Retraites (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

Candidatures à une éventuelle CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites actuellement en cours d'examen.

Cette liste a été affichée conformément à l'article 12, alinéa 4 du Règlement et sera ratifiée si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.

Discussion des articles (Suite)

M. le président.  - Dans l'examen des articles du projet de loi, nous en sommes parvenus à l'article 26.

ARTICLE 26

M. Dominique Watrin .  - Cet article prévoit la création, d'ici le 1er janvier 2017, d'un système en ligne d'information sur les retraites. Cela est une bonne chose. Toutefois, compte-tenu de l'importance de ces informations, elles doivent être rendues opposables. De plus, quel sera le statut de l'organisme chargé d'informer les salariés, établissement privé ou public ? Ses salariés bénéficieront-ils d'une formation appropriée ? L'expérience du guichet unique, née de la fusion de l'ANPE et des Assedic, nous y engage. Enfin, il semble que le simulateur web qui vient d'être mis en place ne prend pas en compte les périodes de décote ; cette anomalie a-t-elle été réparée ? Si non, quand le sera-t-elle ?

M. le président.  - Amendement n°235 rectifié, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC.

Alinéa 3

Après le mot :

bénéficient

insérer le mot :

gratuitement

Mme Isabelle Pasquet.  - Le droit à l'information sur les systèmes de retraite doit être gratuit. Cet amendement pourrait être qualifié de rédactionnel.

Mme Christiane Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Ce service sera évidemment gratuit. Le groupement qui l'assurera à compter de 2017 devra s'assurer de l'accès à l'information pour les personnes dépourvues de connexion à leur domicile.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.  - Le service sera gratuit, cela va de soi. Si vous estimez nécessaire de le préciser, je n'y vois pas d'inconvénient : sagesse.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Cet amendement présente plus de risques que d'avantages. Préciser que la consultation du service est gratuite implique qu'il a un coût.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Oui, le service public a un coût !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Qui le supportera ? S'il s'agit de la sphère publique, l'article 40 pourrait être opposé... La gratuité va de soi, le préciser expose à des risques.

M. Gérard Longuet.  - L'Union des institutions et services de retraites (UISR) supportera le coût de ce service, un coût non négligeable puisqu'il s'agira de reconstituer les droits de chacun des futurs retraités. Le mot gratuit est équivoque, puisque le service a un coût et un financement. Nous nous abstiendrons. (M. Jean-Claude Lenoir approuve)

L'amendement n°235 rectifié est adopté.

L'article 26, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°315 rectifié, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du septième alinéa, le mot : « périodiquement » est remplacé par les mots : « dans l'année des trentième, quarantième et cinquantième anniversaires de l'assuré » ;

2° À la première phrase du huitième alinéa, les mots : « à partir d'un certain âge et selon une périodicité déterminée par le décret susmentionné » sont remplacés par les mots : « dans l'année du soixantième anniversaire de chaque assuré ».

M. Claude Domeizel.  - Avec cet amendement, nous consolidons l'envoi systématique par la poste du relevé individuel à chaque assuré. Avec la création du service en ligne, on pourrait être tenté de l'abandonner. Mais il faut le maintenir. À mon sens, la loi doit être plus directive et prévoir un relevé aux 30e, 35e, 40e, 45e anniversaire et conserver l'envoi de l'estimation globale au 60e. D'autant que cela coûte de 15 à 24 millions d'euros par an, je le sais pour avoir présidé le GIP Info retraite et en être aujourd'hui le vice-président. Il est bon que les actifs soient très tôt sensibilisés à la question.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Favorable. Il faut clarifier dans la loi les conditions d'envoi du relevé et de l'estimation.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je comprends votre souci. Pour autant, je vous demande le retrait de votre amendement.

M. Charles Revet.  - Ah ! Il est bon, mais il faut le retirer...

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Attendons que se mette en place le système d'information en ligne. Je ne voudrais pas d'une période d'incertitude. Je vous garantis en revanche que le décret précisera les conditions du passage de l'information par courrier à l'information en ligne. Retrait, sinon défavorable.

M. Claude Domeizel.  - Je comprends cette demande. Toutefois...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

M. Claude Domeizel.  - J'ai autant qu'un autre le souci de l'information des futurs retraités. Ce que je propose est conforme à l'article 10 de la loi de 2003 et peut être mis en application dès maintenant ; ce n'est pas redondant avec le rendez-vous des 45 ans. Ramener la première information au 30e anniversaire est nécessaire. Nous économiserons 15 à 24 millions d'euros par an.

M. Jean Desessard.  - Je suivrai Mme la ministre.

M. Gérard Longuet.  - Une fois de plus !

M. Jean Desessard.  - Il faut maintenir l'information par courrier.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Et le papier ? (On renchérit à droite)

M. Jean-François Husson.  - Ce n'est guère écolo !

M. Jean Desessard.  - Encore ! Vous avez une vision étroite de l'écologie ! (Mouvements divers) Puisque vous m'y poussez (mêmes mouvements), je rappelle que la base de l'écologie n'est pas de mettre une petite fleur dans un pot à l'entrée des villes. C'est de reconnaître qu'au rythme actuel de production et de consommation des ressources, notre planète ne tiendra pas. Il faut réduire la production...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Réduire la production !

M. Jean Desessard.  - ... et la consommation. C'est une vision globale, cela ne se réduit pas au régime végétarien. (Mouvements divers à droite où on s'interroge sur la position du groupe socialiste)

Mme Laurence Rossignol, rapporteure de la délégation aux droits des femmes.  - Nous sommes d'accord !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Tous les socialistes ?

M. Jean Desessard.  - Les socialistes sont d'accord ; parfait ! Il reste à s'accorder sur le rythme... (Exclamations ironiques à droite) Nous y arriverons et, à ce moment-là, dans un an, vous verrez, vous ferez grise mine ! (Applaudissements sur les bancs socialistes ; exclamations à droite) Pour la période transitoire, il faut un envoi systématique. Je serai prêt à revoir la question dans vingt ans.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Nous ne serons plus là !

M. Gérard Longuet.  - De tous les biens, le plus précieux est le temps ; ne le gaspillons pas. Comme le dit l'Évangile : « Vous ne savez ni le jour, ni l'heure ». Vous remarquerez que malgré notre appétit de dialogue, nous l'avons économisé...

Nous voterons l'amendement de M. Domeizel, qui est nourri par l'expérience. Savoir de quoi on parle n'est pas inutile... Je constate une nouvelle fois que vous rendez hommage en transformant le GIP que nous avons créé en 2003 en UISR... (Applaudissements à droite)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Je serai bref car M. Longuet a dit l'essentiel. M. Domeizel a parlé en homme de terrain. Il va dans le même sens que l'amendement que nous avons proposé à l'article premier. Plus de transparence, plus de lisibilité. Les jeunes s'intéressent peu à la retraite, parlez-en avec vos proches. Un effort pédagogique doit être entrepris. Je salue l'initiative de M. Domeizel.

M. Claude Domeizel.  - J'ai dû mal m'expliquer. De quelle information les actifs disposeront-ils ? Le service en ligne, accessible à tout moment ; le rendez-vous du 45e anniversaire ; et l'envoi papier, que ma proposition ne supprime pas, bien au contraire. Je propose une information systématique au 30e anniversaire - elle est aujourd'hui prévue au 35e anniversaire - puis aux 40e et 50e anniversaires. Subsiste bien entendu l'envoi de l'estimation individuelle globale au 60e anniversaire.

J'ajoute que le GIP retraite, depuis trois ans, a créé un service d'information à la demande. Quand j'évoque les économies, je sais de quoi je parle. Les actifs reçoivent l'information, ce qui génère des demandes d'informations supplémentaires. La liasse envoyée est épaisse, qui retrace la situation de l'actif au regard de tous les régimes de retraite, ainsi qu'une information sur les systèmes de retraite.

M. Jean-François Husson.  - Plutôt que des digressions à la manière de M. Desessard, allons à l'essentiel : plus l'information sur les retraites sera précoce, mieux ce sera. Le support physique papier est le seul élément de preuve ; n'en déplaise à certains, il est in-dis-pen-sable. Ajoutons sur ces documents les règles en vigueur au moment de la communication de l'information.

M. Claude Domeizel.  - C'est le cas !

M. Jean-François Husson.  - Elles sont évolutives. Cela doit être précisé sur un document synthétique, qui tiendra au plus sur un recto verso. Je voterai l'amendement de M. Domeizel. 

Mme Hélène Lipietz.  - Au Parlement, lieu de parole, il n'est pas de digression... M. Domeizel nous a convaincus, nous le suivons.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Quel retournement ! (M. Jean Desessard lève les bras au ciel)

Mme Hélène Lipietz.  - Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis... Et nous n'en sommes pas...

L'amendement n°315 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°346 rectifié, présenté par Mme Ango Ela et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 1er juillet 2014, le Gouvernement remet au Parlement un rapport analysant les obstacles à l'accès des français et des françaises résidant à l'étranger aux versements de la pension de retraite, notamment aux ruptures de versement induites par les réglementations particulières qui leur sont appliquées quant aux justificatifs d'existence ainsi qu'aux délais applicables.

Mme Hélène Lipietz.  - Je présente cet amendement au nom de Mme Ango Ela, qui représente ici les Français établis hors de France et est membre de la commission des affaires sociales de l'AFE. Aux termes de l'article 83 de la loi de financement pour 2013, les expatriés doivent fournir tous les ans à la Cnav, dans un délai d'un mois, un certificat d'existence. Cela est plus simple en Belgique qu'en Inde... Le délai devrait être porté à au moins trois mois et l'envoi demandé tous les deux ans. Le rapport de l'article 29 bis est imprécis, on ne sait si cette question y sera traitée.

Une question, madame la ministre : le décret d'application de l'article 83 n'est pas encore publié ; quand le sera-t-il ?  

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Oui, cet amendement est satisfait par le rapport demandé à l'article 29 bis introduit par l'Assemblée nationale. Évitons les doublons : retrait, sinon rejet.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis. La loi de 2013 a prévu des avancées, les caisses ne peuvent demander les certificats qu'une fois par an. J'ai signé le décret, il est au contreseing de Bercy. Les caisses travaillent actuellement à la suppression des certificats d'existence pour les retraités vivant dans certains pays de l'Union européenne. J'ajoute que le GIP de l'article 27 coordonnera les démarches inter-régimes dans un objectif de simplification.

Mme Hélène Lipietz.  - Je me réjouis que le décret paraisse bientôt. Le rapport à l'article 29 bis devra se pencher sur la situation de tous les retraités hors de France, pas seulement ceux vivant au sein de l'Union européenne.

L'amendement n°346 rectifié est retiré.

ARTICLE 26 BIS

Mme Catherine Deroche .  - Il faut améliorer l'information des personnes éligibles à l'Allocation de solidarité aux personnes âgées, l'Aspa ; beaucoup ne savent pas que la revalorisation du plafond décidée par le gouvernement précédent les a rendues éligibles. Nous voterons cet article.

