Demande de réserve

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - En application de l'article 44-6 du Règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve des articles 34 et 34 bis, qui concernent le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu vendredi 4 décembre, à 14 h 30, ce qui permettra au ministre Sapin d'assister aux débats.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances.  - L'avis est favorable, le secrétaire d'État Eckert nous en avait déjà avisés en début d'après-midi.

La réserve est ordonnée.

Direction de l'action du Gouvernement

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission Direction de l'action du Gouvernement et du budget annexe : Publications officielles et information administrative.

M. Michel Canevet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Le budget s'élève à 1,3 milliard d'euros en crédits de paiement et 1,45 milliard en autorisations d'engagement.

Le chantier Ségur-Fontenoy, qui concerne le transfert des services du Premier ministre d'abord place de Fontenoy, puis avenue de Ségur est assez lourd. Autre source de dépense majeure : l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), alors que la lutte contre la cybercriminalité devient une priorité.

Le budget des autorités administratives indépendantes (AAI) relatives aux droits et libertés figure également dans cette mission. La commission d'enquête présidée par Marie-Hélène Des Esgaulx et dont Jacques Mézard était le rapporteur préconisait le rapprochement de la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada) et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), je préconiserai également celui du Contrôleur général des lieux de privation de liberté et du Défenseur des droits.

Au programme 129, on pourrait également mutualiser l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) et l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (IHESJ).

La rationalisation des AAI et la redéfinition de leur statut seraient opportune.

Ce budget porte également les crédits de la Direction de l'information légale et administrative (Dila). Fait notable : l'arrêt de la publication du Journal officiel au format papier. Il faudra rester vigilant sur sa version numérique.

Nous proposons l'adoption de ces crédits.

Mme Nathalie Goulet, en remplacement de M. Jean-Marie Bockel, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour la coordination du travail gouvernemental .  - Au sein du programme 129, l'action n°2 « Coordination de la sécurité et de la défense » serait dotée de 317 millions d'euros si l'amendement que nous avons déposé était adopté.

La menace cyber ne cesse de s'accroître. La France est classée au 14e rang des pays où la cybercriminalité est la plus active. La cyberdéfense reste une priorité nationale.

Chacun connaît les missions de l'Anssi. En 2015, les décrets d'application de la LPM ont été publiés et une concertation avec les opérateurs d'importance vitale, a été engagée. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser à quelle date seront publiés les premiers arrêtés fixant leurs obligations ?

L'Anssi a affiné son organisation de crise après les attentats survenus à Paris en janvier et la résolution de l'attaque contre TV5 Monde. Elle contribue par sa labellisation à l'indispensable développement d'un écosystème privé car elle n'a ni la vocation, ni les moyens de tout faire.

Le développement des nouveaux usages et des objets connectés est un défi à relever.

Le plafond d'emploi passe de 500 à 507 en 2016. Il faudra de la souplesse sur les rémunérations et de solides formations. Le vivier est réduit, retenons les talents.

Sous réserve de ces observations, la commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à l'adoption des crédits. (M. Jacques Gautier applaudit)

M. Gilbert Roger, en remplacement de M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour la coordination du travail gouvernemental .  - Chacun connaît les activités multiples et essentielles du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) pour la défense dans notre pays. Pouvez-vous nous confirmer que le calendrier de remise de ses rapports, sur Vigipirate renforcé en 2014 et sur les conditions d'emploi des armées sur le territoire national, sera respecté ?

L'IHEDN et l'Institut national des hautes études de sécurité (INHES), qui reçoivent des crédits de 16,8 millions d'euros, regroupés sur un même site, avancent dans la mutualisation.

Le Groupement interministériel de contrôle (GIC), depuis la loi de 2015 sur le renseignement, devra assurer la traçabilité et la centralisation des autorisations d'interceptions, sachant que l'éventail des techniques s'est élargi. Il faut donc renforcer ses moyens : l'amendement du Gouvernement y pourvoit, mais quelle sera l'affectation du supplément de 23,7 millions ? La commission des affaires étrangères, je le confirme, a émis un avis favorable.

M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales pour la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) .  - Pour couper court à tout suspens, j'indique que la commission des affaires sociales donnera un avis favorable aux crédits de la Mildeca. Cependant, son budget se réduit de 4,2 %. Cela peut se comprendre en ces temps d'économie. Cependant, la dotation de l'Observation française des drogues et des toxicomanies (OFDT) accuse une baisse totale de 19 % depuis 2010 alors que l'usage du cannabis, de la cocaïne, des opiacés et le mésusage des médicaments progressent, et que l'alcool et le tabac causent respectivement 78 000 et 49 000 décès.

