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Table des matières



Accord en CMP

Modernisation de la séance publique

Évaluation environnementale (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

M. Alain Fouché, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

M. Ronan Dantec

M. Gérard Cornu

M. Alain Richard

M. Guillaume Gontard

M. Philippe Bonnecarrère

Mme Nelly Tocqueville

M. Jérôme Bignon

M. Guillaume Chevrollier

M. Olivier Jacquin

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État

Discussion des articles

Article 2

Questions d'actualité

Union européenne et couple franco-allemand

M. Claude Malhuret

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Attentat de Marseille

M. Bruno Gilles

M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur

Transferts obligatoires, compétence en matière d'eau et d'assainissement

M. Jean-François Longeot

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Pacte financier avec les collectivités territoriales

M. Julien Bargeton

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Reconstruction de Saint-Martin

M. Guillaume Arnell

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Alstom (I)

M. Pierre Laurent

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement

Budget 2018

M. Vincent Éblé

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Allocations familiales

Mme Corinne Imbert

Mme Agnès Buzyn, ministre

Maisons de l'emploi

Mme Nathalie Delattre

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail

Alstom (II)

M. Martial Bourquin

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement

Ressources des collectivités

Mme Christine Lavarde

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Évaluation environnementale (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 2 (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS

Article 4

Interventions sur l'ensemble

M. Alain Fouché, rapporteur

M. Gérard Cornu

Mme Nelly Tocqueville

M. Ronan Dantec

M. Jean-François Longeot

M. Guillaume Gontard

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État

Ordre du jour du mercredi 11 octobre 2017




SÉANCE

du mardi 10 octobre 2017

4e séance de la session ordinaire 2017-2018

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

Secrétaires : Mmes Agnès CANAYER et Annie GUILLEMOT.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire qui s'est réunie sur le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Modernisation de la séance publique

M. le président.  - La Conférence des présidents qui s'est réunie jeudi 5 octobre a décidé d'expérimenter des mesures de modernisation de la séance publique, qui deviendront définitives en l'absence d'observations d'ici le début de l'année 2018.

Par tradition, beaucoup d'annonces sont lues dans l'hémicycle, alors qu'aucun texte ne l'impose. La Conférence des présidents a proposé d'en supprimer pour alléger la séance et de les remplacer par des courriels adressés à tous les sénateurs afin d'améliorer l'information de tous.

Pour les nominations des sénateurs dans les organes du Sénat ou les organismes extraparlementaires, deux annonces successives sont effectuées en séance. La Conférence des présidents a proposé d'en garder une seule indiquant le délai dans lequel la nomination sera ratifiée.

Enfin, les conclusions de la Conférence des présidents ne seront plus lues intégralement. Elles seront désormais disponibles pendant la séance et, en l'absence d'observation, elles seront considérées comme adoptées à l'issue de la séance.

Nous expérimentons cette procédure dès aujourd'hui, avec les conclusions de la Conférence des présidents réunie jeudi 5 octobre. Elles vous ont été adressées par courriel à l'issue de la réunion de la Conférence et sont disponibles dans les couloirs d'accès à notre hémicycle et auprès des huissiers. Elles seront considérées comme adoptées en l'absence d'observations d'ici la suspension de la séance avant les questions d'actualité au Gouvernement.

Évaluation environnementale (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant les ordonnances du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes et portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement.

Discussion générale

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Tout d'abord, je veux adresser à chacune et chacun d'entre vous mes plus sincères félicitations pour votre élection ou votre réélection ; je suis honoré de vous présenter ce premier texte de la session ordinaire.

En dépit du calendrier d'examen de ces textes resserré, le travail effectué jeudi dernier en commission a été particulièrement riche : quinze amendements ont été examinés et onze adoptés. Nous devrions trouver facilement un point d'équilibre sur ce sujet complexe que les élus locaux, et j'en ai fait partie, connaissent bien.

Les ordonnances prises le 3 août 2016 sur le fondement de la loi Macron clarifient les règles de l'évaluation environnementale et réforment les procédures d'information et de participation du public.

Un mot de la méthode, d'abord : ces ordonnances sont le fruit d'une riche concertation menée par le sénateur Alain Richard à la tête de la commission spécialisée du Conseil national de la transition écologique (CNTE) qui a permis de trouver un large consensus maintenu à l'Assemblée nationale.

L'ordonnance n°2016-1058 conforme notre droit au droit européen - la directive 2014/52/UE, en l'espèce - en définissant des critères d'évaluation en matière de santé, de biodiversité ou encore d'impact visuel sur le paysage et le patrimoine ; en séparant davantage les phases d'instruction et d'évaluation ; enfin et surtout, en simplifiant, l'étude d'impact. Désormais, les projets seront appréhendés dans leur ensemble ; c'en est fini de la logique de silo qui ajoutait du délai au délai. Nous développons les procédures au cas par cas en élevant le degré d'exigence environnementale.

Monsieur Dantec, les députés ont traduit le triptyque éviter-réduire-compenser, consacré par la loi Biodiversité, dans l'ordonnance. Cette remise à niveau était effectivement nécessaire.

L'ordonnance n°2016-1060 sur l'information et la participation du public constitue une réponse du Gouvernement au changement de mentalité dans notre société survenu après le drame de Sivens. « Apprendre à perdre du temps en amont d'un projet ou d'une procédure pour ne pas en perdre ensuite » : cela parait logique mais nous n'avons pas toujours raisonné ainsi.

Certes, la participation du public n'est pas une nouveauté dans notre droit : Convention d'Aarhus de 1998, loi Barnier de 1995, article 7 de la Charte de l'environnement de 2005 ou encore Grenelle de l'environnement... Néanmoins, cette ordonnance crée des droits nouveaux pour nos concitoyens. J'y vois un moyen de réduire la défiance du public par rapport aux procédures menées par les pouvoirs publics. Il ne suffit plus que ces derniers décrètent un projet légitime pour qu'il le soit aux yeux du public. Nos concitoyens pourront désormais participer à la décision mais encore faut-il les associer au bon moment.

Cette ordonnance constitue une réponse pour protéger l'environnement mais aussi pour libérer les porteurs de projets, publics comme privés - sans malice, j'y vois le libérer-protéger du président Macron. Ils auront davantage de visibilité en amont de la procédure, ils pourront aller au-devant des problèmes pour les traiter le plus tôt possible.

Les droits créés sont concrets et nouveaux : droit d'accès aux informations pertinentes, droit à disposer de délais raisonnables pour faire des propositions, droit au suivi des propositions faites.

La Commission nationale du débat public (CNDP) sera obligatoirement saisie sur l'opportunité du débat pour les plans et programmes nationaux - auparavant, elle ne l'était que s'ils dépassaient les 300 millions d'euros.

Pour les projets entre 150 et 300 millions d'euros, les citoyens pourront saisir la CNDP. Il leur faudra réunir 10 000 signatures à l'échelle de l'Union européenne.

Ce droit d'initiative citoyenne est également ouvert pour les projets sous maîtrise d'ouvrage publique ou privée percevant au moins 10 millions d'euros d'argent public. Les députés ont réduit ce seuil à 5 millions d'euros pour que des projets tels que celui de Sivens soit inclus dans le dispositif ; vous préférez renvoyer sa définition à un décret en Conseil d'État par respect de la séparation entre la loi et le règlement. Je ne doute pas que nous trouverons une solution pour régler ce problème de forme.

À l'Assemblée nationale, le délai offert pour exercer un droit d'initiative a été allongé de deux à quatre mois à la demande des députés ruraux. Monsieur le rapporteur, accorder ce même délai aux collectivités et aux associations paraît tout à fait légitime. L'ancien élu local que je suis salue cette avancée.

Enfin, l'ordonnance rend possible un débat public national sur les projets relatifs à des politiques publiques ayant un effet important sur l'environnement avec une saisine ouverte à 500 000 citoyens de l'Union européenne, à 60 députés ou 60 sénateurs ou au Gouvernement. Le seuil de la saisine a fait débat à l'Assemblée nationale, je suis défavorable à son abaissement, monsieur Gontard. Le seuil de 500 000 personnes correspond à celui fixé dans la loi organique de 2010 pour saisir le Conseil économique, social et environnemental ; nous sommes dans une démarche d'alignement. Nous ne pouvons pas parler de simplification à longueur de temps sans la faire. J'ajoute que 500 000 personnes est devenu un objectif facile à atteindre avec les réseaux sociaux.

La CNDP veillera à la bonne organisation du débat public. Celui-ci répondra aux exigences d'un État moderne et sera largement dématérialisé. La concertation préalable ne dépassera pas trois mois, et la durée minimale de l'enquête publique sera réduite de trente à quinze jours. Monsieur le rapporteur, vous avez fait le choix de revenir sur l'allongement du délai, de quatre à six mois, durant lequel l'illégalité pour vice de forme ou de procédure peut être invoquée ; la cohérence entre le code de l'urbanisme et de l'environnement reste toutefois en débat.

À l'Assemblée nationale, je me suis engagé à procéder à évaluer ce texte dans deux à trois ans. Voyons comment citoyens et porteurs de projets s'empareront de ces nouveaux droits ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

M. Alain Fouché, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - Je suis heureux d'inaugurer cette session ordinaire. Je ne reviendrai pas dans le détail sur le contenu de ces deux ordonnances - je vous renvoie à mon rapport. Très techniques, elles touchent à des domaines fondamentaux du droit de l'environnement en conjuguant l'exigence de protection de l'environnement et nécessaire simplification des contraintes et procédures.

La commission n'a pas apporté de modifications substantielles à la première ordonnance ; un équilibre a été trouvé et la simplification qu'elle apporte est réelle. Elle se traduira concrètement par moins d'études d'impact pour les entreprises et les petites collectivités.

Certains maîtres d'ouvrage dans la production d'énergie s'inquiètent toutefois de la nouvelle définition du projet ; elle pourrait être source d'incertitude juridique et, donc, de contentieux.

Sur la question des coûts et des délais induits par ces études d'impact, les ordonnances n'apportent pas de solution. Je salue la proposition de M. Richard d'aller progressivement vers une normalisation de ces études ; en attendant, les délais restent excessifs.

Enfin, monsieur le ministre, disposez-vous d'une comparaison européenne un peu solide sur l'évaluation environnementale chez nos voisins européens ?

Sur la seconde ordonnance, le Sénat s'est montré attentif aux empiètements sur le domaine réglementaire. Il convient de fixer les différents seuils par décret ; le faire par la loi est dangereux sur le plan constitutionnel et rend plus complexe toute modification ultérieure.

Avant la séance publique, notre état d'esprit a été d'intégrer au mieux des modifications issues de deux rapports récents du Sénat, qui ont tous deux été adoptés à l'unanimité : celui de M. Bonnecarrère sur la démocratie coopérative et celui de M. Dantec sur la compensation des atteintes à la biodiversité. Nous y reviendrons dans la discussion des articles et vous invitons à adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RTLI, Les Républicains, LaREM et SOCR)

M. Ronan Dantec .  - Ces deux ordonnances procèdent d'un long chantier de modernisation du droit de l'environnement engagé sous la précédente mandature. Nous sommes bien conscients de la difficulté de conduire des projets en France : contestation, drames humains, durée d'instruction des dossiers deux fois plus longue en France que chez nos voisins dénoncée de colloque en colloque... Il y a donc un consensus pour avancer sur ces sujets. Je salue le long travail de concertation réalisé sous l'égide de M. Alain Richard et de M. Jacques Vernier.