M. Michel Vergoz .  - Cet article me pose un cas de conscience. Expliquer qu'améliorer l'information suffira à relever le nombre de bénéficiaires de l'Aspa est un peu court. La réalité est que l'Aspa est une avance sur succession, appelons un chat un chat. Quand un décret relèvera-t-il le seuil à partir duquel l'actif successoral est appelé pour rembourser cette « indécente » avance ? L'article 26 bis nous donne un peu bonne conscience...

L'article 26 bis est adopté.

ARTICLE 27

M. le président.  - Amendement n°412, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.

I.  -  Alinéa 3, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'Union est administrée par un conseil d'administration, composé de représentants de l'ensemble des organismes et services mentionnés à l'alinéa précédent, et d'un comité exécutif qui met en oeuvre ses orientations stratégiques dans des conditions définies par décret.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - La commission n'ayant pas adopté de texte, me voici contrainte de proposer cet amendement, qu'elle a adopté, joignant à l'UISR un comité exécutif chargé du pilotage des projets.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Clarifier la gouvernance du GIP est une très bonne initiative : favorable.

M. Gérard Longuet.  - Je ne résisterai pas au plaisir de souligner qu'encore une fois, vous prolongez les travaux que nous avons lancés en 2003. C'est ainsi que doit fonctionner une démocratie apaisée ! Vous avez notre soutien ! (Applaudissements à droite)

L'amendement n°412 est adopté.

L'article 27, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°236, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC.

Après l'article 27

Insérer un article additionnel ainsi rédigé

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les coûts pour les comptes sociaux et les avantages pour les assurés, d'une mesure permettant aux fonctionnaires relevant d'une catégorie active, de pouvoir bénéficier d'un départ à la retraite à taux plein à soixante ans.

M. Christian Favier.  - Tenons compte de la pénibilité de certains métiers dans la fonction publique, sages-femmes ou pompiers, exposés à des risques particuliers ou à une fatigue exceptionnelle. Vous l'aurez compris ; nous demandons un rapport pour éviter la censure de l'article 40.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - D'une certaine façon, les catégories actives de la fonction publique correspondent à la prise en compte de la pénibilité dans le privé. Ce projet de loi ne modifie pas la situation actuelle. Rejet.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°236 n'est pas adopté.

L'article 27 bis est adopté.

ARTICLE 28

M. le président.  - Amendement n°238, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Alinéa 9, seconde phrase

Supprimer le mot :

forfaitaire

M. Michel Le Scouarnec.  - Cet article institue un mécanisme qui permet à une des caisses de liquider les droits de toutes lorsqu'un polypensionné fait valoir ses droits. Un seul régime calcule la pension et liquide les droits, sous réserve de compensation par les autres. Il faut que cette compensation soit intégrale. Si elle reste forfaitaire, ce serait injuste pour les assurés des régimes en difficulté comme la MSA ou le RSI.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - La question posée est importante. Que pense le Gouvernement de la faisabilité technique de cet amendement ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Défavorable. L'application de cette disposition créerait une charge pour les caisses plus importante que les gains financiers escomptés : il faudrait tracer en permanence les flux financiers, assuré par assuré. J'ajoute que la MSA est intégrée au régime général, la compensation est assurée par celui-ci.

L'article 238 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°399 rectifié, présenté par MM. Barbier, C. Bourquin et Collombat.

Alinéa 10

Supprimer cet alinéa.

M. Gilbert Barbier.  - Le comité de suivi des retraites remplit une fonction très technique. Faut-il y joindre un jury citoyen constitué de neuf femmes et neuf hommes tirés au sort et renouvelés par tiers tous les ans ? Cela va au rebours de l'objectif poursuivi.

M. le président.  - Amendement identique n°413, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le nouveau mécanisme de pilotage du système de retraite repose sur une distinction claire entre l'instance de concertation que constitue le COR, au sein duquel les partenaires sociaux sont représentés, et l'instance d'expertise - le comité de suivi.

La mission technique dévolue au comité de suivi s'accommode mal de la présence d'un jury citoyen. La démocratie participative ne peut se substituer à la démocratie sociale ni à la démocratie représentative.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je comprends vos interrogations sur cette proposition introduite à l'Assemblée nationale...

M. Gilbert Barbier.  - Intouchable !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Sagesse.

Les amendements identiques n°s399 rectifié et 413 sont adoptés

M. le président.  - Amendement n°239, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  À compter du 1er janvier 2015, les nouveaux assurés mentionnés à l'article L. 731-30 du code rural et de la pêche maritime ne peuvent plus être affiliés qu'auprès des organismes de mutualité sociale agricole mentionnés à l'article L. 723-1 du même code.

Mme Isabelle Pasquet.  - La protection sociale agricole repose sur le principe de la pluralité d'assurance, les assurés pouvant opter soit pour la MSA, soit pour des organismes privés à but lucratif. Ce mécanisme participe d'une privatisation rampante de la protection sociale, d'autant plus inacceptable que certains voudraient, en Europe, mettre en concurrence la protection sociale avec des organismes privés d'assurances commerciales.

Nous proposons qu'à compter du 1er janvier 2014, les ressortissants du régime agricole ne puissent plus opter pour ces opérateurs privés commerciaux. À l'Assemblée nationale, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, nous avons, semble-t-il, obtenu satisfaction. Vous allez donc nous en demander le retrait. Pour autant, je préfère le maintenir pour marquer notre volonté.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement est totalement satisfait par l'article 64 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Retrait.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable, puisque vous ne le retirez pas.

L'amendement n°239 n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je suis satisfait à 43 % de cet article 28. Selon le rapport Moreau, à effet contributif égal, les polypensionnés n'obtiennent pas le même niveau de pension. La MSA et le RSI représentent 43 % des polypensionnés. L'article 28 les assimile au régime général.

Mais je reste frustré à 57 %. Les carrières sont de plus en plus multiples, elles ne sont plus linéaires. Évitons les décalages. Les professions libérales, les agriculteurs, les expatriés ne bénéficient pas de l'article 28. Le refus de mon amendement au motif d'article 40 prouve la réalité de l'injustice que je dénonce : 57 % des retraités polypensionnés méritent un traitement plus équitable.

M. Gérard Longuet.  - Ce sont exactement les raisons pour lesquelles nous nous abstiendrons. La réalité des polypensionnés est appelée à croître et à se complexifier. Ceux qui travaillent à l'étranger sont de plus en plus nombreux, en Lorraine, mais aussi en France, où 200 000 à 300 000 salariés transfrontaliers connaissent des régimes complexes.

Hors procédure accélérée, nous aurions pu approfondir cette question. Malheureusement, le Gouvernement en a décidé autrement.

L'article 28, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°203 rectifié, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 28

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement, un rapport relatif à la situation des polypensionnés et à un calcul équitable du montant de leur pension en tenant compte de l'ensemble des régimes auxquels l'assuré a cotisé.

M. Dominique Watrin.  - Défendu.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Ce projet de loi comporte des avancées significatives en faveur des polypensionnés. L'article 28 en témoigne. Un rapport supplémentaire n'est pas utile. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je ne puis trop souligner le caractère excellentissime du rapport 2010 du COR. Avis défavorable.

L'amendement n°203 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 29

M. le président.  - Amendement n°240, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

Mme Laurence Cohen.  - Le remboursement des cotisations est contraire au principe de la retraite universelle par répartition. Les cotisations versées par un assuré ne sont pas sa propriété et toute cotisation doit ouvrir droit à pension, même si celle-ci est réglée de manière forfaitaire. Maintenons pour les monopensionnés le droit à pension sous la forme du versement forfaitaire unique.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cette suppression remet en cause une mesure de simplification. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°240 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°419, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'alinéa 2

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...- À l'article L. 161-5 et au premier alinéa de l'article L. 311-9 du code de la sécurité sociale, la référence : « L. 351-9 » est remplacée par la référence : « L. 161-22-2 ».

L'amendement de coordination n°419, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 29, modifié, est adopté.

L'article 29 bis est adopté.

ARTICLE 30

M. le président.  - Amendement n°294, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Un débat annuel sur les retraites dans la fonction publique est inutile. À supposer que l'on tienne à l'organiser, cela relève de la compétence des assemblées parlementaires. Un tel affichage témoigne du manque de courage du Gouvernement pour s'engager dans une vraie réforme structurelle.

L'amendement n°400 n'est pas défendu.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis défavorable. Nous mettons en oeuvre une recommandation de la commission Moreau. Ce débat dépassionné aura aussi pour avantage d'améliorer l'information de nos concitoyens.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - La loi de 2010 prévoyait un grand débat national au premier semestre 2013, sur la retraite par points ou par comptes notionnels. Il n'a pas été organisé. Nous ne voulons pas du débat au rabais que vous proposez à défaut.

L'amendement n°294 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°241, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Rédiger ainsi cet article :

Au plus tard un an après la promulgation de la présente loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, le Gouvernement organise les élections dans chacune des branches de la sécurité sociale.

M. Christian Favier.  - Ce débat relève-t-il vraiment de la loi ? Plutôt que ce rendez-vous ex nihilo, il faudrait l'intégrer au cadre existant des instances de la fonction publique. Relançons la démocratie sociale, cette exception française qui assure la participation directe des assurés à la gestion de leur protection sociale, en réactivant les élections prévues par le gouvernement de Pierre Mauroy en 1982, et dont aucune loi n'a supprimé le principe.

M. le président.  - Amendement n°414, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.

Après les mots :

de fonctionnaires

insérer les mots :

, au sein du conseil commun de la fonction publique,

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Il s'agit de ne pas créer une nouvelle instance de concertation et d'associer les trois fonctions publiques d'État, territoriale et hospitalière. Le conseil commun de la fonction publique les regroupe. Avis défavorable.

M. le président. - Amendement n°314, présenté par M. Domeizel.

I. - Remplacer les mots :

la fonction publique

par les mots :

les trois fonctions publiques

II. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les employeurs territoriaux et hospitaliers y sont représentés, pour chacun d'eux, par un membre désigné par le conseil d'administration de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.

M. Claude Domeizel.  - Je voulais attirer l'attention sur le fait que nous avons trois fonctions publiques. L'amendement de la commission me donne satisfaction.

L'amendement n°314 est retiré.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - L'amendement n°241 ne trouve pas sa place dans ce projet de loi. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°241 : ce débat est récurrent ; nous ne voyons pas la nécessité d'organiser ces élections qui n'ont pas eu lieu depuis plus de 30 ans. Avis favorable à l'amendement n°414.

L'amendement n°241 n'est pas adopté.

L'amendement n°414 est adopté.

Mme Laurence Cohen.  - Nous nous abstiendrons sur l'article 30.

L'article 30, modifié, est adopté, L'amendement n°10 n'est pas défendu.

