays de l'Union européenne, et prenaient en compte les blessés selon des critères inadéquats. Il a expliqué qu'il fallait moderniser nos statistiques pour les rendre au moins comparables à l'échelle européenne.

Il a ensuite relevé que les fichiers de la police et de la gendarmerie étaient peu opérationnels pour la recherche, les fichiers des enquêtes détaillées d'accidents, encore partiels et essentiellement développés par les constructeurs privés. Il a souhaité associer public et privé pour créer une base de données fiable pour la recherche. D'une manière générale, il a souhaité qu'une réflexion s'engage sur l'implication des partenaires privés (constructeurs, équipementiers, assureurs) disposant d'informations essentielles pour la recherche.

Enfin, en dehors du strict cadre de la recherche en sécurité routière, il s'est déclaré favorable à ce qu'une réflexion soit engagée sur des mesures bien précises, comme par exemple la réforme du permis de conduire. Il a expliqué qu'il ne lui apparaissait pas logique qu'un permis de conduire soit délivré à vie. Les statistiques montrent en effet que le risque d'accidents est élevé pour les jeunes conducteurs, de même que pour les conducteurs âgés. Il a estimé qu'il conviendrait, par exemple, de délivrer un permis de conduire provisoire à faire valider progressivement, en fonction du comportement sur la route. Des formations devraient également intervenir au long de la vie du conducteur. Il conviendrait également de développer l'étude sur les altérations de conduite liées aux déficiences physiques ou à l'âge et de prendre des mesures. Il a déclaré attendre de réels progrès dans ces domaines.

En conclusion, M. Gérard Miquel a souligné que la recherche dans le domaine de la sécurité routière était véritablement une chance à saisir pour l'avenir. Elle doit permettre de trouver de nouvelles « clés » pour réduire le nombre de tués et blessés sur les routes. Pour cela, il faut qu'elle poursuive ses travaux en matière de nouvelles technologies, mais qu'elle investisse également d'autres champs. Il a estimé surtout impératif que le lien entre la recherche et les décideurs publics soit maintenu. Il a expliqué que s'il était important que la recherche travaille sur des sujets de long terme, qui produiront des résultats dans 10 ou 20 ans, il était aussi essentiel que les chercheurs puissent répondre clairement à des demandes spécifiques dans des délais rapides et se mettent ainsi au service de l'action publique.

A l'issue de la présentation du rapporteur spécial, la commission lui a donné acte des conclusions de sa communication et a décidé d'autoriser leur publication sous la forme d'un rapport d'information.

PJLF pour 2003 - Crédits de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche : I - Jeunesse et enseignement scolaire - Examen du rapport

La commission a ensuite examiné les crédits de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche : I - Jeunesse et enseignement scolaire, sur le rapport de M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial.

A titre liminaire, M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a exposé que les crédits demandés pour le budget de la jeunesse et de l'enseignement scolaire dans le projet de loi de finances pour 2003 progressaient de 2,2 %. Il a ajouté que cette progression était plus faible que celle de l'an passé (+4,1 %), mais que le budget de la jeunesse et de l'enseignement scolaire demeurait, de loin, le premier budget de la nation et que les efforts consentis en faveur de l'enseignement scolaire, comparables à la moyenne des pays de l'organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) pour l'enseignement primaire, étaient nettement plus élevés que cette même moyenne pour l'enseignement secondaire.

Il a ensuite indiqué que l'évolution des effectifs faisait débat, mais il a estimé, pour sa part, qu'il convenait de rapporter l'évolution du nombre des personnels (en hausse au cours des dernières années) à celle du nombre des élèves (en baisse au cours des dernières années). Quoi qu'il en soit, il a rappelé que le Gouvernement avait choisi d'adapter l'évolution des effectifs de personnels à celle des élèves, dans un contexte général de nécessaire maîtrise des finances publiques.

Jugeant que le Gouvernement avait communiqué de manière maladroite sur la suppression d'emplois de maîtres d'internat-surveillants d'externat (MI-SE), il a ensuite fait part de ses inquiétudes quant au financement des postes d'assistants d'éducation qui pourraient être créés en substitution à partir de la rentrée 2003.

Puis il a estimé que le projet de budget de la jeunesse et de l'enseignement scolaire pour 2003 comportait un certain nombre de mesures attendues, comme le développement des actions « école ouverte », la mise en place de classes expérimentales à effectifs réduits dans le cadre de la lutte contre l'illettrisme, la revalorisation des infirmières et des directeurs d'écoles, ainsi que l'approfondissement du plan handiscol, dont il a toutefois souligné qu'il demeurait insuffisant au regard des besoins d'intégration scolaire des jeunes handicapés.

Cela étant, il a estimé que le ministère de l'éducation nationale avait encore des efforts à faire pour améliorer la transparence et le contrôle de la gestion de ses personnels, pour limiter la surconsommation de moyens lors des rentrées scolaires, et surtout pour réfléchir à la redéfinition des obligations de service des enseignants, ces dernières n'ayant pas suivi l'évolution des pratiques et des besoins pédagogiques.

Il a estimé que le ministère de l'éducation nationale demeurait également confronté à des défis : le rejet de l'école par une fraction croissante des jeunes, corollairement le nombre important de jeunes sortant du système scolaire sans qualification, la violence à l'intérieur et autour des établissements, ainsi que les inégalités à l'école, les inégalités entre écoles, et les inégalités des écoles entre les régions.

Enfin, il a indiqué que la baisse de l'attractivité des concours d'enseignants du second degré confrontait l'éducation nationale à un dilemme entre la pénurie de reçus aux concours, d'un côté ; la baisse du niveau, de la motivation ou de l'adéquation des nouveaux enseignants, de l'autre.

En conclusion, il a estimé que le projet de budget de la jeunesse et de l'enseignement scolaire pour 2003 était un budget de transition qui lançait le débat sur le point de savoir s'il fallait surtout avoir toujours plus ou faire toujours mieux.

Un large débat s'est ensuite ouvert.

Tout en soulignant qu'il s'interrogeait sur les conséquences de la suppression des emplois de MI-SE, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, a indiqué qu'il partageait les analyses précédentes et que, compte tenu du niveau considérable atteint par les moyens consacrés à l'enseignement scolaire, la priorité devait être aujourd'hui accordée à leur allocation optimale et à l'organisation de leur articulation avec les autres politiques publiques.

