France - Liban : 2002, des preuves d'amitié viennent éclairer l'horizon

Compte rendu de la mission effectuée au Liban par une délégation du Groupe interparlementaire France-Liban du Sénat du 11 au 14 septembre 2002.

Table des matières




France - Liban : 2002,

des preuves d'amitié viennent éclairer l'horizon

"Parce que c'était lui,

parce que c'était moi."

(Montaigne)

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION

- M. Adrien GOUTEYRON , Président du groupe interparlementaire, Vice-Président du Sénat (Sénateur de la Haute-Loire),

- Mme Marie-Claude BEAUDEAU , Vice-Présidente du groupe (Sénateur du Val d'Oise),

- M. Georges MOULY , Vice-Président du groupe (Sénateur de la Corrèze),

- M. Bernard SEILLIER , Vice-Président du groupe (Sénateur de l'Aveyron),

- M. André VANTOMME , Vice-Président du groupe (Sénateur de l'Oise),

- M. François ZOCCHETTO (Sénateur de la Mayenne).

La délégation était accompagnée de Mme Marie-Pascale BOUTRY , Conseiller au Sénat, Secrétaire exécutif du groupe.

*

* *

Les membres de la délégation expriment leur vive reconnaissance à tous ceux qui ont contribué à son succès.

Ils souhaitent également rendre un hommage appuyé à l'action particulièrement efficace de S.Exc. M. Philippe LECOURTIER, Ambassadeur de France au Liban.


PROGRAMME DE LA MISSION


Mercredi 11 septembre

7h15 :

Départ de Roissy Charles-de-Gaulle

 
 

13h45 :

Arrivée à Beyrouth. Accueil par S. Exc. M.Philippe LECOURTIER, Ambassadeur de France au Liban

 
 

14h30 :

Déjeuner

 
 

17h 30 :

Entretien avec le Président du Conseil des ministres, M. Rafic Hariri

 
 

18h30 :

Entretien avec le Président du Parlement, M. Nabih Berri

 
 

20h30 :

Dîner offert par M. l'Ambassadeur à la Résidence des Pins en l'honneur de la délégation sénatoriale

Jeudi 12 septembre

9h30 :

Départ pour Dimane, résidence d'été du Patriarche maronite

 

11h45 :

Entretien avec le Patriarche maronite, Monseigneur Sfeir, suivi d'un déjeuner

 

14h30 :

Visite du site des Cèdres

 

17h30 :

Entretien avec M. Walid Joumblatt, Président du parti socialiste progressif

 

18h30 :

Entretien avec les Conseillers du commerce extérieur

 

20h30 :

Dîner au restaurant Al-Boustan à l'invitation de M. Fouad Al-Khazen

Vendredi 13 septembre

9h :

Entretien avec Cheikh Abdel Amir KABALAN, Vice-Président du Conseil Supérieur Chiite

 

10h30 :

Entretien avec Cheikh Kabbani, mufti de la République

 

11h45 :

Entretien avec M. Nassib Lahoud, député et Président du Mouvement pour le Renouveau démocratique, ainsi qu'avec d'autres représentants de ce Mouvement

 

13h :

Entretien avec M. Michel Murr, Président du groupe d'amitié Liban-France, suivi d'un déjeuner dans sa résidence de Rabieh

 

21h :

Dîner offert par M. Michel PIPELIER, Consul général, en l'honneur de la délégation sénatoriale

Samedi 14 septembre


11h30 :

Entretien avec le Président de la République, M. Emile Lahoud

 

13h00 :

Déjeuner de travail à la Résidence des Pins avec S. Exc. M. Philippe LECOURTIER

 

15h40 :

Départ de l'aéroport de Beyrouth

 

19h20 :

Arrivée à Roissy Charles de Gaulle

INTRODUCTION


« Tout ce qui concerne le Liban nous concerne ». Cette formule du Président Jacques CHIRAC, notre délégation l'a elle-même ressentie, vécue à l'occasion de la mission qu'elle a effectuée dans ce pays en septembre dernier.

Heureuse de fouler une nouvelle fois la terre libanaise, notre délégation est toutefois rentrée en France sans excès d'optimisme. Depuis 1998, date de sa dernière mission, la situation s'était dégradée sur tous les plans : international et régional -avec l'épée de Damoclès d'une éventuelle guerre en Irak, sur fond de fortes tensions au Proche-Orient -, mais aussi interne au Liban, avec un paysage politique confus et conflictuel et une économie au bord du gouffre.

Pour tout dire, notre délégation est rentrée à Paris avec le sentiment que le pays était à la croisée des chemins. Il pouvait s'enfoncer dans la crise ou, face à l'urgence et avec l'aide de la communauté internationale - au premier rang la France -, rebondir et repartir sur des bases saines.

Comme toujours au Liban, et c'est aussi ce qui nous y fascine, c'est la seconde option qui semble s'affirmer.

Depuis cette visite de septembre, deux événements forts ont marqué la vie libanaise, permettant un vrai regain de confiance : le réel succès du 9 ème Sommet de la francophonie organisé à Beyrouth en octobre dernier et la réussite de la conférence Paris II (en novembre), qui devrait permettre au Liban de sortir du piège financier dans lequel il se trouvait (( * )1) .

En rentrant à Paris, nous avions quelques lueurs d'espoir. Aujourd'hui, nous avons de réelles raisons de croire que les atouts sont à nouveau maîtres dans le jeu libanais. Ce jeu est dans les mains de nos amis libanais. A eux, dans l'unité et la responsabilité, de faire en sorte que cette confiance retrouvée s'inscrive dans la durée et qu'ils puissent vivre dans la sérénité, la prospérité et la paix à laquelle ils aspirent.

I. UNE SITUATION POLITIQUE TRÈS TENDUE

En 1998 , année du dernier déplacement d'une délégation de notre groupe interparlementaire au Liban, la situation dans ce pays nous avait semblé relativement apaisée :

- Sur le plan intérieur, les accords de Taëf (d'octobre 1989) étaient progressivement appliqués, marquant la fin de quinze années de guerre civile ; les élections législatives de 1996 s'étaient déroulées dans des conditions relativement satisfaisantes, de même que les élections municipales du printemps 1998 (les premières depuis 1963), et la perspective d'élections municipales à l'automne 2000, illustraient un retour plus affirmé de l'état de droit et du fonctionnement normal d'une démocratie.

Une certaine restauration de l'autorité de l'État, accompagnée d'une réunification de l'armée et d'une restructuration de l'administration, incitaient à l'optimisme.

- De même, la situation régionale semblait évoluer de façon très positive, le gouvernement israélien ayant annoncé officiellement qu'Israël reconnaissait - bien que sous conditions - la résolution 425 du Conseil de sécurité de l'ONU (1) , alors que les forces armées israéliennes occupaient, depuis 1985, une "zone de sécurité" s'étendant sur 800 km 2 dans le sud du Liban.

Certes, des "points noirs" subsistaient et la délégation avait, dans le rapport qu'elle avait présenté au retour, évoqué les "contrastes et lumières" qui permettaient alors de décrire la situation nuancée du pays.

Par comparaison, la situation politique semble aujourd'hui beaucoup plus tendue, du fait notamment de l'exacerbation des rivalités internes, mais aussi en raison d'un contexte régional très préoccupant.

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(1) La résolution 425 du Conseil de sécurité de l'ONU demandait un retrait unilatéral et sans conditions des troupes israéliennes du Sud-Liban.

A. LES RIVALITÉS S'EXACERBENT ET LES DIVISIONS SE CREUSENT

1. Une organisation confessionnelle des pouvoirs fragile

Le "Pacte national de 1943" avait organisé la répartition des institutions politiques sur une base confessionnelle : Président de la République maronite (Président LAHOUD), Premier ministre sunnite (M. Rafic HARIRI) et Président du Parlement chiite (M. Nabih BERRY). Si les accords de Taëf ont maintenu cette organisation, ils en ont toutefois modifié l'équilibre, en particulier en réduisant les pouvoirs du Président de la République au profit du Premier ministre.