L'étude d'impact se fait plus précise : l'incidence sur le climat sera désormais prise en compte, seront décrites les mesures envisagées pour respecter la séquence éviter  -  réduire - compenser et définir plus précisément ainsi que leur suivi. Il faudra, comme nous l'avions préconisé au sein de la commission d'enquête sur la compensation écologique, ne pas oublier l'impact sur l'agriculture, en particulier sur la consommation du foncier agricole - M. Rémy Pointereau y tenait beaucoup.

Pour éviter que les concertations naturalistes ne surviennent après la première enquête publique, nous proposerons aussi que l'avis de l'autorité environnementale soit complété par une réponse écrite du maître d'ouvrage à ses éventuelles objections dans le dossier d'enquête publique.

La rédaction de la clause dite « filet » ou de rattrapage me semble fragile : selon la jurisprudence européenne, tout projet ayant un impact important sur l'environnement doit être évalué, même si les seuils d'évaluation ne sont pas atteints.

L'accès à l'information est un droit essentiel, lié à la convention d'Aarhus, qui reste néanmoins très mal appliqué dans notre pays : nous proposerons de renforcer le texte, en créant un référé-communication et en donnant davantage de pouvoirs à la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA).

Les ordonnances ne répondent pas à tout mais posent les bases d'un débat public apaisé. Ce sont les faiblesses du débat qui nourrissent les contestations. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe LaREM)

M. Gérard Cornu .  - Je salue le travail mené par Alain Fouché dès juillet et la présentation qu'il a faite de ces textes en commission. Le Sénat poursuit ainsi son engagement en faveur de la rigueur juridique. Un mot à propos de l'empiétement du législateur sur le pouvoir réglementaire : il découle de la tendance qu'a le Gouvernement à s'écarter, dans les décrets d'application, de l'intention du législateur... (Marques d'approbation sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Nous avons manqué de temps pour approfondir l'examen de ce texte, la consultation des citoyens est un sujet inépuisable. La réduction des études d'impact obligatoires et une consultation plus en amont seront bénéfiques pour tous les territoires qui ont parfois vu des projets leur échapper. Je salue les simplifications effectuées. Cependant, un meilleur équilibre entre principe de précaution et principe d'innovation reste à trouver. Les élus locaux, que nous représentons et que nous avons été, sont exaspérés par la rigueur des règles ; ils n'en comprennent pas le sens sans compter qu'elles entraînent des dépenses quand on leur demande de faire toujours plus d'économies. Pourquoi se montrer plus tatillons que nos voisins ? Nous y perdons en compétitivité. Pourquoi surtransposer systématiquement les directives européennes ? (Même mouvement)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - C'est toute la question.

M. Gérard Cornu.  - Une synthèse comparée des règles d'évaluation environnementale et d'association du public serait utile, la procédure accélérée nous prive de la possibilité d'en disposer. Converger sur ce sujet serait un moyen de renforcer l'Union européenne.

Globalement, le texte du rapporteur va dans le bon sens : nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs des groupes RDSE et LaREM)

M. Alain Richard .  - Les évolutions qu'entraîne ce texte vont dans le bon sens, même si elles sont d'une ampleur mesurée ; la gestion des projets sera améliorée mais dans le champ du droit de l'environnement seulement.

Nous avons créé une étape nouvelle de consultation du public en amont, cela a été jugé nécessaire après Sivens. Sommes-nous arrivés à une solution satisfaisante ? Ma réponse sera mesurée... Le compromis auquel nous étions parvenus au sein du groupe de travail était plus sobre dans sa rédaction et son dispositif. Cela étant dit, je ne suis pas là pour dire mes regrets.

Le dialogue est facilité en début et en cours de projet, pour éviter conflits et blocages. Le formalisme est réduit, la souplesse préférée, grâce à l'intervention d'un tiers garant de la procédure, dans le respect du maître d'ouvrage, y compris pour les projets de taille moyenne. Soit. Cela garantit-il l'absence de conflit ? La réponse est clairement non. Certes, nous pourrons réduire ainsi les incompréhensions ; en revanche, il existera toujours des adversaires déterminés à tel ou tel projet provenant des écoles de pensée autour de la décroissance.

Le principe « éviter » me semble avoir été trop hâtivement et non sans légèreté traduit dans notre droit, se prêtant ainsi à des manoeuvres d'obstruction. Les procédures d'autorisation restent globalement trop formalistes, ce qui alimente le contentieux. Ce dernier devrait être vidé à la fin de la concertation préalable. Les études d'impact restent par trop encyclopédiques. Le président Hollande avait déjà souhaité, jadis, leur normalisation. Et je ne dirai rien, enfin, de la nécessité d'établir une comparaison sérieuse des procédures au sein de l'Union européenne. Continuons à travailler pour alléger ces procédures trop lourdes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Guillaume Gontard .  - Sur la méthode d'abord : on ne peut se satisfaire des conditions d'examen de ce projet de loi. Les ordonnances modifient soixante articles du code de l'environnement.

Au sein du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, on ne cesse de dénoncer le recours aux ordonnances, qui fait du Parlement une chambre d'enregistrement. Et pour favoriser la démocratie environnementale en plus, ce qui est cocasse... On ne nous laisse le temps de corriger ce texte qu'à la marge.

Sur le fond, recueillir l'approbation de 500 000 citoyens dans un délai de quatre mois, cela semble impossible. Nous regrettons que notre amendement abaissant ce seuil à 250 000 ait été déclaré irrecevable.

Le maître d'ouvrage n'aura pas obligation de tenir compte des remarques faites durant la consultation. Autrement dit, on cherche à renforcer l'acceptabilité de projets contestés, voire contestables, sans donner la possibilité de les transformer. La participation des citoyens, droit constitutionnel et conventionnel, est insuffisamment protégée. Et le travail en commission au Sénat est revenu sur toutes les améliorations apportées par les députés. Quelle sera la portée réelle de ce droit d'initiative ? Nous n'avons même pas pu évoquer le référendum en matière environnementale, sujet abordé par le rapport Richard. Vous risquez de créer plus de frustration que d'enthousiasme.

Quant à la seconde ordonnance, elle comporte des dispositions dangereuses dans la ligne de la véritable dérégulation entreprise par ce Gouvernement. L'ambition est de libérer les porteurs de projets de contraintes jugées excessives. Et la baisse des moyens de l'administration ne nous rassure pas.

Nous avons déposé des amendements, espérons que le Gouvernement et la majorité sénatoriale sauront nous entendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. Philippe Bonnecarrère .  - La manière de décider a changé : une décision n'est pas bonne intrinsèquement mais si ceux à qui elle s'applique la juge telle, c'est un progrès incontestable. Nous devons passer d'une légitimité de position à une légitimité de décision, comme le dit Marcel Gauchet. C'était l'intuition qui a présidé à la création de la mission d'information sur la démocratie représentative, participative et paritaire qui a adopté son rapport à l'unanimité en mai 2017.

Quatre ordonnances ont été prises en 2016 et 2017. Nous n'évoquons que les deux qui ont été prises le 3 août 2016 pour sortir de dossiers très douloureux.

En consultant le plus en amont possible, il doit être possible de dédramatiser les choses et de prendre des décisions. C'était l'esprit du rapport rendu par notre collègue Richard.

Convention d'Aarhus de 1998, article 7 de la Charte de l'environnement, directive européenne de 2003... Les bases juridiques de ces exigences ne sont pas nouvelles. L'élargissement de la saisine de la CNDP et les autres mesures prévues par ces ordonnances vont dans le bon sens, afin de « prendre du temps pour mieux en gagner ».

L'équilibre prévu visait à augmenter la concertation en amont et à alléger les charges pesant en aval de la procédure ; or l'Assemblée nationale a ajouté des délais, on peut le regretter - de même que nous pouvons faire mieux sur l'harmonisation du code de l'urbanisme et du code de l'environnement et qu'il ne faut pas oublier la simplification et l'expérimentation. En tout état de cause, le groupe Union centriste votera ce texte.

Enfin, les comparaisons étrangères sont riches d'enseignement, notamment les exemples canadiens qui ont une tradition de concertation et hollandais qui ont choisi de réduire les délais. (Applaudissements au centre, sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe RDSE)

Mme Nelly Tocqueville .  - L'article 106 de la loi dite Macron est à l'origine de ces ordonnances, qui sont à nos yeux essentielles. Leur rédaction est l'aboutissement d'un consensus dépassant les clivages partisans - c'est la continuité républicaine à laquelle nous sommes attachés. Les travaux du Conseil national de la transition écologique (CNTE), notamment, et le rapport remis en mars 2015, ont largement inspiré les mesures qu'elles contiennent et qui donne un sens concret au dialogue environnemental, reconnu par l'article 7 de la charte de l'environnement.

Nous nous félicitons du renforcement de la transparence, avec la dématérialisation de la concertation et le plus grand rôle reconnu à la CNDP. La participation du public voit ses procédures modernisées et simplifiées, elle sera possible plus en amont, dès l'élaboration des projets concernés : c'est une très bonne chose. Le texte renforce le rôle de la CNDP et consacre des garanties veillant à la bonne concertation. Notre groupe proposera un amendement dans ce domaine pour modifier les seuils de dépenses entraînant une concertation des citoyens.

Élément essentiel, ce texte transpose une directive européenne, répondant ainsi à l'exigence de conformité. Le groupe socialiste et républicain votera ce projet de loi équilibré, dans un état d'esprit constructif et vigilant. Nous proposerons deux amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et LaREM et sur quelques bancs du groupe UC).

M. Jérôme Bignon .  - Le texte est dense, technique, complexe. C'est normal, car les deux sujets qu'il traite sont à la base du droit de l'environnement. Je ne reviendrai pas sur l'excellent rapport de M. Fouché, qui comporte une analyse à la fois historique, technique et juridique : ce sera, c'est déjà un document de référence sur cette matière naturellement complexe, technique et dense.

De quoi parle-t-on ? L'évaluation environnementale améliore la prévention des atteintes à l'environnement : c'est l'application de l'article 3 de la Charte de l'environnement. Notre rapporteur a relayé les inquiétudes des maîtres d'ouvrage sur la définition par trop « englobante » de la notion de projet qui doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, nous devrons effectivement y veiller. La première ordonnance simplifie et allège les contraintes sur les petits projets et pour les petites collectivités territoriales : nous y sommes évidemment très sensibles, ces mesures vont dans le bon sens - et nous suivrons le rapporteur. Reste, cependant, le problème du coût et des délais des études d'impact, qui pèse sur les maîtres d'ouvrage : il serait utile, comme l'a proposé Alain Richard, de mettre en commun des données, pour leur réutilisation au fil des projets successifs.

La seconde ordonnance renverra au principe de participation. La protection de l'environnement est, comme le souligne le professeur Michel Prieur, non seulement une obligation de l'État, mais aussi un devoir des citoyens - si chacun fait sa part, même petite, l'ensemble se portera mieux, selon la légende du colibri cher à Pierre Rabhi, c'est l'esprit de l'article 2 de la Charte de l'environnement, ainsi que de son article 7, au fondement de cette ordonnance.

Les outils se sont multipliés depuis au moins la loi Bouchardeau de 1983, au service d'un droit effectif à l'information - voyez la loi Barnier de 1995 sur le principe de précaution, la convention d'Aarhus de 1998 : cette ordonnance s'inscrit dans cette filiation, elle renforce et modernise la démocratie environnementale.