J'exhorte le Gouvernement à renoncer à cette mesure funeste et hasardeuse qu'est l'expérimentation de salles de consommation à moindres risques, dont l'Assemblée nationale a refusé de surcroît le contrôle. Et à instaurer une contravention dès le premier usage, que le Sénat a votée par deux fois.

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la coordination du travail gouvernemental, les publications officielles et la modernisation de l'État .  - Le Premier ministre réduit ses dépenses, comme il s'y était engagé. Autre engagement tenu, la circulaire du 30 octobre 2015 organise mieux le travail gouvernemental -vigilance sur les domaines effectifs du règlement et de la loi, chasse aux cavaliers législatifs, modération du dépôt d'amendements en cours de discussion parlementaire.

En application de la loi NOTRe, la responsabilité des collectivités territoriales pourra être mise en oeuvre conjointement avec celle de l'État en cas de manquement au droit européen. Le Secrétaire général des affaires européennes essaie de déminer cette affaire, compliquée.

Enfin, ce débat est sans doute l'un des derniers publié au Journal officiel papier qui disparaîtra au 1er janvier 2017. La CMP est parvenue à un accord : un exemplaire papier pourra être délivré à toute personne qui en fait la demande, sous réserve qu'elle ne soit ni répétitive ni systématique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Yves Leconte, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la protection des droits et libertés .  - Le budget des douze AAI ici concernées, dont une constitutionnelle, le Défenseur des droits, et une autorité publique, représente 100 millions d'euros, montant stable d'année en année. En 2016 21 nouveaux ETP seront affectés à la Commission nationale des techniques de contrôle (CNCTR), la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et la Cnil. La CNCTR a des moyens très supérieurs à l'ancienne CNCIS, car elle a besoin d'équipements informatiques, de compétences techniques et de moyens pour gérer le contentieux des décisions. La HATVP devra suivre 40 % de personnes de plus que l'an dernier.

Attention aux rapprochements et fusions intempestives entre ces autorités, elles n'ont pas les mêmes objets, et ce serait attenter à leur indépendance. Évitons aussi les mises à disposition de personnel, préférons les détachements, plus respectueux de l'indépendance.

M. André Gattolin .  - Je me concentrerai sur la défense contre les cyberattaques, autrement dit sur l'Anssi. Je me réjouis que l'on n'ait pas mélangé les genres entre attaque et défense comme dans les pays anglo-saxons. Les cyberattaques, à cause de la numérisation de toutes les données, pourraient provoquer des dommages considérables, 2 700 milliards d'euros d'ici 2020 si nous ne nous armons pas. L'Anssi voit son budget augmenté, fait rare, et bénéficiera de 40 postes supplémentaires par an. Malheureusement, elle peine à recruter. La souplesse sur les salaires ne suffira pas ; il faudra développer la coopération avec les universités, les écoles d'ingénieurs, les start-up dont l'éthique est certaine et les grandes entreprises. Ces dernières peinent encore à dévoiler les attaques dont elles sont l'objet, pour ne pas révéler leurs failles. La cybersécurité est vitale pour l'économie et pour les droits des citoyens.

Mme Laurence Cohen .  - Je m'inquiète pour le devenir de la Dila, qui publie tous les rapports de l'État. Des années de restructuration ont fini par mettre en péril les missions de service public de cette maison d'édition.

Si depuis deux ou trois ans, l'accent est enfin mis sur la prévention des drogues plutôt que sur le tout répressif de l'ère Sarkozy, on peut déplorer un budget en baisse qui fragilise la Mildeca. Comme M. Barbier, je considère notre arsenal législatif périmé mais, contrairement à lui, notre groupe défend la dépénalisation de l'usage du cannabis et l'ouverture des salles de consommation à moindre risque.

Le groupe CRC ne pourra pas voter ces crédits.

M. Jean-Pierre Sueur .  - L'augmentation des crédits de la CNCTR par rapport à l'ancienne CNCIS était absolument indispensable. Il a été décidé que des parlementaires siégeront dans l'organisme. Je m'interroge, car le pendant des atteintes à la liberté, c'est le contrôle. Et le contrôle prend un temps considérable et demande des moyens. Ceux de la CNCIS étaient, il faut le dire, indigents.

Le SIG sera chargé de produire le discours officiel de déradicalisation sur internet notamment. Fort bien. En 2013, personne ne parlait de ce sujet en France ; maintenant, tout le monde en parle. Cependant il faudra de la cohérence avec les actions menées par plusieurs ministères. Ainsi la circulaire du ministre de l'intérieur et du ministre de la ville en date du 2 décembre évoque la déradicalisation mais ne fait aucune mention du SIG.

De plus, quand un être humain est plongé dans cette noirceur, ce désastre, il faudra plus que quelques clics pour l'en sortir. Il faudra de l'humain, de l'attention.