Dans les faits, les relations entre ces trois autorités sont délicates et assez conflictuelles depuis deux ans, marquées par des rivalités pour lesquelles les facteurs d'ordre personnel et confessionnel occupent sans doute une place significative, mais auxquelles la plus ou moins grande allégeance au voisin syrien n'est pas étrangère.

Ces divisions de la classe politique libanaise servent en réalité la Syrie, qui continue à se poser en arbitre des différends libanais.

Ces différends - qui ne facilitent pas la prise de décision ni la poursuite des réformes - s'expriment sur des dossiers très concrets (tel que celui de la privatisation de la téléphonie mobile).

Ces derniers temps, face à l'ampleur des difficultés (économiques et financières, situation internationale ...), ces rivalités se sont toutefois quelque peu apaisées. Pour combien de temps cependant ?

De façon plus générale, il est vrai que le confessionnalisme fait partie de l'identité libanaise et permet au peuple libanais d'être représenté dans la diversité de ses croyances. Il garantit aussi à chaque confession que les évolutions démographiques ne mettront pas en péril sa représentation au sein des institutions et, théoriquement, sa sécurité.

Mais, décliné à tous les niveaux de l'organisation de l'État, la question se pose néanmoins de savoir s'il ne freine pas la réforme de l'État et de son administration. Le serpent se mord malheureusement la queue : le déficit démocratique entraîne un développement du confessionnalisme et, par là même, du clanisme et du clientélisme.

2. Des pressions accentuées sur l'opposition chrétienne

Depuis deux ans , différentes affaires politiques viennent régulièrement illustrer la dégradation des relations entre le pouvoir et l'opposition chrétienne. On peut citer en particulier :

- en août 2001, des rafles de chrétiens ;

- en 2002, le procès des membres des forces libanaises ;

- en septembre 2002, la fermeture de la chaîne de télévision MTV - détenue par M. Gabriel MURR - et l'invalidation de l'élection de ce dernier aux élections législatives dans le Metn. Notre délégation a été témoin de ce débat politico-juridique, sur fond de guerre fratricide au sein de la famille MURR (ainsi que nous l'expliciterons ci-après).

Il ne paraît pas excessif de dire que l'opposition chrétienne se sent agressée, voire menacée. Il est vrai que les dissensions au sein des chrétiens et la diversité des thèses qu'ils défendent compliquent leur situation et les rend sans doute plus vulnérables.

3. Une communauté chrétienne affaiblie par ses divisions internes

§ On peut aussi parler d'antagonismes au sein du camp chrétien . Les divisions se traduisent par une multiplication des partis et un développement du clientélisme.

Si personne ne semble réellement contester que les destins du Liban et de la Syrie sont liés, l'ampleur de la présence syrienne et surtout ses modalités le sont par une partie des chrétiens. Le redéploiement très partiel de l'armée syrienne, pourtant prévu par les accords de Taëf, est particulièrement critiqué. Les avis sont partagés sur la nécessité même de cette présence militaire (de l'ordre de 30.000 soldats syriens).

En avril 2001, a été créé le rassemblement de Kornet Chetwane, qui réclame notamment la stricte application des accords de Taëf. D'autres, tels le Président LAHOUD ou M. Michel MURR, député grec-orthodoxe, ancien ministre de l'intérieur - auquel son fils, Elias MURR, a "succédé" à ce portefeuille - défendent la présence syrienne comme seule à même de garantir la sécurité, voire l'unité, du Liban.

Mais c'est surtout l'intervention permanente de la Syrie dans les affaires intérieures libanaises qui est contestée.

Si personne ne prône une rupture quelconque avec la Syrie, l'opposition souhaite quant à elle un rééquilibrage des relations entre les deux pays.

§ Le chef des Druzes, M. Walid JOUMBLATT, qui s'est rapproché depuis deux ans des chrétiens, voit quant à lui dans la présence syrienne un facteur de stabilité pour le Liban.

4. Des libertés publiques menacées

§ Ces tensions et divisions ont connu une phase particulièrement aiguë avec " l'affaire MTV ", en septembre et octobre 2002. Il a été reproché au vainqueur des élections du Metn, M. Gabriel MURR, d'avoir influencé le vote des électeurs, en utilisant la chaîne de télévision MTV dont il est propriétaire. Celle-ci s'est montrée très critique à l'égard du pouvoir, en particulier du Président de la République, et de la Syrie. MTV aurait ainsi enfreint la loi et le Tribunal des Imprimés a décidé sa fermeture, décision confirmée en appel par la cour de Cassation. Simple décision de justice, prise en application de la loi, ou décision politique, comme l'a qualifiée le ministre de l'Information ? La situation, comme souvent au Liban, est complexe.

Toujours est-il que l'opposition chrétienne a vécu la fermeture de cette chaîne de télévision, ainsi que l'invalidation de l'élection du Metn (2) - pour laquelle M. Gabriel MURR s'était vu opposer la candidature de sa nièce, fille de M. Michel MURR - comme une répression difficilement supportable des libertés.

Dans un communiqué, l'organisation "Reporters sans frontières" a exprimé sa "profonde préoccupation quant à la fermeture de la chaîne de télévision MTV, qui est le principal outil médiatique de l'opposition (...)" . Elle a également fustigé "la violence exercée par les forces de sécurité libanaises envers les employés de la chaîne lors de l'application de la décision judiciaire de fermeture." (1)

§ Plus généralement, il semble que les services secrets Libanais soient de plus en plus actifs et un certain nombre de Libanais paraissent préoccupés par la dégradation du respect des libertés publiques.

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(1) Cité par le journal An Nahar du 13 septembre 2002.

(2) Un nouveau député (M. MOUKHEIBR) a été élu.

5. Une bouffée d'oxygène démocratique : le Mouvement pour le Renouveau Démocratique

Créé en 2001 sous l'impulsion du député M. Nassib LAHOUD, le Mouvement pour le Renouveau Démocratique veut rassembler autour d'idées politiques plutôt que de confessions. Ce nouveau parti se fixe pour priorité la défense des valeurs démocratiques et des libertés publiques.

Il juge nécessaire l'élargissement progressif de la "composante citoyenne" de chaque libanais, dans le respect de son appartenance confessionnelle et des traditions libanaises. Il prône à cet effet l'accroissement de l'espace non confessionnel et le développement d'un système de "bonne gouvernance" dans les domaines politique, économique et social. Ses réflexions portent également largement sur l'économie libanaise.

S'agissant de la Syrie, s'il est convaincu de la nécessité d'entretenir de bonnes relations avec elle, ce sont ses interventions dans la politique intérieure libanaise qui, selon lui, posent problème.

Notre délégation a pu rencontrer un certain nombre de représentants de ce parti, de confessions variées, et avoir un échange très franc et fructueux avec eux.

S'ils peuvent se prévaloir d'un discours moderne, équilibré, argumenté, dépassionné et de leur intégrité, leur audience est cependant encore limitée.

6. L'appel vigoureux du synode des évêques maronites

Dans le contexte difficile décrit précédemment, le 4 septembre 2002 , Leurs Excellences les évêques maronites ont décidé, pour la troisième année consécutive, de rendre public un nouvel Appel (joint en annexe au présent rapport).

Ils y regrettent en particulier l'application au Liban, surtout d'ailleurs parmi les chrétiens, du vieux dicton : "diviser pour régner" .

Ils y dénoncent également les conséquences d'une stratégie de "bâton et carotte" ou de "promesses et menaces" qui favoriserait le développement de la corruption au sein de l'administration, la dilapidation des fonds publics, la mise de la justice "au service des intérêts des politiciens influents" , et la "perte du sens de la responsabilité".