Nous saluons la concertation qui a prévalu sur ce texte, nous souscrivons aux amendements du rapporteur : c'est dire que nous ratifierons ces ordonnances qui renforcent des principes essentiels de notre droit et qui mettent notre droit en conformité avec les normes européennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RTLI, ainsi que sur les bancs du groupe LaREM)

M. Guillaume Chevrollier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Ce texte est l'occasion de commencer cette législature dans la sérénité. Depuis le premier Grenelle de l'environnement, le législateur n'a pas ménagé ses efforts pour faire de la protection de l'environnement un préalable à toute politique publique - c'est bien un domaine, parmi d'autres, où le clivage droite-gauche est parfaitement inopérant et j'ai, pour ma part, toujours condamné l'instrumentalisation politicienne de la question écologique. Je le dis donc sans détour : je voterai la ratification de ces ordonnances - et vous ne trouverez personne, parmi Les Républicains, pour s'opposer à une réforme qui simplifie la vie quotidienne de nos collectivités tout en associant mieux nos concitoyens aux projets.

L'étude d'impact, par projet et non plus par procédure, est renforcée. Nous y souscrivons. La première ordonnance distingue les projets soumis à évaluation systématique de ceux soumis à évaluation au cas par cas. Là encore, c'est une avancée, en particulier pour les porteurs de projet.

Mieux associer nos concitoyens en amont pour gagner du temps en aval : tel est l'esprit de la seconde ordonnance. Seul accroc, la volonté de la majorité de marquer son territoire vis-à-vis d'une administration jugée omnipotente : la fixation d'un plafond légal pour le budget prévisionnel n'est pas légitime. L'équilibre entre transparence et lourdeur administrative, il est vrai, est difficile à trouver...

Je me réjouis donc de commencer nos travaux avec un texte qui allège les contraintes administratives pesant sur les collectivités territoriales, tout en diminuant les dépenses publiques. Restera, cependant, à rationaliser notre code de l'environnement, pour lui donner la cohérence que les trop nombreux ajouts lui ont fait perdre, depuis l'ordonnance du 18 septembre 2000 : les collectivités territoriales attendent et seront particulièrement attentive à ce travail devenu nécessaire de codification. Je ne doute pas que le Gouvernement en soit conscient. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Olivier Jacquin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR). Nouvel élu de la République, c'est un honneur pour moi de m'exprimer, pour la première fois ici, sur un sujet aussi essentiel que celui de la participation des citoyens au débat public. Ces ordonnances résultent d'un travail de plusieurs années, elles contiennent des mesures très importantes à nos yeux. D'abord, le rôle accru de la CNDP, un outil pertinent et dynamique - je le dis en connaissance de cause puisque j'y ai siégé. Ensuite, la consécration d'un droit d'initiative citoyenne pour l'organisation d'une concertation préalable à certains projets. Troisièmement, le renforcement de la transparence. Enfin, la clarification des procédures organisant cette participation.

En commission, le projet de loi a fait l'unanimité. Je regrette toutefois le seuil de 5 millions d'euros pour l'ouverture du droit d'initiative citoyenne. Les amendements qui revenaient dessus ont été rejetés, mais soutenus sur le fond.

La possibilité d'une procédure de conciliation, portée par un amendement, est bienvenue. Un autre amendement distingue à bon escient le garant du commissaire enquêteur.

En l'état, notre groupe votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État .  - Je le redis, je m'en remettrai à la sagesse du Parlement sur l'opportunité de fixer le seuil de 5 millions d'euros par voie législative ou réglementaire. L'important, c'est qu'un seuil existe, pour l'engagement de fonds publics.

Le code de l'environnement et celui de l'urbanisme sont de véritables chantiers pour ce quinquennat. Donner le temps aux élus de prendre connaissance des projets est essentiel : c'est le sens de l'extension de quatre à six mois, je le dis pour avoir été élu rural, cette extension de deux mois sera utile sur les territoires pour qu'on se rende compte, quand c'est utile, qu'il faut se mobiliser, mieux évaluer les impacts environnementaux.

Monsieur Cornu, vous avez pointé, à juste titre, le risque de sur-transposition : soyez rassuré, il n'est pas présent ici.

Monsieur Dantec, j'ai installé la semaine dernière, dans les Ardennes, le groupe de travail de la CNTE sur l'éolien, pour concilier protection des paysages et développement de l'éolien. Des simplifications devraient résulter de ses travaux, je me tiens à votre disposition pour toute connaissance que vous souhaiteriez y porter.

Monsieur Richard, vous êtes en quelque sorte le père de ces ordonnances, je prends acte de nos désaccords sur leur rédaction mais le statu quo n'était plus acceptable. Nous partageons la conviction qu'il faut apprendre à perdre du temps avant, pour ne pas en perdre davantage ensuite, en procédure. Avons-nous pu aller assez loin ? Probablement pas, mais parce que nous avons visé un équilibre, qui nous permet d'avancer.

Sur les études d'impact, la simplification que vous souhaitiez n'a pas été mise en oeuvre par le Gouvernement précédent. Nous y travaillons. En 2018, nous allons mettre en ligne l'intégralité de leur contenu pour faciliter leur réemploi éventuel.

Monsieur Gontard, sans esprit de polémique, dépassons le débat sur le principe des ordonnances. Elles sont arrivées tard en raison du calendrier électoral, puis les délais fixés par la loi Macron nous obligeaient à aller vite, c'est pourquoi nous commençons la session avec ce texte. On ne peut laisser penser que l'étude au cas par cas est une procédure au rabais : vous ne le dites pas, mais je tenais à le préciser, au nom même des agents de l'État qui ne comprennent pas qu'on oppose le cas par cas aux études d'impact.

Monsieur Bonnecarrère, la faisabilité de l'infrastructure, dites-vous, compte autant que la concertation. C'est bien pour cela que nous mettons en avant le cas par cas, meilleur rempart contre la logique en silo.

Madame Tocqueville, Messieurs Bignon et Jacquin, nos services, comme ceux de la CNDP, se tiennent à la disposition du Parlement, y compris pour évaluer le droit que nous créons aujourd'hui. Il n'y a pas plus humain que la concertation ; c'est pourquoi ses modalités varient beaucoup suivant les pays européens, selon les États selon leur degré de centralisation, selon leurs territoires...

Monsieur Chevrollier, nous recherchons un subtil équilibre entre les acteurs économiques et les associations environnementales. Écouter tous les acteurs n'a rien d'incroyable pour des ordonnances de ce type. Ce n'est ni de gauche ni de droite, nous en sommes d'accord.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier est adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au second alinéa du IV de l'article L. 120-1, les mots :  « , du secret industriel et commercial » sont supprimés ;

M. Guillaume Gontard.  - La Charte de l'environnement pose comme principe que toute personne a le droit de participer aux décisions publiques qui ont une incidence sur l'environnement. Limiter ce principe au respect du secret industriel et commercial, c'est excessif : c'est une atteinte à la démocratie environnementale. Nous proposons de supprimer cette limitation.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Cette mention est au contraire un élément important du dispositif, puisqu'elle assure au maître d'ouvrage que des informations sensibles sur le plan commercial ou industriel, ne seront pas diffusées à l'occasion de la concertation ou de l'évaluation environnementale. Ce point n'a pas été soulevé par les parties prenantes, et le supprimer remettrait en cause l'équilibre du texte. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Même avis. Le secret est parfois nécessaire, dans une économie compétitive et concurrentielle.

L'amendement n°4 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère, Cabanel, Raison et Kern.

I.  -  Alinéas 13 à 16

Supprimer ces alinéas.

II.  -  Alinéas 29 à 31

Supprimer ces alinéas.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Dans sa rédaction initiale, cette ordonnance dispensait la concertation « code de l'environnement » lorsque la concertation « code de l'urbanisme » était obligatoire, comme c'est le cas pour les zones d'aménagement concerté et pour les quartiers ANRU de la politique de la ville. Or l'Assemblée nationale a décidé que, pour ces territoires où la procédure du code de l'urbanisme est obligatoire, la CNDP serait désormais saisie pour savoir si elle doit être mise en oeuvre ou bien si la concertation du code de l'environnement lui est préférable. Cet aiguillage par la CNDP est source de complexité et il fait comme si la concertation prévue par le code de l'environnement était préférable, plus sérieuse, mieux garantie - ce qui n'est nullement le cas. Avec cet amendement, nous revenons au texte initial de l'ordonnance, en respectant mieux les champs respectifs des deux codes.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par M. Fouché, au nom de la commission.

I. - Alinéa 15

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

b) L'article L. 121-9 est ainsi modifié :

- après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :

II. - Après l'alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

- la première phrase du 3° est complétée par les mots : « du présent code » ;

M. Alain Fouché, rapporteur.  - L'amendement n°19 est rédactionnel.

L'Assemblée nationale a fait prévaloir le code de l'environnement sur le code de l'urbanisme : c'est pertinent, car les obligations du code de l'environnement sont plus précises. Seuls quelques projets sont visés, qui relèvent des deux codes, et l'intervention de la CNDP n'allongerait les délais que de deux mois, c'est raisonnable pour de tels projets d'importance : avis défavorable à l'amendement n°3 rectifié.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Même avis. On ne va pas imposer une double concertation... La distinction protège mieux le porteur du projet. Avis favorable à l'amendement n°19.

M. Henri Cabanel.  - Je voterai l'amendement n°3 rectifié. En 2015, la CNTE a mis en avant le sérieux des concertations « code de l'urbanisme ».

La redondance est source de complexité. Seuls un petit nombre de grands projets, certes, sont concernés par la double procédure. Sur le fond, une question comme l'artificialisation des terres agricoles mérite la clarté des procédures, que vise précisément l'amendement.

M. Alain Richard.  - Une explication est nécessaire. Les deux codes ont un champ d'application distinct, dont les limites ont été bien circonscrites par la jurisprudence. Le degré de garantie de l'information et de la participation du public est équivalent dans les deux procédures. Il est logique de donner à la CNDP, dans les cas où elle est consultée d'office, soit les projets de plus de 300 millions d'euros, le pouvoir d'orienter la concertation. Je crains que la rédaction retenue ne brouille la délimitation entre les deux codes en ajoutant certains cas de saisine. Une vérification s'imposerait d'ici à la fin de la séance car nous sommes en deuxième lecture.

M. Michel Raison.  - Une mission du Sénat sur le sujet a rendu son rapport avant l'été. Nous étions convenus de mettre à profit sa réflexion pour améliorer la démocratie participative et simplifier la vie de nos concitoyens. Le fait que l'amendement n°3 rectifié soit cosigné par des sénateurs de groupes différents est un témoignage de l'attitude constructive du Sénat, sans qu'il nous soit besoin de créer des groupes bizarroïdes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Les projets concernés sont de très grande ampleur. Il convient de préserver le champ d'intervention de la CNDP.

L'amendement n°3 rectifié est adopté.

L'amendement n°19 devient sans objet.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Fouché, au nom de la commission.

Après l'alinéa 40

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) La sous-section 2 est complétée par un article L. 121-16-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 121-16-2. -  Lorsqu'un projet mentionné au 1° bis ou au 2° de l'article L. 121-15-1 a fait l'objet d'une concertation préalable organisée selon les modalités prévues aux articles L. 121-16 et L. 121-16-1, la Commission nationale du débat public peut, à la demande du maître d'ouvrage ou de l'autorité compétente pour autoriser le projet, désigner un garant chargé de veiller à la bonne information et à la participation du public jusqu'à l'ouverture de l'enquête publique. La Commission détermine alors les conditions dans lesquelles le garant et le maître d'ouvrage la tiennent informée. Elle assure, si nécessaire, la publication de rapports intermédiaires. Le rapport final du garant est rendu public. L'indemnisation de ce garant est à la charge du maître d'ouvrage. » ;

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Cet amendement reprend l'expérimentation proposée par M. Bonnecarrère pour améliorer la continuité de l'information et de la participation du public.