M. Adrien Gouteyron a exprimé son souhait que le projet de budget de la jeunesse et de l'enseignement scolaire pour 2003 ne soit qu'un budget de transition, en précisant que, si ce budget mettait fin à la dérive des dépenses, il ne dessinait pas encore vraiment des orientations nouvelles. En particulier, il a estimé nécessaire que le Gouvernement précise rapidement ses intentions en matière de surveillants. Enfin, il a souligné que les besoins de renouvellement des enseignants liés à l'accélération des départs en retraite constituaient non seulement un défi, mais aussi une occasion pour remettre en cause leur moule disciplinaire.

M. Paul Girod s'est interrogé sur la formation des personnels en charge de la scolarisation à deux ans des enfants à l'école maternelle.

M. Jean Arthuis, président, a fait part de son étonnement devant le fait que des néotitulaires sortant d'institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) soient nommés directeur d'école primaire.

En réponse, M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé que le Haut conseil de l'évaluation de l'école avait conclu qu'il n'existait pas de lien clair entre le nombre d'élèves par classe et la qualité de l'enseignement, d'une part, que le nombre moyen d'élèves par enseignant dans le second degré s'établissait aujourd'hui, en France, à 12,8 contre 19,3 au Canada ou 17,7 aux Pays-Bas, d'autre part. Il a estimé que la course systématique à la baisse du nombre d'élèves par classe avait sans doute constitué une erreur.

S'agissant de la création des postes d'assistants d'éducation, il a par ailleurs précisé que son financement serait assuré pour partie par le redéploiement de crédits correspondants à des postes d'aides éducateurs non pourvus, mais il n'en a pas moins jugé indispensable que le Gouvernement clarifie ses intentions.

S'agissant des directeurs d'écoles, il a précisé que leur situation actuelle résultait notamment de ce que ceux-ci étaient autrefois des instituteurs parmi d'autres faisant fonction, d'où des réticences initiales à ce qu'ils bénéficient de prérogatives ou d'indemnités particulières.

S'agissant enfin de la scolarisation à deux ans, il a estimé nécessaire une réflexion courageuse sur les personnels nécessaires et souligné que ce cas particulier posait plus généralement le problème de la formation initiale, de l'affectation et de la formation continue des enseignants, en rappelant le paradoxe selon lequel les enseignants les plus expérimentés sont nommés dans les établissements les plus faciles.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la jeunesse et de l'enseignement scolaire.

PJLF pour 2003 - Audition de M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères et de M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie

Au cours d'une troisième séance, tenue sous la présidence conjointe de M. Jean Arthuis, président, et de M. André Dulait, président de la commission des affaires étrangères, la commission a procédé à l'audition de M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères et de M. Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, sur lescrédits de leur département ministériel pour 2003.

Le compte rendu de ces auditions figure à la rubrique « Affaires étrangères ».

Jeudi 24 octobre 2002

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

PJLF pour 2003 - Audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, et de Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, et deMme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, sur les crédits de leur département ministériel.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a tenu à insister sur la grande inertie des dépenses budgétaires de son ministère, en raison notamment du poids des crédits consacrés aux prestations sociales comme l'allocation parent isolé (API), l'allocation pour personne handicapée (AAH), la couverture maladie universelle (CMU) ou les crédits du fonds spécial d'invalidité. Le budget demandé pour 2003 s'élève à 9,4 milliards d'euros, soit un montant relativement faible par rapport aux sommes très importantes dont le ministre a la responsabilité dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Néanmoins, ces crédits progressent de 400 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2002, soit une hausse de 4,4 % en 2003. A périmètre constant, c'est-à-dire hors transfert, cette progression est même de plus de 5 %.

Le ministre a considéré que son projet de budget 2003 était sincère et qu'il allait dans le sens de la nécessaire clarification entre Etat et assurance maladie. Le projet de budget 2003 est un projet de budget sincère qui assume le financement des dettes laissées par le précédent gouvernement dans le domaine des grandes prestations comme l'Allocation parent isolé (API), l'Allocation adulte handicapé (AAH), la Couverture maladie universelle (CMU) et le fonds spécial d'invalidité, qui représentent près de 70 % des dépenses du ministère. Les financements dans ce domaine progressent de 5,8 % entre la loi de finances 2002 et le projet de loi de finances pour 2003, et encore de 2,2 % si on tient compte des ouvertures du collectif d'été. C'est un effort très important pour faire face à un héritage lourd à assumer. Il a ajouté que le budget 2003 allait dans le sens d'une clarification des relations entre l'Etat et la sécurité sociale. A cet égard, le remboursement de la moitié de la dette de l'Etat envers la sécurité sociale et le retour à l'assurance maladie d'une partie des ressources détournées par le financement des 35 heures sont des mesures importantes de clarification, même si elles sont portées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-François Mattei a ensuite expliqué que le projet de budget comportait trois modifications de périmètre : la prise en charge par l'Etat du coût des stages de résidanat chez les médecins généralistes, et le transfert à l'assurance maladie des centres de soins spécialisés pour les toxicomanes ainsi que celui des dépenses afférentes à l'interruption volontaire de grossesse. Il s'agit essentiellement, en effet, de dépenses de soins.

Il a indiqué que les crédits demandés pour 2003 participaient à l'effort collectif de maîtrise et d'optimisation des dépenses publiques, en donnant trois exemples. Les moyens en personnel et en fonctionnement du ministère ont été analysés dans le cadre de l'effort global de réduction des effectifs de l'Etat et au regard d'une analyse des missions et des moyens. Il a ainsi été décidé de diminuer de 100 le nombre de postes budgétaires dans le projet de loi de finances. Par ailleurs, au titre de la pause dans les mesures catégorielles décidée par le gouvernement, le budget 2003 ne contient aucune nouvelle mesure à ce titre. Les agences sanitaires disposent d'une trésorerie accumulée grâce à des crédits de l'Etat non consommés. La gestion de ces agences est parfois loin d'être optimale, comme vient de le souligner la Cour des comptes. Dans une période où chacun doit faire des efforts, il a paru normal au Gouvernement que l'argent public ne dorme pas, et c'est pourquoi il a décidé de mettre à contribution les fonds de roulement de certaines agences en 2003, ce qui incitera les directeurs des agences à améliorer leurs modes de fonctionnement. Cette mesure représente une économie de 45 millions d'euros en 2003. Enfin, compte tenu du résultat mitigé des actions subventionnées par le budget de l'Etat pour moderniser les établissements hospitaliers, le gouvernement a souhaité mettre un terme à cette procédure. Ainsi, aucune nouvelle opération de modernisation d'établissements ne sera désormais plus financée par le fonds d'investissement de modernisation des hôpitaux (FIMHO), et seules les opérations déjà décidées seront poursuivies.