ARTICLE 31

M. le président.  - Amendement n°242, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

M. Michel Le Scouarnec.  - Cet amendement réforme le pilotage de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA). Nous craignons que la solution retenue pour revenir à l'équilibre ne dévalue le montant des prestations servies. Cela reviendrait à faire porter tous les efforts sur les seuls pensionnés, alors que la spéculation sur les prix, qui s'emballe, ne profite pas aux agriculteurs, mais gonfle les profits financiers.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis défavorable. Cet article n'ouvre pas la voie à une réforme systémique. Il associe la MSA au pilotage du régime obligatoire des non-salariés agricoles.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°242 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°243, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Alinéa 5

1° Première phrase

Après le mot :

agricole

insérer les mots :

, après avis de l'ensemble des organisations syndicales agricoles représentatives au plan national,

2° Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

M. Dominique Watrin.  - Amendement de repli. L'article 31 conforte la caisse centrale dans sa fonction de pilotage des régimes des non-salariés agricoles ; or elle est en déficit chronique. Les recettes provenant des cotisations ne représentent que 12,8 % de ses ressources. Un arrêté ou un décret fixera les taux de cotisation. Renforçons la démocratie sociale en réaffirmant la nécessité d'une concertation. Comment parler de citoyenneté, de démocratie, sans y associer les intéressés ?

M. le président.  - Amendement n°344 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 5

I. - Première phrase

Après le mot :

agricole

insérer les mots :

, après avis de l'ensemble des organisations syndicales agricoles à vocation générale représentatives nationalement,

II. - En conséquence, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

M. Jean Desessard.  - Amendement quasiment identique. L'article 31 élargit les missions de la CCMSA, d'une simple gestion administrative à un réel pilotage. Cette évolution aligne les prérogatives de la MSA sur celles des autres régimes professionnels, comme l'Ircantec. Évolution positive, sans doute, mais que fait-on de la concertation ? Les organisations syndicales agricoles doivent continuer d'être associées pour garantir l'efficacité et la justice des retraites agricoles.

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Alinéa 5, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et le niveau des prestations servies

Mme Laurence Cohen.  - La retraite moyenne d'un ancien exploitant agricole est de 800 euros, celle de sa femme de 500. Nous sommes loin de l'objectif 75 % du smic fixé par François Hollande. Réaffirmons-le ! Équilibrer les comptes sociaux au détriment du niveau des pensions n'est pas acceptable.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet article confie à la CCMSA une mission de pilotage de la retraite obligatoire des non-salariés agricoles, et de conseil du Gouvernement sur ses orientations. Les amendements n°s243 et 344 rectifié sont satisfaits par la composition de la CCMSA.

N'opposons pas équilibre de long terme et niveau des prestations servies. Il n'est pas question ici de baisser les pensions ! Ce projet de loi s'inscrit bien dans une logique de revalorisation des pensions les plus faibles, afin qu'elles atteignent 75 % du smic. Il est inutile d'inscrire dans la loi la précision demandée. Sagesse sur l'amendement n°244.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable aux trois amendements. Le maintien des prestations services est un objectif d'ensemble, et non caisse par caisse ; le comité de suivi y veillera.

M. Gérard Longuet.  - Mme la rapporteure et Mme la ministre ont eu raison de repousser les amendements n°s243 et 344 rectifié. La MSA est un organisme animé par des élus du monde agricole, dont la compétence est complètement reconnue. Pourquoi la sanctionner ?

En revanche, l'amendement n°244 montre l'équivoque du projet de loi initial. La caisse des retraites du monde agricole est structurellement déséquilibrée, en raison de la démographie agricole. Le monde agricole a créé des richesses et apporté de nombreux actifs au monde de l'industrie et des services, ce qui a contribué à l'équilibre du régime général.

Enfermera-t-on le conseil d'administration de la MSA dans des paramètres étriqués ? Je comprends la motivation de nos collègues communistes. Sur quels paramètres jouer ? Si ce n'est ni un allongement des cotisations ni le montant des pensions, ce ne peut être que la subvention de l'État. Et cela, il revient au Parlement d'en décider. Dans votre projet, l'amélioration des retraites agricoles repose exclusivement sur la fiscalisation des revenus agricoles.

M. Jean Boyer.  - En 1945, il y avait dix ou douze fois plus d'agriculteurs que de nos jours. La mutualité agricole comptait alors des représentants de toutes les communes de France, qu'elles comptent 300 habitants ou 20 000.

La mécanisation a eu des conséquences terribles. L'ancien agriculteur de montagne qui vous parle sait qu'il n'est pas de terre sans hommes, il sait aussi la précarité de beaucoup d'agriculteurs. Le tissu mutualiste existe toujours, en dépit des tendances bureaucratiques de la MSA. Faisons tout pour qu'elle garde sa vocation, fidèle à la France d'en bas, qui vous est chère, monsieur le président ! Conservons la grande maison qu'est la MSA ! (Applaudissements au centre)

M. René-Paul Savary.  - Le monde agricole se révolte. Il ne comprend plus la charge et la destination des cotisations qu'il doit acquitter. Il est ulcéré. Il importe de lui donner un signe. Que lui propose-t-on ? Un rapport ! Ce n'est pas à la hauteur des attentes.

L'amendement n°243 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°344 rectifié.

M. Jean Desessard.  - Outre les paramètres, les gens s'intéressent au montant des prestations qui en découlent. L'amendement n°244, prônant une évaluation, me paraît de bon sens. Je l'approuve entièrement. J'apprécie le plaidoyer de M. Jean Boyer ; monsieur Savary, vous ne pouvez pas faire l'impasse sur la transformation du modèle agricole, qui change les rapports entre l'homme, la terre et l'animal.

M. Jean-François Husson.  - Cliché !

M. Jean Desessard.  - Pourquoi l'agroalimentaire refuse la traçabilité ? Au nom du moindre coût, cher à l'élevage intensif, qui ne respecte plus le consommateur ! Au contraire, revenons à une agriculture de qualité et de proximité ; c'est cela, l'avenir de l'agriculture française. En voulant copier ceux qui ne parlent que de produire au moindre coût, on ne fera qu'aggraver la crise. Revenons aux valeurs fondamentales : la qualité, la proximité.

M. Jean Boyer.  - Oui, il existe différentes agricultures en France ; les grandes exploitations de plusieurs centaines d'hectares, mais aussi des agriculteurs qui traient leurs vaches à la main dans ma Haute-Loire. La clé, ce sont les circuits courts, le respect des quotients prix et proximité. Les consommateurs, à commencer par moi, veulent des produits naturels, éventuellement bio, à des prix raisonnables, accessibles. Nous sommes nombreux ici à partager ces propos de M. Desessard.

M. René-Paul Savary.  - Monsieur Desessard, oui, l'agriculture est diverse. Il n'y a pas que l'élevage. Il y a un système agroindustriel performant, qui favorise le développement durable, grâce à des emplois non délocalisables, à des savoir-faire d'excellence. Gare aux clichés !

M. Jean Desessard.  - Vous ne me ferez pas soutenir la ferme des 1 000 vaches !

L'amendement n°244 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°345 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

I.- Alinéas 6 et 7

Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :

« 3° L'article L. 732-59 est ainsi rédigé :

« Art. L. 732-59. - I. -  Les cotisations visées à l'article L. 732-58 sont calculées sur la totalité des revenus professionnels ou de l'assiette forfaitaire obligatoire des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, tels que pris en compte aux articles L. 731-14 à L. 731-21. Elles sont fixées de manière progressive dans les conditions prévues au présent article :

« 1° Pour les personnes visées à l'article L. 732-56 dont les revenus sont inférieurs à 1820 fois le montant du salaire minimum de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année précédente, le taux de prélèvement est égal à 4,5 % ;

« 2° pour les personnes visées à l'article L. 732-56 dont les revenus sont supérieurs à 1820 fois le montant du salaire minimum de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année précédente et inférieurs au plafond annuel prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, le taux de prélèvement est égal à 6 % ;

« 3° pour les personnes visées à l'article L. 732-56 dont les revenus sont supérieurs au plafond annuel prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, le taux de prélèvement est égal à 9 %.

« II.  -  Les cotisations sont dues par les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole visés au I de l'article L. 732-56 à compter du 1er janvier 2003.

« III.  -  Les frais de gestion visés à l'article L. 732-58 sont couverts par un prélèvement sur le montant des cotisations, dans une limite fixée par décret.

« IV.  -  En aucun cas, le revenu professionnel pris en compte pour l'attribution annuelle de points portés au compte de l'assuré, ne peut être supérieur au plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. »

II.- Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour les caisses de mutualité sociale agricole du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean Desessard.  - Amendement technique, intelligemment rédigé, que je vais m'efforcer de résumer. (Sourires)

La majorité des paysans sont donc en sur-cotisation : 74 % des cotisants agricoles ont un revenu inférieur au smic annuel mais doivent acquitter une cotisation minimum calculée sur ce smic. Il convient d'y remédier et c'est l'objet de cet amendement : créer un système progressif de prélèvement et retrouver un équilibre budgétaire en ajustant les taux de cotisations pour les revenus les plus élevés. Ceux-ci sont favorisés puisque, soumis au même taux de cotisation, ils reçoivent des points sans aucun plafonnement.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement se rapproche de l'amendement n°244, pour la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés. Toutefois, il augmente très sensiblement le taux de cotisation, actuellement de 3 %, des non-salariés agricoles. Je ne suis pas certaine que ce soit la bonne méthode. Sur la forme, la fixation des taux relève du parcours réglementaire. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis défavorable.

L'amendement n°345 rectifié n'est pas adopté.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'article 31, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

ARTICLE 32

M. le président.  - Amendement n°295, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Pourquoi supprimer cet article ? Parce qu'il met sous tutelle la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL). On peut s'interroger sur une telle démarche sachant que la caisse a 15 milliards d'euros de réserve ! On veut toucher à ce qui marche, dans cette société d'assistanat général, et imposer le modèle de ce qui ne marche pas. Depuis quatre ans, la caisse des professions libérales a subi quatre contrôles de l'Igas et deux de la Cour des comptes. Excusez du peu !  D'après la Cour des comptes, le RSI est une « catastrophe industrielle ». Ses frais de gestion sont de 5,8 %, contre 1,36 % pour les médecins. Les impayés atteignent 22,4 %, contre 2,2 % pour les caisses des médecins. Pourquoi vouloir étendre ce modèle ?

M. le président.  - Amendement identique n°355, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe UDI-UC.

M. Gérard Roche.  - Cette réforme de la gouvernance sous couvert de bonne gestion aboutira à une mise sous tutelle par l'État des caisses de retraites des libéraux, qui affichent aujourd'hui les plus faibles frais de gestion pour le meilleur service rendu. Elles ont accumulé 15 milliards d'euros de réserves depuis 30 ans. Préservons ce modèle qui fonctionne bien.