Toutefois, cette disposition ne s'applique qu'aux projets faisant l'objet d'un débat public, ou d'une concertation préalable décidée par la Commission nationale du débat public (CNDP). Le présent amendement vise ainsi à étendre à titre facultatif cette disposition aux projets hors CNDP et faisant l'objet d'une concertation préalable avec garant. Cette désignation pourra être demandée par le maître d'ouvrage ou par l'autorité compétente pour autoriser le projet.

On comble ainsi le vide entre la fin de l'enquête préalable et le début de l'enquête publique.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°18 est adopté.

Les conclusions de la Conférence des présidents sont adoptées.

La séance, suspendue à 16 h 30, reprend à 16 h 45.

présidence de M. Gérard Larcher

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. La séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres, ainsi que votre temps de parole : les auteurs de questions disposent chacun de deux minutes, y compris la réplique.

La même durée s'applique également à la réponse des membres du Gouvernement - à l'exception de M. le Premier ministre, qui bénéficie d'une « horloge » spéciale, dont il saura user, comme tous les Normands, avec mesure. (Sourires)

Union européenne et couple franco-allemand

M. Claude Malhuret .  - Notre groupe se définit comme libéral, social et européen. C'est pourquoi nous avons suivi avec attention le discours sur l'Europe du président de la République à la Sorbonne, qui fixe des objectifs ambitieux : convergence fiscale et sociale, force d'intervention rapide. Nous les approuvons, mais ils exigent que le couple franco-allemand soit fort, comme il l'a été depuis soixante années de construction européenne, et qu'il continue à parler d'une même voix, pour pouvoir entraîner nos partenaires européens.

Or les récentes élections au Bundestag qui contraignent la chancelière à former une nouvelle coalition, dont certaines composantes ont déjà annoncé leur opposition aux objectifs annoncés : les obstacles à la mise en oeuvre de la feuille de route présidentielle pourront-ils être levés et selon quelle feuille de route, afin de parvenir à ces objectifs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RTLI)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Je répondrai à votre question, comme je le ferai à tous les présidents de groupe, selon l'usage en vigueur au Sénat comme à l'Assemblée nationale.

Je saisis cette occasion pour féliciter tous les sénateurs élus ou réélus lors du scrutin du 24 septembre (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM). J'ajoute mes félicitations au président du Sénat. (Applaudissements sur de nombreux bancs, depuis ceux du groupe LaREM jusqu'à ceux du groupe Les Républicains)

Les résultats des législatives en Allemagne sont un fait : ils marquent une victoire de la CDU mais lui imposent de former une coalition pour gouverner, comme c'est souvent le cas en Allemagne.

Le président de la République, le 26 septembre dernier, a appelé en effet à la Sorbonne nos partenaires européens à retrouver le sens de notre mission et de nos objectifs communs au sein de la construction européenne. Lors du sommet informel de Tallinn, deux jours plus tard, tous les chefs d'État et de Gouvernement ont reconnu que l'Europe doit se transformer car son fonctionnement actuel ne la place pas à la hauteur des enjeux. Le chemin tracé par le président de la République et les ambitions de son projet ont été salués, singulièrement par Mme Merkel. Mais la discussion ne fait que commencer.

Elle mobilisera tous les États membres, ainsi que le Parlement européen. La feuille de route annoncée alimentera aussi les discussions des chefs d'État et de Gouvernement au sein des prochains Conseils européens, ainsi que les propositions qui seront formulées par le président Juncker. La dynamique est lancée : c'est peut-être une course contre la montre que nous entamons, afin que l'Europe se remette en mouvement. Ce n'est qu'un début, nous en débattrons ici, car j'espère que vous y participerez tous ici. (Applaudissements sur les bancs des groupes RTLI, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes SOCR et UC)

M. Claude Malhuret.  - Merci. Au cours de cette mandature, il nous arrivera de vous soutenir franchement, ainsi que d'exprimer tout aussi franchement des désaccords sans arrière-pensée tactique ou électorale. Sur le sujet européen, vous nous trouverez toujours à vos côtés pour que l'Europe soit plus forte, plus unie et plus influente dans le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe RTLI)

Attentat de Marseille

M. Bruno Gilles .  - Nous avons en mémoire les visages de Laura et Mauranne, l'une voulait être médecin, l'autre infirmière, sauvagement assassinées dimanche 1er octobre par un tueur radicalisé. Nous éprouvons de la tristesse, mais aussi de la colère : même si le risque zéro n'existe pas, en matière de terrorisme, la tragédie de Marseille n'aurait jamais dû se produire. Elle a été perpétrée par un clandestin délinquant multirécidiviste, arrêté à sept reprises sous sept noms différents, relâché la veille même de l'attentat et qui aurait dû se trouver en centre de rétention. Comment ne pas être indigné qu'il ait pu se promener librement sur le parvis de la gare Saint-Charles ?

Qu'allez-vous faire, monsieur le Premier ministre, pour que les lois votées ici au Parlement soient simplement appliquées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UC)

M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Ce dimanche 1er octobre a été pour moi un dimanche d'horreur. Je venais de déjeuner avec mes deux filles de 13 et 9 ans quand j'ai appris la nouvelle de cet horrible attentat. Puis je me suis immédiatement rendu sur place. J'ai appris le vol à Lyon, la garde à vue, la libération.

J'ai aussitôt diligenté une enquête de l'inspection générale de l'administration dont je donnerai les conclusions dans une heure. Je les aurais auparavant adressées aux familles. Nos services restent pleinement engagés pour que la lumière soit faite et elle le sera.

M. Bruno Gilles.  - L'efficacité de la lutte contre le terrorisme comporte évidemment une dimension policière et judiciaire, mais la guerre que nous livrent les terroristes vise à conquérir les esprits. Or le déni de réalité face à l'islamisme est flagrant et cela paralyse notre État. Le combat est aussi culturel. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Transferts obligatoires, compétence en matière d'eau et d'assainissement

M. Jean-François Longeot .  - Le 23 décembre, le Sénat a adopté une proposition de loi prévoyant le maintien des compétences eau et assainissement dans les compétences optionnelles des communes. Or la commission des lois de l'Assemblée nationale vient de rejeter ce texte le 4 octobre, et le Gouvernement a opposé une fin de non-recevoir.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Quel mépris envers les élus !

Plusieurs voix sur les bancs du groupe Les Républicains. - Eh oui !

M. Jean-François Longeot.  - C'est particulièrement inopportun car cela revient à déposséder les élus de nos territoires ruraux de toute possibilité de choix alors qu'ils font preuve depuis des décennies d'inventivité pour mettre en oeuvre des solutions adaptées à la géographie et aux contraintes de leurs territoires. Grâce à eux, ces compétences ont été gérées au prix le plus juste et au plus près des habitants. Pourquoi briser ce qui fonctionne ? (On renchérit sur les bancs du groupe Les Républicains.) Pour construire des édifices incertains ? (Même mouvement)

Cette proposition de loi est une marque de confiance et d'attention envers les élus. Pourquoi ne pas la voter ? Cela leur redonnerait, outre la confiance, une liberté d'action (Applaudissements prolongés sur de nombreux bancs des groupes UC et Les Républicains, sur plusieurs bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Je connais bien ce sujet, les compétences eau et assainissement ont été transférées par la loi NOTRe, comme d'autres.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Sans compensation !

M. Jacques Grosperrin.  - Eh oui !

Mme Jacqueline Gourault, ministre.  - Certains ont appelé à une pause législative. Cessons de changer les lois sans arrêt ! La loi NOTRe ne fait pas exception. (Vives protestations sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Cécile Cukierman s'exclame)

Mais le Gouvernement est conscient des problèmes des élus. Je suis sensible en particulier aux inquiétudes des élus de montagne vis-à-vis de la ressource en eau, ou aux préoccupations des communes rurales quant aux services de proximité. Aussi, je vous propose de travailler sur ces questions dans le cadre de la Conférence des territoires... (La ministre est interrompue par les vives protestations du groupe Les Républicains, d'où fusent des huées) et, s'il le faut, nous légiférerons.

Pacte financier avec les collectivités territoriales

M. Julien Bargeton .  - Le Gouvernement a engagé sans tarder, dès cet été, plusieurs réformes, dont certaines ont suscité des interrogations des élus locaux, parfois compréhensibles, parfois caricaturales. Il a voulu jouer carte sur table lors de la Conférence des territoires en mettant tous les sujets sur la table : notamment la taxe d'habitation, le financement de l'économie des territoires par l'investissement...

Les collectivités ont besoin de visibilité à long terme. Les baisses de dotation globale de fonctionnement de ces dernières années, unilatérales et uniformes, ont été mal vécues et ont laissé des traces. La logique partenariale exige de la justice, entre les 319 collectivités les plus importantes et d'autres qui connaissent aussi des difficultés. Il faut donc de la péréquation.

Alors que le projet de loi de finances met enfin un terme aux baisses de dotation aux collectivités territoriales... (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur ceux du groupe CRCE) Pourrez-vous nous garantir, madame la ministre, que cela perdurera ?

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Elle ne le peut pas ! (On approuve sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Oui, la DGF sera stable dans le budget de 2018, et les dotations telles que la DETR, ou dans le cadre de la politique de la ville, augmenteront significativement, pour atteindre 1,8 milliard d'euros. C'est donc la fin du rabot unilatéral. (Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Les collectivités territoriales ont été incitées à passer un pacte financier avec l'État lors de la Conférence nationale des territoires. (Même mouvement) Cet engagement vaut pour un an. La Conférence des territoires sera précisément le lieu pour faire les ajustements éventuellement nécessaires, si la maitrise des dépenses n'a pas été respectée. Il s'agit bien de maîtrise et non de diminution !

Je vous invite donc à participer à cette conférence, (Vigoureuses protestations sur la plupart des bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques autres bancs) lieu privilégié du dialogue des collectivités territoriales avec l'État que le Gouvernement veut rétablir (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; protestations croissantes sur les bancs du groupe Les Républicains)

Reconstruction de Saint-Martin

M. le président.  - Cette question est l'occasion d'exprimer notre solidarité avec Saint-Martin et Saint-Barthélemy. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Guillaume Arnell .  - Le 6 septembre, mon territoire, Saint-Martin, comme Saint-Barthélemy, a été frappé par l'ouragan Irma. Je remercie l'ensemble des forces de secours mobilisées et je condamne les reproches dont elles ont eu à souffrir, quant à leur supposé manque de préparation et d'anticipation.

Peu importe leur pré positionnement, cela n'aurait rien changé à l'ampleur du phénomène et aux dégâts qu'il a causés.

Lors de sa venue, le président de la République a déclaré qu'il fallait faire vite, quitte à bousculer les règles. Il n'empêche que le temps semble toujours trop long lorsque le travail est colossal...

Nous attendons des gestes forts, notamment pour la réhabilitation des bâtiments publics, pour l'aide à un tissu économique et à des populations fragilisées. J'espère en outre, comme les autres représentants du territoire, être associé au comité interministériel à la reconstruction. Monsieur le Premier ministre, la réponse de la France sera-t-elle rapide, et surtout proportionnée à l'ampleur des dégâts ? (Applaudissements sur la plupart des bancs)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Les dégâts laissés par l'ouragan Irma, à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, sont matériels tout autant qu'économiques et psychologiques. La phase d'urgence est en partie derrière nous. Elle a mobilisé de nombreux agents, des gendarmes, médecins, militaires...

Mme Cécile Cukierman.  - Remercions les fonctionnaires !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Ils ont apporté leur soutien à la population et je vous remercie d'avoir souligné que la réponse d'urgence a été à la hauteur des enjeux.

