Mardi 27 novembre 2007

- Présidence de M. Henri Revol, sénateur, président.

Organismes extraparlementaires - Désignation de membres

M. Christian Bataille, député, a été désigné pour siéger au Conseil d'administration de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA).

Désignation de rapporteurs

L'Office a désigné deux rapporteurs, M. Jean-Yves Le Déaut, député, et Mme Catherine Procaccia, sénateur, sur la double saisine des commissions des Affaires économiques du Sénat et de l'Assemblée nationale, respectivement relatives à :

- « L'utilisation du chlordécone, du paraquat et d'autres pesticides dans l'agriculture martiniquaise, guadeloupéenne et guyanaise » ;

- « L'effet des pesticides aux Antilles sur la santé humaine ».

L'étude des deux rapporteurs devra faire un point scientifique sur ces questions et opérer un premier suivi des mesures annoncées dans ce domaine par le Gouvernement.

Puis l'Office a désigné M. Jean-Claude Etienne, sénateur, et M. Claude Gatignol, député, sur la saisine de la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale, relative à « L'effet des pesticides sur la santé humaine ».

Radiothérapie - Communication sur l'audition publique du 15 novembre 2007 : pistes de réflexion et orientations de politique publique

M. Claude Birraux, député, Premier vice-président, a constaté que les terribles accidents survenus à Epinal et à Toulouse avaient jeté le trouble dans le paysage français de la radiothérapie oncologique qui concerne 200 000 malades par an, soit 70% des personnes atteintes d'un cancer.

Pourtant la radiothérapie « à la française » présente sans aucun doute possible des atouts en termes de qualité des soins. Ces atouts sont de deux ordres. D'une part, il existe un dispositif fiable de sécurité et de sûreté dans le domaine nucléaire, avec la présence de deux instances indépendantes expertes, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). D'autre part, la radiothérapie a permis d'enregistrer des progrès considérables dans la lutte contre le cancer. Le déploiement de nouvelles technologies, en remplacement des anciennes, grâce au Plan cancer, assure une meilleure efficacité des traitements et une meilleure sécurité des soins avec un contrôle des doses et un contrôle balistique intégrés.

M. Claude Birraux a indiqué que lors de l'audition publique à l'Assemblée nationale les meilleurs spécialistes du domaine ont montré que la France reste un « pays qui compte ». Le développement de technologies telles que la radiothérapie asservie à respiration, la tomothérapie, le robot Cyberknife et le lancement du projet « Etoile » dessinent des perspectives prometteuses. Le projet Etoile, qui permettra la mise en route de la hadronthérapie en France, ne verra cependant le jour qu'en 2013, ce qui est à regretter pour les malades en attente de traitement.

Les très graves accidents d'Epinal et de Toulouse ont révélé des défauts dans le système d'assurance qualité et les différents organismes publics, ASN, AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), INVS (Institut de veille sanitaire), IRSN se sont rapidement mobilisés dans le but de combler les lacunes les plus criantes. Ils ont mis en place un système déclaratif plus opérationnel, procédé à une inspection systématique des 180 centres de radiothérapie ou défini une échelle de communication des accidents. Le principe d'une réorganisation des centres de radiothérapie est admis sur la base de 17 critères d'agrément fixés pat l'Institut national du Cancer (INCA).

M. Claude Birraux a souligné que l'audition publique avait permis de dégager plusieurs axes de réflexion, en complément des mesures déjà mises en place ou envisagées.

Tout d'abord, des interrogations existent quant à la gestion de la période transitoire d'une durée de 5 ou 6 ans au cours de laquelle des mesures seront prises pour augmenter très sensiblement le nombre des physiciens médicaux en sous-effectifs notoires, reconfigurer le maillage territorial en personnels et en équipements par la fermeture ou le regroupement de petites unités aux seuils d'activité insuffisants. Ensuite, si toutes les agences de sécurité ont fait des efforts louables pour travailler ensemble, le paysage administratif reste excessivement complexe et peu lisible pour les intervenants de terrain. Les procédures d'alerte sont multiples et mal coordonnées.

En conclusion, M. Claude Birraux a souligné la nécessité d'insister dans les années à venir sur deux orientations dans le secteur de la radiothérapie.