M. le président.  - Amendement identique n°380 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Mme Françoise Laborde.  - On propose de réformer la CNAVPL sur le modèle du RSI que la Cour des comptes a justement dénoncé.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet article 32 entend améliorer la gestion des retraites des professions libérales en renforçant les moyens de la CNAVPL. Il ne s'agit nullement de ponctionner ses ressources. (Exclamations ironiques à droite)

La loi d'août 2003 a révisé les règles de fonctionnement du régime de base et des régimes complémentaires des professions libérales en conférant à la CNAVPL un rôle d'animation du réseau des dix sections professionnelles. Elle ne l'a jamais endossé. J'ajoute qu'elle est la seule à n'avoir jamais contractualisé avec l'État. Et ce, depuis 2003 ! Alors, mesdames et messieurs de l'UMP, par cohérence avec les choix passés, rejet. (Protestations à droite)

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je veux dissiper les inquiétudes, pour autant qu'elles soient de bonne foi. (Exclamations à droite) Nous ne cherchons nullement à faire main-basse sur les réserves des sections professionnelles, je le dis très clairement. Ces réserves garantissent l'équilibre des caisses. La tentation de l'étatisation ? Mais la CNAVPL est déjà sous la tutelle de l'État, comme toutes les autres caisses. Le but est d'assurer le bon fonctionnement d'une caisse nationale, ce qui paraît bien légitime. Nous avons ajusté la rédaction de l'article 32 pour tenir compte des avis de l'Union nationale des professions libérales (UNAPL) et de la CNAVPL. Ces organismes s'en sont félicités dans un communiqué commun du 10 octobre dernier.

L'avis est défavorable.

M. Jean-François Husson.  - À entendre Mme la ministre, l'objectif est seulement d'assurer une meilleure gouvernance. Puisque tout va bien, pourquoi le faire ?

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Pour appliquer la réforme de 2003 !

M. Jean-François Husson.  - Faites confiance à la caisse ! Ne mettez pas en cause notre bonne foi : nous sommes dans notre rôle en cherchant à faire entendre les inquiétudes des élus de la CNAVPL. Votre défense de la réforme de 2003 ne manque pas de sel ! Nous, nous ne cautionnerons pas cette mesure qui va aux dépens des intérêts des professions libérales ! (Applaudissements à droite)

M. Gérard Longuet.  - Les rapports de la Cour des comptes et de l'Igas méconnaissent une réalité essentielle : les professions libérales sont diverses ; certaines sont règlementées. Leur situation varie considérablement : l'État contrôle l'accès à la profession de médecin, mais non au métier d'avocat, qui est libre. Résultat, peu de cotisants chez les médecins mais des situations confortables quand les avocats actifs sont, eux, plus nombreux mais, surtout les jeunes, ont des capacités contributives relativement faibles. À chaque section professionnelle la charge de gérer sa caisse. On ne peut imposer un modèle unique.

M. René-Paul Savary.  - Tout va très bien, madame la ministre... Tout va très bien ! (Sourires à droite) J'ai reçu de nombreux courriers où l'on se demande pêle-mêle comment le Gouvernement peut se mettre à dos 800 000 libéraux qui se voient imposer l'article 32, pourquoi il veut nommer un directeur, pourquoi cette réforme idéologique, pourquoi les propositions faites par les professionnels n'ont pas trouvé d'écoute. (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs à droite )

M. Claude Domeizel.  - Le groupe socialiste votera contre ces amendements de suppression. Faire main basse sur les 15 milliards d'euros de la CNAVPL ? Mais pourquoi pas ?

M. Gilbert Barbier.  - Quel aveu ! Comment va-t-on payer les retraites ?

M. Claude Domeizel.  - J'avais cru comprendre que notre système de retraite était fondé sur la solidarité. D'où le mécanisme de compensation créé en 1974, que nous devons revoir. La Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNACRL), que l'on connaît bien au Sénat, a versé 1,4 milliard d'euros en 2012, alors qu'elle ne détient aucune réserve, contre 700 millions d'euros pour la CNAVPL. Revoir le mécanisme de compensation, qui est devenu injuste, est une urgence !

M. Gilbert Barbier.  - Les propos de M. Domeizel sont instructifs.

M. Claude Domeizel.  - Ils n'engagent que moi !

M. Gilbert Barbier.  - Étatisation de la CNAVPL est peut-être un peu fort. Il n'empêche que son directeur sera nommé par décret. Certains médecins contestent la gestion de leur caisse autonome de retraite, la Cour des comptes assure pourtant qu'elle est équilibrée jusqu'en 2040. Pourquoi enfermer dans un contrat d'objectifs et de gestion la liberté de gestion des régimes complémentaires dans dix sections professionnelles ? Outre que le directeur sera nommé par décret, il ne pourra être démis qu'à la majorité des deux tiers. Autrement dit, il pourra diriger la caisse pendant cinq avec six opposants. On se demande bien comment ! Cet article 32 est superfétatoire, à moins qu'il ne trahisse fondamentalement votre hostilité au système de retraite par points.

M. Marc Laménie.  - Je ne suis pas membre d'une profession libérale et M. Barbier a bien dit les choses : il y a de quoi craindre une fusion des caisses des libéraux. Les pharmaciens de mon département m'ont alerté.

M. René Beaumont.  - Bien qu'administrateur d'une caisse, celle des vétérinaires, je n'avais pas l'intention d'intervenir après MM. Longuet, Cardoux, Husson et Savary. M. Domeizel m'y force. Je l'ai entendu tout au long de ces jours et je l'ai trouvé sincère, honnête et franc. Mais sa franchise l'a perdu. Il a l'air de nous accuser d'un défaut de solidarité. Oui à la solidarité à condition que cela soit à part égale. Nous, les libéraux, qui travaillons jusqu'à 65 ans, bientôt 67 ans, paierons pour ceux qui ne travaillant pas assez, prennent leur retraite à 50, 52 ou 55 ans. (Protestations à gauche)

M. Claude Domeizel.  - De qui parlez-vous donc ?

M. René Beaumont.  - C'est du vol, c'est scandaleux ! (Applaudissements à droite)

M. Claude Domeizel.  - Oui. C'est ce que vous dîtes qui est scandaleux ! (On apprécie à gauche)

À la demande des groupes UDI-UC et UMP, les amendements identiquess295, 355 et 380 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°41 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 185
Contre 159

Le Sénat a adopté.

L'article 32 est supprimé.

Les amendements n°s296 à 302 deviennent sans objet.

ARTICLE 32 BIS

M. Claude Domeizel .  - Le groupe socialiste votera évidemment cet article.

Je reprends la parole pour préciser que mes propos sur l'article 32, tout à fait spontanés, n'engagent que moi. Libre à mes collègues de s'y associer.

M. Gilbert Barbier.  - Et à la ministre ?

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'article 32 bis, mis aux voix par assis et levé, est adopté.

L'article 33 est adopté.

présidence de M. Didier Guillaume,vice-président

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°303, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Après l'article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du travail est ainsi modifié :

I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 3314-10 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces sommes peuvent également être affectées en tout ou partie aux régimes de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »

II. - L'article L. 3315-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il en est de même si ces sommes sont affectées à un régime de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »

III. - L'article L. 3315-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il en est de même si ces sommes sont affectées à un régime de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »

IV.- La perte de recettes pour l'État et pour les organismes de sécurité sociale résultant des I, II et III ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.  

M. Jean-Noël Cardoux.  - Nous présentons quatre amendements pour défendre un système qui n'est pas politiquement correct, celui de la retraite par capitalisation.

Nous proposons que les contrats d'entreprise à cotisations définies, dont une partie de la cotisation est financée par l'entreprise, se développent largement en les alimentant par des sommes provenant de l'intéressement.

Ils représentent un stock de 34 milliards d'euros d'engagements à l'égard des salariés.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement pourrait utilement figurer à l'ordre du jour du Copiesas, chargé de faire des propositions en vue d'une réforme globale de l'épargne salariale. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Jean-François Husson.  - Cette réponse n'est pas satisfaisante. La particularité du système français, nous l'avons dit aux articles premier et 2, est d'associer retraite par répartition et retraite par capitalisation qui n'est pas un gros mot !

L'amendement n°303 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°305, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Après l'article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après le 2° de l'article L. 3323-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 3° À des régimes de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »

II.  -  Après le premier alinéa de l'article L. 3324-12 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Ces mêmes salariés ou bénéficiaires peuvent obtenir de l'entreprise que les sommes qui leur sont attribuées par celle-ci, au titre de la participation, soient affectées aux régimes de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »

III.  -  Le deuxième alinéa de l'article 163 bis AA du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L'exonération est également totale lorsque les sommes reçues sont à la demande des salariés affectées en tout ou partie à des régimes de retraite supplémentaire auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. »

IV.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

V.  -  La perte de recettes résultant pour l'État des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Isabelle Debré.  - Nous proposons de développer les contrats d'entreprise à cotisations définies, dont une partie de la cotisation est financée par l'entreprise. Ils représentent un stock de 34 milliards d'euros d'engagements à l'égard des salariés.

Il conviendrait d'élargir les possibilités de versement sur ces contrats, en cohérence avec les autres produits de retraite d'entreprise créés par la loi du 21 août 2003.Nous proposons un abondement avec les sommes venant de la participation.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Après l'intéressement, la participation : comme à l'amendement précédent, défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Également.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Lors du débat récent, dans cet hémicycle, sur l'utilisation de ces sommes pour relancer la consommation, nous avions proposé de les affecter à des choses plus durables, comme des travaux dans le bâtiment, qui ne sont pas délocalisables. Cet amendement est tout à fait conforme à l'esprit de l'intéressement et de la participation créés par le général de Gaulle.

L'amendement n°305 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°304, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Après l'article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le a) du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il en est de même des sommes versées sur ces mêmes plans par une entreprise employant moins de cinquante salariés pour le compte de ceux adhérant à un plan. »

II. - Les sommes versées par l'entreprise mentionnées au a) du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts sont assimilées aux contributions relevant du sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et ne sont pas prises en compte dans l'assiette définie au premier alinéa du même article.

III. - Les sommes versées par l'entreprise mentionnées au a) du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts doivent être identiques pour une même catégorie de salariés.

IV. - La perte de recettes pour l'État et pour les organismes de sécurité sociale résultant des I, II et III ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.  

M. Jean-Noël Cardoux.  - Cet amendement est de la même veine.

La loi du 21 août 2003 à créer le Perp. Il convient de compléter ce dispositif en prévoyant la faculté, pour un employeur, de verser des sommes sur un Perp qui aurait été ouvert par ses salariés.

Les PME de moins de 50 salariés, tellement maltraitées, représentent le plus grand gisement d'emplois de ce pays, cet amendement serait une excellente chose pour leurs salariés.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement prévoit une exonération, qui sera aux dépens des caisses des régimes de retraite par répartition : avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°304 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°306, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia et M. Savary.

Après l'article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Tout salarié lié par un contrat de travail de droit privé et relevant du régime d'assurance vieillesse de base mentionné au titre 5 du livre 3 du code de la sécurité sociale ainsi que des régimes de retraite complémentaire mentionnés au titre 2 du livre 9 du code de la sécurité sociale peut adhérer à un plan d'épargne retraite répondant aux conditions fixées par la présente loi. Les avocats salariés relevant de la Caisse nationale des barreaux français mentionnée à l'article L. 723-1 du code de la sécurité sociale peuvent également adhérer à un plan d'épargne retraite.