Il faut maintenant, autant que possible, revenir à la normale. Les commerces ont rouvert, les liaisons aériennes, maritimes et commerciales ont repris, plus lentement qu'imaginé initialement ; les réseaux électrique et de communication se rétablissent plus vite que prévu ; un grand nombre d'enfants ont repris les cours.

Je me rendrai, comme je l'ai annoncé, à Saint-Martin pour la rentrée de la Toussaint, avec le ministre de l'éducation nationale, pour dresser un état des lieux.

Mais la production et la distribution d'eau restent insuffisantes. L'activité économique, notamment le tourisme, est perturbé. Plus de 4 000 salariés bénéficient d'un régime de chômage partiel adapté. Un fonds d'urgence a été créé, le réseau bancaire est soutenu pour alléger le problème de trésorerie des entreprises et un moratoire fiscal et social a été déclaré.

Dans la perspective de la reconstruction, un délégué et un comité interministériels ont été mis en place. Il se réunit demain pour la troisième fois. On ne peut pas reconstruire comme si rien ne s'était passé, à l'égard des normes et des zones de construction en particulier, mais nous devons anticiper une intensification, annoncée par les experts, de ces phénomènes climatiques à l'avenir. La France, l'État dans son ensemble, doivent être à la hauteur des enjeux. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Les Républicains, RDSE et UC, ainsi que sur les bancs du groupe LaREM)

M. Guillaume Arnell.  - Il est toujours difficile de rassurer et de dissiper les inquiétudes légitimes, celles des plus touchés. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOCR)

Alstom (I)

M. Pierre Laurent .  - Le ministre Bruno Le Maire a annoncé l'intention du Gouvernement de ne pas lever l'option d'achat des parts de Bouygues dans Alstom au motif désolant et irrecevable que l'État n'aurait pas vocation à occuper un « strapontin »...

En effet, en rachetant les actions détenues par Bouygues, l'État deviendrait le premier actionnaire d'Alstom avant son absorption par Siemens et pourrait peser sur les choix stratégiques.

M. Le Maire prétend que l'État serait plus efficace dans un comité de suivi... Or nous constatons qu'à Belfort, où a été créé un tel organe, les engagements sont loin d'être tenus.

Le groupe américain General Electric avait promis à M. Macron, alors ministre de l'économie, 1 000 emplois en France : ce furent autant de supprimés, comme à Grenoble récemment...

Certes, la coopération entre les grands groupes industriels est nécessaire mais mettons fin au dogme « naïf » de la coopération-fusion. C'est l'Agefi qui parle ainsi des intentions françaises !

L'absorption d'Alstom par Siemens n'est en fait européenne qu'en façade. Ce sont 2 milliards d'euros - soit huit ans de budget de recherche et développement d'Alstom -. En réalité, elle favorise les actionnaires, au détriment de l'intérêt national, et Bouygues en particulier, qui touchera 800 millions de dividendes.

Nous vous demandons d'exercer l'option d'achat de l'État sur les titres Alstom détenus par le groupe Bouygues, de suspendre l'opération et d'ouvrir un large débat démocratique sur les conditions d'une alliance entre égaux. N'excluez pas a priori, pour des raisons idéologiques, l'idée d'un contrôle public de dimension européenne sur la nouvelle entité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement .  - Vous avez raison : l'idéologie n'a pas sa place dans cette opération. La fusion a pour objectif de créer un champion industriel européen.

Ce Gouvernement a toujours visé à garantir la stabilité du capital, pour accompagner un projet structuré, afin de garantir et pérenniser l'emploi et l'économie. Ce sera chose faite avec le rapprochement d'Alstom et de Siemens Mobility.

L'État actionnaire, sans aucune visée idéologique, a ici joué tout son rôle. Le nouveau groupe aura un actionnariat stable, un ancrage franco-allemand solide, un partenariat articulé autour d'un projet stratégique clair. L'État continuera à jouer un rôle, notamment grâce à la commande publique. Ce sera plus efficace, pour garantir la pérennité de l'emploi et l'équilibre des pouvoirs qu'une simple prise de participation.

Grâce à cela, l'État pourra continuer à jouer son rôle de stratège. Le siège de l'entreprise restera en France, ainsi que les lieux de production. Telle est bien la vocation de l'État, et non pas de spéculer sur les titres de Bouygues. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Budget 2018

M. Vincent Éblé .  - La commission des finances se met en ordre pour examiner le projet de loi de finances et le projet de loi de programmation des finances publiques. Les discussions s'annoncent animées : des modifications de la fiscalité immobilière sont déjà annoncées dès avant les débats à l'Assemblée nationale...

Nous veillerons en particulier à la fiscalité du patrimoine car la justice contributive doit guider l'action de l'État. Nous examinerons si les moyens supplémentaires sont bien là où il faut et si la qualité du service public n'est pas sacrifiée sur l'autel des réformes.

Nous serons particulièrement vigilants quant au financement des collectivités territoriales, aux modalités de la contractualisation, au fonctionnement du dispositif de bonus-malus et bien sûr à la réforme de la taxe d'habitation.

Nous devons pour cela disposer de toutes les simulations - je les demanderai, en tant que président de la commission des finances.

Vous proposez au nom de la croissance un ajustement structurel inférieur à ce qu'exige le droit européen. L'Union européenne et nos partenaires approuvent-ils cette lecture extensive des textes relatifs à la politique budgétaire ? Sommes-nous soutenus dans notre proposition de renforcer la gouvernance de la zone euro ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Vous serez bien naturellement associé à la discussion du budget, qu'il est de la responsabilité du Gouvernement de présenter au Parlement, la mission fondamentale de celui-ci étant d'en débattre. Vous aurez en conséquence l'occasion d'approuver, de corriger ou - ce que je ne souhaite évidemment pas  - de rejeter le budget lors de son examen...

Nous tenons nos engagements à l'égard de nos partenaires européens, c'est notre priorité, dès 2017. Vous avez omis de dire en effet que la Cour des comptes a estimé que le budget voté par la précédente majorité nous plaçait sur une trajectoire aboutissant en fait à 3,4 % du PIB de déficit. (MM. Claude Raynal et Jean-Marc Todeschini protestent.)

Or, dès cette année, nous respectons nos engagements européens, puisque le déficit sera inférieur à 3 %.

Pour 2018, le budget est conforme aux engagements du président de la République. Il innove sur plusieurs points.

S'agissant de la maîtrise (et non de la diminution) des dépenses locales, le mécanisme retenu consiste en une contractualisation concertée. Il serait plus facile de diminuer brutalement la DGF au rabot ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) Discutons-en, mesdames et messieurs les sénateurs !

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Il serait temps !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Sans discussion, la chose ne peut se faire que brutalement. Faisons donc le pari de la Conférence des territoires pour faire évoluer nos dépenses publiques et notre fiscalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Allocations familiales

Mme Corinne Imbert .  - Le principe même de l'universalité des allocations familiales est remis en cause. Après que le quinquennat précédent ait fortement modulé les allocations perçues selon les revenus perçus, les ménages les plus aisés pourraient s'en voir privés selon une proposition qui vient d'entrer dans le débat public. Évitons les caricatures grossières opposant les plus aisés aux plus modestes. La politique familiale est un pilier de notre modèle social.

Mme Catherine Troendlé.  - Très bien !

Mme Corinne Imbert.  - Quelles sont, madame la ministre, les intentions du Gouvernement en la matière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe UC)

Mme Agnès Buzyn, ministre .  - Notre politique familiale est généreuse : 60 milliards de dépenses en 2015, soit 2,7 % du PIB. Les modes de soutien, dont la fiscalité, sont variés, cumulables, qui permettent de maintenir le niveau de vie des familles comme de concilier vies familiale et professionnelle. J'y suis très attachée, comme je le suis à l'universalité de la sécurité sociale en général.

Mais notre politique a évolué comme la famille a elle-même changé : elle est désormais plus ciblée sur les familles les plus fragiles et monoparentales en particulier. Le plafond du complément de libre choix du mode de garde sera augmenté en conséquence de 30 % ; le complément familial majoré et l'allocation de soutien familial, à destination des parents isolés, seront également revalorisés.

Les choix du PLFSS seront poursuivis dans le cadre de la renégociation de la convention avec la branche famille de la sécurité sociale qui s'ouvre ce mois-ci. Plusieurs mesures concourent à préserver l'universalité : nous maintenons les allocations permettant de choisir le mode de garde et nous créons des places en crèche ; en particulier dans les territoires sous-dotés. Nous ciblons aussi certaines familles et parents en difficulté.

Dans ce cadre, je souhaite ouvrir avec le Parlement un débat sur la politique familiale en général. Il faudra en prendre le temps.

La politique familiale, pilier de notre modèle social, ne se décide pas dans l'urgence, mais doit être concertée. C'est la méthode que j'ai choisie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Corinne Imbert.  - À quelques jours de l'ouverture de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, gardez-vous, madame la ministre, d'une vision exclusivement comptable. Nous devons notre taux de natalité à notre politique familiale, qui a vu ses principes d'universalité fixés en 1946. N'allons pas au-delà de la modulation des allocations familiales décidées en 2015, elle suffit. Les enfants sont l'avenir de notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Maisons de l'emploi

Mme Nathalie Delattre .  - Madame la ministre du travail, vous vous apprêtez, dans le projet de loi de finances, à prendre une mesure préjudiciable pour les 126 maisons de l'emploi. Créées par Jean-Louis Borloo dans la loi de cohésion sociale en 2005, elles ont fait la preuve de leur pertinence en matière de plan de formation, d'analyse des besoins des entreprises et, évidemment, de gestion prévisionnelle territorialisée des emplois et compétences.

Alors que leur financement était à l'origine partagé entre l'État et les collectivités, les collectivités territoriales assument aujourd'hui leur financement à hauteur de 65 %. La contribution de l'État est passée de 82 millions en 2007 à 21 millions en 2017 ; vous prévoyez 10,5 millions pour 2018 puis zéro euro en 2019.

Persévérer dans cette décision empêchera Bordeaux de porter les 215 000 heures d'insertion ouvertes auprès des jeunes de nos quartiers. Elle obligera Strasbourg à renoncer à ses dispositifs de mobilité des jeunes en insertion vers l'Allemagne. Et je pourrais vous citer bien d'autres exemples. Est-ce vraiment le signal, madame la ministre, que vous comptez envoyer aux jeunes et aux chômeurs de longue durée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Lorsque les maisons de l'emploi ont été créées en 2005, l'idée était d'installer un guichet unique. Beaucoup de choses se sont passées depuis cette date, notamment la création en 2008 de Pôle Emploi. Comme vous l'avez rappelé, les gouvernements successifs, considérant qu'il y avait des doublons, ont petit à petit réduit leur aide. (Murmures sur les bancs du groupe SOCR) J'entends murmurer des élus qui ont soutenu ces réductions ! (Exclamations sur les bancs du groupe SOCR)

Les 116 maisons de l'emploi ont évolué vers la gestion prévisionnelle territorialisée des emplois et des compétences. Elles pourront toujours bénéficier des crédits à ce titre ainsi que des fonds européens.