M. Jean-François Mattei a ensuite fait part de sa volonté de faire de son ministère un ministère exemplaire et pilote dans la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances : la présentation du budget pour 2003 a subi des modifications liées à des changements de nomenclature et de présentation des agrégats, afin de préfigurer les programmes de la loi organique. Ces nouveaux agrégats tiennent compte de la nouvelle structure gouvernementale, mais aussi des travaux d'ores et déjà menés au sein du ministère sous l'égide de M. Etienne Marie, nouveau directeur de l'administration générale, du personnel et du budget, pour réfléchir à la future structure de programme qui sera nécessaire dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances. Le ministre a ainsi exprimé son souhait de pouvoir adopter une véritable structure de programme pour le prochain projet de loi de finances.

M. Jean-François Mattei a indiqué que le budget de son ministère traduisait les priorités du gouvernement et mettait en place les moyens nécessaires pour la conduite des grands chantiers annoncés par le Président de la République le 14 juillet dernier. Le handicap constitue l'un des trois grands chantiers sociaux du quinquennat et le budget 2003 est à la hauteur de cet enjeu majeur. S'en tenant à l'essentiel, le ministre a précisé que les dépenses consacrées aux personnes handicapées progresseraient l'an prochain de 5,6 %, que 3.000 places de centres d'aide par le travail (CAT) seraient créées, ce qui représente un doublement de l'effort de création de places par rapport au plan 2001/2003 que le précédent gouvernement avait élaboré, que 63 millions d'euros supplémentaires seraient prévus pour l'amélioration des structures d'aide et de prise en charge pour les personnes handicapées : ainsi, 500 nouveaux postes d'auxiliaires d'intégration scolaire sont prévus afin de favoriser la scolarisation des enfants handicapés.

Le ministre a ensuite indiqué que la prévention, l'éducation à la santé et le dépistage figuraient au premier rang de ses priorités dans le domaine de la santé. Considérant que la responsabilité de l'Etat se mesurait à la priorité qu'il accorde à la santé publique, il a jugé que le choix implicite du curatif par rapport au préventif dans notre pays n'était plus acceptable : il convient donc de développer progressivement, mais avec détermination, une véritable culture de la prévention dans notre pays. Au total, les crédits du projet de loi de finances pour 2003 affectés aux programmes de santé publique ciblés sur la prévention, en particulier le cancer et les maladies transmissibles, sont en forte progression, de 30 %, soit un montant de 173 millions d'euros. Il a annoncé que le gouvernement déposerait en 2003, si possible au premier semestre, un projet de loi quinquennale en santé publique, qui concernera l'ensemble des politiques de santé, y compris la santé scolaire et la santé au travail, 5 millions d'euros étant d'ores et déjà provisionnés dans le projet de loi de finances pour 2003.

Rappelant que le cancer était la première cause de mortalité prématurée en France, il a souligné que le projet de budget prévoyait 35 millions d'euros supplémentaires pour la lutte contre le cancer. Les crédits budgétaires consacrés au cancer seront ainsi en 2003 quatre fois supérieurs à ce qu'ils étaient en 2002. D'ores et déjà, et avant même les conclusions de la commission que le ministre a installée avec Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, deux orientations peuvent être indiquées : le dépistage intra-familial des femmes à risque pour le cancer du sein débutera en 2003, et, à compter de 2004, l'extension du dépistage systématique du cancer du sein sur l'ensemble du territoire sera poursuivie, alors que seuls 32 départements organisent actuellement le dépistage.

M. Jean-François Mattei a précisé que, dans le domaine du syndrome immunodéficitaire acquis (SIDA), la politique du ministère répondait à l'engagement présidentiel, exprimé à nouveau avec force au cours de la XIVe conférence internationale sur le SIDA à Barcelone. Elle intègre les nouvelles données épidémiologiques, mais aussi sociologiques et thérapeutiques disponibles. Au total, l'effort du ministère pour la lutte contre le SIDA représente près de 65 millions d'euros dans le budget 2003. En outre, les crédits consacrés à la coopération internationale devraient progresser de 30%, à 8,2 millions d'euros, l'accent étant porté sur l'aide publique au développement dans le domaine de la santé. Il a ajouté avoir voulu renforcer les initiatives françaises en matière de lutte contre le SIDA, en particulier le groupement d'intérêt public « Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau » (ESTHER).

Abordant la question de la lutte contre la drogue et la toxicomanie, le ministre a estimé que la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) jouait un rôle clé dans ce dispositif. Il s'est félicité qu'un nouveau président de la MILDT, un médecin, qui est également un professionnel de terrain, ait été nommé la veille en Conseil des ministres. Ce changement de président contribuera à donner une nouvelle impulsion à la politique, qui a parfois un peu souffert au cours des dernières années d'une approche trop rigide et trop globale. En ce qui concerne les crédits, ceux destinés à la MILDT sont ramenés de 45,6 millions d'euros à 40 millions d'euros en 2003, en raison de la nécessité de rechercher une meilleure synergie avec l'Institut national pour la prévention et l'éducation sanitaire (INPES) pour la communication. Mais cela traduit également la volonté du ministre de mieux gérer les crédits de la MILDT. Son nouveau président devra adresser au Gouvernement, dans quelques semaines, un état des lieux de la situation qu'il a trouvée ainsi que des propositions opérationnelles.

