Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et du projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 43

M. le président.  - Amendement n°56 rectifié bis, présenté par MM. Retailleau, Allizard, Babary, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonne, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, MM. J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mme Dumas, M. Duplomb, Mme Duranton, M. Émorine, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier, Frassa et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Grand et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Guené, Houpert, Hugonet et Huré, Mmes Imbert et M. Jourda, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mmes Lherbier et Lopez, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Schmitz, Segouin, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vogel, Vaspart, Laufoaulu, Le Gleut et Paccaud.

Après l'article 43

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 131-30-2 du code pénal, il est inséré un article 131-30-... ainsi rédigé :

« Art. 131-30-...  -  L'interdiction du territoire français est prononcée par la juridiction de jugement dans les conditions prévues à l'article 131-30 du code pénal, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'un des délits ou crimes punis d'une peine au moins égale à cinq ans d'emprisonnement.

« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ces peines, en considération des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. »

Mme Muriel Jourda.  - Cet amendement crée une peine complémentaire générale d'interdiction du territoire français pour les délits et crimes punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement obligatoire sauf décision spéciale et motivée de la juridiction de jugement, comme la loi le permet depuis 2016 pour les délits et crimes terroristes.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois.  - Avis favorable. Le Sénat l'avait déjà adopté lors de l'examen du projet de loi Asile et immigration.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Avis défavorable. Le Gouvernement souhaite que cette peine obligatoire soit réservée aux délits d'une particulière gravité comme les infractions terroristes. Votre amendement semble disproportionné. L'interdiction du territoire s'appliquerait ainsi au vol d'une mobylette avec effraction. Actuellement, 2 147 personnes sous main de justice font l'objet d'une interdiction du territoire français. Lorsqu'elles sortent de prison, elles sont prises en compte par les autorités préfectorales qui font appliquer l'interdiction du territoire grâce à la délivrance d'un laissez-passer consulaire. Nous travaillons avec le ministère de l'Intérieur pour que les décisions d'interdiction du territoire soient exécutées dans les meilleurs délais.

M. Jacques Bigot.  - Le groupe SOCR ne votera pas cet amendement pour les mêmes raisons que celles exposées par la garde des Sceaux.

L'amendement n°56 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°58 rectifié bis, présenté par MM. Retailleau, Allizard, Babary, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, MM. Bizet, Bonhomme et Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, M. Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deromedi et Di Folco, M. Dufaut, Mmes Dumas et Duranton, M. Émorine, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. Frassa et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, M. Grand, Mme Gruny, MM. Hugonet et Huré, Mmes Imbert et M. Jourda, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mme Lherbier, M. Magras, Mme Malet, M. Mandelli, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, de Montgolfier, Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec, Perrin, Pierre, Pillet et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mme Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Schmitz, Segouin, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vogel, Vaspart, Laufoaulu, Le Gleut et Paccaud.

Après l'article 43

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 132-16-5 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 132-16-5.  -  L'état de récidive légale est relevé par le procureur de la République dans l'acte de poursuites et au stade du jugement, sous réserve du principe d'opportunité des poursuites prévu à l'article 40-1 du code de procédure pénale.

« Il est relevé d'office par la juridiction de jugement, sauf décision spéciale et motivée, même lorsqu'il n'est pas mentionné dans l'acte de poursuites. La personne poursuivie en est informée et est mise en mesure d'être assistée d'un avocat et de faire valoir ses observations. »

Mme Muriel Jourda.  - Cet amendement reprend une disposition adoptée par le Sénat, en janvier 2017, issue de la proposition de loi tendant à renforcer l'efficacité de la justice pénale.

Il prévoit que l'état de récidive légale est relevé par le ministère public, sous réserve du principe d'opportunité des poursuites, dans l'acte de poursuites et au stade du jugement, et d'office, par la juridiction de jugement, sauf en cas de décision spéciale et motivée de cette dernière. Actuellement, l'état de récidive légale peut être relevé par la juridiction saisie de la seconde infraction, lorsqu'il est mentionné dans l'acte de poursuites.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable. Cet amendement a déjà été voté par le Sénat en janvier 2017. Insistons...

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Cet amendement est soit peu utile soit excessif. Il ne change presque rien au droit existant pour le procureur de la République. Le tribunal correctionnel peut relever d'office la récidive à l'audience. La motivation de cette décision ajoute de la complexité formelle et introduit une forme de défiance à l'égard des magistrats même si ce n'est pas votre intention. Faisons confiance aux tribunaux.