Mon ministère a rencontré il y a quelques jours le réseau Alliance Villes Emploi qui coordonne ces maisons et continuera de le faire. Plus important pour moi, il sera aux côtés des élus locaux et des structures pour travailler sur l'insertion. Compte tenu de la croissance qui repart, nous devons faire tous les efforts pour permettre aux jeunes décrocheurs, aux jeunes demandeurs d'emploi et aux chômeurs de longue durée de saisir ces opportunités. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Nathalie Delattre.  - À un moment, nos collectivités territoriales ne pourront plus endosser vos responsabilités en finançant les maisons d'emploi. Elles sont à genoux. La balle est dans votre camp. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Alstom (II)

M. Martial Bourquin .  - Le rapprochement de Siemens et d'Alstom pour faire l'Airbus du ferroviaire face à la concurrence asiatique interroge. La vente de la branche énergie d'Alstom n'a pas été un succès - et c'est un euphémisme. Pourquoi refusez-vous d'acheter les actions de Bouygues avant le 17 octobre pour que nous ayons un droit de regard sur cette fusion ? On connaît pourtant la volonté de l'Allemagne que son industrie reste la plus forte. Pierre Moscovici, lui, avait pris la décision d'intervenir pour sauver PSA. Arrêtons de brader nos joyaux industriels ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement .  - Nous, nous croyons à la construction européenne. (On se récrie sur les bancs du groupe SOCR.) Le nationalisme économique n'est pas une mesure. L'exemple de Peugeot ? Il est parlant : l'entreprise a racheté Opel, sans opposition des Allemands...

M. Gérard Longuet.  - Opel appartenait déjà aux Américains !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État.  - La condition pour qu'émerge un grand leader européen dans le ferroviaire est de ne pas lever l'option. (On le nie sur les bancs du groupe CRCE.) Oui, nous pourrions faire une opération spéculative mais, sans vouloir vous donner un cours d'économie, si nous levions cette option, le cours de l'action baisserait.

Nous sommes dans une économie mondialisée. Face au géant chinois CRRC, il suffirait que nous nous repliions sur nous-mêmes avec nos petits bras musclés ? Faisons plutôt le pari audacieux d'un rapprochement de deux fleurons industriels aux complémentarités évidentes pour contribuer à l'émergence de l'Airbus ferroviaire européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Martial Bourquin.  - Monsieur le ministre, votre angélisme me sidère. General Electric à Grenoble, c'est 345 emplois supprimés sur 800 ! L'entrée d'un fonds de pension américain dans le capital de General Electric ne fera qu'aggraver les choses. Nous avons déjà perdu la branche énergie d'Alstom ! Je propose la création d'un EADS ferroviaire avec un accord entre États garantissant les sites et les emplois. Prenez vos responsabilités, arrêtez de botter en touche ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Ressources des collectivités

Mme Christine Lavarde .  - Le projet de loi de finances pour 2018 concentre le paiement de la taxe d'habitation sur 20 % des Français d'ici à trois ans. Ce que vous présentez comme une grande mesure de générosité, censée contrebalancer la suppression de l'ISF sur les valeurs mobilières, pose de réelles questions de fond. Si la taxe d'habitation est, comme vous le dites, un mauvais impôt, pourquoi la maintenir pour une partie de la population ? Cette mesure accroîtra l'hyperconcentration fiscale sur les classes moyennes puisque les ménages gagnant plus de 20 000 euros par an seront les seuls à la payer.

Une fois de plus, les collectivités territoriales feront les frais de la réforme. Vous leur ôtez une partie de leur autonomie fiscale en diminuant leur pouvoir de taux. Comment comptez-vous préserver cette autonomie qui est garantie par la Constitution ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RTLI)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Annoncée par le président de la République, (On se gausse sur les bancs du groupe Les Républicains.) la réforme redonnera du pouvoir d'achat à un certain nombre de nos concitoyens. Elle prendra la forme d'un dégrèvement, comme cela existe déjà pour les communes. L'État se substituera aux citoyens exonérés.

Mme Sophie Primas.  - C'est faux !

M. Marc-Philippe Daubresse.  - À quel taux ? Avec quelle année de référence ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre.  - C'est une opération blanche pour les collectivités territoriales. (On le récuse sur les bancs du groupe Les Républicains.) Oui, il faut repenser la fiscalité locale. Depuis des années, nous parlons d'une révision des bases cadastrales sans le faire. Reconnaissons-le, et les élus mettent la pédale douce dès qu'ils voient les conséquences que cela aurait. Pour revenir à la taxe d'habitation, la réforme sera sans effet sur les finances et la liberté de taux des collectivités. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Christine Lavarde.  - Votre réponse ne me rassure pas ! Compensation la première année mais après ? C'est une mesure typique de votre Gouvernement : boucs émissaires et hyperconcentration fiscale sur la classe moyenne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

La séance, suspendue à 17 h 45, reprend à 17 h 55.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

Évaluation environnementale (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 2 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Alinéa 42

Rédiger ainsi cet alinéa :

-  au 1° de l'article L. 121-17-1, les mots : « au seuil fixé par décret en Conseil d'État » sont remplacés par les mots : « à un seuil fixé par décret en Conseil d'État et ne pouvant être supérieur à 5 millions d'euros » et, à la fin, le mot : « montant » est remplacé par le mot : « seuil » ;

II.  -  Alinéa 67

Rétablir le II dans la rédaction suivante :

II.  -  Le deuxième alinéa du c du 2° du I entre en vigueur deux mois après la promulgation de la présente loi.

Mme Nelly Tocqueville.  - Nous souhaitons revenir au seuil de 5 millions d'euros pour le déclenchement du droit d'initiative citoyen. Le rapporteur de l'Assemblée nationale l'a bien expliqué : avec un seuil à 10 millions d'euros, on vise seulement 140 projets. J'entends l'argument légistique de notre rapporteur mais la loi peut encadrer le décret. Le but est d'élargir le droit d'initiative citoyen, et cela s'est fait sans que le Gouvernement ne s'y oppose à l'Assemblée nationale.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Avis défavorable. Cet amendement empiète sur le domaine réglementaire et rigidifierait la loi...

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Pardon mais quel symbole de faire entrer Sivens dans le dispositif ! Si on l'en excluait, il y aurait une forme d'anachronisme. Les députés étaient unanimes, le sujet reviendra forcément en CMP. J'ai trop d'amitié pour le Sénat pour ne pas le lui dire. Sagesse.

M. Ronan Dantec.  - L'approche en termes de seuil est une avancée. Tactiquement, le Sénat a intérêt à adopter cet amendement dans la perspective de la CMP.

M. Gérard Cornu.  - Le Sénat, depuis longtemps, cherche à éliminer les dispositions réglementaires dans la loi. Puisque le Gouvernement est prêt à fixer ce seuil de 5 millions dans un décret, pourquoi surcharger la loi ? Cet amendement n'a pas lieu d'être.

M. Claude Bérit-Débat.  - Pour ma part, je le soutiendrai. Le voter nous donnera un peu plus de respiration en CMP.

M. Alain Richard.  - Il n'est pas inutile de préciser le contexte dans lequel se tient cette discussion. L'ordonnance est incomplète et imparfaite sur ce point. Elle ne mentionne pas la valeur sur laquelle s'établit le seuil : s'agit-il du coût des travaux ou du coût complet du projet ? J'y vois un premier argument pour renvoyer cela à un décret en Conseil d'État comme le veut, pardon de le rappeler, la Constitution de 1958. Le second est que nous n'avons pas assez approfondi la notion d'opération ayant bénéficié d'un soutien public ; elle n'est précisément définie nulle part et ne peut l'être que par le règlement.

Une concertation ne sera pas inutile puisque l'obligation concernera à 90 % les collectivités. M. le ministre s'est sans doute laissé emporter par une discussion quelque peu hâtive à l'Assemblée nationale...

M. Ladislas Poniatowski.  - Tout à fait d'accord !

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Monsieur Richard, l'ordonnance est très précise sur ce point. Donner un avis de sagesse n'est pas se laisser emporter par une discussion hâtive... La seule question est de savoir si la définition du seuil est d'ordre législatif ou réglementaire. Nous sommes tous d'accord pour un seuil à 5 millions.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Débat paradoxal : on constate un accord sur le fond quand le désaccord persiste sur la forme. De la concertation, le respect de la séparation entre la loi et le règlement ; ce sont là de bons arguments. Monsieur le ministre, l'article 41 de la Constitution vous fait obligation de rejeter des demandes irrecevables, non de leur accorder un avis de sagesse. Le texte aura tôt fait d'être déclaré inconstitutionnel, il suffit d'un mauvais coucheur. Donnez votre engagement, monsieur le ministre, de fixer le seuil à 5 millions d'euros par décret et nous pourrons enfin clore cette discussion totalement improductive. (Marques d'approbation sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

M. Marc Laménie.  - On peut tout à fait comprendre la volonté d'améliorer le texte des auteurs de cet amendement n°10. Cependant, n'oublions pas notre volonté de simplification et de cohérence. Des projets de 5 millions d'euros, c'est de l'activité économique pour nos territoires. Faisons confiance à notre rapporteur.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 44

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

-  le II du même article L. 121-19 est ainsi rédigé :

« II.  -  Le représentant de l'État informe sans délai le maître d'ouvrage ou la personne publique responsable de l'élaboration du plan ou du programme et, si elle est distincte, l'autorité compétente pour autoriser le projet ou approuver le plan ou programme. Il apprécie la recevabilité de la demande au regard des critères énoncés au I.

« Si la recevabilité est avérée, le représentant de l'État organise une concertation préalable selon les modalités des articles L. 121-16 et L. 121-16-1 et, dans ce cas, fixe la durée et l'échelle territoriale de la participation qui sera mise en oeuvre au regard des principaux impacts environnementaux et des retombées socio-économiques attendus.

« Sa décision est motivée et rendue publique dans un délai maximum d'un mois à compter de la réception de la demande. » ;

M. Guillaume Gontard.  - Il s'agit de rendre effectif le nouveau droit d'initiative citoyen. Les critères sont déjà suffisamment restrictifs. S'ils sont remplis, la concertation préalable doit être organisée.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - La validation de la demande par le préfet est un élément fondamental du dispositif. Représentant de l'État, il peut apprécier la pertinence d'une consultation pour éviter les procédures abusives et contrecarrer les volontés de blocage.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Nous avons besoin du filtre du préfet, ne serait-ce que pour donner effet à ce nouveau droit. L'organisation d'une concertation demande du temps et des moyens ; attention, si j'ose dire, à ce que trop de consultations ne tue pas la consultation. Pour ma part, je fais confiance aux préfets. Je les vois mal faire fi de l'environnement local.

M. Alain Richard.  - Quelques mots d'explication : ce sont les porteurs de projets qui ont estimé que ce rôle revenait au préfet. Une partie de la population peut avoir été guidée par une information incomplète, les autorités doivent pouvoir lui dire que le projet sur lequel porte sa demande n'est pas celui qui est à l'étude.

La concertation préalable concerne, je l'ai dit, les collectivités territoriales à 90 %. À mon sens, le meilleur moyen pour elles de sécuriser les projets est d'en prendre l'initiative sans attendre qu'on la leur demande.

L'amendement n°6 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par MM. Bonnecarrère, Cabanel, Raison, Mandelli et Kern.

Après l'alinéa 44

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Au début de la section V du chapitre Ier, sont insérés deux articles L. 121-... et L. 121-... ainsi rédigés :

« Art. L. 121-...  -  Les cours administratives d'appel sont compétentes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges relatifs aux projets, plans et programmes ayant fait l'objet d'un débat public ou d'une concertation préalable en application du présent chapitre. 

« Art. L. 121-...  -  Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un projet, un plan ou un programme estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de ce projet est susceptible d'être régularisé par une décision modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle décision modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. » ;

M. Philippe Bonnecarrère.  - Cet amendement procède d'une volonté de simplification et de convergence entre les codes de l'urbanisme et de l'environnement. En contrepartie des efforts de concertation consentis, nous allégeons les procédures aval en prévoyant un recours devant la cour administrative d'appel. Appliquons la jurisprudence « Danthony », qui vaut en droit de l'urbanisme, pour autoriser le juge administratif à demander la régularisation de vices purement formels pouvant entraîner l'illégalité des projets.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - À titre personnel, et parce que je suis avocat, je suis réservé. Cet amendement émanant des travaux consensuels de la mission d'information sur la démocratie, sagesse.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - La philosophie de cet amendement est particulièrement intéressante, je la ferai mienne dans le cadre du groupe de travail sur les énergies renouvelables. En revanche, juridiquement, je dois donner un avis défavorable à cet amendement éloigné du texte.