Premièrement, l'instauration d'une culture de sûreté est primordiale, et ce, à toutes les étapes de la chaîne, en commençant par la vérification des appareils utilisés. L'idée d'appliquer à la radiothérapie le principe de la « défense en profondeur », en cours dans l'industrie nucléaire, a été évoquée à juste raison, les constructeurs et les exploitants devant faire la preuve de la qualité de l'appareil et de ses conditions d'utilisation.

Deuxièmement, le développement de la recherche dans ce domaine apparaît prioritaire. Les besoins sont considérables : métrologie des rayonnements ionisants et dosimétrie in vivo, analyse des effets secondaires de la radiothérapie grâce à un suivi régulier à long terme des patients et constitution de bases de données épidémiologiques sur un sujet peu exploré, mise au point de nouvelles approches thérapeutiques pour traiter les complications radioinduites, lancement d'un programme de recherche sur la souffrance des patients surriradiés.

Enfin, M. Claude Birraux a insisté sur le caractère alarmant du sous-effectif des physiciens médicaux. Sur le terrain, la moyenne nationale est de 0,6 physicien par appareil de radiothérapie, alors que la règle européenne clairement énoncée est d'1 praticien par appareil. Ces chiffres sont préoccupants pour la sécurité et expliquent que les physiciens médicaux en France n'ont pas le temps de bénéficier de formation continue, alors que les technologies employées sont en perpétuelle évolution.

Recherche - Audition de M. Michel Cosnard, président directeur général de l'Institut national de recherche en informatique et en automatique

MM. Henri Revol, sénateur, président, après avoir rappelé le parcours professionnel de la personnalité auditionnée, a précisé que l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) célébrait cette année ses quarante ans d'existence. Il s'est félicité de ce qu'à cette occasion, l'Office renoue des liens avec cet établissement public à caractère scientifique et technologique.

M. Michel Cosnard, président-directeur général de l'INRIA, a tout d'abord présenté l'établissement, qui accueille 3 700 personnes, dont 2 100 sont directement rémunérées par l'Institut. L'INRIA compte cinq centres de recherche et prévoit d'en créer trois nouveaux à Bordeaux, Lille et Saclay. Son budget s'élève à 162 millions d'euros et comporte 20 % de ressources propres issues de la Communauté européenne, de l'Agence nationale pour la recherche (ANR) et des entreprises. Placé sous la double tutelle du ministère de la recherche et du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, l'INRIA promeut une excellence scientifique associée à des transferts de technologie. L'établissement a développé ses relations industrielles, comptant aujourd'hui 730 contrats de recherche actifs. Sa filiale INRIA-Transfert est à l'origine de 4 fonds d'amorçage. 83 sociétés de technologie sont issues des activités de l'INRIA, qui continue de créer en moyenne 4 à 5 entreprises par an. L'Institut est impliqué aux côtés d'une vingtaine de pôles de compétitivité et s'est fixé pour priorité, plus généralement, l'insertion de ses activités de recherche dans les tissus économiques régionaux. L'INRIA est par ailleurs actif au sein d'instances de normalisation internationale et fortement impliqué dans les PCRD (programme cadre de recherche et de développement technologique).

M. Michel Cosnard a ensuite précisé les grands axes de recherche qui lui semblaient aujourd'hui prioritaires. Il a estimé que la révolution numérique n'était pas achevée, dans la mesure où cette révolution n'était pas seulement industrielle, mais aussi sociétale. Une des causes du retard de croissance de la France réside dans la lenteur de diffusion des sciences et technologies de l'information et de la communication au tissu économique. L'Europe est toutefois bien placée s'agissant du développement des systèmes embarqués, un axe de recherche à privilégier compte tenu de l'évolution qui se dessine d'un « internet des personnes » vers un « internet des objets ». Dans ce contexte, l'INRIA finalise actuellement son plan stratégique pour les années 2008 à 2012. Ce plan stratégique fera état des priorités de recherche suivantes :

- l'évolution d'internet ;

- la qualité, la fiabilité des logiciels, et plus généralement, la sécurité des systèmes d'information, ce qui implique le développement des méthodes formelles de validation ;

- la modélisation et la simulation, qui soulèvent le problème des interactions ;

- la robotique ;

- une meilleure intégration de la recherche en biologie dans le domaine médical, ce qui impliquera des retombées potentielles dans le domaine informatique (« bio-computing »);

- l'ingénierie numérique c'est-à-dire le développement des logiciels embarqués, qui est la première priorité du 7e PCRD, et qui intéresse des secteurs tels que les transports, les banques ou la grande distribution.