M. Jean-François Mattei a indiqué que la sécurité sanitaire était une exigence indispensable de la politique de santé. Celle-ci doit s'appuyer très fortement sur la fonction d'expertise scientifique et d'évaluation des risques confiée aux agences sanitaires. La préoccupation du ministre est de veiller à la séparation de cette fonction de la décision politique pour ne pas mélanger l'évaluation des risques avec la question de leur gestion. Il en va de la confiance de la population envers l'action publique. Il s'est réjoui de ce que la France dispose aujourd'hui d'un dispositif de sécurité sanitaire nettement plus performant qu'il y a une dizaine ou quinzaine d'années. Le projet de budget pour 2003 intègre ainsi le financement des diverses agences qui assurent la veille et la sécurité sanitaires. Sera ainsi poursuivi l'effort de développement en ce domaine, en particulier en donnant vie dans les prochains jours à l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE), qui n'était jusqu'à présent que virtuelle mais qui sera installée et en mesure de commencer son travail en novembre. Les différentes agences seront financées en 2003 à la fois par le budget de l'Etat, à hauteur de 53 millions d'euros, et par les fonds accumulés par les agences au cours des années passées. Le recours à ces deux sources de financement permettra de financer 10 millions d'euros de mesures nouvelles en 2003, en particulier l'embauche de 150 personnes. Les moyens propres du ministère sont également renforcés à hauteur de 14,5 millions d'euros, en hausse de 7 millions d'euros en matière de prévention et de lutte contre les risques sanitaires liés aux facteurs d'environnement, la qualité de l'environnement immédiat étant en effet de plus en plus liée aux questions de santé. Le ministre a expliqué que, tout en adhérant à l'idée de précaution, il considérait que le principe de précaution n'était pas une « formule magique » permettant de résoudre tous les problèmes. Le contenu de ce principe doit faire l'objet d'un vaste débat dans la société et, pour ce faire, l'expertise des agences doit être mise à la disposition de la population.

M. Jean-François Mattei a indiqué que la CMU permettait l'accès aux soins aux plus démunis : près de 4,7 millions de personnes bénéficient ainsi gratuitement d'une couverture complémentaire maladie. Depuis cet été, l'accès à une couverture complémentaire pour les personnes situées juste au-dessus du plafond de revenu pour bénéficier de la CMU est également possible. La prochaine étape, a-t-il ajouté, est certainement de transformer ce dispositif qui a fait ses preuves afin de donner à tous les Français la possibilité d'accéder à une couverture complémentaire. Dans un premier temps, c'est-à-dire dès 2003, le Gouvernement a décidé de revaloriser significativement le montant de la déduction des organismes complémentaires qui participent à la CMU, de 228 à 283 euros. Cette déduction n'avait pas été revalorisée depuis 1999, date de la mise en place de la CMU. Il a également décidé de contrôler davantage l'utilisation de la CMU par ses bénéficiaires, qui fait l'objet d'interrogations nombreuses, afin que le bilan financier soit globalement neutre.

Le ministre a ensuite abordé la famille et la politique familiale. Les interventions publiques en direction des familles figurent, pour l'essentiel, au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Dans le domaine strictement budgétaire, le gouvernement a prévu deux mesures fiscales fortes en faveur des familles : le doublement de l'abattement pour les donations entre les grands-parents et les petits-enfants, et l'augmentation des seuils pour les emplois familiaux, qui a fait l'objet d'amendements au cours des débats à l'Assemblée nationale. Sur le budget du ministère de la santé, il convient de relever essentiellement que la dotation 2003 pour l'API  progresse de 8,8 %, à 805 millions d'euros. En tenant compte de l'abondement intervenu cette année sur cette ligne, qui avait été sous-dotée par la loi de finances initiale pour 2002, la progression est de 4,5 %. Plus de 175.000 personnes sont concernées en 2003. Une réflexion concernant une réforme de cette allocation est par ailleurs engagée, dont le ministre aura l'occasion de reparler dans les mois à venir.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, a indiqué que les crédits alloués à la prise en charge des personnes handicapées passeraient de 5,6 milliards d'euros en 2002 à 5,9 milliards d'euros en 2003, dont 4,5 milliards sont consacrés à l'AAH, 1 milliard aux centres d'aide par le travail (CAT), 263,5 millions au fonds spécial d'invalidité et plus de 12 millions aux instituts des jeunes aveugles et des jeunes sourds. Le projet de budget pour 2003 permet ainsi de doubler le nombre de places en CAT, soit 3.000 places supplémentaires l'année prochaine, ce qui permettra d'atteindre 100.000 places dans les CAT en France. Elle a indiqué que les structures de prise en charge bénéficieront de 63 millions d'euros supplémentaires. Elle a noté la mise en place, en vue de la pérennisation des auxiliaires d'intégration scolaires, postes aujourd'hui occupés par des emplois-jeunes, d'un groupe de travail commun avec le ministère de la jeunesse et de l'éducation nationale sur les statuts de ces personnels, qui doit remettre ses conclusions en mars 2003. La secrétaire d'Etat a donc pris l'engagement de maintenir les aides-éducateurs sur ces postes jusqu'en juin 2003. Elle a également indiqué avoir engagé une réflexion sur la question de l'efficience du système d'insertion professionnelle des bénéficiaires de l'AAH et du renforcement de l'évaluation médicale dans les COTOREP. L'insertion des personnes handicapées dans la société bénéficie non seulement de crédits de l'État, mais aussi de dotations inscrites en loi de financement de la sécurité sociale et dans les budgets des collectivités territoriales.

La secrétaire d'Etat a présenté les quatre principaux axes de sa politique : conforter l'engagement des acteurs de la lutte en faveur des handicapés, qui est véritable mais parfois insuffisamment visible, en particulier au niveau des collectivités territoriales et des associations ; diversifier les modalités de prise en charge des personnes handicapées en introduisant davantage de souplesse ; engager des expérimentations, qui seront facilitées par le projet de loi constitutionnelle sur la décentralisation ; régler certains problèmes spécifiques, comme celui des poly-handicapés ou des handicapés vieillissants.