Ce troisième Appel réitère le souhait de l'Église maronite "que les relations entre le Liban et la Syrie soient assainies en appliquant les accords de Taëf, ainsi que les résolutions des Nations-Unies" . Il fait également part de ses "appréhensions et craintes" face à la situation régionale et aux risques d'une guerre en Irak.

B. UNE SITUATION RÉGIONALE TRÈS PRÉOCCUPANTE

1. Un paysage régional assombri par le conflit israélo-palestinien

a) L'aggravation de la "question palestinienne", liée à l'enlisement du processus de paix

Il est évident que la situation au Moyen-Orient exacerbe les tensions internes au Liban.

Depuis notre mission de 1998, de grands pas en avant ont pourtant été franchis, en particulier après le retrait des troupes israéliennes du Sud-Liban (en mai 2000) - à l'exception notable d'une enclave : la zone des fermes de Chebaa - et la poursuite du dialogue entre Israéliens et Palestiniens, sous les encouragements vigilants des États-Unis. La paix entre Israël et le Liban n'a cependant pas été conclue et elle ne pourra sans doute l'être que dans le cadre d'une négociation de paix globale dans la région, dont l'échéance paraît s'éloigner toujours un peu plus ...

Dans ce contexte, le Liban apparaît un peu comme "l'otage" d'un processus de négociations qui le dépasse et qu'il subit plus qu'il ne l'influence.

Avec la dégradation de la situation dans les territoires palestiniens, s'éloigne aussi la perspective d'un règlement de la "question palestinienne" . Comme en 1998, voire plus encore, nos interlocuteurs ont exprimé leurs préoccupations liées à la présence de très nombreux Palestiniens sur le territoire libanais : environ 300.000, davantage d'après certains (pour une population de 4 millions d'habitants, sans compter la présence massive de Syriens, au nombre de 300 à 400.000). Or, la situation dans les camps palestiniens s'est sensiblement détériorée . Ceux-ci abritent un certain nombre d'activistes armés, auteurs d'incidents, de crimes (mort de soldats libanais fin 1999 par exemple) et facteurs de risques, y compris ceux liés au terrorisme international.

Un certain consensus semble exister au Liban sur le refus de l'implantation définitive des Palestiniens sur le territoire. Comment le pays pourrait-il d'ailleurs intégrer 300.000 personnes de confession chiite sans bouleverser son équilibre politique ? Les autorités libanaises sont confrontées à un arbitrage délicat : il leur faut garantir la sécurité sur leur territoire, éviter que les camps ne deviennent un refuge - voire un terrain d'entraînement - commode pour des terroristes, sans pour autant trahir le lien de solidarité qui les unit aux autres pays arabes. Ceci rend difficile le désarmement des Palestiniens, alors qu'un sommet arabe l'a autorisé afin qu'ils puissent se défendre en cas d'attaque par Israël. Difficile jeu d'équilibrisme, Sabra et Chattila étant encore dans les mémoires ...

b) La cristallisation des tensions autour de l'accès aux eaux du Ouazzani (1)

L'accès à l'eau, bien rare dans cette région du monde, constitue également l'un des enjeux d'importance dans les relations entre le Liban et Israël. Le différend qui les oppose sur le pompage par les Libanais d'une partie des eaux de la source Ouazzani (1) , au sud de leur territoire, était à son comble en septembre et octobre derniers.

Nombre des personnalités que notre délégation a rencontrées ont évoqué ce dossier épineux. Les Libanais reprochent aux Israéliens de leur contester leurs droits sur les eaux du Ouazzani, après avoir exploité celles-ci pendant la période de l'occupation du Sud-Liban. Bien qu'Israël ait déclaré en faire un "casus belli" , les autorités libanaises ont poursuivi la mise en oeuvre d'un projet d'adduction d'eau au profit de 36 villages du Sud-Liban manquant cruellement d'eau, projet portant sur quelques mètres cubes d'eau (sur environ 150 m 3 au total).

Les gouvernements français et américain ont appelé les deux parties à la retenue et envoyé des experts. Des rapports, non publics, ont été commis par ces experts, français comme américains, tandis qu'un rapport pouvait être prochainement rendu public par la Commission européenne qui travaille à l'élaboration d'un plan prospectif de développement de la zone concernée.

2. Le spectre de la guerre en Irak

Bien évidemment, nos interlocuteurs ont souvent évoqué la menace d'une guerre en Irak et les risques qu'elle ferait peser sur la situation géopolitique dans la région.

Chiites, sunnites et kurdes continueraient-ils à cohabiter en bonne intelligence en Syrie, Turquie, Iran, voire même en Arabie saoudite (pour les deux premiers) ? Ils craignent que la carte géopolitique de la région ne vole en éclat, avec l'accord Sykes-Picot, et n'entraîne une recomposition des États. En outre, ils ne croient pas qu'une telle guerre puisse en aucune façon résoudre le problème du terrorisme.

Les autorités religieuses musulmanes rencontrées, en particulier le représentant des sunnites (cheikh Kabbani), ont clairement exprimé qu'une offensive contre l'Irak serait comprise, dans le monde entier, comme une offensive contre la Palestine, l'Islam et les Arabes.

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(1) Le fleuve Ouazzani est l'un des affluents du Hasbani (Liban-Sud) ; il prend sa source sur le territoire libanais et se jette dans le Hasbani, toujours sur ce territoire. Le Hasbani coule ensuite en Israël et se jette dans le lac de Tibériade, qui lui-même alimente le Jourdain.

Si aucun ne défend le bilan du Président irakien, tous se félicitent de la position française et la soutiennent. Les Libanais, comme les Syriens, n'ont pas envie d'avoir le feu à leur porte ... Le Président du Parlement libanais a résumé leur position d'une expression forte, bien qu'imagée : "les Américains voient avec un seul oeil !" .

II. UNE ÉCONOMIE QUI A FRÔLÉ LA FAILLITE

Fin 2002, la situation économique, financière et sociale libanaise était plus que préoccupante et la conférence Paris II, très attendue. Si celle-ci est incontestablement une réussite, elle n'affranchit cependant pas le Liban de nécessaires réformes structurelles.

A. LA DÉGRADATION DE LA SITUATION ÉCONOMIQUE, FINANCIÈRE ET SOCIALE

En 1991, l'économie libanaise était caractérisée par une chute de l'investissement privé, un effondrement du secteur public et une inflation galopante (de 70 %).

Les années qui ont suivi la guerre civile ont enregistré une croissance soutenue, tirée notamment par la reconstruction (le secteur immobilier en particulier) et le secteur bancaire (qui a financé la dette publique). En sept ans, le PIB par tête a été multiplié par 4 (à 4000 $) et l'inflation ramenée à moins de 10 %. A partir de 1997 cependant, les principaux indicateurs économiques se sont dégradés, même si quelques signes sont encourageants.

1. Des indicateurs préoccupants ...

§ Le taux de croissance du PIB a chuté : 6,5 % en 1995, 2 % en 1997 et 1998, 1 % en 2001.

§ Surtout, le niveau de la dette s'élevait à près de 180 % du PIB fin avril 2002 et le service de la dette absorbait 93 % des recettes de l'État (contre 88 % en 2000), rendant problématique le financement de l'État en 2002. Les banques libanaises, déjà exposées à hauteur de 4 fois leurs fonds propres se sont en effet montrées plus circonspectes.

La dette extérieure publique a été multipliée par 15 en à peine dix ans.

§ Les représentants des entreprises françaises présentes au Liban, rencontrés par notre délégation, ont exprimé les préoccupations du monde économique face au poids de cette dette, au niveau très élevé des taux d'intérêt - qui pénalisent les investissements et créent une économie de rentiers -, à la fragilité du secteur bancaire libanais dans ce contexte, au manque de visibilité pour les entreprises et aux réticences des Libanais eux-mêmes à investir dans leur pays ...