M. Michel Cosnard a ensuite dressé un bilan de l'application par l'INRIA du pacte national pour la recherche. Il a constaté que la création de l'ANR ne constituait pas un bouleversement pour l'Institut, dans la mesure où celui-ci fonctionnait préalablement avec les réseaux nationaux de recherche et d'innovation technologique. Il a souhaité que l'INRIA soit, à l'avenir, opérateur de certains programmes de l'ANR. S'agissant de l'évaluation des activités de recherche de l'Institut, il a fait valoir la pertinence d'une organisation souple selon une logique d'équipes-projets de recherche, créées pour quatre ans renouvelables deux fois. Quant au dispositif national d'évaluation mis en place par l'INRIA, il consiste en un comité de personnalités externes à l'organisme, à 80 % étrangères. L'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES), mise en place par la loi de programme pour la recherche, vient compléter ce dispositif en lui adjoignant une évaluation par sites.

Enfin, M. Michel Cosnard a présenté le projet de croissance de l'INRIA tel que prévu par le contrat quadriennal en cours d'application. L'objectif est de doubler en dix ans les capacités de l'Institut, pour être à la hauteur des défis du plan stratégique. Il s'est félicité d'avoir pu maintenir une logique de création d'emplois en 2008, grâce aux marges de manoeuvre propres à l'Institut, dans un contexte budgétaire resserré.

Répondant ensuite à M. Henri Revol, sénateur, président, M. Michel Cosnard a apporté des précisions sur la « loi de Moore » d'après laquelle la puissance des ordinateurs double tous les dix-huit mois. Il a jugé que cette loi allait continuer à prévaloir, mais selon de nouvelles modalités, notamment grâce à l'augmentation de la taille des circuits et aux nanotechnologies.

M. Claude Birraux, député, Premier vice-président, a ensuite posé des questions sur :

- le contraste entre la place éminente de l'INRIA au sein de la communauté scientifique internationale et le faible rayonnement médiatique de l'Institut en France ;

- les nouvelles frontières que va se fixer l'INRIA dans son prochain plan stratégique ;

- la place de l'INRIA aujourd'hui dans la gouvernance de l'internet ;

- la contribution de l'INRIA au développement des logiciels libres ;

- l'adéquation aux besoins de l'Institut des moyens de calcul dont il dispose, et l'apport, à cet égard, du projet Grid 5000 ;

- l'implication de l'INRIA dans les travaux de simulation numérique participant des recherches au laboratoire souterrain de Bure sur le stockage des déchets radioactifs ;

- les retombées attendues pour chaque partenaire du centre de recherche que l'INRIA vient d'ouvrir en commun avec « Microsoft Research » à Orsay ;

- les conditions dans lesquelles l'INRIA organise l'essaimage de ses réalisations scientifiques, en référence notamment au modèle de l'Université de Leuven en Belgique flamande, qui s'appuie à cette fin sur une grande entreprise-relais ;

- la place des redevances de brevets parmi les vingt pour cent de ressources propres de l'INRIA.

M. Michel Cosnard a répondu, s'agissant du rayonnement médiatique de l'INRIA, qu'il faisait personnellement un effort pour être présent sur les ondes chaque fois qu'il était sollicité.

S'agissant des nouvelles frontières que l'INRIA se fixerait dans le cadre de son prochain plan stratégique en cours d'élaboration, il a signalé l'axe majeur du développement de la qualité des logiciels, donnant l'exemple des besoins accrus à cet égard, nés des progrès de la diffusion des images animées sur les réseaux, lesquelles supportent mal des ruptures de flux ; il a aussi mis en avant les avancées à réaliser dans la mise au point de logiciels permettant d'utiliser à plein le potentiel des circuits intégrant en parallèle un nombre toujours plus grand de processeurs.

Il a abordé la question de la place de l'INRIA dans la gouvernance de l'internet, en rappelant le rôle pionnier qu'avait joué l'Institut dans ce domaine, devenu membre du consortium World Wide Web dès 1996, et assumant la responsabilité de la gestion des noms de domaine pour la France jusqu'à la création de l'AFNIC en 1998. A cette époque, l'INRIA a mobilisé jusqu'à quinze personnes aux tâches de suivi de l'Internet. Depuis le passage de relais à l'AFNIC, l'INRIA contribue surtout à la gouvernance de l'Internet en participant aux travaux internationaux d'élaboration des nouveaux protocoles permettant d'en suivre les évolutions.