Au terme d'un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, les salariés qui ne bénéficient d'une proposition de plan d'épargne retraite ni au titre d'un accord collectif d'entreprise, professionnel ou interprofessionnel, ni au titre d'une décision unilatérale de leur employeur ou d'un groupement d'employeurs, peuvent demander leur adhésion à un plan d'épargne retraite existant. Si, postérieurement à cette adhésion, un plan d'épargne retraite est proposé dans leur entreprise, ils peuvent demander que les droits qu'ils ont acquis soient transférés intégralement et sans pénalité sur ce plan. Un décret fixe les conditions d'application du présent alinéa.

II.  -  Les citoyens français établis hors de France peuvent demander leur adhésion à un plan existant, lors même qu'ils ne relèvent pas d'un régime de retraite complémentaire.

III.  -  Le plan d'épargne retraite ouvre droit, au profit de ses adhérents, au paiement d'une rente viagère à compter de la date de leur cessation définitive d'activité et, au plus tôt, à l'âge fixé en application de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, en contrepartie de leurs versements ou des abondements de leur employeur.

À cette date, les adhérents ont également la possibilité d'opter pour un versement unique qui ne peut excéder 20 % de la provision mathématique représentative des droits de l'adhérent, sans que le montant de ce versement puisse excéder 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale.

Par dérogation aux dispositions des alinéas précédents, la rente d'un montant annuel inférieur à une valeur fixée par arrêté du ministre de l'économie est liquidée en totalité sous la forme d'un versement unique.

L'adhérent à un plan d'épargne retraite peut également demander que tout ou partie de la rente servie au titre de ce plan soit versée, après son décès, à ses enfants mineurs, incapables ou invalides ou à son conjoint survivant.

IV.  -  Les plans d'épargne retraite peuvent être souscrits par un ou plusieurs employeurs, ou par un groupement d'employeurs, au profit de leurs salariés.

La souscription peut résulter d'un accord collectif d'entreprise ou d'un accord de branche, professionnel ou interprofessionnel, conclu à un échelon national, régional ou local. Ces accords sont régis par le titre III du livre II de la deuxième partie du code du travail, à l'exclusion de ses chapitres III et IV ; ils peuvent déroger au second alinéa de l'article L. 2252-1 et au second alinéa de l'article L. 2253-2 dudit code. Les plans d'épargne retraite sont proposés à l'adhésion de tous les salariés de l'entreprise et, en cas d'accord de branche, professionnel ou interprofessionnel, à tous les salariés compris dans son champ d'application professionnel et territorial. Les conditions d'adhésion sont alors définies de façon identique pour des catégories homogènes de salariés.

En cas d'impossibilité de conclure un accord collectif ou, à défaut de conclusion d'un tel accord dans un délai de six mois à compter du début de la négociation, la souscription peut également résulter d'une décision unilatérale de l'employeur ou d'un groupement d'employeurs constatée dans un écrit remis par ceux-ci à chaque salarié. Les salariés d'une même entreprise adhèrent au plan d'épargne retraite qui leur est proposé dans les conditions prévues à l'alinéa précédent.

V.  -  La mise en place de plans d'épargne retraite est subordonnée à la conclusion d'un contrat entre un employeur, un groupement d'employeurs, d'une part, et un organisme mentionné au 1° du VIII du présent article, d'autre part.

Les fonds d'épargne retraite ne peuvent s'engager à servir des prestations définies.

VI.  -  Les versements du salarié et l'abondement de l'employeur aux plans d'épargne retraite sont facultatifs. Ils peuvent être suspendus ou repris sans pénalité dans des conditions fixées soit par les accords collectifs visés au IV du présent article, s'ils existent, soit, à défaut, par décret.

L'abondement de l'employeur ne peut excéder chaque année le quadruple des versements du salarié.

VII.  -  En cas de rupture du contrat de travail, l'adhérent à un plan d'épargne retraite peut demander le maintien intégral des droits acquis au titre de ce plan. Il peut également demander le transfert intégral sans pénalité, dans des conditions fixées par décret, des droits attachés à ce plan sur un autre plan d'épargne retraite ou contrat d'assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle.

En l'absence de rupture du contrat de travail, l'adhérent peut demander, à l'expiration d'un délai de dix ans à compter de son adhésion, le transfert intégral, sans pénalité, des droits acquis en vertu de ce plan sur un autre plan d'épargne retraite. Cette demande ne peut être renouvelée qu'une fois.

VIII.  -  Les fonds d'épargne retraite.

1° Les fonds d'épargne retraite sont des personnes morales ayant pour objet exclusif la couverture des engagements pris dans le cadre de plans d'épargne retraite. Les fonds d'épargne retraite doivent être constitués sous la forme d'une société anonyme d'assurance, d'une société d'assurance mutuelle, d'une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale ou d'un organisme mutualiste du code de la mutualité.

Lorsque le fonds d'épargne retraite est constitué sous la forme d'une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale, le chapitre 2 du titre 3 du livre 9 dudit code est applicable aux plans d'épargne retraite souscrits auprès de ce fonds.

Lorsque le fonds d'épargne retraite est constitué sous une autre forme juridique, les titres Ier, III et IV du livre Ier et le titre IV du livre IV du code des assurances sont applicables aux plans d'épargne retraite souscrits auprès de ce fonds.

2° Lorsque l'accord collectif ou la décision unilatérale visés au IV du présent article désignent le fonds d'épargne retraite auprès duquel est souscrit le plan, il comporte une clause déterminant dans quelles conditions et selon quelle périodicité le choix de ce fonds ainsi que des intermédiaires et délégataires des opérations relatives aux plans d'épargne retraite peut être réexaminé. La périodicité du réexamen ne peut excéder cinq ans.

Lorsque le souscripteur d'un plan d'épargne retraite décide de changer de fonds d'épargne retraite, la contre-valeur des actifs représentatifs des droits et obligations attachés à ce plan est intégralement transférée, sans pénalité, vers le nouveau fonds d'épargne retraite dans un délai et selon des modalités fixées par décret.

3° Les fonds d'épargne retraite ne peuvent commencer leurs opérations qu'après avoir obtenu un agrément administratif délivré après avis de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article.

Les dispositions de l'article L. 310-27 du code des assurances s'appliquent lorsque des opérations visées au 1° du VIII du présent article sont pratiquées sans cet agrément. Cet agrément est délivré par arrêté du ministre chargé de l'économie lorsque les fonds d'épargne retraite sont constitués sous la forme d'une société anonyme d'assurance ou d'une société d'assurance mutuelle et par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé de la sécurité sociale lorsqu'ils sont constitués sous la forme d'un organisme mutualiste régi par le code de la mutualité ou sous la forme d'une institution de prévoyance.

La délivrance de l'agrément prend en compte :

-  les moyens techniques et financiers dont la mise en oeuvre est proposée et leur adéquation au programme d'activités de l'entreprise d'assurance, de l'organisme mutualiste ou de l'institution de prévoyance ;

-  l'honorabilité et la qualification des personnes chargées de diriger l'entreprise d'assurance, l'organisme mutualiste ou l'institution de prévoyance ;

-  la répartition du capital et la qualité des actionnaires de la société anonyme d'assurance ou, pour les sociétés d'assurance mutuelles, les organismes mutualistes et les institutions de prévoyance, les modalités de constitution du fonds d'établissement.

La liste des documents à produire à l'appui d'une demande d'agrément est fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie.

4° a) Les règles propres à la forme juridique sous laquelle est constitué le fonds d'épargne retraite continuent de s'appliquer, sous réserve qu'elles ne soient pas contraires aux dispositions de la présente loi.

b) Lorsque le fonds est constitué sous la forme d'une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale, les articles L. 931-9 à L. 931-33 dudit code lui demeurent applicables.

Lorsque le fonds est constitué sous la forme d'un organisme mutualiste régi par le code de la mutualité, les chapitres II à VIII du titre II, le titre III et le titre IV du livre III du code des assurances, à l'exception des articles L. 322-26-1 à L. 322-26-2-1 et L. 322-26-5, lui sont applicables en tant qu'ils visent les sociétés d'assurance mutuelles. Lorsque le transfert de portefeuille de contrats est réalisé selon les modalités prévues à l'article L. 324-1 du code des assurances, l'arrêté du ministre chargé de l'économie autorisant le transfert doit être contresigné par le ministre chargé de la sécurité sociale lorsque l'entreprise à l'origine ou bénéficiaire du transfert est une institution de prévoyance régie par le titre 3 du livre 9 du code de la sécurité sociale ou un organisme mutualiste régi par le code de la mutualité.

5° a) En cas de délégation de la gestion des actifs des fonds d'épargne retraite, celle-ci ne peut être confiée qu'à une entreprise d'investissement agréée pour effectuer à titre principal les services visés au 4 de l'article L. 321-1 du code monétaire et financier.

Dans ce cas, le fonds d'épargne retraite procède, au moins tous les cinq ans, au réexamen du choix de l'entreprise d'investissement.

b) L'Autorité des marchés financiers désigne deux de ses membres qui participent avec voix délibérative aux travaux de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article.

6° a) Les fonds d'épargne retraite sont tenus d'exercer effectivement, dans le seul intérêt des adhérents, les droits de vote attachés aux titres, donnant directement ou indirectement accès au capital de sociétés, détenus par ces fonds.

Le non-respect de l'obligation posée à l'alinéa précédent est sanctionné par l'Autorité des marchés financiers dans les conditions prévues au titre II du livre VI du code monétaire et financier.

Un décret fixe les conditions d'application du présent paragraphe et, notamment, les conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux dispositions du premier alinéa dans le cas où l'exercice effectif des droits de vote entraînerait des coûts disproportionnés.

b) Les actionnaires d'un fonds d'épargne retraite doivent s'abstenir de toute initiative qui aurait pour objet ou pour effet de privilégier leurs intérêts propres au détriment des adhérents.

Les dirigeants d'un fonds d'épargne retraite doivent, dans l'exercice de leur activité, conserver leur autonomie de gestion afin de faire prévaloir, dans tous les cas, l'intérêt des adhérents des plans d'épargne retraite dont ce fonds couvre les engagements.

IX.  -  Les comités de surveillance.

1° Dès la mise en place d'un plan d'épargne retraite, le souscripteur est tenu de mettre en place un comité de surveillance.

Ce comité est composé, au moins pour moitié, de représentants élus des adhérents du plan. Il peut comprendre des personnalités n'adhérant pas au plan, compétentes en matière de protection sociale ou de gestion financière et n'ayant aucun lien de subordination ou d'intérêt avec le fonds.

2° Le comité de surveillance définit les orientations de gestion du plan d'épargne retraite. Aucune modification du contrat instituant ce plan ne peut être prise sans que le comité en soit informé préalablement.

Le comité de surveillance émet au moins deux fois par an un avis sur la gestion du plan et, le cas échéant, sur la gestion du fonds.