Enfin, elle a indiqué avoir confié deux missions à des personnalités, la première à Mme Geneviève Levy, députée de Seine-Maritime, sur l'accessibilité des transports aux personnes handicapées, et la seconde au professeur Lecomte, sur les prestations spéciales.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial des crédits de la santé, de la famille et des personnes handicapées, s'est dit impressionné par la faiblesse des marges de manoeuvre dont dispose le ministre en raison de la rigidité de son budget. Il s'est félicité des engagements en matière de clarification des financements et de mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, même s'il a noté un taux extrêmement faible de réponses à son questionnaire budgétaire à la date fixée par ladite loi organique. Il a ensuite souhaité obtenir des informations relatives au financement du protocole hospitalier de mars 2000, dont la gestion avait été très critiquée par la Cour des comptes. Puis il a noté la faiblesse du taux de consommation des crédits du FIMHO, qui a empêché de financer les nombreuses opérations inscrites à son programme, et a voulu savoir les orientations que le ministre entendait donner à cet instrument. Concernant les minima sociaux, il a interrogé le ministre sur l'intention du Gouvernement de réformer le RMI pour le transformer en revenu minimum d'activité (RMA) et a voulu savoir si cette réforme s'inspirerait de la proposition de loi votée par le Sénat le 8 février 2001 et visant à instituer un RMA. Il s'est enquis de la préparation par le ministère de la loi organique relative aux lois de finances, notamment de l'élaboration d'indicateurs de résultats et de performances et de la mise en place de programmes. Il a voulu savoir pourquoi la contribution à l'initiative de solidarité thérapeutique internationale était augmentée en 2003 de 1,7 million d'euros, alors que les crédits inscrits à ce titre les années précédentes n'ont été consommés qu'à hauteur du tiers. Enfin, il a souhaité obtenir des informations sur les consultations engagées en vue de la préparation de la loi de programmation quinquennale sur la santé.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur les compétences que pourraient exercer les collectivités territoriales en matière de santé publique après le vote du projet de loi sur la décentralisation.

En réponse à M. Adrien Gouteyron, M. Jean-François Mattei a tout d'abord souligné que le FIMHO était un fonds dont les ressources n'étaient pas utilisées correctement dans la mesure où son fonctionnement était trop centralisé. Il a annoncé que les projets en cours faisant l'objet d'un financement par le FIMHO iraient à leur terme mais que, par la suite, le financement des projets d'investissement dans les hôpitaux se ferait via le plan « Hôpital 2007 ».

S'agissant de la politique de prévention, M. Jean-François Mattei a précisé qu'il fallait entendre par « familles à risque » susceptibles de faire l'objet d'un dépistage systématique du cancer du sein, les familles pour lesquelles une analyse génétique révèlerait que certaines femmes sont porteuses du gène du cancer du sein, présentant ainsi une prédisposition à développer cette maladie. Il a estimé que ce genre de dépistage participait d'une politique de prévention d'avant-garde. En outre, il a annoncé la mise en oeuvre d'un dépistage systématique du cancer du sein à partir de 2004 et par la suite l'extension de ce dépistage à deux autres formes de cancers facilement dépistables : le cancer du côlon et celui du col de l'utérus.

S'agissant des programmes de coopération internationale, M. Jean-François Mattei a rappelé que ceux-ci avaient débuté en 2001 et qu'ils seraient relancés par son ministère. Il a rappelé à cet égard que trois accords avaient déjà été signés sur la lutte contre le SIDA.

En réponse à M. Jean Arthuis, président, M. Jean-François Mattei a d'abord regretté que l'espace européen n'ait pas été construit sur le thème de la santé et a souligné le besoin d'une agence de santé publique au niveau européen. À un niveau décentralisé, il a estimé que certaines compétences ne pouvaient être entièrement dévolues à l'échelon local. Il a rappelé que les départements disposaient de compétences sanitaires et sociales mais qu'en la matière une certaine recentralisation s'imposait, notamment dans le domaine de la santé publique et de la prévention afin d'assurer une réelle égalité entre tous les citoyens. Il a en outre précisé que les compétences d'ordre sanitaire devaient relever du territoire régional et celles d'ordre social plus spécifiquement du territoire départemental. Il a enfin estimé que privilégier la proximité en matière de santé était essentiel et devait mener à une réflexion sur un juste transfert de compétences.

En réponse à la question de M. Adrien Gouteyron s'agissant de l'articulation entre le RMI et l'AAH, Mme Marie-Thérèse Boisseau a estimé que l'objectif d'insertion professionnelle des handicapés devait être primordial et que l'assistance devait intervenir en dernier recours. Elle a cependant reconnu que, malgré les réels efforts de réinsertion, il demeurait un noyau dur de handicapés ne pouvant être réinsérés professionnellement. Elle a ensuite fait part de sa volonté de simplifier et de clarifier les dispositifs à destination des handicapés.

S'agissant de la révision de la loi de 1975 sur les personnes handicapées, elle a affirmé son souhait d'aboutir a une loi simple et claire, et annoncé la discussion prochaine d'une loi-cadre qui définirait les principaux objectifs de la politique en faveur des handicapés et laisserait place à l'expérimentation et à l'inventivité. Elle a estimé que cette réflexion devait être menée en collaboration avec les parlementaires et avec les acteurs de terrain.

M. François Trucy a souhaité interroger M. Jean-François Mattei sur le mode de gestion de l'assurance maladie, sur la couverture de la responsabilité médicale des médecins et des cliniques ainsi que sur la possibilité de créer un ordre des masseurs-kinésithérapeutes. Il a ensuite enjoint Mme Marie-Thérèse Boisseau de mieux faire respecter les places de parking réservées aux conducteurs handicapés.

M. Yann Gaillard a d'abord tenu à saluer l'existence d'un ministère de la santé à part entière. Il a ensuite souhaité interroger le ministre sur divers sujets : l'accompagnement et l'information des familles de personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer, la nécessité de créer des chaires de médecins dédiées à la santé publique et enfin a évoqué les dépenses d'appareillage.

M. Auguste Cazalet a estimé que la politique en faveur des handicapés devait être une priorité du gouvernement et a souhaité que la secrétaire d'Etat développe les grands axes de sa politique. Il s'est également inquiété d'une recrudescence de la méningite dans le sud-ouest de la France, notamment dans le département des Pyrénées-Atlantiques, et a souhaité connaître les causes de cette recrudescence.