§ Cette conjoncture a bien sûr des conséquences au plan social . Le taux de chômage (estimé à 25 % environ) augmente, celui des jeunes en particulier, incitant ces derniers à émigrer. Cette situation exacerbe par ailleurs les ressentiments à l'égard des Syriens : sont visés les 300.000 travailleurs syriens qui déséquilibrent le marché de l'emploi et les importations de produits syriens à bas prix qui viennent concurrencer les produits libanais.

Au total, la fracture sociale s'aggrave.

2. ...en dépit de quelques signes encourageants

§ Un certain nombre de points positifs sont toutefois venus éclairer quelque peu cette sombre situation :

- l'introduction de la TVA , en février 2002, a constitué un succès ;

- le Liban a bénéficié de capitaux arabes : par le biais du tourisme, d'une part, par celui des investissements, d'autre part ;

- les tensions sur le marché des changes se sont un peu atténuées au cours de l'été 2002. Étant donné le déficit structurel très important de la balance des paiements, la question de l'opportunité ou non d'une dévaluation de la livre libanaise a été débattue, dans un contexte d'économie fortement dollarisée ;

- un accord d'association entre le Liban et l'Union européenne a été signé le 17 juin 2002 et le Liban a demandé à adhérer à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l'objectif étant de rapprocher la législation libanaise des standards commerciaux internationaux ;

- en avril 2001, le Parlement libanais a adopté une loi visant à lutter contre le blanchiment d'argent et le 21 juin 2002, le GAFI (Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux) a supprimé le Liban de la liste des pays non coopératifs.

§ Le Premier ministre libanais, M. Rafic HARIRI, souhaite que son gouvernement mette en oeuvre un programme de nature à maîtriser la spirale de la dette et à assainir la situation financière du Liban. Ce programme s'articule autour de quatre axes :

- la diminution du train de vie de l'État ;

- l'amélioration de la collecte des impôts et un accroissement de la pression fiscale ;

- la restructuration de la dette publique libanaise détenue par la banque centrale du Liban et le secteur bancaire, la baisse des taux d'intérêt pouvant permettre une économie substantielle sur le service de la dette en 2003 ;

- un programme de privatisation ambitieux.

B. LA CONFÉRENCE PARIS II DU 23 NOVEMBRE 2002 : UN SUCCÈS INDÉNIABLE POUR LA RESTAURATION DE LA CONFIANCE DANS L'ÉCONOMIE LIBANAISE

La Conférence Paris II était très attendue par tous nos interlocuteurs libanais, qui comptaient beaucoup sur la France pour mobiliser pays amis et institutions internationales afin de sauver leur pays de la faillite qui le guettait.

Tenue le 23 novembre 2002 sous la présidence du Président de la République, M. Jacques CHIRAC, Paris II peut être qualifiée de franc succès. La Conférence a réuni les responsables de 23 États et institutions internationales. De nombreux chefs de gouvernement y ont participé en personne, de même que le Président de la Commission européenne, les représentants du FMI, de la Banque européenne d'investissement (BEI) et de quatre fonds arabes.

17 délégations ont proposé une contribution financière dans le but de soutenir la mise en oeuvre du programme du gouvernement libanais. Ces contributions, dont le total atteint de 4 285 à 4 420 millions d'euros - dont 500 millions d'euros par la France -, se répartissent comme suit :

Contributions annoncées lors de la conférence Paris II
sur le soutien au programme de réformes économiques du Liban

En millions d'euros

 

Financement

Projets

Arabie Saoudite

700

 

Bahrein

200

 

Belgique

35 à 70

 

Canada

100 à 200

 

Émirats Arabes Unis

300

 

France

500

 

Italie

200

 

Koweit

300

 

Malaisie

300

 

Oman

50

 

Qatar

200

 

Banque mondiale

 

200

Union européenne

(Commission et Présidence)

20

80

Banque Européenne
d'Investissement

 

350

Fonds arabe de développement économique et social

 

500

Fonds koweitien pour le développement

 

150

Fonds monétaire arabe

100

 

TOTAL

3005 à 3140

1280

C. LA CONFIANCE DES MILIEUX ÉCONOMIQUES SEMBLE REVENUE, MAIS ELLE RESTE SUBORDONNÉE À LA MISE EN oeUVRE DE PROFONDES RÉFORMES STRUCTURELLES

L'objectif du gouvernement de M. HARIRI est d'arriver, à l'horizon 2007, à la fois à un équilibre budgétaire et à une baisse significative de la dette publique. Les contributions financières annoncées à Paris II devraient permettre d'accélérer la réduction de la charge de la dette libanaise. Ceci est de nature à créer un climat de confiance à même d'entraîner une baisse des taux d'intérêt.

Paris II a d'ailleurs rapidement commencé à porter ses fruits grâce à une chute des taux d'intérêt, à une reconstitution des réserves de la banque centrale libanaise et à une abondance des liquidités sur le marché. Par un accord intervenu le 16 décembre dernier entre la Banque centrale libanaise et l'association des banques libanaises, tous les établissements financiers libanais sont convenus de contribuer à l'effort de Paris II en souscrivant des bons du trésor à hauteur de 10 % de leurs dépôts, évalués à 42 milliards de dollars. Les contributions annoncées à Paris se mettent en place progressivement : la Malaisie, les Émirats Arabes Unis, Koweït et Oman ont émis leurs contributions pour un total de 950 millions de dollars. Le concours français (prêt de 500 millions de dollars) a été versé le 28 février dernier.

Il faut donc se féliciter du soutien apporté par la communauté internationale et du succès de l'intermédiation française en faveur de nos amis libanais. Le "choc de confiance" attendu, et donc le succès réel de cette opération, dépendront cependant essentiellement du volontarisme avec lequel les autorités libanaises mettront en oeuvre les réformes et de la solidarité dont elles sauront faire preuve pour sortir durablement leur pays de l'adversité.

Le Liban s'est engagé dans un programme macro-économique d'assainissement de la situation financière du pays articulé autour de deux piliers principaux :

- budgétaire et fiscal (le budget 2003 - adopté le 28 février - a ramené le déficit à 8 % du PIB, contre 14 % dans la loi de finances pour 2002) ;

- politique de privatisations.

L'objectif est de parvenir à l'horizon 2007 à la fois à un équilibre budgétaire et à une baisse significative de la dette publique. S'agissant de la croissance, pour le gouverneur de la Banque centrale du Liban, l'année 2003 devrait être celle de l'ajustement, avant une reprise en 2004.

L'État libanais doit cependant continuer à renforcer sa crédibilité, que seules des réformes structurelles courageuses pourront restaurer sur le long terme.

Le programme de privatisations annoncé ne doit pas être davantage différé. Ainsi, d'aucuns avancent que si EDL (Électricité du Liban) avait été privatisée assez tôt, les recettes issues de cette opération auraient couvert la dette de 2002, tandis qu'une privatisation fin 2002 n'aurait payé que les intérêts de cette dette ...

Ne conviendrait-il pas d'aller au-delà des objectifs affichés, par exemple en réformant la fiscalité libanaise (la répartition entre impôts directs et indirects est très déséquilibrée, l'essentiel de l'effort portant sur les seconds) et, plus généralement, en mettant en oeuvre un système de "bonne gouvernance" de l'État ? De ce point de vue, la récente introduction d'une taxe de 5 % sur les intérêts des dépôts va dans le bon sens.