Un décret précise les modalités de fonctionnement du comité de surveillance, notamment les conditions dans lesquelles les avis mentionnés à l'alinéa précédent sont portés à la connaissance des adhérents au plan.

3° Un tiers au moins des membres du comité de surveillance peut interroger les dirigeants du fonds d'épargne retraite sur une ou plusieurs opérations relatives à la gestion du plan d'épargne retraite.

À défaut de réponse sous trente jours, ou si la réponse ne satisfait pas les membres du comité de surveillance visés au premier alinéa, ces derniers peuvent demander en justice la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur la ou les opérations de gestion concernées.

Le ministère public est habilité à agir aux mêmes fins.

S'il est fait droit à la demande, la décision de justice détermine l'étendue de la mission et des pouvoirs des experts. Elle peut mettre les honoraires à la charge du fonds.

Le rapport est adressé au comité de surveillance, au ministère public, au commissaire aux comptes du fonds qui gère le plan d'épargne retraite, aux organes de direction dudit fonds ainsi qu'au président de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article. Ce rapport doit en outre être annexé à celui établi par le commissaire aux comptes en vue de la prochaine assemblée générale du fonds.

Un décret fixe les conditions d'application du présent IX.

X.  -  Le contrôle des fonds d'épargne retraite.

1° Le contrôle de l'État sur les fonds d'épargne retraite est exercé par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution mentionnée aux articles 612-1 et suivants du code monétaire et financier, et dans l'intérêt des salariés adhérant à un plan d'épargne retraite et de leurs ayants droit au titre de la présente loi.

La présidence de la réunion des deux commissions instaurée à l'alinéa précédent est assurée.

2° L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution adresse chaque année un rapport d'activité au Président de la République et au Parlement.

3° Les membres de la commission constituée conformément au 1° du X du présent article ne peuvent, pendant la durée de leur mandat et dans les cinq ans qui suivent l'expiration de celui-ci, recevoir, directement ou indirectement, de rétribution d'un fonds d'épargne retraite ou d'un prestataire de services d'investissement mentionné au 5° du VIII du présent article, ou de toute société exerçant sur le fonds ou le prestataire un contrôle exclusif au sens de l'article L. 233-16 du code du commerce.

XI.  -  Information des adhérents.

1° Le souscripteur d'un plan d'épargne retraite est tenu :

- de remettre à l'adhérent une notice établie par le fonds qui définit les garanties et leurs modalités d'entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir lors de la liquidation de sa rente viagère ou, le cas échéant, du versement unique ;

- d'informer, le cas échéant, les adhérents par écrit des modifications qu'il est prévu d'apporter à leurs droits et obligations lors d'une modification du contenu ou des conditions de gestion du plan d'épargne retraite.

La preuve de la remise de la notice à l'adhérent et de l'information relative aux modifications contractuelles incombe au souscripteur.

Le fonds d'épargne retraite communique chaque année, deux mois au plus après la date de clôture de ses comptes et au plus tard le 31 août suivant la clôture de l'exercice considéré, à chaque souscripteur d'un plan d'épargne retraite ainsi qu'au comité de surveillance du plan un rapport sur la gestion du plan, établi dans des conditions fixées par décret.

En outre, le fonds doit indiquer chaque année aux adhérents des plans d'épargne retraite, dans des conditions fixées par décret, le montant de la provision mathématique représentative des droits qu'ils ont acquis dans le cadre du plan par leurs versements et, le cas échéant, l'abondement de leur employeur.

2° Le comité de surveillance peut demander aux commissaires aux comptes et aux actuaires de fonds d'épargne retraite auprès desquels les plans sont souscrits tout renseignement sur l'activité et la situation financière des fonds. Les commissaires aux comptes et les actuaires sont alors déliés, à son égard, de l'obligation de secret professionnel. Les membres du comité de surveillance sont tenus à une obligation de discrétion à l'égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par les commissaires aux comptes.

XII.  -  Règles prudentielles applicables aux fonds d'épargne retraite.

1° Les fonds d'épargne retraite sont soumis à des règles spécifiques d'évaluation de leurs actifs, de provisionnement afférent à ces derniers et de participation aux excédents, fixées par décret en Conseil d'État. Ces règles tiennent compte de la nature et de la durée de détention de leurs actifs ainsi que de leurs besoins de solvabilité.

2° Les engagements réglementés des fonds d'épargne retraite ne peuvent être représentés pour plus de 65 % par des titres de créance visés au 2 de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier ou par des parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières investies à titre principal dans ces mêmes titres de créance. Un décret fixe les conditions d'application du présent article.

3° a) Les engagements réglementés des fonds d'épargne retraite ne peuvent être représentés pour plus de 5 % par des parts ou actions d'un même organisme de placement collectif en valeurs mobilières, ou par l'ensemble des valeurs émises et des prêts obtenus par une même société ou par des sociétés contrôlées par cette société au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.

Cette règle ne s'applique pas aux parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières représentatives des engagements des plans d'épargne retraite à capital variable pour lesquels la somme assurée est déterminée par rapport à une valeur de référence. Dans ce cas, ces organismes de placement collectif en valeurs mobilières ne peuvent employer plus de 5 % de leurs actifs en titres d'une même société ou de sociétés contrôlées par cette société au sens de l'article L 233-3 précité. Aucune autre dérogation à la règle posée au premier alinéa n'est admise.

b) Les engagements réglementés des fonds d'épargne retraite peuvent être représentés, à concurrence de 10 % et dans la limite de 0,5 % par émetteur, appréciée dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa précédent, par des actions, parts ou droits émis par une société commerciale et non admis à la négociation sur un marché réglementé ainsi que par des parts de fonds communs de placement à risques mentionnés à l'article L. 214-36 du code monétaire et financier et de fonds communs de placement dans l'innovation institués par l'article L. 214-41 du même code.

XIII.  -  Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après le 1° bis de l'article 83, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« ...° Les versements des salariés et les contributions complémentaires de l'employeur aux plans d'épargne retraite prévus par l'article L. 137-5 du code de la sécurité sociale dans la limite de la plus élevée de ces deux valeurs : 5 % du montant brut de la rémunération ou 20 % du plafond annuel moyen retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale ; l'excédent est ajouté à la rémunération. 

« La différence entre, d'une part, la limite définie au précédent alinéa et, d'autre part, les versements et les contributions complémentaires de l'employeur effectués au titre d'une année peut être utilisée au cours de l'une des trois années suivantes pour effectuer des versements complémentaires bénéficiant de l'exonération prévue au précédent alinéa. Un décret fixe les conditions d'application de ces dispositions, et notamment les obligations déclaratives des employeurs et des salariés ; »

2° L'article 206 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 12. Les fonds d'épargne retraite prévus par l'article L. 137-5 du code de la sécurité sociale sont assujettis à l'impôt sur les sociétés, dans les conditions de droit commun. » ;

3° L'article 219 quater est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces dispositions ne sont pas applicables aux fonds d'épargne retraite mentionnés au 12 de l'article 206. »

XIV.  -  Au sixième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, après le mot : « prévoyance », sont insérés les mots : « , y compris les abondements des employeurs aux plans d'épargne retraite, ».

XV.  -  Les fonds d'épargne retraite ne sont pas assujettis à la contribution des institutions financières.

XVI.  -  La perte de recettes résultant pour l'État des I à XV ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

XVII.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à XV ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

XVIII.  -  La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration du prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale et, corrélativement pour l'État, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Isabelle Debré.  - Le système de retraite français est à trois étages, avec les régimes de base obligatoire par répartition, les régimes de retraite complémentaire obligatoire, l'épargne retraite collective ou individuelle.

La loi « Thomas » créant les plans d'épargne retraite, du 25 mars 1997 avait autorisé la création de fonds de pension en France. Elle n'a reçu aucun décret d'application, du fait de l'alternance de 1997.

Ce mécanisme, supprimé par l'article 48 de la loi du 12 janvier 2002, doit être rétabli.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Tout de même, vous avez eu dix ans, entre 2002 et 2012, pour appliquer la loi Thomas !

M. Jean Desessard.  - Voilà !

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement, comme le précédent, priverait les caisses de ressources puisqu'il prévoit une exonération. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Jean-François Husson.  - Le système de retraite par répartition, contrairement à ce que j'ai entendu ici, n'est pas le plus juste. Puisque la retraite ressort du temps long, regardons les choses depuis la crise de 1929. Le plus rentable, ce sont les actions, bien sûr !

M. Jean-François Husson.  - Nous offrons aux Françaises et aux Français de s'associer à la création de richesses dans notre pays...

M. Jean Besson.  - Vous l'offrez à ceux qui ont de l'épargne...

M. Jean-François Husson.  - Qui ont peu d'épargne ! Je redis ici que modifier les règles du jeu rétroactivement est inacceptable pour les petits épargnants. Que chacun reconsidère sa position comme l'a fait le groupe écologiste tout à l'heure ; il en est encore temps. Ce sera dans l'intérêt national !

M. Jean Bizet.  - Très bien.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Nous n'avons pas eu l'opportunité de rétablir la loi Thomas...

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Ah bon ? Et en 2003, en 2008, en 2010 ?

M. Jean-Noël Cardoux.  - Je regrette que la dépendance ait été tant absente de nos débats. (Murmures sur les bancs CRC) On en parle beaucoup, on nous dit que le Gouvernement travaille, mais rien ne vient... Comment a-t-on pu l'occulter de cette discussion sur l'avenir des retraites ? L'espérance de vie augmente, et le risque de dépendance avec elle. La retraite ne relève pas de la logique assurantielle, contrairement à la présentation qu'en font certains experts. Elle est certaine pour qui est en vie. En revanche, la dépendance est un aléa. On n'échappera pas à son propos à un système assurantiel privé. D'où l'intérêt de la retraite par capitalisation, qui apporte une rente complémentaire, propre à responsabiliser chacun à l'inverse de la logique de l'assistanat général. (Protestations à gauche)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Votre sincérité vous trahit.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Un versement partiel en capital peut aussi répondre aux préoccupations des personnes âgées qui deviennent dépendantes et doivent changer de domicile ou adapter leur logement.

La logique financière des fonds de pension, dit-on, implique un risque. Néanmoins, il n'existe pas d'exemple de fonds de pension souscrit en début de carrière n'ayant pas profité aux intéressés au terme de leurs cotisations. (M. Jean Besson s'exclame)

M. Marc Laménie.  - Je voterai cet amendement que Mme Debré a présenté avec franchise et compétence. Je dirais qu'il pose un problème réel. Quelle que soit la majorité, des mesures de bonne gestion s'imposent. Cet amendement dense soulève des problèmes réels : démographie, dépendance et évolution sociale sont liées.

M. Jean Desessard.  - Après vous avoir entendus, je n'ai guère de doute sur la position du groupe écologiste. Je voterai contre cet amendement. Quelle franchise ! Nous voyons clairement le fond de votre pensée ! Vous avez commencé doucement, presque sur le ton de la confidence, et voilà l'aveu : il faut aller vers un système par capitalisation ! (Exclamations à droite) Et de solidarité il n'est pas question... (Protestations sur les mêmes bancs) N'avez-vous pas parlé « d'assistanat général » ?