Mme Marie-Claude Beaudeau a d'abord tenu à souligner que le contexte de rigueur budgétaire actuel allait contribuer à décrédibiliser le discours plein de bonnes intentions du ministre de la Santé. Elle a ensuite insisté sur le fait que la prochaine loi de programmation de santé publique du premier semestre 2003 faisait l'objet de très fortes attentes, de la part du personnel médical notamment. S'agissant du dépistage systématique du cancer du sein, elle a souhaité savoir comment les évaluations statistiques seraient traitées au niveau national et elle a insisté sur l'existence d'un monopole instauré par la compagnie américaine « Myriad Genetics » en matière de technique du dépistage de ce cancer. Enfin, s'agissant des handicapés, elle s'est émue de l'impossibilité pour certains enfants handicapés d'être scolarisés et a estimé le nombre de ces enfants en France à 6.600.

M. Philippe Adnot a constaté que, dans le cadre de la politique de prévention, les départements manquaient de moyens eu égard au dépistage du SIDA. Il a également rappelé que 33 départements avaient mis en place une expérimentation en matière de dépistage du cancer du sein et a souhaité savoir ce qu'il adviendrait de cette expérimentation si cette politique de dépistage était recentralisée. Il a estimé qu'une clarification des règles du jeu était nécessaire en la matière.

M. Michel Moreigne a souhaité savoir si les conventions tripartites signées par les établissements d'accueil des personnes âgées dans le cadre de l'allocation personnalisée d'autonomie allaient être encadrées par le ministre.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a posé deux questions, l'une s'adressant à M. Jean-François Mattei et portant sur la mise en oeuvre de la politique de prévention en matière de lutte contre la toxicomanie notamment s'agissant de la coordination entre les actions du ministère de la Santé et celles de la MILDT, l'autre s'adressant à Mme Marie-Thérèse Boisseau et concernant le mode de financement très complexe de certains établissements d'accueil des handicapés.

M. Jean Arthuis, président, s'est enfin inquiété du déclin de la démographie médicale dans certaines régions et a interrogéMme Marie-Thérèse Boisseau sur le statut des CAT et sur leur accessibilité aux handicapés et à d'autres populations.

En réponse à ces interventions, M. Jean-François Mattei a d'abord tenu à rappeler que certains des sujets évoqués par les membres de la commission des finances, notamment celui de la démographie médicale, seraient plus spécifiquement traités dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et qu'il aurait l'occasion d'y revenir.

En réponse à M. François Trucy, il a rappelé qu'un groupe de travail destiné à mieux définir le domaine de compétence de l'assurance maladie avait été créé à l'occasion de la dernière réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale. S'agissant de la couverture de la responsabilité médicale des médecins, il a précisé qu'une proposition de loi d'origine sénatoriale portant spécifiquement sur ce sujet serait discutée devant le Parlement avant le 31 décembre de cette année. Enfin, s'agissant de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, il a estimé qu'il n'existait aucun obstacle majeur à sa création, mais il a aussi souligné la nécessité de régler le problème du conseil des professionnels de santé.

En réponse à M. Yann Gaillard, il a constaté que la maladie d'Alzheimer était une maladie désarmante et qu'elle constituerait un des sujets prioritaires de la prochaine loi de programmation de santé publique. Il a également estimé que le domaine de la santé mentale était en jachère dans notre pays. Il a rappelé que la santé publique était une spécialité mal aimée en France et a souhaité faire évoluer les esprits en créant notamment un grand institut de santé publique à l'image de celui existant à Londres.

En réponse à M. Auguste Cazalet, M. Jean-François Mattei a rappelé l'existence d'un système de veille sanitaire en France qui avait permis de déceler une augmentation des cas de méningites dans certains départements du sud-ouest de la France, notamment les Hautes-Pyrénées et les Landes. Le seuil atteint avait abouti à la recommandation d'une campagne de vaccination de certaines populations à risque, notamment les enfants. Il a indiqué que le coût de cette campagne de vaccination s'élevait à 13 millions d'euros.

M. Jean-François Mattei a indiqué, en réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, que la loi de programmation sur la santé publique ferait l'objet d'une vaste concertation au niveau régional et départemental, orchestrée respectivement par les Directions régionales des affaires sanitaires et sociales (DRASS) et les Directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS). S'agissant de la firme américaine « Myriad Genetics », il a reconnu le monopole exercé par elle en matière de dépistage du cancer du sein, mais il a estimé qu'il était impossible de renoncer à ce dépistage pour autant. Il a soutenu qu'il apporterait une aide à l'Institut Curie dans le but de développer une technique de dépistage similaire.

En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, il a rappelé qu'un nouveau président avait été nommé à la tête de la MILDT, M. Didier Jayle, et qu'il s'agissait d'un médecin. Il a rappelé que l'approche en matière de lutte contre la toxicomanie était une approche de santé publique et qu'elle devait permettre d'articuler deux volets, celui de la prévention et celui de la répression.

En réponse à M. François Trucy, Mme Marie-Thérèse Boisseau a affirmé qu'il était possible de faire respecter les emplacements pour personnes handicapées mais qu'il s'agissait d'une question de mentalité. Elle a par ailleurs rappelé que l'année 2003 serait l'année européenne du handicap.

En réponse à M. Yann Gaillard, elle a indiqué qu'il était nécessaire de développer les compétences des aides-soignantes en contrepartie de celles des infirmières, notamment en matière de prise en charge des malades mentaux. S'agissant de l'appareillage, elle a annoncé qu'un groupe de travail serait chargé de mener une réflexion sur l'ensemble des aides techniques existantes. Elle a reconnu que beaucoup de progrès restaient à faire, notamment dans le domaine des fauteuils roulants pour myopathes.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, Mme Marie-Thérèse Boisseau a fait savoir qu'elle était réservée sur le chiffre avancé de 6.600 enfants handicapés non scolarisés cette année. Elle a rappelé que si les enfants avaient le devoir d'aller à l'école, l'Etat lui se devait d'intégrer scolairement la majorité des enfants handicapés. Elle a également estimé indispensable de développer le nombre d'auxiliaires d'intégration scolaire.

En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, elle a rappelé que son objectif était de simplifier et de clarifier la législation. S'agissant du financement des foyers d'accueil médicalisés, elle a estimé, à titre personnel, qu'il devait être pris en charge intégralement par l'assurance maladie.