Le retournement de confiance tant attendu s'est produit. Le Président CHIRAC a parlé d' "engagements réciproques" et la communauté internationale a souhaité que les autorités libanaises poursuivent et approfondissent leurs relations avec le FMI, afin d'aboutir rapidement à un engagement financier significatif des institutions financières internationales

III. DES RELATIONS BILATÉRALES PLUS QUE JAMAIS VIVANTES

Le caractère privilégié des relations qu'entretiennent traditionnellement la France et le Liban connaît une traduction concrète dans de nombreux domaines :

- les relations politiques sont particulièrement fécondes ;

- les relations de coopération et d'action culturelles, dynamiques, sont aussi stimulées par le Sommet de la francophonie ;

- la politique française de développement au Liban traduit le haut niveau d'engagement de l'État français en faveur du Liban ;

- quant aux échanges économiques, financiers et commerciaux, ils montrent globalement le maintien de l'intérêt des entreprises françaises.

A. UN SOUTIEN POLITIQUE JAMAIS DÉMENTI ET PARTICULIÈREMENT FÉCOND

La Conférence Paris II précitée en est une illustration. Mais la défense continue par la France de la souveraineté libanaise, l'approfondissement des relations interparlementaires entre nos deux pays et l'organisation à Beyrouth du Sommet de la francophonie, en octobre dernier, constituent autant d'autres exemples probants de la réalité de ce soutien politique.

1. La défense de la souveraineté du Liban

Les rencontres bilatérales de haut niveau se sont intensifiées depuis quelques années et le Président de la République s'est lui-même rendu quatre fois au Liban depuis avril 1996.

La position française repose sur l'affirmation constante de la souveraineté et de l'indépendance du Liban, pays auquel nous sommes historiquement, culturellement, humainement attachés. Sa stabilité, dans le respect et la richesse de sa diversité, nous paraît essentielle. Pont précieux entre l'Orient et l'Occident, le Liban doit continuer à témoigner, à travers le vivant exemple de son modèle original, en faveur de la démocratie et de la tolérance.

La France, inlassablement, rappelle tant à ses interlocuteurs libanais eux-mêmes qu'au sein des instances internationales, les conditions de la souveraineté du Liban :

- le rétablissement de la pleine autorité de l'État libanais sur l'ensemble de la zone libérée dans le Sud du territoire à la suite du retrait des troupes israéliennes en mai 2000 ;

- le règlement global de la situation au Proche-Orient (incluant les volets libanais et syrien), en vue d'une paix juste, globale et durable ;

- s'agissant de la difficile question des réfugiés palestiniens au Liban - le refus de les voir s'implanter définitivement faisant l'objet d'un rare consensus, ainsi qu'il a été relevé précédemment -, elle devra faire l'objet d'un traitement particulier de nature à garantir la cohésion du Liban, tout en tenant compte du sort des populations concernées.

2. L'approfondissement des relations interparlementaires

La page de la guerre civile enfin tournée, et la création d'un groupe homologue au Parlement libanais à la suite des élections législatives de 1996, ont permis l'organisation régulière de missions à Beyrouth, soit dans le cadre de relations strictement politiques (avril 1998 et septembre 2002), soit dans le cadre d'opérations concrètes de coopération (février 2000 et février 2003, en partenariat avec l'Association des Collectivités locales pour le Liban, présidée par notre collègue Gérard LARCHER, vice-Président de notre groupe interparlementaire : bibliobus, échanges entre écoles françaises et écoles libanaises ...).

Nous nous félicitons, par ailleurs, de la signature par le Président Christian PONCELET et le Président Nabih BERRY, le 10 octobre dernier, d'un programme de coopération entre nos deux assemblées .

Cet accord s'inscrit dans la phase 2 du programme d'appui au Parlement libanais mis en place en 1999 par le PNUD (programme des Nations-unies pour le développement).

La coopération engagée avec le Sénat poursuit deux objectifs : le renforcement des capacités et des compétences administratives, d'une part, le développement de la fonction législative, d'autre part.

Dans ce cadre, le Sénat mène des actions de formation au bénéfice de personnels de l'administration de l'Assemblée nationale du Liban, dans les cinq domaines suivants :

- le processus législatif,

- le vote et le contrôle de l'exécution du budget de la Nation,

- les études, recherches, renseignements et documentation,

- les relations interparlementaires,

- l'organisation et le fonctionnement de l'administration parlementaire.

Au total, cinq ou six groupes de fonctionnaires libanais francophones suivront ces formations.

Par ailleurs, des députés libanais ont consacré la semaine du 24 février dernier à une visite de travail au Sénat afin d'approfondir leur connaissance du fonctionnement de notre institution, et le Bureau de notre groupe a eu le plaisir de les recevoir pour un déjeuner de travail très intéressant.

M. Adrien GOUTEYRON, Président de notre groupe interparlementaire, a également participé à un séminaire organisé à Beyrouth, du 4 au 6 février dernier, par l'Assemblée nationale du Liban et le Programme des Nations-unies pour le développement (PNUD), dans le cadre du « Projet pour la bonne gouvernance dans les pays arabes » (POGAR-ONU).

Ce séminaire, qui réunissait des représentants de onze parlements arabes, avait pour thème de réflexion « la procédure d'élaboration des lois et la qualité rédactionnelle des textes ». Ce séjour a également permis à M. GOUTEYRON de dresser le bilan du programme de coopération technique engagé par l'Assemblée nationale libanaise, le Sénat français et le Bureau du PNUD au Liban et de déterminer les futures activités de ce programme.

Il a, par ailleurs, été reçu par M. Nabih BERRI, président de l'Assemblée nationale libanaise, M. Riyad SALAMÉ, gouverneur de la banque centrale du Liban, et plusieurs dirigeants politiques libanais. Il a enfin effectué un déplacement à Tripoli, où il a rencontré M. Samir CHAARANI, maire de la ville, puis a dialogué avec les étudiants de l'université.

B - LE SOMMET DE LA FRANCOPHONIE : POINT D'ORGUE DE LA COOPÉRATION ET DE L'ACTION CULTURELLES AU LIBAN.

L'organisation du 9 ème Sommet de la francophonie à Beyrouth est un signe politique et d'amitié fort manifestant le soutien de la France dans une période difficile. Elle révèle aussi la place de la langue et de la culture françaises au Liban, entretenue par notre présence culturelle active.

1. Le sommet de la francophonie : un franc succès.

Repoussée d'une année, après les événements du 11 septembre 2001, l'organisation à Beyrouth du 9 ème Sommet de la francophonie a constitué en 2002 à la fois un point de consensus et une source d'espoir dans un contexte globalement difficile. Nos interlocuteurs ont confirmé à la délégation à quel point ce Sommet était attendu.

Tenu du 18 au 20 octobre dernier, l'événement a été à la hauteur de ces attentes et notre groupe interparlementaire se réjouit tant du succès qu'il a rencontré que de ses retombées positives pour le Liban, pour l'image et le rayonnement culturel de notre pays au Liban ainsi que pour la francophonie. Il faut aussi saluer la remarquable organisation par les Libanais de ce premier Sommet francophone en terre arabe.

• Beyrouth : un choix naturel

En 1914 déjà, Maurice BARRES constate sur place que « les Libanais ont un amour pour la langue française que beaucoup d'entre eux parlent avec une élégance bien rare chez les étrangers ».

Pour Andrée CHÉDID, « à la différence du Suisse ou du Belge, le Libanais est bilingue plus par goût que par nécessité ». Portant son regard sur la littérature francophone au Liban, un ancien conseiller culturel de l'Ambassade du Liban à Paris, Abdallah NAARRAN, ajoute que certains écrivains libanais choisissent de s'exprimer en français parce « au-delà de leurs difficultés d'hier, se sont toujours fait une certaine idée de la liberté, de la fraternité et de l'universalité, concepts véhiculés par la France qui a réussi, la première, à en faire, pour elle et pour les autres, des vertus, voire une raison d'être. Tel est et tel sera, en dépit des misères de l'histoire, le destin du Liban ».

Outre qu'il aura permis de rappeler la place ancienne et éminente du Liban dans la famille francophone, ce Sommet aura démontré le souhait de cette famille de partager notre langue et, au-delà, des valeurs. Comme le souligne Charles ZORGBIBE, président du comité éditorial de la revue Géopolitique africaine : « le lien culturel, noué à l'origine entre ses membres, est devenu politique ».