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Eh oui !

M. Jean Desessard.  - Connaissez-vous la différence entre solidarité et assistanat ? Nous voici donc à un moment de vérité : un système de répartition minima, de capitalisation maxima. (Applaudissements sur les bancs écologistes ; protestations à droite)

Mme Laurence Cohen.  - Oui, cet amendement témoigne de votre logique politique, constante, après votre première entrée dans la capitalisation à l'article premier. Vous passez sous silence les dégâts, aux États-Unis et en Europe, de la capitalisation. Vous portez des jugements péjoratifs sur les feignants qui ne travailleraient pas assez, en refusant de voir que des peuples sont mis à genoux par de tels systèmes. Nous avons évoqué l'exemple suédois, dans lequel les pensions servent de variables d'ajustement - elles y ont fondu en cinq ans de 40 %. Nous n'en voulons pas. Nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs CRC et sur quelques bancs socialistes)

L'amendement n°306 n'est pas adopté.

L'article 33 bis est adopté.

L'article 34 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Noël Cardoux .  - Je me doutais que nos derniers amendements susciteraient des réactions ; nous devions les défendre, par cohérence. Au total, nous avons obtenu quelques avancées, mais nous sommes loin du compte. Vous faites une réforme comptable, arithmétique, pour gagner un peu de temps ; financièrement, à peine la moitié du chemin a été parcourue. Après cette rustine sur une jambe de bois, il faudra y revenir. Surtout, il faudra revoir les règles de fond, structurelles, qui n'ont pas été abordées par ce projet de loi - réforme systémique, convergence, gouvernance.

Avec la suppression des articles 2, 3, 4, 6, 10, 12, 16, 31 et 32, nous avons corrigé en partie le texte. L'amendement du groupe UDI-UC à l'article premier instaurant une réforme systémique, celui d'Isabelle Debré à l'article 12 bis, sont positifs. Toutefois, cette réforme comporte trop de lacunes, que M. Longuet et les autres orateurs de mon groupe ont soulignées. Le groupe UMP ne la votera pas.

M. Jean Desessard.  - Qui la votera ?

M. Jean Bizet .  - Le Gouvernement se trouve dans une grande ambigüité et une grande incohérence. À Bruxelles, il défend une coordination étroite des politiques économiques et budgétaires et même un gouvernement économique de l'Union. Celle-ci recommande à la France de relever à nouveau, après la réforme de 2010, l'âge de départ à la retraite et d'éviter d'augmenter les cotisations sociales pesant sur la compétitivité et l'emploi. À Paris, le Gouvernement fait le contraire : il ne touche pas à l'âge de départ à la retraite et augmente les cotisations. Y aurait-il deux gouvernements, l'un à Bruxelles, l'autre à Paris ? Combien de temps encore vont-ils cohabiter ? Nos partenaires finiront par se lasser de ce double langage, alors que tous les pays de la zone euro ont adopté un âge légal de 65 ans ou 66 ans, avec il est vrai dans certains d'entre eux des règles plus favorables pour les femmes.

Certains tiennent qu'en éliminant précocement les seniors du marché du travail et en taxant toujours plus les actifs, on donne du travail aux jeunes. Mais la France a l'âge de départ à la retraite le plus bas et le plus fort taux de chômage des jeunes - il est trois fois moindre en Allemagne. Résolument européen, je ne voterai pas ce texte. (Applaudissements à droite)

M. Dominique Watrin .  - Nous vérifions, après cette semaine de discussions intenses, que les retraites engagent un véritable débat de société. La copie finale est bien maigre. Et une alliance entre la droite et le RDSE a consacré le principe d'un système de retraites par points dès 2017, ce que nous combattons avec la plus grande détermination. Ce basculement fait du niveau des pensions une variable d'ajustement et ouvre la voie au renforcement des mécanismes de capitalisation.

Le Gouvernement s'est échiné à imposer son modèle, sourd à nos propositions alternatives. Les quelques améliorations, bien timides, ne changent pas la donne : pour l'essentiel, ce texte tourne le dos aux valeurs de gauche. Je pense à l'allongement de la durée de cotisation, à la non-revalorisation des pensions de retraite au 1er avril, au choix de faire porter tout le poids des efforts sur les salariés et les retraités et d'en exonérer totalement les employeurs.

Quelle erreur d'avoir ignoré le message progressiste que nous envoyait Pierre Mauroy en 2010 ! Ce projet de loi valide la réforme Sarkozy-Woerth de 2010 contre laquelle la gauche, unie, avait bataillé. Nous avons été bien seuls pour combattre la droite, qui propose de reculer l'âge de départ à la retraite de 62 à 65 ans, de punir les salariés de la fonction publique et des régimes spéciaux, de développer les systèmes de capitalisation qui font faillite partout.

Il était possible de muscler notre système par répartition, en taxant les revenus financiers exemptés de toute cotisation sociale, qui assèchent les comptes de la sécurité sociale, en modulant les cotisations des employeurs et en conditionnant certaines exonérations de cotisation au respect de la loi.

Ce fut un rendez-vous manqué, nous voterons contre ce projet de loi approuvé par la droite. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Françoise Laborde .  - Je salue la qualité de nos débats, le travail de notre rapporteure et de la présidente de la commission des affaires sociales.

Si rien n'est fait, le déficit de nos régimes de retraites atteindra 20 milliards d'euros en 2020 et 27 milliards en 2040. Il fallait agir. Après nos débats, le texte de l'Assemblée nationale a été pour le moins remanié... Certes, il comporte de bonnes dispositions, comme celles en faveur des non-salariés agricoles ou des apprentis. Pour autant, les retraités qui vivent sous le seuil de pauvreté, un million de personnes, sont ignorés.

Nous avons obtenu le maintien de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé pour un départ anticipé. Autre motif de satisfaction, le débat sur la mise en place d'une réforme systémique, que nous demandons depuis longtemps et qui n'implique pas l'abandon de notre système par répartition...

Mme Isabelle Debré.  - Exact !

Mme Françoise Laborde.  - Ce texte est néanmoins dénaturé. Le compte personnel de prévention de la pénibilité a été supprimé, je regrette que le Sénat n'ait pas adopté cette indéniable avancée.

Le groupe RDSE n'approuvera pas ce texte éloigné de la réforme en profondeur que nous appelons de nos voeux. (MGilbert Barbier applaudit ; marques d'approbation à droite)

M. Gérard Roche .  - Pour le groupe UDI-UC, l'examen de ce texte par le Sénat marque un progrès. Je veux bien sûr parler de l'adoption de notre amendement qui ouvre la voie à une réforme systémique, après l'essoufflement du système paramétrique, avec un système par points à partir de 2017 et un débat national au premier semestre 2015. C'est une étape supplémentaire vers ce qui est souhaitable et même inexorable. Tôt ou tard, cette réforme se fera, comme l'a souligné M. Vanlerenberghe, car elle est plébiscitée par 75 % des Français. Pour acheter la paix sociale, vous avez cédé aux corporatismes. (M. Jean Bizet approuve)

Cette énième réforme paramétrique ne garantira ni l'avenir ni la justice de notre système de retraites, d'autant que le texte issu de nos travaux est vidé de son sens. Il n'y a plus de réforme. Malgré le vote de notre amendement, nous voterons contre ce qu'il en reste. Le Sénat n'est pas le triangle des Bermudes des projets de loi. Le problème, ce sont les textes que l'on nous soumet ! (« Très bien ! » et applaudissements au centre et à droite)

M. Claude Domeizel .  - Notre débat a vidé le texte de son sens. Il n'a plus rien d'un texte qui assure la justice, garantit le financement et l'avenir des retraites, anticipe les évolutions sociales. Certains ici ont fait le choix de renoncer. Notre vote en prend acte.

L'avenir de notre système par répartition est un défi. Il y a des décisions qui ne sont pas faciles à prendre, ni populaires, quand il s'agit de demander à chacun un effort supplémentaire ; nous ne pouvons faire comme si l'équilibre pouvait être rétabli sans ces efforts. Nous avons la responsabilité de ne pas trahir les règles immuables et fondatrices de 1945. (Exclamations sur les bancs CRC) Nous avons la responsabilité de préserver cet héritage et d'assurer l'avenir que la Nation doit à celles et ceux qui ont le plus besoin de protection. Il n'y a pas de remède miracle. Le refus et l'immobilisme ne sont pas responsables, face aux défis immenses auxquels nous sommes confrontés, et qu'il faut relever avec lucidité. Il faut dire la vérité aux Français. L'augmentation de la durée de cotisation est juste, car en phase avec l'allongement de l'espérance de vie et assortie de mesures prenant en compte la pénibilité et la diversité des parcours professionnels.

Ce projet de loi comporte des avancées ambitieuses. Il était temps. Il n'est jamais trop tôt pour s'attaquer aux déficits (rires à droite) mais il est parfois trop tard. Aux côtés du Gouvernement le groupe socialiste assume son choix de progrès et de justice, dans la clarté et la vérité. C'est pourquoi nous nous opposons au texte issu des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean Desessard .  - (Exclamations à droite) Merci à la présidence pour l'animation de nos débats et le respect des horaires, dans la sérénité, à la rapporteure pour ses explications et réponses détaillées ; progressivement, madame la ministre, vous vous êtes habituée aux débats du Sénat, avec des réponses de plus en plus positives et précises. (Rires à droite)

Il aurait fallu être plus saignant, car le résultat, franchement, n'est pas terrible. C'est un projet en lambeaux qui sort de nos échanges intéressants. Comme quoi, la forme ne garantit pas le fond...

Sur l'article premier, nous avons défendu le système par répartition. Certes, le système à points ne le contredit pas par principe. Mais, comme le groupe CRC l'a marqué, nous craignons qu'il nous oriente vers la capitalisation. Nous avons dit que nous souhaitions un aménagement du système actuel pour qu'il prenne en compte la pénibilité et la précarité.

Je ne comprends pas pourquoi la droite n'a pas voté l'article 2. Nous ne souhaitons pas qu'il faille toujours travailler plus, pour des raisons écologistes et sociales, alors que tant de jeunes, de seniors, sont au chômage. Nous étions opposés à l'article 4, car les petites pensions ne doivent pas perdre du pouvoir d'achat. Ces articles ont été supprimés. Il faut les retravailler. Les articles sur la pénibilité ont malheureusement sauté.

Nous ne pouvons voter pour un pantin désarticulé ; nous risquons un vote contre aussi unanime que surprenant. (Exclamations à droite)

Je regrette enfin la procédure accélérée. (Applaudissements à droite)

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Et en 2010 ?

M. Claude Jeannerot.  - La droite a perdu la mémoire.

M. Jean Desessard.  - Des ministres nous ont dit : vous allez voir, le travail en amont... Une plus grande concertation s'impose dans nos relations avec nos amis et partenaires socialistes... (On s'amuse à droite) Nous avons des valeurs, au groupe écologiste !