M. Jacques Bigot.  - Même avis que la garde des Sceaux. Cet amendement ne fait qu'exprimer la volonté de donner une image répressive et peu respectueuse des droits de la défense, il témoigne d'un manque de confiance vis-à-vis du juge.

L'amendement n°58 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°57 rectifié bis, présenté par MM. Retailleau, Allizard, Babary, Bascher et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, MM. Bizet, Bonhomme et Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mmes L. Darcos et Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne, Di Folco et Dumas, M. Duplomb, Mme Duranton, M. Émorine, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier, Frassa et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, M. Grand, Mme Gruny, MM. Guené, Hugonet et Huré, Mmes Imbert et M. Jourda, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et H. Leroy, Mme Lherbier, M. Magras, Mme Malet, M. Mandelli, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, de Montgolfier, Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Rapin, Revet, Savary, Savin, Schmitz, Segouin, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vogel, Vaspart, Laufoaulu, Le Gleut et Paccaud.

Après l'article 43

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi modifié :

1° Après le mot : « présent, », la fin du second alinéa de l'article 132-29 est ainsi rédigée : « des conséquences qu'entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction qui serait commise dans les délais prévus aux articles 132-35 et 132-37. » ;

2° L'article 132-35 est ainsi modifié :

a) Les mots : « ayant ordonné la révocation totale du sursis dans les conditions définies à l'article 132-36 » sont remplacés par les mots : « sans sursis qui emporte révocation » ;

b) Les mots : « totale ou partielle » sont supprimés ;

3° L'article 132-36 est ainsi rédigé :

« Art. 132-36.  -  Toute nouvelle condamnation à une peine d'emprisonnement ou de réclusion révoque le sursis antérieurement accordé, quelle que soit la peine qu'il accompagne.

« Toute nouvelle condamnation d'une personne physique ou morale à une peine autre que l'emprisonnement ou la réclusion révoque le sursis antérieurement accordé qui accompagne une peine quelconque autre que l'emprisonnement ou la réclusion.

« La révocation du sursis est intégrale. » ;

4° L'article 132-37 est ainsi modifié :

a) Les mots : « ayant ordonné la » sont remplacés par les mots : « sans sursis emportant » ;

b) La seconde occurrence des mots : « du sursis » est supprimée ;

5° L'article 132-38 est ainsi rédigé :

« Art. 132-38.  -  En cas de révocation du sursis simple, la première peine est exécutée sans qu'elle puisse se confondre avec la seconde.

« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, dire que la condamnation qu'elle prononce n'entraîne pas la révocation du sursis antérieurement accordé ou n'entraîne qu'une révocation partielle, pour une durée qu'elle détermine, du sursis antérieurement accordé. Elle peut également limiter les effets de la dispense de révocation à l'un ou plusieurs des sursis antérieurement accordés. » ;

6° À l'article 132-39, les mots : « totale du sursis n'a pas été prononcée dans les conditions prévues à l'article 132-36 » sont remplacés par les mots : « du sursis n'a pas été encourue » ;

7° Le premier alinéa de l'article 132-42 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;

b) À la deuxième phrase, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;

c) À la dernière phrase, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « dix » ;

8° Au premier alinéa de l'article 132-47, les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est » ;

9° L'article 132-48 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « peut, après avis du juge de l'application des peines, ordonner » sont remplacés par les mots : « ordonne, après avis du juge de l'application des peines » ;

b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, faire obstacle à la révocation du sursis antérieurement accordé. » ;

10° Au début de l'article 132-49, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La révocation partielle du sursis ne peut être ordonnée qu'une fois. » ;

11° L'article 132-50 est ainsi rédigé :

« Art. 132-50.  -  Si la juridiction ordonne l'exécution de la totalité de l'emprisonnement et si le sursis avec mise à l'épreuve a été accordé après une première condamnation déjà prononcée sous le même bénéfice, la première peine est d'abord exécutée à moins que, par décision spéciale et motivée, la juridiction ne dispense le condamné de tout ou partie de son exécution. »

II.  -  Le chapitre Ier du titre IV du livre V du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L'article 735 est abrogé ;

2° À l'article 735-1, la référence : « 735 » est remplacée par la référence : « 711 ».