Ce que vous proposez représente un grand soir juridique ; cela mérite une réflexion approfondie et, à tout le moins, une concertation avec la garde des Sceaux.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Le Gouvernement prend-il l'engagement d'examiner les dispositions de cet amendement dans un futur texte de simplification ?

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Un texte sur le droit à l'erreur est en cours, il pourrait être l'occasion de co-construire en amont ce dispositif. Un autre véhicule pourrait être le plan de simplification que proposera mon ministère ; sans doute prendra-t-il la forme d'un projet de loi et, parce qu'il concernera au premier chef les collectivités, sans doute sera-t-il examiné en premier par le Sénat.

L'amendement n°1 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 45

Rétablir le 3° du I dans la rédaction suivante :

3° À l'article L. 121-22, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « six » ;

Mme Nelly Tocqueville.  - Le délai pendant lequel une illégalité pour vice de forme peut être invoquée doit être aligné sur le droit de l'urbanisme : revenons à six mois.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - La commission a rétabli le délai de quatre mois, soit l'équilibre établi par l'ordonnance. L'argument d'une harmonisation avec le code de l'urbanisme n'est guère recevable et l'allongement du délai présente un risque juridique pour les porteurs de projet : de grâce, n'en n'ajoutons pas ! Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Avis très favorable. Ce délai de six mois n'est pas un simple alignement sur le droit de l'urbanisme. Dans les zones rurales, où des outils informatiques, où les réseaux de téléphonie mobile font trop souvent défaut, six mois, ce n'est pas de trop pour informer la population -  je le dis comme ancien président du Conseil départemental de l'Eure et en pensant à un projet bien précis, auquel les sénateurs de l'Eure, présents dans cet hémicycle, ne peuvent pas méconnaître... Qui plus est, la CNDP s'est prononcée pour un délai de six mois.

M. Ladislas Poniatowski.  - Élu de l'Eure, je voterai cet amendement. Non pour une cohérence avec le code de l'urbanisme, tant les projets varient d'un code à l'autre, mais pour prendre en compte notre situation dans les campagnes, je le sais comme président d'un syndicat d'électricité à qui l'on demande à développer les énergies non renouvelables. Les éoliennes sont implantées dans nos campagnes, pas dans les villes, et pour débattre des projets, il faut tenir compte des distances, du sous-équipement, de l'état des réseaux... Deux mois de plus, finalement, ce n'est pas considérable : j'invite chacun des élus ruraux à penser aux implications sur son territoire.

Mme Nelly Tocqueville.  - L'esprit du texte, c'est de donner la parole et d'associer le public le plus en amont, pour tenir compte de son avis ; donner le temps à cette expression, c'est assurer que tous les territoires s'expriment, y compris les territoires ruraux où il est plus difficile d'attirer l'attention de la population - non parce qu'elle se désintéresse des projets, mais parce que les outils de communication n'y sont pas toujours aussi diffusés qu'en ville. Dans ces régions, les élus doivent aller à la rencontre de la population. Allonger le délai de deux mois, c'est renforcer l'égalité des territoires.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - J'entends, mais nous ne sommes plus au Moyen-Âge ! Il existe des réseaux de communication dans la ruralité : journaux, Internet... Le délai de six mois, en revanche, permettra à de nombreuses associations de lancer des contentieux : avis défavorable.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°11, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 46

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Au premier alinéa du II de l'article L. 122-1, la première occurrence du mot : « et » est remplacée par le mot : « ou » ;

M. Guillaume Gontard.  - La Cour de justice de l'Union européenne, dans une jurisprudence bien établie, dispose que tout projet doit faire l'objet d'une étude d'impact dès lors qu'il est susceptible d'incidences notables sur l'environnement, mais aussi que le critère du cumul d'effets avec d'autres projets ne peut s'analyser qu'in concreto. C'est pourquoi le groupe de travail sur la modernisation du droit de l'environnement conduit par Jacques Vernier, a proposé une « clause-filet » pour soumettre à évaluation environnementale tout « petit » projet non visé par le régime de l'examen au cas par cas mais situé dans un milieu récepteur sensible ou fragile.

Avec cet amendement, nous proposons d'instituer une telle « clause-filet ».

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Les seuils n'auraient plus aucun sens et tous les projets devraient être évalués. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Même avis : cette clause-filet créerait une insécurité juridique, car elle permettrait de soumettre a posteriori de petits projets aux obligations de l'évaluation environnementale. C'est contre notre tradition d'un droit clair et prévisible. Cependant, le principe de ne pas laisser échapper des projets à incidence environnementale est nécessaire, il faut examiner de près les meilleurs outils à notre disposition.

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par MM. Dantec, Labbé, Collin, Corbisez, Gold et Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Après l'alinéa 46

Insérer neuf alinéas ainsi rédigés :

...) Après le II de l'article L. 122-1, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Lorsqu'un projet, en deçà des seuils fixés, est toutefois susceptible d'avoir des incidences négatives notables sur l'environnement, l'autorité compétente transmet les informations relatives au projet dont elle dispose à l'autorité environnementale qui examine sans délai la nécessité d'une évaluation des incidences sur l'environnement.

« La saisine de l'autorité environnementale est également ouverte :

« - au maître d'ouvrage qui peut transmettre à l'autorité environnementale une demande d'examen au cas par cas ;

« - à toute association agréée au niveau national en application de l'article L. 141-1 qui peut adresser à l'autorité compétente une demande motivée en ce sens ;

« Lorsque le maître d'ouvrage n'est pas à l'origine de la demande, l'autorité compétente l'informe sans délai.

« L'absence de réponse de l'autorité compétente, saisie par une association agréée au niveau national en application de l'article L. 141-1 au terme du délai fixé par voie réglementaire vaut rejet de la demande de saisine de l'autorité environnementale.

« L'absence de réponse de l'autorité environnementale au terme du délai fixé par voie réglementaire vaut dispense de réaliser une étude d'impact.

« Les modalités d'application de ce paragraphe sont fixées par voie réglementaire. »

M. Ronan Dantec.  - Dans son arrêt Commission contre Belgique, du 24 mars 2011, la Cour de justice européenne est claire : un projet « de dimension même réduite » peut avoir des incidences notables sur l'environnement et doit, par conséquent, être soumis à évaluation environnementale.

L'absence de transposition en droit interne de la « clause de rattrapage » constitue un risque d'insécurité juridique, que ces ordonnances veulent précisément réduire.

Cet amendement reprend la proposition du groupe de travail présidé par Jacques Vernier.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - En autorisant la saisine en deçà des seuils, y compris par les associations, vous soumettez en fait tous les projets à l'autorité environnementale.

La France fait l'objet d'une procédure précontentieuse pour non application de la clause de rattrapage et, dans son avis motivé, la Commission européenne précise bien que les petits projets - contrairement aux plans et programmes - ne sont pas concernés : respectons cet équilibre ! Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - L'argumentaire de M. Dantec est solide. Avis défavorable, toutefois, car introduire ces clauses à ce stade serait source d'insécurité.

M. Ronan Dantec.  - Pressions ?

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Je ne suis la voix d'aucun lobby et je ne fais ici que suivre l'avis des juristes, sans me prononcer sur le fond. Je suis prêt à réexaminer cette question dans un texte ultérieur.

M. Ronan Dantec.  - Je ne pensais pas que le ministre était la voix d'un lobby mais il faut concilier différents intérêts.

Je vous propose plutôt d'adopter cet amendement, quitte à y revenir en CMP. Il faut réparer une insécurité juridique.

L'amendement n°16 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par MM. Dantec, Longeot, Bignon et Vall.

Après l'alinéa 46

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...) L'article L. 122-1 est ainsi modifié :

- le V est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 « L'avis de l'autorité environnementale fait l'objet d'une réponse écrite de la part du maître d'ouvrage. » ;

- au VI, après le mot : « public », sont insérés les mots : « , ainsi que la réponse écrite à l'avis de l'autorité environnementale, » ;

M. Ronan Dantec.  - Cet amendement, comme le suivant, reprend les propositions de la commission d'enquête du Sénat sur les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité.

Là encore, nous comblons un trou dans la raquette : le maître d'ouvrage n'a pas à répondre à l'avis de l'Autorité environnementale, au risque de créer des conflits ultérieurement. Nous rendons obligatoire une réponse écrite de sa part.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Le maître d'ouvrage dispose déjà de la possibilité de modifier l'enquête publique. Cet amendement améliorera l'information du public. Avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Avis favorable sous réserve de restreindre cette obligation aux projets soumis à l'avis de la CNDP, autrement nous surtransposerions le droit européen.

M. Ronan Dantec.  - Il sera temps de préciser les choses en CMP.

M. Daniel Gremillet.  - Je voterai cet amendement mais je regrette le retrait de celui de M. Bonnecarrère, qui avait un sens. On sait tous que les délais d'instruction sont chez nous bien plus longs que chez nos voisins. Emparons-nous des deux sujets -  je le dis à l'attention des futurs membres de la CMP.

L'amendement n°13 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par MM. Dantec, Longeot, Bignon et Vall.

Après l'alinéa 51

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Le f) du 2° du II du même article L. 122-3 est complété par les mots : « , notamment en application de l'article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime » ;

M. Ronan Dantec.  - Nous proposons de prendre en compte spécifiquement l'impact des projets sur le foncier agricole -  y compris celui des mesures compensatoires. Vous le savez tous, le rétrécissement du foncier agricole est au coeur des préoccupations du monde agricole.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - La loi d'avenir agricole de 2014 impose au maître d'ouvrage des travaux ayant des conséquences négatives pour l'agriculture, la réalisation d'une étude préalable des impacts de son projet sur l'économie agricole, et de proposer des mesures pour réduire les effets négatifs et des compensations collectives dans un document adressé à l'étude d'impact. L'amendement introduit des éléments de cette étude préalable dans l'étude d'impact. Avis favorable à cette proposition de la commission d'enquête présidée par M. Longeot.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - On ne peut à la fois dénoncer la surtransposition, l'empiètement sur le pouvoir réglementaire et s'éloigner à ce point de la loi de transposition... Avis défavorable. Notez que je ne me prononce pas sur le fond du sujet.

M. Daniel Gremillet.  - L'esprit de cet amendement écarte la critique de surtransposition... Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut limiter l'artificialisation des terres agricoles ! Cet amendement va droit au but, en ciblant l'impact sur les terres agricoles, nous sommes unanimes, n'attendons pas !

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - J'essaie simplement de faire preuve de cohérence. Les états généraux de l'alimentation donneront lieu à des conclusions opérationnelles en leur temps. Pour l'heure, soyons cohérents dans l'écriture de la loi.

M. Ronan Dantec.  - L'artificialisation du foncier agricole est une question environnementale : quand il s'agit d'évaluer les impacts, nous sommes au coeur du sujet ! Surtransposition, sans doute, mais cela va dans le bon sens : nous sommes tout de même là pour améliorer la loi ! N'attendons pas les conclusions des états généraux de l'alimentation pour prolonger l'esprit de l'ordonnance. Avec cette précision, le maître d'ouvrage veillera aux conséquences de son projet sur les terres agricoles et sur la biodiversité, c'est aller dans le sens d'une vision globale, dont vous nous avez dit, monsieur le ministre, qu'elle était au coeur de ces ordonnances...