M. le président.  - Veuillez conclure !

M. Jean Desessard.  - Nous attendons un meilleur travail en commun. Nous devons penser ensemble, à partir de nos valeurs. Pourquoi ne retrouvons-nous pas ici les positions que nous défendions il y a trois ans ?

M. le président.  - Vous devez conclure.

M. Jean Desessard.  - S'il y a un nouveau texte sur les retraites, nous souhaitons être associés pleinement à son élaboration... (Applaudissements sur les bancs écologistes ; exclamations à droite)

M. Gilbert Barbier .  - Ce projet de loi ne peut que décevoir car il a été verrouillé par le Gouvernement. Je salue les efforts de notre rapporteure, qui a tenté de le soutenir avec sa connaissance du dossier. Je regretterai votre attitude, madame la ministre, en des termes moins fleuris que M. Desessard. J'ai la nette impression que vous vous disiez « cause toujours, j'ai ma majorité à l'Assemblée nationale ; peu importe le Sénat ». (Applaudissements à droite)

La plupart des économistes, et de toutes tendances, considèrent que ce projet de loi ne changera pas grand-chose. La fonction publique, les régimes spéciaux ont été laissés de côté. Vos petits ajustements paramétriques ciblent salariés du privé et retraités, ils sont illusoires et dangereux. L'impact prévisible pour 2014 du report de la revalorisation des pensions est évalué à 800 millions d'euros. Une économie de 2,7 milliards d'euros en 2040 ? Qui peut prévoir ce que sera alors l'inflation ? L'impréparation de ce texte est flagrante.

La prise en compte de la pénibilité est louable. La loi de 2010 n'avait pas résolu le problème. Mais votre approche est difficilement applicable aux petites entreprises. Formation, reclassement, départ, retraite anticipée : 20 % à 25 % des salariés du privé seraient concernés. L'étude d'impact est muette sur le coût d'un dispositif qui sera source de tracas et de contentieux en plus du reste.

Vous vous attaquez au régime bien géré par les professions libérales, à l'article 32 bis, en espérant un jour en accaparer les réserves. Bien que l'ouverture à une réforme de fond, vers un système par points, soit un appel à une future réforme, je ne voterai pas ce texte croupion comme l'ensemble de mon groupe. (Applaudissements à droite)

Mme Isabelle Pasquet .  - Le groupe CRC votera unanimement contre cette réforme des retraites.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Vous l'avez déjà dit !

Mme Isabelle Pasquet.  - Nous nous réjouissons de la suppression des articles 2 et 4, sans nous faire d'illusions ; la droite l'a votée par pur opportunisme.

Le groupe CRC, une partie des sénateurs socialistes et le groupe écologiste ont voté contre une mesure qui renie l'héritage de la gauche. Vous allongez la durée de cotisations de manière disproportionnée par rapport à l'espérance de vie.

Vous avez refusé d'engager enfin une meilleure répartition des richesses pour garantir le retour à la retraite à 60 ans et l'équilibre des comptes sociaux. Selon Henri Sterdyniak, 14 des 16 milliards de déficit en 2012 sont imputables à la crise et au chômage... Au-delà des mesures comptables, il y avait place pour une réforme plus ambitieuse et plus juste, une politique économique et sociale qui favorise des emplois de qualité et rémunérateurs. Tel n'est pas le cas des emplois d'avenir ni des contrats de génération.

Le retour à l'équilibre n'est pas une fin en soi. Ce texte amputé n'y parviendra pas. Le groupe CRC votera contre. (Exclamations à droite)

M. Jean-Claude Lenoir .  - Voici un projet de loi en haillons, comme le Gouvernement, (protestations socialistes) après les coups de ciseaux qui ont été infligés en séance à ce qu'on nous présentait comme ses beaux atours. En cause, l'absence de majorité au Sénat. La faute, quand bien même cela ne nous regarde pas, (exclamations à gauche) en revient aux parlementaires et au Gouvernement, qui n'ont pas su s'entendre.

Madame la ministre, je vous ai connue plus loquace sur les retraites. En 2010, vous étiez porte-parole du groupe socialiste à l'Assemblée nationale. Il était difficile d'adopter des mesures quand la population était dans la rue, que les tirs de barrage étaient nourris à l'Assemblée nationale. Pourtant, nous y avons réussi en 2003 et en 2010 ; nous avons alors adopté un texte que vous combattiez et sur lequel, contrairement à vos dires de l'époque, vous ne revenez pas. Le groupe CRC a concédé quelques avancées. Lesquelles ? Sur la base des dispositions de 2003 et de 2010, que vous avez tant critiquées et auxquelles vous ne touchez pas ? (Protestations à gauche)

Voilà un grand gâchis. C'est votre problème, pas le nôtre. Nous sommes contre votre projet de loi, contre votre absence de courage. Les Français vous jugeront en regardant le calendrier républicain de la fin du XVIIIe siècle et en y voyant que le 5 novembre était le jour du dindon ! (Vifs applaudissements à droite)

Mme Laurence Cohen .  - Je ne voterai pas ce texte : on ne parviendra pas à l'égalité des pensions entre femmes et hommes sans instaurer l'égalité salariale. Nos propositions ont été rejetées par le Gouvernement aussi bien que par la droite.

Autre motif de notre refus, le basculement vers un système par points qui se dessine à l'article premier. Nous y sommes résolument opposés : on parle trop d'équilibre des comptes sans jamais songer au niveau des pensions. Il existe d'autres solutions, M. Watrin n'a eu de cesse de le dire.

On a rendu hommage à Ambroise Croizat ; ne vous réclamez pas de l'héritage des grands hommes, quand vous le foulez aux pieds !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Vous parlez du général de Gaulle ?

Mme Éliane Assassi.  - On parle de Guy Mocquet, d'Ambroise Croizat.

Mme Laurence Cohen.  - Monsieur Lenoir, si vous vous sentez morveux, mouchez-vous !

Mme Isabelle Debré.  - Ce n'est pas chic ! Nos débats avaient de la tenue.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Vive la courtoisie communiste !

M. Alain Gournac.  - Chassez le naturel...

Mme Laurence Cohen.  - Nous resterons aux côtés de ceux qui poursuivront le combat contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Hervé Maurey .  - Un projet de loi garantissant la justice et l'avenir du système de retraites ? On pouvait difficilement trouver titre plus inapproprié, publicité plus mensongère. Ce texte concerne seulement le régime de base. L'avenir ? Vos mesures ne rétabliront pas les comptes sociaux. On nous promettait une réforme ambitieuse. « Vous allez voir ce que vous allez voir », disait la gauche autrefois. Nous avons vu : un texte en lambeaux !

M. Alain Gournac.  - Nous n'avons rien vu !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Vous n'étiez pas là !

M. Hervé Maurey.  - Nous voterons contre ce texte, ce n'est guère original. Ce qui l'est plus est qu'un texte fasse ainsi l'unanimité contre lui, comme le Gouvernement du reste. (On renchérit à droite) Encore un effort, et vous entrerez dans le Livre des records ! (Protestations à gauche, où l'on retourne l'argument)

À vouloir trop ménager la chèvre et le chou...

M. Bruno Sido.  - On se transforme en dindon ! (Sourires à droite)

M. Hervé Maurey.  - ... vous vous êtes exposés à un cinglant désaveu. Un de plus ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Claude Jeannerot .  - Si je n'avais pas prévu d'intervenir, je veux revenir (murmures à droite) sur les manipulations que certains ont orchestrées. Nous aurions aimé, comme l'avait dit Mme Touraine en 2010, reprendre « le flambeau des conquêtes sociales passées ».

M. Alain Gournac.  - Paroles !

M. Claude Jeannerot.  - Ce texte, qui sécurisait incontestablement le système de retraite par répartition et comportait des progrès avec la prise en compte de la pénibilité, n'existe plus. D'où notre refus, ne cherchez pas d'autres explications, de ce texte fortement teinté de libéralisme, quoique pas encore assez au goût de l'UMP.

Nous manquerions de courage ? Depuis des années la droite a promis un texte sur la dépendance, qui n'est jamais venu. Le Premier ministre vient d'annoncer un projet de loi « sur l'adaptation de la société française au vieillissement » dès le début de 2014. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Gournac.  - On verra, pour le courage !

M. Claude Jeannerot.  - Et nous, ce n'est pas aux calendes grecques que nous renvoyons ce débat que la droite n'a pas eu le courage d'aborder. (« Très bien ! » et applaudissements socialistes)

M. Roland Courteau.  - En effet !

M. Jean-François Husson.  - Et les retraites ?

M. Claude Jeannerot.  - Nous aurons ainsi de nouveau le plaisir d'accueillir Mme Touraine au Sénat. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. René-Paul Savary .  - Toujours la même méthode : la critique de la droite pour arriver à vos fins ; plus des prélèvements obligatoires, des rapports, des comités de suivi, des débats ; et, au bout du compte, le report des décisions difficiles sur les générations futures. Autant de raisons de voter contre ce projet de loi. (Applaudissements à droite)

À la demande des groupes UMP, socialiste et UDI-UC, l'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin n°42 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 346
Pour l'adoption 0
Contre 346

Le Sénat n'a pas adopté.

(Vifs applaudissements à droite)

M. Alain Gournac.  - Du jamais vu, ça s'arrose !

Mme Christiane Demontès, rapporteure .  - Rassurez-vous, je ne relancerai pas le débat. Je veux remercier chacun des orateurs pour avoir défendu avec force ses convictions, Mme la présidente de la commission des affaires sociales pour avoir préparé le travail en amont, la ministre Mme Touraine, ainsi que Mmes Bertinotti et Delaunay pour leur vigilance. Même si cela se finit mal au Sénat, nous nous retrouverons demain soir pour la CMP. Je formule un voeu : que nous ne mettions pas une semaine pour en connaître les conclusions ! (Sourires et applaudissements)

Mme Marisol Touraine, ministre .  - Merci à Mme la rapporteur pour son excellent travail, à Mme la présidente de la commission pour sa diligence, le groupe socialiste pour son soutien sans faille, (exclamations ironiques à droite) les orateurs pour la part qu'ils ont prise à ces débats que je n'ose qualifier de constructifs... Merci également à la présidence et à la direction de la séance pour l'organisation de nos travaux. (Applaudissements)

Nominations à une éventuelle CMP

M. le président.  - Pour le cas où le Gouvernement chargerait une commission mixte paritaire de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce projet de loi, il va être procédé à la nomination de ses membres.

La liste des candidats a été affichée. N'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 12 du Règlement, je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire en tant que titulaires Mmes Annie David, Christiane Demontès, MM. Claude Domeizel, Jacky Le Menn, Jean-François Husson, Gérard Longuet, Jean-Marie Vanlerenberghe ; en tant que suppléants, MM. Gilbert Barbier, Yves Daudigny, Mme Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Catherine Génisson, MM. Ronan Kerdraon, René-Paul Savary.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.