Enfin, en réponse à M. Jean Arthuis, président, elle a estimé que l'accès aux CAT devait être réservé aux personnes souffrant d'un handicap lourd et que l'ouverture des CAT le soir pourrait être envisagée afin d'utiliser au mieux le potentiel de formation professionnelle représenté par ces centres.

PJLF pour 2003 - Crédits de l'écologie et du développement durable - Examen du rapport

La commission a ensuite examiné les crédits de l'écologie et du développement durable, sur le rapport de M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a indiqué que les crédits demandés en 2003 pour l'écologie et le développement durable s'élevaient à 768,16 millions d'euros, en légère diminution apparente de 0,16 % par rapport à 2002. Toutefois, après prise en compte des modifications de périmètre, portant sur 6,19 millions d'euros, et des crédits du Fonds national de solidarité pour l'eau (FNSE), soit 83 millions d'euros, les moyens du ministère s'établissent à 837,35 millions d'euros, en hausse de 0,5 %. Les dépenses ordinaires, qui représentent 617,47 millions d'euros, reculent de 2,15 % en 2003, après une augmentation de 18 % en 2002, et représentent 80,4 % de l'ensemble du budget, contre 82 % l'année dernière mais 42 % en 2000. Au contraire, les dépenses en capital croissent de 8,90 %, alors qu'elles avaient diminué de 27 % en 2002 : elles atteignent ainsi un niveau de 150,69 millions d'euros, soit 19,6 % du budget, contre 18 % l'année dernière.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a ensuite présenté les quatre principales observations que lui inspire le budget de l'écologie et du développement durable pour 2003.

Il a attiré l'attention sur l'exécution extrêmement critiquable du budget 2001 et a estimé qu'elle confirmait les analyses qu'il avait développées à l'époque. D'une part, certains crédits ont été imputés de manière irrégulière, notamment au titre du plan POLMAR, sur le titre V, alors qu'il s'agissait, pour l'essentiel, de dépenses de fonctionnement. D'autre part, et surtout, la Cour des comptes a une nouvelle fois souligné la sous-consommation des crédits de ce qui était alors le budget de l'environnement, qu'elle qualifie de « chronique ». Elle note ainsi que la forte progression de ces crédits en 2001 s'est accompagnée d'un taux de consommation extrêmement faible, de l'ordre de 50 %, et de 25 % pour ce qui concerne les seuls crédits de paiement, ce qui l'amène à « s'interroger sur la sincérité du budget de l'environnement ». Or, les informations concernant la consommation des crédits au premier semestre 2002 ne sont guère plus encourageantes. Ainsi, les crédits d'intervention (titre IV) n'ont été consommés qu'à hauteur de 37,5 %, et la situation est plus médiocre encore pour les dépenses en capital : 14,2 % pour le titre V et 12,5 % pour le titre VI, soit un taux de consommation global de 12,6 % pour les crédits de paiement, qui tombe à 11,6 % hors Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).

Le rapporteur spécial, eu égard à ses modalités de financement et de fonctionnement, s'est, enfin, interrogé sur l'utilité du FNSE. Il a noté avoir auditionné l'ancien contrôleur financier central du ministère qui lui a indiqué qu'il était « difficile de définir l'activité du fonds ». Son fonctionnement, effectif à partir de 2001, ne paraît guère optimal, le comité consultatif du fonds chargé d'assister le ministre ne s'étant réuni qu'une fois, au lieu de deux fois par an minimum en droit, sans du reste diffuser le moindre procès-verbal de cette réunion. Sa gestion financière n'est guère meilleure : le taux de consommation de ses crédits ne s'est établi, selon la Cour des comptes, qu'à 28 % en 2001, soit au même niveau que l'année précédente, tandis que d'importants reports de crédits ont eu lieu, près de 95 millions d'euros en 2001 et plus de 91 millions en 2002. La Cour des comptes a d'ailleurs estimé que « l'affectation de ces ressources [le prélèvement sur les agences de l'eau] au budget général aurait sans doute permis une meilleure utilisation ».

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a ensuite considéré que le budget de l'écologie et du développement durable était globalement peu lisible. Les documents budgétaires afférents au budget de l'écologie sont d'un accès objectivement peu aisé. En effet, la nomenclature retenue ne permet pas, ou mal, d'identifier la plupart des mesures financées par ce budget. L'intitulé de la plupart des chapitres et articles budgétaires reste extrêmement général, voire ambigu, et il est rare que l'intégralité d'un chapitre soit consacrée au financement d'une seule action. De surcroît, de nombreux chapitres, qu'il s'agisse de dépenses ordinaires ou de dépenses en capital, portent le même intitulé, notamment « Protection de la nature et de l'environnement », ou « Prévention des pollutions et des risques » - soit le même intitulé que l'agrégat 23 lui-même -, ce qui, s'agissant de ce budget, n'apporte que peu d'éclaircissements sur l'objet et le champ des politiques publiques mises en oeuvre. Il a précisé qu'alors que le « bleu » comporte aussi des informations écrites relatives aux politiques conduites, il est très difficile de rapprocher ces dernières des informations chiffrées fournies par la nomenclature budgétaire : il est dès lors quasiment impossible d'identifier le coût de chacun des nombreux dispositifs financés. Dans ces conditions, et notamment en vue de l'entrée en vigueur définitive de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de l'établissement de programmes, il a encouragé le ministère à améliorer la lisibilité de la nomenclature budgétaire.

Il a également insisté sur le fait que les indicateurs de résultats fournis dans l'annexe « bleue » étaient peu significatifs. Leur qualité est très inégale, mais globalement médiocre, voire franchement mauvaise. Surtout, ils ne permettent pas d'apprécier véritablement les résultats des politiques publiques environnementales ni, a fortiori, leurs performances. L'ancien contrôleur financier central du ministère a confirmé cette analyse, en indiquant « ne pas avoir eu l'impression que les efforts financiers[réalisés en faveur de l'environnement] aboutissaient à des résultats tangibles », ajoutant que « les objectifs quantitatifs n'étaient pas la traduction de véritables besoins », et déplorant l'absence de tableaux de bord et d'indicateurs de résultats socio-économiques pertinents. Le « bleu » fournit ainsi de très nombreuses illustrations de ce manque de pertinence des indicateurs, voire des objectifs eux-mêmes : certains objectifs et résultats suscitent le scepticisme ; des résultats affichés peuvent ne pas sembler crédibles eu égard aux évolutions passées ; l'aspect purement quantitatif de certains objectifs ne laisse pas de s'interroger sur la pertinence de ceux-ci ; l'affichage d'objectifs peut ne tirer aucune conséquence du fait que plusieurs d'entre eux ne sont purement et simplement pas atteints ; d'autres indicateurs de résultats sont renseignés avec une évidente fantaisie.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a indiqué que ces critiques portaient essentiellement sur les gestions passées, dont l'actuel gouvernement doit aujourd'hui assumer les conséquences.