L'INRIA a produit et continue à produire de nombreux logiciels libres ; en ne prenant en compte que ceux intégrant une forte valeur ajoutée, leur nombre peut être estimé à une centaine. Parmi eux, deux outils connaissent un certain succès : Scilab pour le calcul scientifique, concurrent du logiciel payant Matlab, et Coq, pour l'aide à la preuve dans les démonstrations.

S'agissant des moyens de calcul dont dispose l'INRIA, ils sont bien suffisants, car le positionnement des recherches de l'Institut, plutôt axé sur la mise au point de méthodes de calcul que sur le calcul lui-même, peut s'appuyer sur des outils de puissance moyenne. L'INRIA recourt couramment à l'IDRIS, centre du CNRS pour le calcul numérique intensif à Orsay, ou au CINES (Centre Informatique National de l'Enseignement Supérieur) à Montpellier. Au besoin, l'INRIA peut utiliser le Bull TERA 10 du CEA.

M. Michel Cosnard a déclaré bien connaître le projet Grid'5000, puisqu'il en est l'initiateur. C'est une plate-forme de recherche visant à créer une puissance de calcul grâce à une « grille » expérimentale de 5000 processeurs interconnectés à travers la France, via le réseau RENATER. A ce stade, l'interconnexion ne rassemble encore que 4000 processeurs environ. Dans la mesure où ce dispositif est tourné vers la recherche, il n'est mis à disposition de la communauté scientifique que pour des calculs non critiques. Un exemple d'utilisation concerne justement les calculs de simulation dans le cadre des recherches sur le stockage de longue durée des déchets radioactifs, domaine où l'ANDRA travaille en partenariat avec l'INRIA.

Pour bien faire comprendre l'intérêt des recherches communes sur la qualité des logiciels conduites depuis janvier 2007 avec Microsoft Research, M. Michel Cosnard a rappelé que le théorème d'incomplétude de Gödel, sur l'existence d'énoncés mathématiques indémontrables, avait pour conséquence qu'il était théoriquement impossible de concevoir une « boîte noire » qui permettrait de vérifier la parfaite adéquation d'un logiciel à un panel de spécifications. Mais cela n'empêche pas de pouvoir faire des vérifications complètes dans certains cas particuliers, notamment celui des petits programmes. Et des efforts très importants de vérification ont été effectués par les banques pour assurer la fiabilité de la carte à puce, ou par l'industrie aéronautique pour ses systèmes. En revanche, la culture de la fiabilité des logiciels est encore très peu répandue dans le milieu industriel en général.

Le laboratoire commun « INRIA - Microsoft Research » confie à une équipe organisée autour de Georges Gonthier et Benjamin Werner, les inventeurs d'une preuve formalisée du théorème des quatre couleurs, des recherches sur les méthodes de programmation permettant d'assurer leur qualité, leur fiabilité et leur sécurité. Le théorème des quatre couleurs prévoit qu'on peut décrire avec quatre couleurs une carte décomposée en zones contiguës ; ce résultat conjecturé en 1852 ne peut être démontré, compte tenu des milliers de cas possibles à traiter, sans un détour par un lourd calcul informatique, dont il faut justement certifier la fiabilité.

L'effort financier est supporté pour moitié par chaque partenaire. Pour Microsoft, il s'agit d'un investissement de long terme, qui va alimenter entre-temps un flux de conférences internes permettant aux salariés de rester attentifs aux progrès de la recherche fondamentale en informatique, avant peut-être d'aboutir à une percée technologique. Pour l'INRIA, c'est une manière de poursuivre ses objectifs stratégiques en partageant l'effort financier. Le choix des thèmes de recherche est soumis, comme pour les autres projets de l'INRIA, à un comité d'experts indépendants.

M. Michel Cosnard a expliqué que ce partenariat avec Microsoft Research n'est pas le seul du genre, puisque l'INRIA travaille depuis longtemps en collaboration avec France Télécom, et se trouve actuellement en négociation pour une collaboration avec Alcatel, et surtout avec les prestigieux Bell Labs.

S'agissant du dispositif d'essaimage, il ne passe pas par le relais d'une grande entreprise, comme dans le modèle de l'Université de Leuven, mais par un soutien direct aux petites structures naissantes. Certaines, comme ILOG, qui édite des composants logiciels pour améliorer les performances et le rendement des processus et des systèmes opérationnels, ont pu certes grossir jusqu'à employer 700 personnes environ.