• Une francophonie plus politique

L'orientation plus politique donnée au mouvement francophone par le Sommet de Hanoï en 1997 a été pleinement confirmée à l'occasion de ce 9 ème Sommet. A cet égard, le choix de Beyrouth n'était pas anodin : les prises de position sur la situation au Proche-Orient ont permis d'affirmer à la fois la nécessaire intégrité territoriale et souveraineté du Liban, le droit d'Israël à des frontières reconnues ainsi que celui des Palestiniens à un État et à un pays.

Les débats ont également largement porté sur la crise ivoirienne, le terrorisme et bien sûr l'Irak. Sur ce dernier point, la déclaration adoptée à Beyrouth rappelle « la primauté du droit international et le rôle primordial de l'ONU, en appelle à la responsabilité collective pour résoudre la crise et à l'Irak pour respecter pleinement toutes ses obligations, relève avec satisfaction que l'Irak a accepté officiellement la reprise inconditionnelle des inspections ».

• Pour une convention sur la diversité culturelle

Le choix du thème du Sommet n'était pas anodin non plus : le dialogue des cultures, en particulier le dialogue entre les mondes francophone et arabophone.

Le message du Président de la République, M. Jacques CHIRAC, sur cette terre libanaise était particulièrement porteur de sens :

« La francophonie est par vocation au service du dialogue et de la diversité des cultures. La mondialisation promet aux hommes plus de liberté et de progrès. Nous y voyons aussi le risque de l'uniformisation et une menace pour nos identités. Mais le repli sur soi mènerait au déclin aussi sûrement que le renoncement à soi. L'un des défis du monde fluide où nous vivons désormais est d'apprendre à mieux être soi-même pour mieux accueillir l'autre. Nous désamorcerons ainsi ce qu'Amin MAALOUF appelle « les identités meurtrières ».

Les chefs d'État et de gouvernement présents ont souhaité obtenir l'adoption par l'UNESCO d'une convention internationale sur la diversité culturelle, « consacrant le droit des États et des gouvernements à maintenir, établir et développer des politiques de soutien à la culture et à la diversité culturelle » dont « l'objet doit être de définir un droit applicable en matière de diversité culturelle ».

Cette convention refuserait donc de laisser réduire les biens et services culturels au rang de simples marchandises. Elle prônerait, au contraire, l'égalité de toutes les cultures et le plurilinguisme. La francophonie veut ainsi peser dans la recherche de moyens de maîtriser la mondialisation.

• Une participation record

Au total, 54 des 55 pays membres associés et observateurs de la Communauté francophone mondiale - qui regroupe près de 600 millions de personnes sur les cinq continents - étaient représentés au Sommet, dont 36 par leur Chef d'État ou de gouvernement.

Cette participation exceptionnelle, dans une capitale libanaise sous très haute surveillance et dans un Proche-Orient en pleine ébullition, est très encourageante, tant pour le Liban que pour la francophonie.

2. Où en est aujourd'hui la langue française au Liban ?

Cet événement donne aussi naturellement l'occasion de faire le point sur la place réelle qu'occupe aujourd'hui la langue française au Liban, son apprentissage, son usage et les enjeux qui lui sont attachés.

Quelle place pour le français au Liban ?

Quelques repères, chiffres et enjeux

 

§ Une progression quantitative du français

 

Le nombre de francophones au Liban est estimé à 1 million.

 

49 % de la population résidente connaît la langue orale tandis que 52,8 % des Libanais adultes résidents connaissent le français écrit et oral à des degrés divers. Les plus importants taux de connaissance du français se rencontrent parmi les tranches jeunes de la population : 63 % (connaissance du français oral) chez les résidents ; 68 % (connaissance du français écrit et oral) chez les Libanais résidents âgés de 15 à 24 ans. Il apparaît ainsi que le français est quantitativement en progression.

 

§ Une progression qualitative du français

 

Le français connaît également une progression qualitative : 26,4 % des Libanais âgés de 15 à 19 ans connaissent moyennement ou bien le français écrit et oral, et 23 % de ceux qui ont entre 20 et 24 ans, contre 19,8 % de l'ensemble des Libanais adultes résidents, avec une supériorité significative de la population féminine.

§ Diversité sociale et confessionnelle des francophones

 

Les meilleurs francophones sont très nombreux parmi ceux qui exercent une profession libérale ou qui sont cadres supérieurs, mais ils sont également majoritaires parmi les cadres moyens et les employés.

 

Si les francophones sont majoritaires au sein des communautés confessionnelles chrétiennes (maronites, grecs-orthodoxes, grecs-catholiques) à la différence des communautés confessionnelles musulmanes, la francophonie de bon niveau augmente dans toutes les communautés entre les 15-19 ans et les 30-49 ans, particulièrement dans la communauté chiite en raison d'une forte communauté libanaise chiite francophone installée en Afrique. Parallèlement, on note une augmentation du taux de francophonie élémentaire dans les communautés musulmanes alors que ce même taux baisse chez les communautés chrétiennes.

 

§ Une progression qui n'est pas nécessairement le résultat d'une politique déterminée

 

La forte avancée de la connaissance écrite et orale du français que l'on peut observer est à rattacher à la généralisation de la scolarisation. Elle ne découle donc pas nécessairement d'une volonté affichée de promouvoir la francophonie.

 

§ Apprentissage et usage du français

 

L'école publique, qui regroupe 44 % des scolarisés, ne donne pas de résultats similaires à ceux enregistrés par les écoles privées en ce qui concerne l'apprentissage du français. Pourtant, la francophonie est, au Liban, avant tout une question d'apprentissage scolaire. De plus, la majorité des bons francophones n'ont en réalité jamais l'occasion d'utiliser le français.

 

Si la connaissance du français est en très net progrès, celle de l'anglais l'est également. Les francophones réels sont trilingues. Le danger réel réside dans le fait que la maîtrise de l'anglais à côté de celle de l'arabe puisse sembler suffisante. Un anglophone ne sera pas un bon francophone alors que l'inverse est vrai.

 

§ Enjeux

 

La population francophone est caractérisée par sa jeunesse . Il apparaît que s'il y a un francophone dans une famille, cela suffit pour que la proportion de l'usage du français dans le cadre familial double d'une génération sur l'autre. Par ailleurs, choisir le français peut être une stratégie pour placer ses enfants dans les meilleurs établissements scolaires.

 

Finalement, il convient de souligner que, chez les francophones réels, il n'y a pas de répartition fonctionnelle des deux langues, arabe et française. Le Liban ne se caractérise pas seulement par le bilinguisme, mais bien par le biculturalisme . Il faut également mettre en avant la spécificité culturelle portée par le français , ainsi que le fait que le français doit être choisi comme langue étrangère puisque cela ne sera pas préjudiciable par la suite à l'apprentissage de l'anglais à un bon niveau.

 

Ces observations montrent également l'importance à donner à l'école et à l'apprentissage scolaire du français, mais aussi à la création d'un environnement francophone qui permette à tous de réinvestir dans la vie quotidienne ce qui a été acquis dans un cadre scolaire. L'enseignement du français au cours des études universitaires est également essentiel. Or, l'enseignement de l'anglais est de plus en plus prépondérant dans les universités libanaises. Si l'on veut que le français soit la langue de la culture mais aussi de l' univers professionnel - afin que l'anglais ne devienne pas l'unique langue des affaires -, il est nécessaire qu'il soit enseigné à tous les stades de l'enseignement, y compris dans les matières scientifiques . Ceci suppose une amélioration de la formation des enseignants eux-mêmes.

 

Un accord de coopération culturelle, scientifique et technique a été signé, en octobre 1993, et notre budget de coopération avec le Liban est le plus important de la région .