Un mot enfin des sondages. Des efforts ont été faits en la matière, mais le rapport de M. Anziani indique qu'ils peuvent être prolongés. La loi de 1977 est complètement archaïque. On peut encore publier légalement des sondages sans note méthodologique ou mention de l'intervalle d'erreur. Le Sénat a adopté une proposition de loi à l'unanimité pour l'actualiser. Il serait bon de l'inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Le groupe socialiste votera ces crédits.

Mme Françoise Laborde .  - Les crédits sont importants, ils financent le CSA, la HTVP, La CNCTR ou encore la Mildeca.

Le rapporteur pour avis Barbier s'est dit inquiet devant la hausse de la consommation de drogue et la multiplication des comportements à risque. Soyons vigilants sur la prévention.

Les AAI, un État dans l'État titrait le rapport de M. Mézard au nom de notre commission d'enquête. Réemparons-nous de notre pouvoir de contrôle et exerçons-le. Notre rapporteur dénonçait une prolifération de structures nuisant au contrôle. Des rationalisations et des mutualisations de moyens seraient conformes à l'intérêt général et sources d'économies.

Le groupe RDSE apportera son concours à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Merci pour vos avis favorables.

Les crédits de paiement de cette mission sont stables. Cependant des réorganisations administratives sont à noter ainsi que des changements importants dans trois programmes.

Le Gouvernement entend fixer des indicateurs de performances aux AAI, si indépendantes soient-elles. Soyons prudents sur leur rapprochement, la loi de finances n'est pas d'ailleurs le moment d'en débattre. Certaines sont de véritables institutions au sens sociologique du terme. Je proposerai un amendement pour adapter les crédits du programme « Coordination de l'action gouvernementale » au pacte de sécurité.

Pour faciliter les recrutements à l'Anssi, nous avons mis en place une politique attractive, établi des partenariats avec les écoles d'ingénieurs, revalorisé les rémunérations et pris des mesures d'accompagnement des jeunes salariés. Nous demeurons défavorables à une autonomie budgétaire accrue, ou à doter l'Anssi de la personnalité morale.

L'IHEDN et l'INHESJ mutualisent leurs moyens et se regroupent sur le site de l'École militaire sans que cela porte atteinte à leurs particularités. Ils signeront sous peu leurs nouvelles conventions d'objectifs et de performance.

La Mildeca participe pleinement à l'effort de réduction du déficit public. Ses crédits baisseront de 2,7 %. Comme M. Barbier, je pense qu'il est trop tôt pour dresser un bilan de son action et je ne m'engagerai pas dans un débat sur la réponse pénale à l'occasion du budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

ARTICLE 24 État B

M. le président.  - Amendement n°II-319, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Coordination du travail gouvernemental dont titre 2

40 350 000250 000

33 850 000250 000

Protection des droits et libertés dont titre 2

Moyens mutualisés des administrations déconcentréesdont titre 2

TOTAL

40 350 000

33 850 000

SOLDE

40 350 000

33 850 000

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - À Versailles, le président de la République a annoncé des mesures pour lutter contre le terrorisme. Cet amendement les traduit dans le domaine du renseignement.

L'amendement n°II-319, accepté par la commission, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-155, présenté par M. Canevet, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Coordination du travail gouvernemental dont titre 2 

1 150 000

1 150 000

Protection des droits et libertés dont titre 2 

550 000

550 000

Moyens mutualisés des administrations déconcentréesdont titre 2

TOTAL

1 700 000

1 700 000

SOLDE

-1 700 000

-1 700 000

M. Michel Canevet.  - Avec cet amendement, nous respecterons la trajectoire des finances publiques pour 2014-2019.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - Cet amendement abaissant les crédits est incohérent avec celui que nous venons de voter, qui les augmente. Et les députés ont déjà réduit les crédits des AAI. Retrait ?

L'amendement n°II-155 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-512, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Coordination du travail gouvernemental dont titre 2

Protection des droits et libertés dont titre 2

Moyens mutualisés des administrations déconcentréesdont titre 2

386 211

386 211

TOTAL

386 211

386 211

SOLDE

- 386 211

- 386 211

 

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - Cet amendement tire les conséquences du transfert de la gestion des fonds européens aux régions et du transfert à la collectivité territoriale de Corse au 1er janvier 2015 de la pépinière de Castelluccio.

M. Michel Canevet, rapporteur spécial.  - Avis favorable sous réserve de l'engagement que ces crédits seront inscrits dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État.  - Ce sera le cas.

L'amendement n°II-512 est adopté.

Les crédits de la mission sont adoptés.

Les crédits du budget annexe sont adoptés.

Prochaine séance, aujourd'hui, vendredi 4 décembre 2015, à 9 h 45.

La séance est levée à minuit quarante-cinq.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus analytiques