Mme Muriel Jourda.  - Cet amendement reprend une disposition adoptée par le Sénat, en janvier 2017, issue de la proposition de loi tendant à renforcer l'efficacité de la justice pénale.

Il ouvre la possibilité pour la juridiction, par une décision motivée, de faire obstacle à la révocation du sursis, de ne le révoquer que partiellement et de limiter les effets de la dispense à un ou plusieurs sursis précédemment accordés.

M. le président.  - Amendement identique n°72 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Henno et Daubresse, Mme N. Goulet, M. Longeot, Mme Billon et MM. Kern, Dufaut, Moga et Houpert.

M. André Reichardt.  - Cet amendement rétablit le principe de la révocation automatique et intégrale du sursis simple, en laissant toutefois la possibilité d'y faire obstacle pour les juridictions, par une décision spéciale et motivée. L'effet dissuasif de la peine jouera davantage à travers sa certitude que sa sévérité.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Revenir à la révocation du sursis d'avant 2014 n'est pas souhaitable d'autant que ce droit antérieur, fondé sur l'automaticité sauf dispense du tribunal, était source de difficultés. Lorsque le précédent sursis était trop récent, le tribunal n'en était pas informé car il ne figurait pas au casier judiciaire. De plus, le prévenu omettait de demander la dispense de révocation. Et le droit antérieur encombrait les juridictions en multipliant les contentieux liés à l'exécution de la peine. La réforme de 2014 a supprimé ces inconvénients en renforçant la cohérence de notre droit, notamment entre la révocation du sursis simple et celle du sursis avec mise à l'épreuve. Rétablir un mécanisme automatique irait à rebours de l'évolution du droit de la peine qui, depuis la réforme du code pénal de 1994, tend à renforcer le principe de l'individualisation des peines.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Madame la Ministre, vous rappelez le principe de l'individualisation des peines. J'y suis également favorable. Mais ici, le juge conservera la possibilité de ne pas appliquer l'automaticité de la peine. Ses pouvoirs sont préservés. Il lui faudra juste motiver sa décision. Il n'y a aucune disproportion sur ce point.

M. Jérôme Bascher.  - Je voterai naturellement cet amendement car il s'agit de récidivistes, qui pourrissent la vie de nos concitoyens. Je crois beaucoup en la vertu pédagogique de passer devant un juge. Cependant, quand il s'agit de multirécidivistes, il faut raisonner autrement. Redonnons du sens à notre droit.

M. Marc Laménie.  - Pas moins de 40 % des peines sont devenues fictives. Je peux comprendre la réponse de Mme la ministre. Lorsque je vous ai interrogée sur les casseurs dans les écoles, vous aviez défendu votre position. Nos collègues de la Seine-Saint-Denis sont particulièrement touchés ces jours-ci, ils l'ont rappelé lors des questions d'actualité. Cependant à Charleville-Mézières, nous venions d'inaugurer une salle des fêtes à 400 000 euros ; le lendemain ou le surlendemain, tout était dévasté. Comment ne pas être lassé, révolté ? Je voterai cet amendement.

M. André Reichardt.  - La révocation d'un sursis est la condition d'existence de ce sursis. À quoi sert de condamner si 40 % des peines ne sont pas effectuées ? Il faut que le juge puisse déroger à la révocation du sursis.

M. Jacques Bigot.  - Nous voterons, comme en janvier 2017, contre cet amendement. Cependant, en janvier 2017, le travail réalisé par la commission des lois était différent...

Nous sommes tous convaincus qu'il faut lutter contre la récidive car lorsque les mêmes reviennent en maison d'arrêt, c'est que le système ne fonctionne pas. Une peine assortie du sursis en-dehors de la probation est assortie d'une mise à l'épreuve. Celui qui y est soumis peut revenir devant les tribunaux pour une infraction d'un autre ordre.

Certains souhaitent défendre la voie de la répression pour lutter contre la récidive. C'est une question d'affichage politique. L'expérience a montré que cela fonctionnait souvent à l'inverse.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - L'automaticité nuit à l'individualisation de la peine, qui est un principe constitutionnel. Deuxième argument, pourquoi l'imposer alors que le juge peut toujours révoquer ? Enfin, la loi de 2014 n'a pas augmenté le laxisme. Nous n'aurions pas 70 000 détenus dans le cas contraire. D'où vient cette évaluation de 40 % de peines fictives ?