Notre présence culturelle et linguistique est prépondérante, mais elle est confrontée au défi du développement rapide de l'anglophonie. L'objectif est donc de la consolider par le biais d'actions fortes, en particulier dans les domaines suivants :

- le renforcement de l'enseignement du français dans le système éducatif libanais ;

- le développement d'un pôle universitaire francophone à vocation régionale ;

- la mise à niveau de notre présence dans le secteur audiovisuel, qui est encore insuffisamment assurée aujourd'hui, ce que la délégation de notre groupe interparlementaire avait déjà relevé en 1998. Les émissions francophones n'occupent que 20 % du temps d'antenne et nous attendons des autorités libanaises qu'elles encouragent davantage le plurilinguisme au travers des canaux audiovisuels.

C - LA COOPERATION TECHNIQUE : UN HAUT NIVEAU D'ENGAGEMENT EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DU LIBAN

Dès la fin de la guerre, la France a eu à coeur de contribuer activement à la reconstruction et au développement du Liban. Rappelons que, outre les accords d'apurement des arriérés de paiements signés en 1992, des mesures financières de soutien actif à la reconstruction du pays ont été décidées en 1995. Cinq protocoles financiers ont été conclus pour un montant total de 200 millions d'euros, dont 80% ont été engagés. L'aide française s'est portée sur des secteurs stratégiques : l'eau (94 millions d'euros), l'électricité (37 millions d'euros), l'aviation civile (15,7 millions d'euros), mais aussi sur une assistance à la remise à niveau des services de l'État comme le ministère des Finances (dont 2 300 agents ont suivi un stage à l'Institut des Finances à Beyrouth, organisme créé en coopération avec le ministère français de l'économie et des finances.)

De nouveaux instruments prennent le relais de ces financements sur protocoles. Désormais, l'inscription du Liban dans la "zone de solidarité prioritaire" et l'intervention croissante de l'Agence Française de Développement constituent les instruments privilégiés de notre action dans ce domaine.

1. L'inscription dans la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP)

Le Liban a été inscrit dans la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP) au début de l'année 1999, ce qui lui permet de recevoir des financements pour la mise en oeuvre de projets (au titre du Fonds de Solidarité Prioritaire -FSP).

Ce fonds, le FSP, est chargé de contribuer au développement des pays figurant dans la ZSP par le financement, sous la forme de dons, projets et programmes d'investissements matériels et immatériels, dans les domaines institutionnel, social, culturel et de recherche. Les interventions du FSP consistent principalement en des dépenses d'expertise, conseil, formation, appui à la recherche, à l'innovation, à la création, sans exclure un volet matériel d'accompagnement.

Outre les projets qui peuvent intéresser plusieurs pays, voire l'ensemble des pays, le FSP peut permettre le financement de projets dans un seul pays, qui sont exécutés dans un cadre bilatéral et donnent lieu à la signature d'une convention de financement entre l'ambassade et l'État bénéficiaire.

Il existe également des « Crédits déconcentrés/ Fonds Social de Développement ». Il s'agit d'une dotation globale, accordée à l'ambassade pour réaliser plusieurs actions avec, soit l'État, soit la société civile.

La coopération de proximité avec la société civile figure, au même titre que l'appui au secteur éducatif et universitaire, au secteur de l'audiovisuel public (radio) ou encore au secteur agricole, parmi les priorités de l'aide bilatérale de la France au Liban. Le Fonds Social de Développement sert ainsi d'instrument privilégié de la coopération française pour appuyer des projets élaborés par les acteurs de la société civile. Il a pour ambition de cofinancer des projets de petite taille au bénéfice immédiat de la population et avec sa participation. Ses domaines d'intervention concernent aussi bien l'éducation, la santé, la promotion des droits de l'homme et de la démocratie. Le FSD ne finance les projets qu'à hauteur de 70% de leur montant total, pour une contribution comprise entre environ 7 620 € et 304.900 €, les bénéficiaires devant apporter au minimum 30% du montant. Les projets faisant l'objet d'un appui de l'ambassade de France sont choisis sur avis d'un comité mixte de sélection franco-libanais.

Deux nouveaux projets sont actuellement en cours d'instruction. L'un, intitulé « Héritage culturel et développement urbain » en cofinancement avec la Banque mondiale, concerne les principales villes anciennes du Liban et porte sur des financements d'infrastructures en matière d'assainissement et d'aménagement de quartiers. L'autre consiste en un financement complémentaire à celui accordé par protocole pour la réalisation de cinq stations de traitement des eaux usées.

PROPARCO
- société de promotion et de participation pour la coopération économique, filiale de l'AFD consacrée au financement des entreprises privées) - contribue à la promotion et au financement du secteur privé directement (prêts, prises de participation) ou indirectement (par le biais du refinancement des banques). Elle a ainsi accordé une ligne de crédits de 10 millions d'euros à la Banque Byblos, pour le refinancement de ses crédits aux PME-PMI, en 1999. Elle a cependant dû arrêter toute activité au Liban tant que le Liban a été inscrit sur la liste noire du GAFI.

Le Fonds français de l'Environnement mondial (FFEM) participe, quant à lui, sous forme de subventions, au financement de projets de développement ayant un impact durable sur l'environnement mondial. Il n'intervient qu'en appui à des projets ayant pour finalité le développement économique et social. Au Liban, le FFEM finance des projets dans les domaines de la protection de la couche d'ozone (9 projets), de la biodiversité et de l'effet de serre.

2. Les interventions de l'Agence Française de Développement (AFD)

Les financements accordés par le Groupe de l'AFD au Liban depuis mi-1999 s'élèvent à 46,5 millions d'euros (dont 10 millions pour la PROPARCO). L'AFD administre également les financements accordés par le Fonds français de l'Environnement mondial (2,4 millions d'euros depuis 1997).

A la suite de l'inscription du Liban dans la Zone de Solidarité Prioritaire, le gouvernement français a demandé à l'AFD d'intervenir pour prendre le relais des financements sur protocoles.

Le domaine de l'eau a immédiatement constitué une priorité en raison des importants besoins en matière d'investissements, mais aussi de la compétitivité de l'offre française dans ce domaine.

L'AFD a accordé quatre prêts au Conseil de Développement et de Reconstruction (CDR), organisme emprunteur auprès des bailleurs de fonds agissant sur autorisation du Conseil des ministres libanais. Les financements accordés ont porté sur la mise en place d'un Fonds d'études et de préparation du projet , visant à faciliter l'étude technique des projets proposés au financement de l'AFD : la remise en état de l'alimentation en eau potable de la région de Jezzine ; l'alimentation en eau potable de l'agglomération de Tripoli ; l'adduction d'eau potable pour le Sud-Liban. L'AFD a également accordé un prêt direct à l'Université Saint-Joseph pour le financement partiel du technopôle BERYTECH (1,5 million d'euros).

D - DES RELATIONS ECONOMIQUES ET COMMERCIALES TOUJOURS SOUTENUES

La France est aujourd'hui le premier partenaire économique du Liban : 3 ème fournisseur, 1 er investisseur, 1 er partenaire financier bilatéral.

1. Un triplement des échanges commerciaux en dix ans

Depuis la fin du conflit, le total des échanges franco-libanais a plus que triplé, atteignant 619 millions d'euros pour les exportations françaises vers le Liban et 33 millions d'euros d'importations françaises de produits libanais en 2001, ce qui fait de la France le 3 ème fournisseur et le 6 ème client du Liban. Après une diminution sensible en 1998 et 1999, les échanges commerciaux franco-libanais ont retrouvé de la vigueur et les exportations françaises ont augmenté de 7,8 %, dopées par la baisse des droits de douane et l'effet d'anticipation sur l'introduction de la TVA.