Aussi a-t-il estimé que le projet de budget pour 2003 comportait des orientations nouvelles qu'il convenait de saluer. D'abord, le changement de dénomination du ministère de l'environnement en ministère de l'écologie et du développement durable, ainsi que la création d'un secrétariat d'Etat au développement durable, traduisent bien les priorités de la politique de la France en la matière : la solidarité entre les générations ; la réconciliation entre protection de l'environnement et développement économique, social et culturel, à travers une gestion responsable des ressources naturelles ; l'information, l'éducation et la formation sur les enjeux liés au développement durable. Ces grandes orientations sont inscrites dans le document-cadre pour l'élaboration d'une stratégie nationale de développement durable, qui avait été adopté en vue du sommet de Johannesburg. Un travail interministériel va débuter cet automne afin de traduire rapidement sur le terrain cette politique de promotion du développement durable. Ensuite, a-t-il ajouté, une Charte de l'environnement devrait être adossée à la Constitution. Il s'agit d'un engagement du Président de la République, qui vise à inscrire les principes essentiels de la protection de l'environnement dans un texte adossé à la Constitution. Le Conseil des ministres du 5 juin dernier a engagé la procédure en vue de son élaboration, puis, sur la base des propositions d'une commission présidée par M. Yves Coppens, et après concertation interministérielle, la ministre de l'écologie et du développement durable présentera un projet de Charte en Conseil des ministres avant le 5 juin 2003, date de la prochaine journée mondiale de l'environnement. Enfin, la ministre de l'écologie et du développement durable et le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire ont demandé à l'Inspection générale des finances et à l'Inspection générale de l'environnement d'effectuer un audit du ministère, portant notamment sur deux points : le versement de subventions aux associations, et la mise au point d'une méthodologie permettant au ministère d'appliquer la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Enfin, M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, s'est félicité que le projet de budget 2003 renoue avec une certaine sincérité budgétaire. D'une part, les changements de périmètre budgétaire sont limités. Il a en effet rappelé que, dans la loi de finances initiale pour 2002, 381 millions d'euros sur les 761 millions inscrits au budget, soit plus de 50 %, résultaient de simples modifications du périmètre budgétaire, ce qui permettait de mettre en avant des progressions considérables du budget de l'environnement. Le projet de budget pour 2003 connaît une stabilité assez grande de son périmètre, puisque les transferts sont limités à 6,20 millions d'euros, soit seulement 0,8 % des dotations du ministère. De ce point de vue, il a exprimé sa satisfaction de voir que l'environnement n'était plus utilisé à des fins politiques. D'autre part, l'investissement est privilégié. Les efforts budgétaires considérables, quoique en partie virtuels, en faveur du budget de l'environnement au cours des années récentes avaient, pour l'essentiel, consisté, non pas à conduire des politiques publiques environnementales, mais à renforcer les moyens du ministère et à créer des emplois publics. Au contraire, le projet de budget 2003 rompt avec cette augmentation constante du nombre de fonctionnaires et avec la croissance ininterrompue des dépenses de fonctionnement, et met l'accent sur les dépenses d'investissement : les crédits du titre V progressent de 19,4 % et ceux du titre VI de 6,1 %.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a estimé que l'évolution observée sur les crédits de l'ADEME confirmait ses analyses antérieures. Les crédits de cet établissement public avaient beaucoup augmenté en 2000, essentiellement pour des raisons d'affichage politique, mais ont été très faiblement consommés. Or, faute de lissage de ses crédits, l'ADEME ne peut plus traiter aucun dossier nouveau concernant les déchets ménagers depuis juin 2002.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a constaté que le budget de l'écologie et du développement durable pour 2003 était établi dans la continuité du précédent et que, dès lors, il était indispensable de demander à la nouvelle ministre les priorités qu'elle entendait mettre en oeuvre. Il a pris l'exemple de la lutte contre les inondations en s'interrogeant sur l'absence d'un programme clair en la matière. Il a également posé la question des missions et de l'utilité réelle du FNSE. Notant que les effectifs du ministère avaient augmenté de plus de 46 % depuis 1997, il a constaté que la création d'emplois se poursuivait en 2003 dans les établissements publics placés sous la tutelle du ministère.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a tout d'abord expliqué qu'il convenait de relativiser le poids du ministère, dont les dotations budgétaires ne représentent que 22 % de l'ensemble de la dépense publique en faveur de l'environnement. Il a indiqué qu'un « plan Bachelot » avait été annoncé pour faire face aux conséquences des inondations survenues il y a quelques semaines dans le sud-est de la France, mais a regretté avoir reçu très peu d'informations sur ce point pour l'instant.

M. François Marc a noté que l'environnement suscitait de nombreuses attentes dans l'opinion, notamment des attentes en matière de résultats. Il a dès lors estimé qu'il serait paradoxal de vouloir réduire les moyens du ministère.

M. Yann Gaillard s'est interrogé sur les crédits inscrits au Fonds de gestion des milieux naturels (FGMN) au titre du contrat d'objectifs liant l'Office national des forêts et l'État.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a considéré qu'il ne fallait pas lier la rapidité du traitement des dossiers aux moyens dont disposent les services du ministère, en raison de ce qu'il a qualifié de « syndrome de Toulouse ». En effet, une application quasi-systématique du principe de précaution a souvent pour conséquence de différer la prise de décision et de réclamer des mesures de protection supplémentaires. Il a indiqué attendre du ministère des informations complémentaires sur le financement du FNSE.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de l'écologie et du développement durable pour 2003.