Les automatismes peuvent conduire à une forme d'incarcération à l'aveugle alors que d'autres peines seraient plus adaptées.

La proposition que vous faites, ajoutée à l'abaissement à un an du seuil fixé à l'article 723-15 du code de procédure pénale, produirait une inflation carcérale, le sursis est un outil nécessaire.

L'individualisation des peines et la remise du juge au coeur du système sont les deux lignes que je défends. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos57 rectifié bis et 72 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°119 rectifié bis, présenté par MM. H. Leroy, Charon, Bonhomme, Grosdidier et Fouché, Mme Giudicelli, M. Panunzi, Mme Vermeillet, MM. Paccaud, Meurant, Reichardt, Laménie, Mandelli et Moga, Mme A.M. Bertrand, MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Deromedi et MM. Sol, Houpert, D. Laurent et Revet.

Après l'article 43

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 622 du code de procédure pénale est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« La révision d'une décision pénale définitive peut également être demandée au détriment de toute personne reconnue non coupable d'un crime ou d'un délit lorsque :

« 1° Après un acquittement ou une relaxe, vient a? se produire un fait nouveau ou a? se révéler un élément inconnu de la juridiction au jour du procès, de nature a? établir indubitablement la culpabilité? de la personne reconnue non coupable ;

« 2° Après un acquittement ou une relaxe, sont découverts de nouveaux éléments de preuve faisant sérieusement présumer que si la cour d'assises ou le tribunal correctionnel en avait eu connaissance, l'accuse? ou le prévenu aurait été? condamne? ;

« 3° Après un acquittement ou une relaxe, a été? fait un aveu crédible de l'infraction par la personne reconnue non coupable, que cet aveu ait été? fait en justice ou qu'il ait été? extrajudiciaire ;

« 4° Un des témoins entendus a été?, postérieurement a? l'acquittement ou a? la relaxe, poursuivi et condamne? pour faux témoignage a? l'avantage de l'accuse? ou du prévenu ; le témoin ainsi condamne? ne peut pas être entendu dans les nouveaux débats. »

M. Henri Leroy.  - Cet amendement ouvre en droit français la révision in defavorem, c'est-à-dire au détriment d'une personne qui aurait, au bénéfice manifeste d'une erreur judiciaire, été relaxée ou acquittée à tort. En l'état actuel de notre droit, la révision d'une décision pénale définitive ne peut être demandée qu'au bénéfice de toute personne reconnue coupable d'un crime ou d'un délit - c'est-à-dire in favorem.

L'affaire Haderer a mis en lumière cette lacune de notre législation. Des années après le meurtre de Nelly Haderer, des traces d'ADN identifiées sur le pantalon de la victime ont mis en cause un homme qui ne pouvait plus être judiciairement inquiété, car définitivement acquitte? en octobre 2008 par la cour d'assises de la Moselle.

Cette situation a profondément choque? l'opinion publique a? une époque ou? les progrès techniques et scientifiques ouvrent de nouvelles perspectives en matière de manifestation de la vérité?.

Notre droit doit permettre de revenir sur une décision d'acquittement ou de relaxe, lorsque la survenance d'un fait nouveau ou la découverte d'un élément inconnu entache d'erreur manifeste la décision rendue. L'erreur judiciaire est inacceptable et contraire à nos principes et a? notre conception de la justice, qu'elle concerne l'innocent en prison ou le coupable en liberté. Dans ces deux hypothèses, la vérité judiciaire doit pouvoir être révisée lorsqu'il existe un doute sur son bien-fondé.

Plusieurs pays européens ont introduit dans leur législation nationale la révision in defavorem, comme l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Le principe constitutionnel et conventionnel non bis in idem s'y oppose. En cas d'acquittement définitif, il n'est pas possible de rouvrir les poursuites. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Henri Leroy.  - L'argument du rapporteur est logique. Cependant, nous restons figés alors que de nombreux pays ont évolué sur le sujet.

L'amendement n°119 rectifié bis est retiré.

Mise au point au sujet d'un vote

Mme Sophie Joissains.  - M. Bonnecarrère souhaitait s'abstenir sur la loi ELAN. Il a été porté comme votant contre.

M. le président.  - Acte est donné de votre mise au point qui sera portée au Journal officiel.