M. Jérôme Bignon.  - Le rythme de l'artificialisation des terres agricoles s'est accéléré. En quelques années, on est passé de la surface agricole utile d'un département tous les dix ans, à un département tous les six ans !

La surtransposition est à éviter lorsqu'elle aggrave ou rend plus difficile à mettre en oeuvre la directive ; lorsqu'elle améliore la situation, il faut l'accueillir avec joie !

M. Jean-François Longeot.  - Très bien !

M. Gérard Cornu.  - Je souscris au fond de l'amendement, il faut bien sûr protéger les terres agricoles, mais ne peut-on régler le problème localement, au moyen des documents d'urbanisme, qui sont dans les mains des élus ? Faisons-leur confiance, ce sont majoritairement des gens très responsables.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - L'ordonnance réécrit cet article du code et il ne s'agit que de modifier une chose qui existe : ce n'est donc pas un cavalier.

L'amendement n°12 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 58

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le deuxième alinéa de l'article L. 123-9 est supprimé ;

M. Guillaume Gontard.  - La refonte de l'article L. 123-9 du code de l'environnement réduit l'information du public et la concertation ; rétablissons le délai d'origine de trente jours : les actes suivront enfin les déclarations d'intention !

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Passer de trente à quinze jours est un élément de simplification. D'ailleurs, l'Assemblée nationale n'y a rien trouvé à redire. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Nous sommes ici en dehors du périmètre des évaluations. C'est cohérent avec ma position sur l'extension de quatre à six mois du délai de concertation. Le délai de trente jours romprait l'équilibre trouvé avec les porteurs de projets : avis défavorable.

L'amendement n°7 n'est pas adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par MM. Bonnecarrère, Cabanel, Raison et Kern.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À titre expérimental, la Commission nationale du débat public peut, sur les projets dont elle est saisie dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, nommer un garant, dans les conditions fixées par l'article L. 121-1-1 du code de l'environnement, chargé de veiller au bon déroulement de l'ensemble des procédures de participation du public prévues au titre II du livre Ier du même code et au chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

Seuls les projets pour lesquels les maîtres d'ouvrage se portent candidats à cette expérimentation auprès de la Commission nationale du débat public peuvent être retenus.

Les projets retenus sont soumis au présent article pour une durée maximale de quinze ans à compter de leur sélection par Commission nationale du débat public.

Si elle constate des difficultés dans la mise en oeuvre de l'expérimentation pour un ou plusieurs projets, la Commission nationale du débat public peut décider d'y mettre fin, sur proposition du garant et avec l'accord du maître d'ouvrage. Cette décision n'a pas d'effet sur les procédures de participation du public réalisées dans le cadre de l'expérimentation.

Au cours de l'expérimentation, le garant s'assure de la bonne articulation entre les différentes procédures de participation du public. Il veille à la lisibilité des objectifs de ces procédures pour les citoyens. Son indemnisation est prise en charge par le maître d'ouvrage.

Par dérogation à la section 1 du chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement et du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le garant veille au bon déroulement des enquête publiques, en lieu et place de la commission d'enquête ou du commissaire enquêteur.

Les rapports du garant sont rendus publics. Ils peuvent faire état de recommandations sur le déroulement des différentes procédures de participation du public et leur enchaînement ; ils n'ont pas vocation à prendre position pour la poursuite ou pour la cessation du projet, par dérogation aux articles L. 123-5 et L. 123-6 du code de l'environnement.

Chaque garant informe la Commission nationale du débat public du déroulement de l'expérimentation dont il a la charge ainsi que les maîtres d'ouvrage et les collectivités territoriales concernés par le projet.

L'expérimentation fait l'objet d'un bilan intermédiaire dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, puis d'un second bilan définitif à la fin de l'ensemble des procédures de participation du public des projets retenus. Chacun de ces bilans prend la forme d'un rapport du Gouvernement, qui le transmet au Parlement, avec, le cas échéant, les observations des maîtres d'ouvrage concernés et de la Commission nationale du débat public.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Les enquêtes publiques peinent à remplir leur office dans la continuité : les procédures entrainent une discontinuité préjudiciable et les enquêtes publiques sont parfois instrumentalisées par les parties prenantes.

Pour assurer le continuum, je propose d'expérimenter - conformément au voeu du président de la République - avec un tiers garant, qui serait présent tout au long de l'évaluation. Il recevrait l'information et assurerait la transparence du processus. Il serait parfaitement indépendant, alors que l'enquêteur public est toujours entraîné dans un camp et cristallise les difficultés.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Je partage votre souci de prévenir les ruptures dans la procédure. Mais l'amendement n°18, adopté à l'article 2, vous donne satisfaction : retrait ?

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Je crois effectivement que vous avez satisfaction. Attention, ensuite, à ne pas faire disparaître l'enquête publique. Et n'oubliez pas que les garants n'interviennent que sur la forme, pas sur le fond : ils doivent garantir l'accès à l'information, la procédure, les suites de la concertation, mais pas trancher entre les positions : c'est ce que nous demandent les représentants de la CNDP. Retrait ?

Laissons-nous le temps d'évaluer la mise en oeuvre des deux ordonnances, dans deux ou trois ans ; si les recours sont trop nombreux, nous pourrons alors envisager une expérimentation.

L'amendement n°2 rectifié bis est retiré.

L'article 3 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°14 rectifié bis, présenté par M. Dantec, Mme Benbassa, MM. Gontard, Jomier, Labbé, Collin et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini et Mme Jouve.

 Après l'article 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 521-3 du code de justice administrative est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Lorsque la mesure demandée relève de l'application des dispositions de l'article L. 124-1 du code de l'environnement, la condition d'urgence est présumée. »

M. Ronan Dantec.  - Cet amendement crée un référé-communication pour faciliter l'accès élargi aux informations environnementales exigé par le droit de l'Union et la Convention d'Aarhus.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Vous supprimez la condition d'urgence pour un référé. Or un référé est un outil bien spécifique qui repose précisément sur cette condition. N'encombrons pas l'office du juge administratif. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - L'esprit d'Aarhus souffle dans cet hémicycle (Sourires) mais le mieux est l'ennemi du bien : avis défavorable.

L'amendement n°14 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié bis, présenté par M. Dantec, Mme Benbassa, MM. Gontard, Jomier, Labbé, Collin et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini et Mme Jouve.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code des relations entre le public et l'administration est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article L. 342-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsque la commission conclut au caractère communicable du ou des documents réclamés, elle prescrit, dans le même avis, la communication des documents assortie d'un délai d'exécution. » ;

2° L'article L. 342-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« De même, en cas de non-respect d'une injonction de communication prévue à l'article L. 342-1, elle peut, au terme d'une procédure contradictoire, infliger à la personne désignée par son avis les sanctions prévues par l'article 18 précité. »

M. Ronan Dantec.  - Les documents administratifs doivent être rendus publics lorsque la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) le prescrit, ce qui n'est pas toujours le cas... Un pouvoir d'injonction y pourvoirait : c'est l'objet de cet amendement.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - De tels ajouts modifieraient les pouvoirs de la CADA - déjà renforcés par la loi pour une République numérique de 2016 -, en la dotant en particulier d'un nouveau pouvoir de sanction, cela n'entre pas dans les compétences de notre commission. Le champ de cet amendement dépasse très largement le domaine environnemental. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - La question de l'accès insuffisant aux documents administratifs se pose, je ne le nie pas. Mais pour les mêmes raisons formelles, avis défavorable.

L'amendement n°15 rectifié bis n'est pas adopté.

Article 4

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le second alinéa de l'article L. 2124-3 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par les mots : « sauf en ce qui concerne les permis exclusifs de recherche qui restent soumis aux dispositions de cet article. »

M. Guillaume Gontard.  - Cet amendement soumet l'octroi de permis exclusifs de recherches de mines sur le domaine public maritime à une enquête publique. La proposition portée naguère par Évelyne Didier a disparu. C'est dommage, car les lobbies sont actifs sur cette question, tel le 21 septembre dernier, sur le permis dit Guyane maritime, pour l'exploration d'hydrocarbures.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Nous aurons l'occasion d'y revenir dans un autre cadre, plus approprié que celui d'un amendement de séance sur un texte qui ne porte pas sur le domaine minier.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État.  - Même avis. Le ministre d'État Nicolas Hulot a annoncé un véhicule législatif dédié en 2018.

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

L'article 4 est adopté, de même que l'article 5.

Interventions sur l'ensemble

M. Alain Fouché, rapporteur .  - Je remercie les membres de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et son président, pour le travail effectué, ainsi que monsieur le ministre avec qui les échanges ont été fructueux.

M. Gérard Cornu .  - Le groupe Les Républicains votera ce projet de loi, car nous sommes très favorables à la simplification des normes qui tuent les initiatives, retardent et renchérissent les projets.

En tant que sénateurs, nous sommes en outre attachés à la simplification des lois ; si les députés veulent les encombrer de dispositions réglementaires, libre à eux...

Mme Nelly Tocqueville .  - Je félicite à mon tour tous les collègues qui se sont impliqués dans ce travail. Artificialisation des terres agricoles, participation des élus et du public... Les sujets importants ont été abordés. Puissions-nous trouver un accord en CMP.

M. Ronan Dantec .  - Il ne s'agit pas de surcharger la loi pour le plaisir. Mais de concrétiser rapidement les propositions consensuelles surtout lorsqu'elles émanent du Sénat. Si toutes les données ne sont pas rendues disponibles au public, le contentieux l'emportera. Nous ne pouvons de toute façon plus passer en force sur les sujets environnementaux.

M. Jean-François Longeot .  - Le groupe UC votera ce texte qui apporte des assouplissements utiles et reprend une partie de notre rapport.

M. Guillaume Gontard .  - Les craintes du groupe CRCE n'ont pas été levées. Le droit de participation de nos concitoyens est très loin de ce qui était attendu, et le maître d'ouvrage ne sera pas tenu de répondre aux avis de l'autorité environnementale ; c'est regrettable.

Les marges des DREAL baissent sous l'effet des politiques « austéritaires » continues, et nous votons en quelques heures la modification de près de soixante articles du code de l'environnement. Sans nous.

Le projet de loi est adopté.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État .  - Je vous remercie et vous assure que le suivi des points sur lesquels le Gouvernement s'est engagé, sera assuré. N'hésitez pas à me faire savoir si ce n'est pas le cas.

Prochaine séance mercredi 11 octobre 2017, à 14 h 30.

La séance est levée à 19 h 35.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du mercredi 11 octobre 2017

Séance publique

À 14 h 30

Présidence : M. Gérard Larcher, président

Secrétaires : Mme Catherine Deroche

M. Victorin Lurel

1. Éloge funèbre de Nicole Bricq.

À 15 h 15

Présidence : M. David Assouline, vice-président

2. Examen de trois projets de loi en discussion commune :

- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n°2017 - 31 du 12 janvier 2017 de mise en cohérence des textes au regard des dispositions de la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé ;

- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n°2017-48 du 19 janvier 2017 relative à la profession de physicien médical et l'ordonnance n°2017-50 du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé ;

- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n°2017-644 du 27 avril 2017 relative à l'adaptation des dispositions législatives relatives au fonctionnement des ordres des professions de santé.

Rapport de Mme Corinne Imbert, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°10, 2017-2018).

Textes de la commission (nos 12, 11 et 13, 2017-2018).

À 17 h 30

Présidence : M. Gérard Larcher, président

M. David Assouline, vice-président

3. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur l'avenir de l'Union européenne, en application de l'article 50-1 de la Constitution.

4. Suite éventuelle de l'ordre du jour de l'après-midi.