Une part minime des ressources propres de l'INRIA, de l'ordre d'un million d'euros par an, provient des redevances de propriété intellectuelle ; l'INRIA déclare au mieux une dizaine de brevets par an. Par ailleurs, environ 200 logiciels de l'INRIA ont été déposés à l'Agence pour la protection des programmes.

Mme Geneviève Fioraso, député, a ensuite plaidé pour une meilleure communication entre acteurs de l'informatique, regrettant le fossé existant entre « hardware » et « software », qui constitue un obstacle à l'émergence de projets fédérateurs. Estimant par ailleurs que les besoins des collectivités territoriales en matière informatique soulevaient des difficultés particulières, elle a suggéré qu'un partenariat avec l'INRIA dans ce domaine serait sans doute profitable. S'interrogeant sur le financement de la croissance des « start-ups », elle a regretté que celui-ci soit insuffisamment assuré au niveau français et européen, ce qui entraînait des rachats internationaux susceptibles de menacer les emplois. Enfin, elle a demandé s'il n'y avait pas un risque de contradiction pour l'INRIA à travailler en partenariat avec de grandes entreprises, par exemple dans le cadre du pôle de compétitivité System@tic, tandis que l'Institut développait par ailleurs ses activités dans le domaine du logiciel libre.

En réponse, M. Michel Cosnard a jugé qu'il existait probablement un déficit de communication des acteurs du logiciel, pour des raisons principalement culturelles, liées au caractère immatériel des produits et à la dispersion des équipes. Il a indiqué que l'INRIA possédait une forte notoriété, mais auprès d'un public ciblé. S'agissant de la coopération avec les collectivités territoriales, il a souligné que le développement de logiciels était une activité complexe, comme en avait témoigné le cas particulier du dossier médical. Il a indiqué qu'un certain nombre de chercheurs de l'INRIA étaient conseils auprès de collectivités. S'agissant enfin du rachat de « start-ups » françaises fondées sur les activités de l'INRIA, il a souhaité que les emplois puissent être maintenus en France. Enfin, il a jugé que les activités menées dans le cadre du pôle System@tic n'étaient pas contradictoires avec le logiciel libre et qu'il pouvait au contraire en résulter un enrichissement mutuel.

M. Pierre Laffitte, sénateur, a remercié M. Michel Cosnard pour la qualité de sa présentation. Approuvant la modernité du « modèle INRIA » en matière de transferts de technologies aux entreprises, il a toutefois souligné l'insuffisance du financement initial, non seulement des entreprises, mais aussi des incubateurs. Il a par ailleurs posé des questions sur :

- le développement de la télévision numérique, qui posait selon lui la question de la gestion des fréquences ;

- la domination d'internet par les Etats-Unis, qui risquait peut-être de s'accroître.

Enfin, il a préconisé de renforcer les liens entre les pôles de compétitivité et le système académique.

En réponse, M. Michel Cosnard a indiqué que la question du financement de la création d'entreprises était moins problématique que celle du financement de leur croissance. Les exemples d'Ilog (entrée au NASDAQ), de Polyspace (rachetée par Mathworks) et de Kelkoo (rachetée par Yahoo) ont illustré l'insuffisance des relais de croissance pour les entreprises de haute technologie en France. La clef de la réussite américaine réside dans un accompagnement financier performant des entreprises. A propos de la gouvernance d'internet, il a estimé peu probable qu'un pays parvienne à en prendre seul le contrôle, dans la mesure où, cet outil étant devenu stratégique, cela entraînerait une riposte de la part des autres pays. L'Europe, notamment, serait tout à fait capable de construire son propre internet. En revanche, des difficultés technologiques liées à la saturation des réseaux sont à craindre. Il est par ailleurs indispensable que l'Europe soit présente, tant au niveau politique que scientifique, pour influer sur l'évolution d'internet et des logiciels associés. Enfin, il a approuvé l'idée d'une meilleure intégration des milieux académiques au sein des pôles de compétitivité, afin de favoriser l'émergence d'une culture de coopération entre équipes industrielles et laboratoires de recherche, malgré l'existence de préoccupations distinctes.

En conclusion, soulignant l'intérêt ainsi illustré des pôles de compétitivité, M. Henri Revol, sénateur, président, a vivement remercié M. Michel Cosnard pour la richesse de l'information délivrée aux membres de l'Office.