Le Liban représentait en 2001 notre 14 ème excédent commercial et notre 3 ème excédent au proche et au Moyen-Orient, après les Émirats Arabes Unis et l'Égypte. La France détient au Liban la troisième part de marché (8,4 % du PIB) derrière l'Italie - premier partenaire commercial traditionnel du Liban - et l'Allemagne, qui est passée devant la France grâce à une politique commerciale assez agressive menée depuis 1998.

Représentant 42 % des importations et 20 % des exportations libanaises, l'Union européenne est le premier ensemble partenaire commercial du Liban.

2. La France, premier investisseur étranger au Liban

Avec près d'une centaine d'implantations, principalement concentrées dans le domaine des services , la France est aujourd'hui le premier investisseur étranger au Liban (200 millions d'euros entre 1990 et 1998). Les établissements bancaires, financiers et d'assurance constituent le noyau dur de notre présence. France Télécom, à travers son réseau de téléphonie mobile (250 000 abonnés), est le principal investisseur français (270 millions d'euros), même si ses positions sont actuellement menacées dans le cadre du programme de privatisation de la téléphonie mobile (une procédure d'arbitrage international a été lancée). Il est suivi par TotalFinaElf (15,24 millions d'euros), premier distributeur de carburant dans le pays. D'autres grands groupes sont bien implantés, soit industriellement (Air Liquide, Alcatel Câbles, Lafarge, Colas), soit commercialement (L'Oréal, AXA, AGF).

Cette présence est doublée par de nombreuses PMI/PME, actives dans les secteurs en développement. Le nombre de franchisés libanais d'entreprises françaises progresse rapidement dans le domaine des biens et services mais aussi dans la distribution (BHV, Monoprix).

La France est le pays qui a remporté le plus grand nombre de grands contrats liés à la reconstruction (1,07 milliard d'euros depuis 1992) , que ce soit dans le domaine du BTP avec la façade maritime du centre ville de Beyrouth (Bouygues), dans le domaine de la remise en état du système électrique (EDF), dans celui des télécommunications ou de l'eau (Vivendi, Suez-Lyonnaise des eaux, Bouygues). Les entreprises françaises s'intéressent à des projets à caractère privé concernant de grandes infrastructures, mais aussi au programme de privatisation.

Les difficultés budgétaires du gouvernement et la crise économique et financière, évoquées précédemment, ont cependant induit un ralentissement des projets de reconstruction et donc une raréfaction des grands contrats qui lui sont liés. Globalement, les investissements internationaux au Liban tendent à régresser.

Gageons que le récent regain de confiance en faveur de l'économie libanaise stimulera à nouveau les échanges et les investissements internationaux.

ANNEXE I :

Le Liban en quelques chiffres et repères


INTITULÉ OFFICIEL:

République libanaise . Indépendance en 1944. Constitution du 23 mai 1926 et révision en 1990 (accords de Taëf).

Nature du régime : République parlementaire

PRÉSIDENCE:

Toujours confiée à un Maronite. Election par le Parlement. Président actuel : M. Emile LAHOUD, élu en novembre 1998 pour 6 ans.

EXÉCUTIF:

Pouvoir exécutif détenu collégialement par le Conseil des Ministres (16 ministres).

Le Président du Conseil, toujours musulman sunnite, est choisi par le Président de la République après consultation de l'Assemblée nationale. Le 26 octobre 2000, M. Rafic HARIRI a été désigné à ce poste, à la suite de sa victoire aux élections législatives du 27 août et 3 septembre. Il avait déjà occupé ces fonctions entre 1992 et 1998.

Le gouvernement est formé par le Président du Conseil et le Président de la République

Vice-Premier ministre : M. Issam FARES, Grec-Orthodoxe

Ministre des Affaires étrangères : M. Mahmoud HAMMOUD, Chiite

Ministre de la Défense : M. Khalil HRAOUI, Maronite

LÉGISLATIF:

Pouvoir législatif monocaméral. Loi électorale du 13 août 1996. Conformément à la constitution, le Président est toujours chiite.

Assemblée nationale : 128 députés élus pour 4 ans (64 chrétiens, 64 musulmans). Dernières élections législatives : été 2000. M. Nabih BERRY, Président depuis 1992, a été réélu à la tête de l'Assemblée pour 4 ans en octobre 2000.

PRINCIPALES FORCES

POLITIQUES:

Le système politique repose plus sur un système néo-patrimonial et clientéliste que sur les partis politiques: Parti Kataëb (principal parti maronite), Bloc national (Chrétiens), Parti National Libéral (maronite - Dory Chamoun), Parti socialiste progressiste (druze, M. Walid Joumblatt), Amal et Hezbollah (partis chiites).

SUPERFICIE:

- 10 452 Km2

POPULATION:

- 4,5 M d'hab. dont 3,7 M de Libanais, 250.000 Palestiniens et 450.000 travailleurs syriens. - Capitale: Beyrouth (1,5 M d'hab) - 382 hab. au km2 - Croissance : 1,8%

- Forte émigration (3 M de Libanais vivent à l'étranger)

- Communautés religieuses (estimations):

Chrétiens : 42% (dont Maronites 23 % ; Grecs orthodoxes 7 % ; Grecs catholiques 6 % ; Arméniens 4 %)

Musulmans : 58 % (dont Chiites 31 % ; Sunnites 22 % ; Druzes 5,5%)

- Taux d'urbanisation : 60 % - Taux d'alphabétisation : 80% - - Espérance de vie : 67 ans

ARMÉE:

11 brigades opérationnelles (60 000 hommes)

Présence étrangère : armée syrienne, surtout dans la Beqaa (20 000 hommes).

ECONOMIE:

Monnaie : 1 Euro=1508 Livres Libanaises (3 en 1980, 2.700 en 1992)

PIB : 16,7 Mds USD (2001).

PIB par habitant : 4000 USD (2001) multiplié par 5 depuis 1990

Taux de croissance du PIB: 1% en 2001 (2% en 1998 et en 1997, 6,5% en 1995).

Taux de chômage : 25% (estimation).

Inflation: 0,6% en 2000, 3 % en 1998 (100% en 1992).

Déficit budgétaire : 25,6 % du PIB en 2001

Service de la dette: 90% des recettes budgétaires en 2001.

Dette publique : 180% PIB en 2001.

Dette extérieure publique: 5,5 Mds USD, multipliée par 15 depuis 1992

Industrie : 14 % du PIB, agriculture : 17 %, tertiaire : 69 %

RELATIONS BILATERALES

Relations historiques privilégiées ( proclamation de l'Etat du Grand Liban le 1er sept 1920

par le Général Gouraud).

Echanges commerciaux :

exportations françaises : 619 Meuros en 2001, 3,7 MdsF en 2000 et 1999.

importations françaises : 33 Meuros en 2001, 278 MF en 2000

Soit notre 14ème solde excédentaire en 2000.

En 2000, la France était le troisème partenaire du Liban (8,4%) après l'Italie (9,4%) et l'Allemagne (8,5% du PIB).

Dons (FASEP) : trois projets depuis 1997 pour 0,82 millions d'Euros. Protocoles financiers de 1995, 1996 et 1997 prorogés

Coface : 650 MF de crédits garantis en 1996, 750 MF en 1997 (encours total de 2,7 MdF devant l'Italie à 2 Mds).

Nous sommes le deuxième bailleur de fonds occidental, après l'Italie, et le premier investisseur étranger, hors immobilier (une centaine d'entreprises implantées).

Enveloppe de coopération : 5,98 Meuros en 2002 + 5 Meuros AEFE. Accord de coopération culturelle et technique (14/10/93) / Le Liban est inclus dans la zone de solidarité prioritaire depuis 1999 (1,52 Meuros en 2001).

Communauté française : 14 500 immatriculés dont 90% de binationaux



(1) Réunion de 23 États et institutions internationales, dans le cadre du soutien au programme de réformes économiques engagé par le gouvernement libanais.



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